07 février 2012

Il y a une autre vie

Du ponte Cavallo, un regard à la façade de Zanipolo et à celle de la Scuola San Marco... Comme si je les voyais pour la première fois... Le lion altier qui semble surgir de la paroi et avance vers les passants... Faire une courte pause, pleine de senteurs, de couleurs et d'émotions, comme au retour d'un long voyage... Fermer les yeux un court instant... Entre l'écho du passé dont je retrouve ici les traces, le bruit des pas sur les dalles gelées et le rire d'un petit groupe d'enfants qui se rendent à l'école, je crois presque entendre le ronronnement de Rosa, ma petite chatte grise qui vivait avec moi alors et tout le bruissement de ma vie d'autrefois...
 
Franchir le porche de la basilique et voir surgir comme une barrière les images d'autrefois. Des milliers de souvenirs surgissent et font barrage comme le stand de livres et de cartes fait barrage au pèlerin, marquant physiquement autant que mentalement la différence, comme un filtre, entre l'intérieur et à l'extérieur, entre le spirituel et le terrestre. Installé dans une horrible guérite de métal, un homme sans âge contrôle l'accès des visiteurs et des touristes. C'est qu'à Venise on ne peut plus aller et venir tranquillement dans les églises. Trop de visiteurs désormais, plus assez de fidèles. Il faut montrer patte blanche. Je ne peux pas m'empêcher de penser à l'épisode de la colère de Jésus contre les marchands du Temple... Autrefois, un vieux moine dominicain tenait le stand de souvenirs, situé alors dans la première salle de la sacristie. Il posait des questions aux visiteurs, leur faisait l'article comme n'importe quel camelot, mais il les encourageait à prier un instant et les bénissait quand ils sortaient. Certains jours, on pouvait passer deux heures dans l'église sans croiser un seul visiteur... L'incohérence des hommes ne nous permet pas pour autant de juger l’Église et ses choix. Respecter le mystère... Mais très vite quelque chose de plus fort que tout cela prend et emporte le visiteur. Déjà, devant le premier autel sur la gauche, dans une pénombre parfumée - l'odeur d'encens y est intense et fervente - le sentiment d'être déjà dans l'autre vie est palpable... De la petite chapelle sombre où repose Beato Giacomo Salomoni émanent comme des ondes de foi. Deux ou trois vieilles femmes sont agenouillées devant l'autel. Quand on sait que le saint est évoqué contre le cancer, on ne peut qu'espérer que l'intercession du religieux vénitien soit entendue du Seigneur.  
 
Belle histoire que celle de Fra Giacomo. Le jeune homme né en 1231, entra à 17 ans au monastère de San Giovanni e Paolo. Venant d'une riche famille de convertis devenus patriciens, il donna toute sa fortune aux pauvres. A l'imitation de Saint Dominique, il voua sa vie aux plus misérables, aux malades et aux déshérités. Ses reliques ont toujours été adorées par les vénitiens. Le couvent possède un portrait de lui lorsqu'il devint prieur du couvent de Forli. C'est là qu'il mourut.

La foi jaillit de partout dans la basilique. Quand on lève les yeux vers les imposantes voûtes, quand on marche sur les pierres tombales des doges, quand on s'avance entre les gigantesques colonnes de la nef et sous l'imposante ogive qui sépare du maître autel, partout le frisson d'être immergé dans une architecture unique chargée d'histoire et d'amour. Toutes ces fresques et ces ornements, ces peintures et ces sculptures, tout enivre l'âme. Et puis ce silence... Contrairement à San Marco, et en dépit des visiteurs, il règne toujours un grand silence. Ici les touristes les plus braillards se taisent, écrasés par la grandeur des lieux et par mille ans de prières et de rites.

Au pied du Colleone, assis près de la vitrine de Rosa Salva, avec l'odeur des tartelettes aux amandes et des croissants fourrés, je regarde au dehors, captivé par le spectacle du campo. Doucement, avec bonheur, je sirote mon café macchiato observant deux jeunes femmes, des vénitiennes, qui passent en bavardant. Belles, élégantes, elles représentent à mes yeux la vie qui continue, se perpétue et se renouvelle au milieu des souffrances et de la mort qui règnent de l'autre côté de la place : à l'hôpital et dans la basilique... Douceur du café parfumé parfaitement dosé comme toujours ici et mélancolie devant le temps qui passe et les souvenirs de ma vie d'alors, quand j'étais encore étudiant, jeune et disponible à tous les destins... Le joli sourire des deux jeunes femmes qui répondent à mon salut remplit mon cœur d'une douce paix. Jolie conclusion de ma visite matutinale aux saints et aux doges du sanctuaire. La radio diffuse une chanson de Pino Daniele bien assortie aux boiseries du bar, à la lumière un peu crue, au temps qu'il fait au dehors... Retour à la réalité. Payer et sortir. J'aperçois mon visage dans le miroir au-dessus du bar. Un sourire un peu niais barre mon visage. L'impression de voir se superposer à l'image de l'homme fait le visage juvénile de celui que j'étais, ici, trente ans plus tôt...Onze heures sonnent au campanile. Déjà la moitié du jour...

La poésie de la chanson italienne



Une très belle chanson avec de très belles paroles et une orchestration qui ajoute à la poésie du texte. Je ne sais pas vous,mais nulle part ailleurs on sait emballer nos oreilles comme la chanson traditionnelle italienne. Avant que de chanter du bel canto napolitain, c'est ce genre de romances que les gondoliers sussuraient sur leur embarcation aux belles dames et à leurs amoureux. Quelques disques des mélodies traditionnelles vénitiennes ont paru ces dernières années et les arias composés par Reynaldo Hahn, pour ne citer que lui, directement inspirés de vieilles chansons entendues dans les bacari de Venise du début du XXe siècle, nous donnent une idée de ce que fut Il Canto Venezian...

Il neige à Venise aussi !


Timides, les premiers flocons sont tombés sur la lagune et toute la Vénétie. Pas assez froid hélas. Rien n'a tenu, sauf à l'intérieur des terres où la neige a laissé la place au verglas. La température (encore assez douce malgré tout) ne semble pas devoir permettre à la neige de s'installer mais chi lo sà... Comme le disait ce matin - la sotte ! - l'animatrice de Radio Venezia, "la neige c'est bien beau quand ça tombe, c'est magique mais ça complique tellement la vie qu'il vaut mieux que ça fonde vite"... On va encore me traiter de Peter Pan (j'assume et revendique, vous le savez !) mais, hormis les aléas du froid pour les Sans-logis qui sont encore trop nombreux à errer dans les rues partout dans notre Occident riche et égoïste, on s'en fiche des aléas, des complications, des retards ! J'ai aimé ce panneau vu un jour, accroché à la porte d'une boutique "Fermé exceptionnellement pour cause de bonhomme de neige avec les enfants" J'aurai aimé immortaliser la choses mais je n'avais pas d'appareil photo sous la main... Le monde des affaires et des obligations peut attendre, la vie passe vite et les moments de petits bonheurs comme ceux que nous avons la possibilité de vivre en ce moment, sont trop importants pour y renoncer. Ne travaille-t-on pas mieux après avoir fait provision de petits riens qui réconfortent. Ces instants revigorants n'ont pas de prix. Aucun trader ne peut en faire l'objet de spéculations et pas un politique ne peut empêcher les enfants - les vrais et ceux qui ont su le rester - de préférer la neige qui embellit tout aux fractions et aux déclinaisons latines !

Venise sous la neige réunit tous les bonheurs vécus partout ailleurs : tout devient beau, le silence se fait plus ample, les parfums de l'hiver nourrissent notre âme et soignent tous types de chagrins, de craintes et de fureurs. Remède sans aucune contre-indication. Une image de paradis qui apaise et rédime, sauf à fermer sciemment son cœur. C'est certainement pour cela que le billet publié en janvier 2009 sur Tramezzinimag, intitulé Venise sous la neige (cliquer sur le titre pour lire le billet) est l'article le plus lu du blog avec plus de 35.000 visites depuis sa parution. Venise fait rêver, mais Venise sous la neige encore davantage. La neige, la vraie, est attendue selon la météo, pour la fin de cette semaine. Si la journaliste de Radio Venezia espère que la météo se trompe, gageons que nous sommes des milliers à espérer que ce soit vrai !


2 commentaires:

Tietie007 a dit…
Nous avions vu Venise sous la neige, en février 2004.
VenetiaMicio a dit…
Personnellement je n'ai jamais vu Venise sous la neige, sauf à travers des photos ou vidéos. Si j'ai rêve aujourd'hui c'est bien celui-là ! Modeste et sans doute réalisable, ne croyez-vous pas ? Danielle

05 février 2012

La neige est là !


"Le froid s'abat sur l'Europe" clament les médias. Quelques degrés en dessous de zéro et on serait paniqué ? Quelle rigolade. Les (merveilleux) cinq centimètres de neige qui recouvraient ce matin Bordeaux ont paralysé toute la ville : plus de tramways, plus d'autobus, des automobiles au pas, d'autres en travers de la route et le vide. La ville semblait abandonnée au petit matin. Puis les gens sont sortis. les enfants surtout et ceux parmi les grandes personnes qui ont su garder leur âme d'enfant. Les meilleurs d'entre nous, les poètes, les artistes, les rêveurs. Partout des groupes élevaient de magnifiques bonshommes de neige, improvisaient des batailles de boules de neige. C'était la fête. Demain, tout aura disparu. La pluie va venir effacer toute cette blancheur immaculée. C'est normal, demain ce sera lundi et la grisaille du recommencement. La routine. L'école pour les petits à la place des jeux dans la neige. Les obligations professionnelles et sociales pour les parents. La parenthèse doit être refermée. A Venise point encore de neige. Quand elle tombe, tout change là-bas aussi. Le silence se fait soudain plus vaste et plus profond. Tout est embelli, magnifié, comme un merveilleux objet qu'un papier de soie enveloppe et protège. En attendant, il fait froid et le soleil qui se montre pourtant bien décidé ne parvient pas à réchauffer l'air. La neige n'est pas loin murmurent les vieux vénitiens qui sentent venir le vrai froid et la neige...



2 commentaires:

Frédéric a dit
Vous avez raison, dans le bordelais nous sommes peu habitués à ces vagues de froid, c'est bien connu. Pourtant nos ancêtres il n'y a pas si longtemps savaient faire avec.
Lorenzo a dit…

Les temps modernes. La perte des valeurs traditionnelles... Est-ce dans la logique des choses où bien sommes-nous en train de devenir vieux et grincheux ?

02 février 2012

Toujours ces petits riens

Écrit en écoutant Frank Sinatra qui chante Prisoner of love. Le ciel est d'un blanc d'acier. Le froid s'est répandu sur toute l'Europe. Un froid sec et revigorant. La lumière est très belle. Métallique. A la campagne, l'air doit être chargé de ces parfums confortables qui consolent les cœurs affligés, mélange d'humus et de bois qui brûle dans l'âtre, odeurs de soupe, de mousses et d'écorces. A Venise dans ces moments-là, on respire les senteurs du large, le parfum des pierres mouillées par l'eau des canaux. Autrefois se mêlait à tout cela l'odeur du charbon qui brûlait dans les chaudières et dans les vieilles cuisinières où chauffait la pastaciutta. Avez-vous remarqué quand il fait froid combien notre odorat est aiguisé ? Ce mélange de muguet et d'iris qui suit la belle jeune femme qu'on a croisé, l'odeur du pain chaud qui s'échappe du fournil sur la fondamenta... Encore et toujours ces petites choses sans grande importance qui rendent la vie délicieuse, bien plus que toutes les possessions et les richesses.
 
Le soleil pointe ses rayons, soudain tout semble chanter. Un air un peu démodé chanté par Billie Holiday me revient à l'oreille. un air que fredonnait ma mère quand j'étais un petit garçon. "I Don’t Stand A Ghost Of A Chance With You" (cliquer sur le titre) de Mel Tormé, surnommé The Velvet Fog. La journée sera belle et douce.

Venise, l'hiver et l'été, de près et de loin..


Mille remerciements à ceux de mes lecteurs qui ont commandé le livre et su patienter aussi longtemps, me soutenant et m'encourageant quand les problèmes s'amoncelaient et finissaient par me décourager. Sauf erreur, tous les ouvrages acquis par souscription sont parvenus à leurs destinataires. Mille remerciements aussi à ceux qui ont aimé le livre et m'ont envoyé leurs commentaires et leurs encouragements. Les heures passées à écrire, relire et corriger sont largement récompensées par tous les mots charmants, les lettres et les courriels que j'ai reçu.

6 commentaires:


J@M a dit…
Y'a erreur....
ladivinecomédie a dit…
Erreur aussi ! Point d'ouvrage arrivé à Verdelais à ce jour.

Lorenzo a dit…
Mais (sauf erreur justement) tous les ouvrages souscrits ont été expédiés. je vérifie. Désolé en tout cas et je croise les doigts pour que vos exemplaires ne se soient pas perdus !
VenetiaMicio a dit…
Lorenzo, colis bien arrivé chez moi ! À bientôt, je commence la lecture ! Bien à vous Danielle
Micha Venaille a dit…
Cher Lorenzo, j'ai toutes sortes de travaux urgents à rendre, donc je n'ai pas encore eu le temps de me plonger complètement dans votre livre, il me tarde vraiment. Surtout que j'ai du mal à joindre mon amie Marie-Christine Deprund, à chaque fois elle est en train de vous lire,et très heureuse de découvrir à son rythme vos pages qu'elle trouve si inspirées et profondes. C'est "amusant" que vous ayez vu C'est à dire en librairie, si vous le lisez vous y trouverez sûrement une Venise qui vous est proche. Amicalement

Anne a dit…
Lorenzo, j'aurais sans doute dû vous dire plus tôt que j'aime beaucoup votre livre : les descriptions de Venise, votre ton très personnel, ces fragments de temps intensément vécu, vos réflexions si profondes qui donnent à méditer. C'est très beau. Merci. Anne

01 février 2012

Le dialecte vénitien. Exemples

Ne devrait-on pas parler plutôt de la langue vénitienne . Après tout le vénitien fut la langue officielle de l'administration de la République. Si le français et l'italien succédèrent au latin comme moyen de communication avec les autres peuples, le vénitien s'imposa comme la langue de la communauté vénitienne, du doge au plus humble apprenti de l'arsenal, tous la parlaient. Ils la parlent encore. Je n'aurai pas la prétention de vouloir l'enseigner aux lecteurs de TraMezZiniMag, cependant en donner quelques notions va dans le sens de notre réflexion amorcée avec vous depuis le billet sur les "néo-vénitiens". Et puis parce que je travaille depuis quelques mois à l'élaboration d'un dictionnaire - un lexique - vénitien-français qui n'existait pas alors que l'équivalent anglais a vu le jour depuis longtemps déjà, autant "prendre la température"...

Le dialecte trouve son origine on ne sait où. Des linguistes émérites ont trouvé des racines communes avec le basque et plus loin avec certaines langues parlées du côté de l'Hindus. Rien de celte contrairement à d'autres langues régionales d'Italie. Mais n'étant pas linguiste ni philologue, je ne saurai m'aventurer dans un domaine hautement technique qui ennuierait mes lecteurs. Ceux qui sont souvent à Venise ne peuvent que s'être rendus compte de la différence d'accent entre le parler vénitien et l'italien "normal". C'est un accent que l'on attrape vite et qui fait qu'on repère partout l'origine vénitienne de celui qui parle avec. On peut le trouver grossier, voire vulgaire. Il m'est arrivé d'entendre des parisiens dire la même chose du basque ou de l'occitan. Mais laissons aussi ces considérations de peu d'intérêt. Abordons quelques bribes de vocabulaire. ce qu'on apprend souvent en premier quand on commence l'apprentissage d'une langue au milieu de ceux qui la parlent, ce sont les expressions populaires, triviales. Les "gros mots" comme disaient nos grands-mères. En voilà quelques uns avec, dans la mesure du possible leur phonétique. J'ai en projet cette année d'enregistrer des vénitiens à qui je demanderai de prononcer les mots usuels du dialecte et quelques expressions courantes. De quoi s'exprimer face aux autochtones et de leur montrer l'intérêt que l'on prend à leur culture et le respect qui nous fait souvent défaut quand on se contente de s'exprimer en français ou en anglais, avec force gestes pour tenter de se faire comprendre de l'habitant. Vieux réflexes de colons impérialistes ?

Le premier mot, nerf de toutes les guerres et liant de bon nombre de relations entre les personnes, est le mot "argent". En vénitien, il se dit "Schei" ( prononcer skeye). On devine une parenté avec le mot écu. Le terme a survécu jusqu'à nos jours, en dépit du passage à la Lire puis à l'Euro. 

Ti ga schei ?
: tu as des sous. Expression souvent employée pour exprimer la surprise. par exemple quand on est avec quelqu'un qui n'a pas l'habitude de sortir son portefeuille le premier et résiste à la tentation d'inviter ses commensaux. Par extension, le mot employé au singulier (il devient alors "scheo") sert à indiquer quelque chose de petite dimension ou une faible longueur. (Un sou, c'est petit dans tous les sens du terme !)

"Spòsteło de vinti sche"i " : déplace-le de vingt centimètres.

Le terme est d'usage courant avec une connotation triviale, presque vulgaire. La vieille comtesse du palazzo voisin ne l'emploiera pas quand elle fait ses courses. tout au plus le mot lui échappera quand elle recevra sa facture d'électricité ou devra payer les gages de sa vieille servante. Il est souvent sur les lèvres des gondoliers et des boutiquiers. Il serait utile d'apprendre son équivalent en chinois d'ailleurs. Mais on va encore m'accuser de mauvais esprit !

En revanche, l'arrivée de la monnaie unique a pratiquement fait disparaître le vocable "franco" qu'on utilisait pour la lire et par extension pour désigner une certaine quantité d'argent. 

"Trenta franchi"
correspondaient à trente lires, "na carta da mìłe franchi" désignait un billet de mille lires. Le terme n'avait pas de rapport avec le Franc français mais avec la monnaie autrichienne en vigueur pendant l'occupation et qui portait gravée l'inscription "FRANC." abréviation du nom de l'empereur François-Joseph. Les vieux vénitiens continuent de l'employer mais on l'entend bien moins qu'avant.

6 commentaires:

Anonyme a dit…
Dans ma région (Vicenza, Val d'Astico) on dirait : "gheto schei?)
D'après le dictionnaire lo Zingarelli,les dialectes italiens- ou langues si elles sont écrites comme le vénitien - sont des langues "romanze" issues du latin vulgaire ( le latin étant lui-même une langue indo-européenne).La présence de "g" comme dans "el gaveva..." correspondrait au dialecte régional avec des éléments de "bellunese cittadino"?
Il existe un dictionnaire vénitien/italien fait par Giuseppe Boerio.
Graziella
Lorenzo a dit…
Absolument. Merci de ces précisions. Il existe même un lexique vénitien-anglais mais rien à ce jour en français. Nous y travaillons.

Anne a dit…
http://www.blogger.com/profile/03524487160360572243J'espère que, dans votre ouvrage, on lira aussi des mots d'amour vénitiens...
Anne
Virginie Lou-Nony a dit…
Moi je suis pour une leçon de vénitien par semaine, mots d'amour et gros mots, locutions, proverbes, je prends tout avec bonheur
Aldo a dit…
Pour le plaisir, voici une petite "poésie" que ma grand mère me récitait de temps en temps:

Veneziani gran signori,
Padovani gran dotori,
Visentini magna gati,
Veronesi tuti mati,
Udinesi castelani col cognome de Furlani,
Trevisani pan e tripe,
Rovigoti baco e pipe,
i Cremaschi fa cojoni,
i Bressan tajacantoni,
ghe n'è anca de pì tristi: Bergamaschi brusa cristi.
LaveneXiana a dit…
Le Boerio, acheté par une douce nuit à la Libreria San Geremia du temps où elle existait toujours ( j'adorais cette librairie ouverte jusqu'à minuit.... mais quel dommage qu'elle ait été remplacée par un negozio de plus...fut-il affriolant...) est un petit bonheur avec ce langage si chantant, si particulier, si imagé.Les expressions idiomatiques sont délicieuses.Quant à ce petit poème, je l'ai moi-même découvert dans un ouvrage dédié au venessian...mais à travers sa cuisine."Savoureux également....
La cucina veneta( déniché chez notre bon Luigi Frizzo, amoureux des livres et des chats) dont l'auteur m'échappe....Lorenzo, peut-être pourrez aider ma pauvre mémoire défaillante... mes livres étant amoureusement emballés en vue de leur prochain déménagement à Paris.
Merci de votre aide, cher Lorenzo et bien amicalement,
Agnès

27 janvier 2012

On vit encore à Venise

Il y a avait à Venise dès années 50 aux premières années 80 une foule de jeunes à Venise. Le baby boom de l'après-guerre. Puis le nombre a diminué, les gens ont vieilli et les jeunes qui sont restés ont fait peu d'enfants. Mais il y a des jeunes à Venise et pas que des visiteurs !
Il suffit de passer près d'un collège ou à proximité d'une école quand sonne l'heure de la sortie pour s'en rendre compte. L'université ne désemplit pas. Et quand on les interroge ces jeunes vénitiens on sent bien qu'ils sont conscients du caractère unique et magique de leur ville. Tous parlent le vénitien et tous ont le sourire aux lèvres quand on leur demande s'ils sont heureux d'y vivre. Alors, gageons que tout n'est pas perdu !
Dans les années 50, ci-dessus, comme aujourd'hui :

 
Venise a une vie en dehors du tourisme. Toutes les personnes un peu curieuses de la Sérénissime et qui s'éloignent des grands parcours le savent bien. Au passage, petit quizz : où ont été prises ces deux photos ?

8 commentaires:

Anonyme a dit…
Je viens de découvrir le livre dans ma boite aux lettres. La perspective d'un week-end enchanteur. Merci.
Paul
Robert M a dit…
Je ne sais où sont prises les photos mais celle en noir et blanc évoque bien une Venise qui n'existe plus.
J@M a dit…
La deuxième m'évoque un panneau de danger dans une mine de charbon en Silésie...

Lorenzo a dit…
J@M, j'aime ton humour ! Apparemment un bug. Je revois ma copie.

la girafe a les yeux noirs a dit…
je tente deux réponses: la 1ère me fait penser aux "quais" du Mercato - il campo della pescheria nel fondo- et la 2ème me rappelle un café au bord du canal face à l'église aux frari - il caffè dei frari- au plaisir de votre blog

Lorenzo a dit…
Effectivement la photo en noir et blanc a été prise devant les Fabbriche Nuove, juste avant l'Erberia, avec en face la Ca'Mangili-Valmarana où habitait l'ambassadeur Joseph Smith grâce à qui la famille royale d'Angleterre possède la plus belle collection privée de Canaletto.
Quant aux jeunes sybarites, ils sont accoudés au comptoir du Senso Unico, un pub installé à l'angle du ponte del Formager e de la calle della chiesa, à San Vio, tout près de la Guggenheim. Un endroit que j'aime beaucoup.
Micha Venaille a dit…
Je vous écris rapidement pour vous dire que j'ai reçu votre livre... à mon retour de Venise, quelle merveille en janvier, trois semaines de brume et de silence.Je n'ai eu que quelques moments pour le parcourir (le mot ne va pas avec le charme du livre) et je sais déjà qu'il me tarde de le lire en entier.

Lorenzo a dit…
Pour ma part, je viens de découvrir "C'est à dire" chez mon libraire. Je n'avais lu que "Le sultan d’Istanbul".

26 janvier 2012

Ma Venise au quotidien. Et en plus, il fait beau


Quand reviendra le printemps et que la brise se fera douce et parfumée sur la lagune, quand des eaux monteront ces parfums uniques qui nous portent à la joie, nous irons vers les îles tranquilles que gardent les oiseaux. Après le pique-nique, l'un de nous avec sa flûte ou sa guitare entonnera un chant paisible qui résonnera parmi les ajoncs et se répandra sur les eaux calmes. Une sieste peut-être puis le dédale des chenaux parmi les herbes hautes. le silence de nouveau et cette lumière, cette lumière unique. Quand reviendra le printemps.

24 janvier 2012

Venise ne veut plus des navires géants


Le récent naufrage du Costa Concordia à deux cent mètres des côtes italiennes donne un éclairage nouveau à la polémique concernant l'invasion des maxinavi comme disent les vénitiens qui débarquent chaque jour des milliers de touristes et représentent un danger certain pour les eaux lagunaires déjà bien malades, mais aussi pour l'air qu'on y respire et pour la tranquillité de ses habitants.
Savez-vous qu'un seul de ces bateaux (mais qu'ont-ils donc d'un bateau ces mastodontes ?) rejette avec ses fumées noires et nauséabondes, autant de CO² que 12.000 moteurs de voiture ? Savez-vous qu'un jour d'été 2011, ces navires ont déversé 35.000 personnes en une journée sur la ville, soit l'équivalent de la moitié de la population résidente. Si on ajoute à cette masse, les touristes pendulaires, qui arrivent par train ou par bus des environs et ne restent que la journée, les touristes logés dans les hôtels et pensions du centre historique, on atteint le chiffre de 100.000 personnes, voire plus certains jours... Davantage que l'ensemble des vénitiens résidents !

Et lorsque, par un hasard malheureux, le personnel de l'ACTV décide de faire grève, cela donne une foule agglutinée dans les rues qui ne peut ni avancer ni reculer. C'est ainsi qu'aux heures de pointe, l'affluence est telle que des rues sont bouchées de la même manière que les rocades aux abords des villes à certaines heures... Même sans grève des transports, 90.000 personnes passent en moyenne chaque jour entre San Marco et San Zaccaria, 15.000 entre la Strada Nova et le Rialto, autant entre San polo et le Rialto... Pendant ce temps, les vénitiens ont du mal à se rendre à leur travail, les enfants à l'école, les ménagères au marché...

Dans les quartiers ultra fréquentés par cette masse de touristes, il est devenu impossible de se loger, on ne trouve plus un seul commerce de proximité et les rares résidents qui ont pu rester ont l'impression d'être devenus comme des indiens dans une réserve.
Beaucoup d'entre nous, tout à leur amour pour la Sérénissime, son charme, ses trésors, son atmosphère, refusent de voir ce cancer qui se propage et détruit inexorablement toute vie véritable, mais pourtant le mal est là, omniprésent et s'accroit.

Pour ce qui est des grands navires, le naufrage du Concordia a été utile. Le maire dénonce depuis longtemps les dangers des grands navires pour Venise, de nombreuses associations ont vu le jour et sont très actives. jusqu'à un ministre qui vient de déclarer la guerre aux navires géants et veut les interdire dans les endroits fragiles. Venise et sa lagune sont un endroit fragile.

En parallèle à ce phénomène absurde, d'autres problèmes pointent à l'horizon. Le nouveau plan d'occupation des sols qui permettrait la création d'une ville nouvelle sur la terre ferme avec des buildings à l'américaine, une ligne de train à grande vitesse dont le tracé devrait exproprier bon nombre de paysans, et la scandaleuse Sublagunare, métro souterrain qui relierait Venise et Murano à la Terre ferme. Sont à l'étude aussi de nouveaux aménagements qui permettraient de délester les sites les plus visités qui arrivent maintenant à saturation. Ce qui voudrait dire autant de monde sur ces sites et de plus en plus dans des endroits encore aujourd'hui protégés parce que peu connus des touristes et donc protégés...



Bref, cancer, gangrène... Les temps modernes, le consumérisme et l'appât du gain, sont en train de tuer Venise et personne à ce jour ne possède de solution sure et efficace. Un ticket d'entrée ? C'est assurer la transformation de la ville en Veniceland, parc d'attraction pour gogos du monde entier. Quotas ? C'est assez injuste et comment les mettre en place ? Par pays d'origine ? Par âge, niveau social, montant des revenus, niveau d'étude ?

Personnellement, je pencherai pour la création à quelques kilomètres d'une copie de la cité des doges, avec des restaurants, des cafés, des gondoles et des musées où les gens pourraient se divertir, découvrir les monuments et l'histoire de la Sérénissime, tout en mangeant des glaces, en se dorant au soleil, voire en se baignant. Les vénitiens reprendraient leur ville et les palais, les églises, les musées seraient ouverts aux touristes dans des limites précises par jour et par lieux. Ce n'est pas la panacée, mais cela permettrait de sauver ce qui peut l'être. Venise, patrimoine universel, pourrait déployer ce qu'elle est déjà, un laboratoire de recherches et d'innovations. Des chercheurs du monde entier pourraient venir y travailler. on y installerait des centres de formation aux métiers d'art, à la restauration, à la communication, la gestion urbaine. elle deviendrait un centre culturel de haut niveau où culture classique, histoire et technologies de demain se côtoieraient pour mieux faire avancer l'humanité. Il n'est pas interdit de rêver. Sans être pessimiste, on ne prend hélas pas ce chemin...






9 commentaires:


Evelyne a dit…
Merci beaucoup mon livre est bien arrivé.
Anonyme a dit…
En somme construire une Venise-Grotte de Lascaux, je dois dire que l'idée est originale :-))) Oui Lorenzo vous cauchemardez, il faut vous réveiller, Venise est loin d'espérer un avenir radieux... Je comprends votre souffrance et je la partage, mais sans être pessimiste, Venise est à vendre... Cordialement.

Lorenzo a dit…
Mais qui parle de souffrance ? Je ne fais que constater. Quant à une Venise artificielle reproduisant les principaux lieux visités, il y a longtemps que l'on y a pensé. Cela parait absurde mais à Lascaux, cela a permis de sauver l'original... Pas plus que pour le reste de notre monde - et de notre civilisation - on ne peut s'attendre à un avenir radieux du moins si on ne fait rien et si on arrête de secouer les consciences. "Venise, autrefois peuple de marchands, aujourd'hui peuple de boutiquiers" ce n'est pas de moi, mais de Barrès... Bien sur que Venise est à vendre. Comme tout d'ailleurs. Mais que faut-il faire ? Se taire et regarder notre univers sombrer ? Je préfère donner à voir la réalité, expliquer ce qui se passe, donner mon avis aussi parfois. Sinon à quoi servirait ce blog ? Une dernière chose : soyez gentil, même en gardant votre incognito, choisissez un pseudonyme ou un prénom lambda, mais ne restez pas "anonyme", c'est agaçant (attention, je ne veux pas dire que vous êtes agaçant(e)!)de ne pas savoir à qui s'adresser ! Je ne vais tout de même pas vous appeler du nom de votre adresse IP ! De plus plusieurs personnes laissent des commentaires avec la même signature... Je sais que les "Anonymous" sont à la mode, mais c'est dans un autre registre ce me semble... Il n'y a qu'une toute petite manipulation à faire pour s'inscrire. Merci d'avance

Lorenzo a dit…
Merci Evelyne pour avoir pris la peine de cette confirmation. Logiquement tous les souscripteurs doivent l'avoir reçu à ce jour. Un record dans les délais, digne des postes italiennes des années 80 (1680 he veux dire bien entendu !)

FRANCOIS a dit…
L'UNESCO veut que le gouvernement italien interdise la circulation de ces mastotondes à Venise et dans ses abords !!! Espérons que l'UNESCO soit persuassif !!! et que l'interdiction soit très rapide!!!

Lorenzo a dit…
Le maire a pris position contre aussi. Il ne s'agit pas d'interdire à ces bateaux d'inscrire Venise dans leurs escales mais de ne plus passer par le bassin de San Marco et le canal de la Giudecca. Une escale plus éloignée limiterait forcément le nombre de passagers débarqués chaque jour, ce qui serait une bonne chose.

Anonyme a dit…
Oui, mais si ceux qui viennent visiter Venise (98 % ?) prennent les vaporetti, est-ce que ce sera vraiment un progrès ? Soazig
Anonyme a dit…
il faudrait penser à fermer l'aéroport Marco Polo, et aussi dynamiter le pont de la liberté comme ceci plus ou très peu de touristes et donc adieu tout le monde, à tous les commerçants de Venise et autres car tout le monde à Venise ( quasi 100% ) vivent du tourisme.Plus de travail donc ce n'est plus 59000 résidents mais une poignée peut-être.... Les gains, l'argent, les taxes, les impôts obtenus font vivre et entretiennent Venise Le pire est d'entendre les gens qui vivent du tourisme se plaindre de ces derniers, pitoyable...
Cannaregio24 a dit…
Une pétition est en ligne pour la sauvegarde de Venise, des Vénitiens et de sa lagune. Elle a pour but de restreindre la circulation des bâteaux de croisière de fort tonnage dans la lagune; ce qui nuit à ce fragile équilibre, et de protéger ses habitants de la pollution : Pétition Populaire - Hors de la lagune les navires incompatibles - Petizioni Online - Raccolta Firme Afin de protéger la Sérénissime, n'hésitez pas à la signer. N'oublions pas que Venise est appartient au patrimoine mondial de l'UNESCO. Nous avons tous notre mot à dire...!  
08 mai, 2012