04 décembre 2010

Publicité décalée, "ti ga asciuga el canal !" (1997)

 

Je ne suis pas (plus) fou de publicité, trop souvent vulgaire et aliénante, mais je dois dire que ce qui se faisait avant (hé oui, on va encore me taxer de conservateur nostalgique et rétrograde), méritait qu'on en parle. Comme par exemple ce petit spot de 1997, pour la marque DeLonghi qui vante les mérites d'un déshumidificateur baptisé Tasciugo (littéralement "je t'assèche"). C'est bien fait, efficace, didactique sans prétention, et surtout plein d'humour. L'humour de Burano, Appellation VSOP garantie ! Devant une réalité quotidienne assez préoccupante, il parvient à apporter un peu de légèreté et d'humour.   Tout ce qui est nécessaire afin de mieux appréhender les problèmes et les solutions qu'il nous faut trouver. Bonne journée.

2 commentaires:
Anonyme a dit…

drôle en effet !
Laura

Yvonne a dit…

Even with my small grasp of the language, that was funny and effective!

03 décembre 2010

Les métiers traditionnels vénitiens, autour de la gondole (1)

Gondole avec son felze sur le Bassin de San Marco. Photographie de Paolo Salviati (circa 1890) Collection particulière
 
Depuis dix ans, une association fait un travail remarquable de préservation des traditions vénitiennes, mais s'avère aussi au fil des années un véritable laboratoire d'idées tant en matière de conservation d'un patrimoine historique unique au monde qu'en matière d 'innovations techniques.

Dans un monde où tout bouge très vite, où les modes se font et se défont en l'espace que quelques clics sur internet, El Felze fondée par Saverio Pastor, Giuliana Longo et Emilio Ballarin, défend un artisanat de qualité, mais bien plus encore une philosophie de la vie où le beau et l'authentique ont la part belle. L'Associazione dei mestieri che contribuiscono alla costruzione della gondola organise ainsi régulièrement des conférences et des séminaires de haut niveau, présente des expositions didactiques autour de tous les métiers qui participent à la naissance, à l'entretien et à l'utilisation des gondoles. Tramezzinimag a décidé de vous présenter ces métiers, dont la plupart tendent à disparaître. On en garde cependant la trace dans la toponymie vénitienne, puisque souvent des rues, des ponts ou des cortile rappellent l'existence de ces artisans autrefois très nombreux. Avec El Felze, Tramezzinimag divulguera à ses lecteurs les adresses des quelques artisans qui perpétuent ces traditions.

I Squerarioli
Ce sont les charpentiers spécialisés dans la construction des embarcations en bois et donc des gondoles. En vénitien, squero désigne le chantier naval où se fabriquent les petits bateaux. Ceux qui connaissent Venise connaissent bien le Squero di San Trovaso, à Dorsoduro, à deux pas des Zattere. Du côté de San Giovanni e Paolo en existe un autre, moins photographié parce que moins pittoresque, le Squero dei Mendicanti (ou Squero Canaletto) remis en fonction il y a quelques années par un américain devenu authentique vénitien. mais il y en a d'autres, comme le Squero dei Muti, non loin du campo dei Mori, à Cannaregio, celui de Roberto de Rossi au sud de la Giudecca. Quelques chantiers navals perpétuent aussi ce savoir-faire. Le squero est l'authentique chantier de construction de gondoles. Autrefois, avant le développement de l'Arsenal, chantier d'État, de nombreux squeri fabriquaient tous les types d'embarcation nécessaires à la navigation sur les eaux de la Lagune, mais aussi sur les fleuves voisins. Les premiers squerarioli étaient des charpentiers venant des montagnes voisines, souvent de Cadore et de Val Zoldana. Ils arrivaient jusqu'à Venise avec les trains de bois qu'ils acheminaient depuis les forêts de leur pays et ils mettaient vite leur savoir-faire au service de la construction navale. 
 
Aujourd'hui, les derniers qui subsistent et peuvent ainsi prétendre à l'appellation originelle, ne construisent plus que des gondoles, barque symbole de la Cité des Doges. Dans le squero va naître la gondole dans sa structure, avec sa forme asymétrique? c'est là qu'elle sera montée, son fond calfaté. Le forgeron y posera les structures métalliques de la proue, de la poupe, puis c'est là encore que le peintre et le vernisseur interviendront. Curiosité : dans certains squeri, on utilise encore le le pede venexian unité de mesure de l'ancienne République qui vaut un peu plus de 1,4 mètre et se divise divisé en onces faisant douze lignes chacune, semblable à la mesure utilisée avant l'invention du système métrique. les charpentiers qui l'utilisent expliquent qu'il est parfaitement adapté aux dimensions originales de la gondole.
..
Chantiers encore en activité et membres de l'association Il Felze :
Squero Roberto Tramontin, Dorsoduro 1542.
Squero Daniele Bonaldo, Dorsoduro 1545.
Squero Roberto Dei Rossi, Giudecca 866a.
Squero San Trovaso, de Lorenzo Della Toffola, Dorsoduro 1097.
Squero Canaletto, de Tom Price, Cannaregio 6301
Cantiere nautico Crea, de Gianfranco Vianello, Giudecca 212.
Cantiere nautico Bote, Giudecca 2211d.

8 commentaires:

Danielle a dit…

Connaissez-vous les livres(3e éditions mars 2010) sur les métiers de Venise de Antonio Manno :I Mestieri di Venezia 2 volumes. Editions Biblos. Pas vraiment génial mais qui ont le mérite d'exister...

Bonne journée.

Gérard a dit…

En voilà une chose qu'elle est belle ! Une vraie noblesse du travail . Charpentier de marine . Pierre le Grand , force de la nature , colosse aux pieds sans argile , tira de ses souvenirs maritimes des Danois la force de construire la Russie . Lui manqua le temps de l'embellir . J'suis sûr qu'il y songea , nostalgique , à l'Amirauté , dans sa cabane . Autre grande noblesse des mains , le plâtre et les stucs . En voilà une autre merveille . Le gâchage , le dosage sélect , la prise , le modelage , le lissage , le séchage , les mains sensuelles à l'extrême , les très grands décorateurs , le chignon des miss et la chevelure fine au bout . J'adooooooooooore ! Et ne m'en lasse jamais . Venise en splendeur ! Sa très grande valeur . Que dis-je , mon vrai bonheur . For old happy few , only ! What else ? Offffffffeeeeee , un pt'tit café dans ma cabane d'arpette .

Anne a dit…

Votre reportage est très intéressant. J'attends avec impatience les autres articles.
Anne

Anonyme a dit…

Unfortunately Squero Canaletto is no longer operating, since Thom Price and his beautiful work left Venice a few years ago.

Lorenzo a dit…

But the squero seems to be opened and boats still being built there. Who owns it now ?

Lorenzo a dit…

Danielle, je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous, je trouve "I mestieri di Venezia" très documenté et Manno, qui est membre de l'Ateneo Veneto, a eu si je me souviens bien le Prix Gambrinus pour cet ouvrage. Connaissez-vous son "Tesori di Venezia". C'est toujours du domaine de l'inventaire savant qu'on vulgarise, mais c'est une somme de documentation aussi. Mais vous avez raison de toute manière, cela a le mérite d'exister. Bonne fin de weekend à vous.

Danielle a dit…

Non Lorenzo je ne connais pas ce titre, je vais me le procurer, merci...

Pour revenir sur le livre des métiers, je ne le trouve pas assez fouillé, il y aurait beaucoup plus de chose à dire sur chaque métier... Mais peut-être le coût éditorial y est il pour quelque chose je ne sais pas.

Merci Lorenzo à presto.

Anonyme a dit…

Lorenzo, I think you refer to the Circolo Nautico Generali, which is right next to former Squero Canaletto. The latter was bought by a company to temporarily store materials for the hospital and as far as I know is not being used as a boatyard anymore.

02 décembre 2010

Nebbia a Venezia

Traverser le grand canal en traghetto quand il y a du brouillard, c'est un peu avoir un aperçu de la traversée de l'Achéron... Mais éloignons de nos esprits l'idée de mort quand on parle de Venise...
 
Frisquet ce matin sur les bords du Grand Canal... A peine deux degrés sous abri au lever du soleil. Soleil que l'on imagine loin, très loin derrière cette masse de brume qui envahit tout. Parfois dans les cortile entourés de maisons ou les petits campi, on voit le brouillard non pas descendre mais monter comme venant du sol et au débuché, les passants surgir d'un coup de cette masse très dense, comme autant de furtives apparitions... L'hiver à Venise, dans certains quartiers me rappelle le smog londonien de mon enfance (le parfum de tourbe brûlée en moins). Un délice pour ceux qui aiment le rêve et laissent leur esprit s'évader loin des préoccupations quotidiennes. 
 
Je crois que pour aimer la neige, le brouillard, le froid qui fouette la peau, il faut avoir conservé une part d'enfance. Je suis toujours surpris quand j'entends des gens se plaindre de la neige qui tombe, des embarras que cela entraîne. Cette part d'enfance, elle est ancrée, immarcescible, dans le cœur de tous les Fous de Venise qui l'aiment sous la torpeur de l'été autant qu'aux jours de froidure, sous la neige et le brouillard.

2 commentaires:

Martin a dit…

Salut, j´aime aussi beaucoup le brouillard à Venise. On peut le comparer avec le brouillard à Londres, seulement plus beau parce que la silhouette est plus belle et encore plus mystérieuse à Venise!

Lorenzo a dit…

C'est tout à fait vrai. Et puis à Venise, quand le brouillard, il y a ce silence magique, mystérieux, un peu effrayant parfois. Un régal pour les âmes poètes.

01 décembre 2010

Pour lui aussi, voici le temps des frimas

Et en attendant que les vénitiens obtiennent que le réverbère reprenne sa place. Il était tout de même plus éclairant...

 Le garçon à la grenouille de Charles Ray - Coll. Fondation Pinault.
 

7 commentaires:

venise a dit…

j'aime bien cette idée de le protéger du mauvais temps de l'hiver :) merci aussi pour votre billet du mardi, si doux à lire

Anne a dit…

Merci pour votre humour!
Anne

Lorenzo a dit…

Merci de le comprendre !

Lorenzo a dit…

Pour Venise : A quand ce prochain voyage à Venise ? Pour le prochain carnaval ou plutôt au printemps quand la lumière se fait si douce qu'on a envie de la caresser...

Yvonne a dit…

Poor little fellow! I will knit him a nice warm sweater, and trousers!

Anonyme a dit…

Cela pourrait être une "performance" intéressante dans le cadre d'une prochaine Biennale

venise a dit…

j'aimerais tant, j'ai attendu presque vingt ans entre mes deux voyages à Venise, j'espère que le prochain ne sera pas aussi tardif Mais pour le moment, d'autres impératifs, surtout financiers, des enfants qui grandissent, dont il faut financer les études, les rêves doivent rester à l'état de rêve. Pour un temps, du moins...
La prochaine fois, je pense que ce sera au printemps et non plus au Carnaval, c'était un projet, un rêve éveillé que j'ai vécu l'an dernier. Il était parfait tel quel... L'impression de marcher dans vos pas aussi avec toutes les adresses collectées sur tramezziniMag. bon vendredi Lorenzo

30 novembre 2010

Happy tuesday everyone, Buon martedi a tutti !

Tout est toujours une question d'état d'esprit, vous ne trouvez-pas ? Se lever le matin et se dire qu'une journée difficile ou pénible nous attend encore sous un ciel gris et bas, fera la journée difficile et pénible et aucune embellie ne viendra éclairer nos pensées. On n'a pas toujours le choix. La vie est parfois pénible et le sort semble s'acharner sur certains. On ne peut hélas rien y faire, ou alors si peu quand il s'agit des autres et de la profondeur de leur désarroi. Tout l'argent du monde ne résoudrait pas les bobos du cœur et de l'âme dont les humains s'affligent. Mais il suffit souvent de petits riens pour que tout aille mieux. Un pas grand chose qui éclaire soudain le ciel et chasse les nuages.

Réveil en fanfare ce matin. Mitsou notre vieux chat rouge, a sauté sur le rebord de la fenêtre en faisant tomber des livres, puis il a sauté sur mon lit et avec sa patte a cherché à me réveiller, comme il fait quand il a faim et qu'il tolère mal d'attendre. Mais là, il n'était pas sept heures. Qu'est ce qui pouvait bien motiver cet excès d'énergie chez un gros chat casanier et poussif ? En m'approchant de la fenêtre, j'ai vu le chat des voisins qui manquait à l'appel hier soir. Grelottant, la pauvre bête s'était réfugiée sous le porche de la maison d'en face. Il miaulait doucement, comme un cri de désespoir. Tout dormait dans la rue.  
 
Mitsou l'avait entendu et voulait l'aider. J'ai ouvert la fenêtre sous le regard approbateur de Mitsou. Le chat des voisins, tout frigorifié est vite rentré. La fenêtre refermée aprs qu'une bouffée d'air glacé se soit répandue dans la pièce, les deux amiss sont allés directement vers la cour, d'où le chat des voisins a pu regagner sa maison. On eut dit que les deux bêtes bavardaient joyeusement. Avant de remonter chez lui, le rescapé a longuement léchouillé son sauveur en ronronnant. L'air de lui dire « Merci beaucoup et à bientôt ». 
 
Mon chat tout guilleret semblait avoir le sourire. Il est revenu sur le lit et, après s'être confortablement lové sur la couverture, ronronnement au maximum, il s'est rendormi, visiblement satisfait de sa B.A. du jour. INXS à la BBC envoyait les décibels. Il n'était plus temps de rester au lit. Dehors, une pluie fine tombait. La tasse de thé bouillant, ce builder's tea dont je ne sais me passer le matin, les biscuits qui vont avec (vous savez, ces Digestive de Mc Vities qui sont depuis toujours liés dans mon esprit à la délicieuse campagne anglaise), le plaisir du rasage,  la mousse sur la joue, la journée qui vient comme une page blanche... Autant de petits riens qui font déjà ce jour un bon jour. La pluie a cessé. Il fait bien froid, dans quelques minutes le bureau, la routine... Venise me manque et mon travail m'ennuie... Mais tout cela, les contraintes, les ennuis, les soucis, les chagrins ne sont rien quand je pense aux deux chats ce matin, aux enfants qui viennent de passer sous mes fenêtres en chantant joliment. Et puis les quelques minutes prises à l'instant pour noter tout cela et essayer de le partager avec vous. Petits riens sans prétentions « qui font du bien et qui ne coûtent rien», mais aident à vivre, voire parfois à sur-vivre. Bonne journée à vous.

______________

3 commentaires:

anita a dit…

Oh ! oui !!!! votre histoire de chats est mon 2è sourire du matin ( le 1er pour mon petit-fils ... ) la journée sera agréable malgré le froid humide ....
merci !!!
Anita

VenetiaMicio a dit…

Merci Lorenzo pour ces petits riens qui m'ont fait du bien et qui m'apportent beaucoup par cette matinée triste d'hiver...Venise me manque, à moi aussi !!!
Vous voyez votre page d'aujourd'hui ne sera pas blanche, ces quelques mots sont joyeux grâce à Mitsou et son petit pote !
Alors Buon martedi a voi Lorenzo
Danielle

Anne a dit…

C'est une anecdote charmante que je découvre ce soir et à laquelle je penserai demain matin. Merci, Lorenzo!
Anne

28 novembre 2010

Pour finir ce dimanche en beauté

A Venise, le temps passe si vite quand on n'est là que de passage, que chaque moment compte. On ne sait pas toujours traîner le nez au vent. J'ai été comme cela moi aussi autrefois, et mes enfants après moi. Mais désormais, lorsque nous avons la chance de pouvoir y revenir, quelque soit la durée de notre séjour, c'est davantage d'atmosphère dont il s'agit, plus que de vie sociale, de marathon culturel avec la longue liste des expositions à voir, des musées, des biennales et des collections privées ouvertes au public. Comme je le scandais au micro d'une sympathique journaliste suisse, il y a quelques années, Venise, n'ayez pas peur". N'ayez pas peur de vous perdre, mais n'ayez pas peur non plus de laisser le temps filer, que ce soit en restant longtemps à une terrasse de café (ce n'est pas trop la saison je le reconnais), pour observer les gens qui passent, sur un banc aux Schiavoni, pour admirer ce paysage unique au monde, mais aussi, chez vous, si vous avez la chance de bénéficier d'une fenêtre avec vue, d'un jardin ou d'une altana... 
 
Moi, ce que je préfère, c'est quand il fait assez bon, en hiver, pour laisser la fenêtre ouverte et sentir le mouvement de la ville, les passants dans la rue, les bateaux sur le canal voisin. Une tasse de thé fumant, quelques biscuits, un scone ou une tranche de cake (fabrication maison bien entendu), un livre ouvert à portée de main, et de la musique. C'est là le meilleur moyen que je connaisse pour éloigner cette mélancolie du dimanche soir, surtout quand l'hiver est proche et que la nuit tombe vite. Cette belle chanson de Josh White convient parfaitement à cet état d'esprit. laissez-moi vous en faire cadeau ce soir, en vous souhaitant une bonne semaine.

1 commentaire:

Les Idées Heureuses a dit…

N'est ce pas ce que l'on emmène avec soi en quittant la lagune, songeant: -"Quand y reviendrai-je ?"
Elle ne nous abandonne jamais, cette impression de la sentir, de la frôler, de l'écouter respirer, au moindre détour d'une seconde.
Chaque jour, chaque nuit, on s'en éloigne et on s'en rapproche.
Bonne semaine à vous Lorenzo.

Sartre et les pigeons de Venise

«Les pigeons, morceaux de marbre fous. Ces grands nerveux à quelle épreuve soumis. Photographiés, nourris par des touristes eux-mêmes énervés, ils ont l’égarement des êtres vivants astreints à faire couleur locale. Ils marchent entre les jambes des Anglaises mais à chaque sonnerie de cloche, s’envolent en ronds fous, une grande étoffe claquante. Je suis sûr qu’ils jouent la peur : pensez, ça fait un siècle que ça dure.»
Jean-Paul Sartre
in-La Reine Albermale, « Venise »
 

25 novembre 2010

Joie à Venise : Il revient notre lampadaire, c'est le maire qui l'a dit !

Le maire Orsoni l'a confirmé dans un entretien paru le 23 novembre, dans le Gazzettino : non seulement la sculpture la plus photographiée de Venise restera le temps de l'exposition des collections Pinault, mais après son retrait, le lampadaire dont nous sommes des milliers à réclamer le retour, reprendra effectivement sa place.

C'est une bonne nouvelle qui a été accueillie avec satisfaction par les vénitiens et tous ceux qui regrettaient de ne plus pouvoir s'installer à la pointe de la douane, la nuit, pour contempler l'un des plus beaux paysages urbains du monde, les amoureux qui aimaient s'asseoir au pied du lampione, les rêveurs, les musiciens qui parfois, loin de toute habitation, venaient gratter leur guitare ou souffler dans leur flute. Il va donc être remis en place et Tramezzinimag s'en félicite.

Combien de fois, la nuit, après un dîner, une soirée, ou simplement en revenant de la bibliothèque Querini-Stampalia, avec des amis, ou le plus souvent seul, suis-je venu m'asseoir au pied de ce lampadaire. A droite la longue façade de la Giudecca avec le Redentore éclatant de blancheur, en face, San Giorgio et son campanile, le petit port de plaisance d'où parvenaient le cliquetis des drisses et le grincement des coques contre les pontons, et à gauche, la Piazza, illuminée, avec le palais des doges , les coupoles byzantines de la basilique, le campanile, "Il paron di casa"... L'eau noire du bassin, du Grand Canal et du Canal de la Giudecca, comme un appel du large. Les quelques bateaux qui passaient, le dernier vaporetto, une vedette de la police, plus rarement une ambulance. Puis, plus rien que le silence et le clapotis de l'eau. 

 
Le plaisir de tirer une longue bouffée odorante de la pipe qui ne me quittait jamais alors. Le ciel étoilé. Le silence. La paix. La beauté du décor. Et le lampadaire contre lequel j'appuyais mon dos, qui éclairait cette pointe de la douane et répandait l'ombre de mon corps en de multiples directions, symbole de mon désir d'être partout à la fois dans cette ville tant aimée, de tout voir, de tout posséder. Chaque fois, en me relevant, j'avais l'impression d'être le capitaine à la proue de son navire, scrutant l'horizon de ses jours. Les rares fois où un chagrin, une angoisse, un problème m'empêchaient de dormir, une promenade jusqu'au lampione suffisait pour tout apaiser en moi...


23 novembre 2010

La pluie n'arrête pas le pêcheur

©Enzo Pedrocco

2 commentaires:

Les Idées Heureuses a dit…

On pourrait aussi inverser: le pêcheur n'arrête pas la pluie!

Lorenzo a dit…

cela ressemblerait alors à un proverbe oriental.