10 juillet 2012

Un chat par un après-midi d'été à Venise...

 
Ne serait le décor et les accessoires qui montrent bien combien notre époque est dénuée de sens esthétique, favorisant depuis des lustres le pratique plutôt que la beauté, cette image pourrait être de tout temps. Un chat, au soleil, sur le rebord de sa fenêtre qui observe des moineaux sur le toit voisin. L'ocre de la façade, l'intensité du soleil et la douceur de l'air, tout cela respire la sérénité d'un jour de juillet quand le vent ne souffle pas encore les étouffantes effluves qu'il ramène des lointaines contrées africaines...

02 juillet 2012

Venise et les peintres (I)

Venise et les peintres... Une longue histoire d'amour. un peu de hargne aussi parfois. Comment résister à cette lumière, à ces couleurs, à la magie des reflets... 

Ce miroitement qu'il est tellement difficile de traduire. Et les perspectives, la beauté altière des palais, la fascinante profondeur des ciels changeants... Beaucoup ont échoué à traduire ce miracle de beauté. Certains y parviennent à tel point que leur œuvre est définitivement associée à tout cela qui fait Venise et le regard qu'on pose sur elle, même à distance.





J'aime depuis longtemps partir à la recherche de ces vues de Venise, ces portraits de la Sérénissime nés un jour de la fascination d'un artiste, connu ou inconnu, professionnel ou amateur depuis le XIXe siècle. La galerie TramezziniMag vous en présente ici quelques uns, glanés au fil des ans, des expositions, des ventes et des lectures. Eugène Boudin aimait particulièrement la lumière sur les façades et leur reflet dans l'eau des canaux, comme le montrent les deux huiles présentées ci-dessus. 

Bon nombre de voyageurs ont avec eux un carnet à dessin où ils tentent d'immortaliser toute la beauté des lieux qu'ils arpentent. Simples ébauches, dessins achevés, crayon, encre, aquarelle, ces croquis ont toujours une âme et sont la plupart du temps remplis de poésie. Ils traduisent, parfois maladroitement l'amour de leurs auteurs pour Venise.



01 juillet 2012

Premier dimanche de juillet, l'été enfin !


That sunday, that summer chante Nat King Cole. Cette belle chanson rythme ce premier et délicieux dimanche de juillet. Il fait vraiment beau, l'air est doux, parfumé encore des senteurs printanières qui ont tant tardé à se répandre, qu'une brise légère comme dans un film de Jacques Demy, répand dans la maison. Constance termine la préparation de son sublime fondant au chocolat. Tout à l'heure nous irons à la messe, comme chaque dimanche chez les dominicains, dont la magnifique liturgie retient et séduit les plus rétifs de mes enfants tellement tentés par l'attrait des fureurs du monde moderne et qui retrouvent dans ces moments tout ce pourquoi l'office dominical a été créé et qui en est peut-être le principal Mystère. Arrivant tous avec le poids de nos faiblesses, de nos doutes, notre mauvaise humeur et nos ressentiments, l'heure d'abandon au milieu des volutes d'aloès et de myrrhe, portés par le chant des moines sous la splendeur baroque de ce temple, fait fondre nos carapaces et tomber nos haillons. Je remarque à chaque fois l'atmosphère joyeuse et légère de la sortie, quand sur le parvis les fidèles se mêlent aux frères. 

C'est à chaque fois comme le deuxième allegro du concerto en La mineur de Vivaldi (RV418) dont on retrouva une copie dans l'ancien monastère de Cosmo e Damiano, à la Giudecca, ce bel édifice encore debout aujourd'hui et qui fut tour à tour un entrepôt, une usine de textiles, un hospice pour déshérités. L'église y abritait des trésors dont certains sont aujourd'hui conservés à l'Accademia. Mes lecteurs vont finir par penser que cela tourne à l'obsession pathologique, mais je ne sais aborder un sujet sans évoquer rapidement le lien qui se fait en moi avec la Sérénissime. Mais si c'est de démence dont il s'agit, je veux bien m'y vautrer avec joie et détermination Et à tout jamais ! Bon dimanche à tous. 
 

29 juin 2012

Pour une fois qu'une guerre ne tuera personne !

Beaucoup de mes lecteurs s'insurgent parfois du caractère négatif de certains des billets de TraMeZziniMag. Le constat quotidien de la perte d'âme est douloureux pour ceux qui, vivant à Venise ou la considérant comme leur patrie de cœur. cependant, il ne fait pas de nous des réactionnaires aigris. Au contraire. Seulement, lorsque la plupart des médias - cela dure depuis des siècles - tendent à véhiculer une vision orientée des événements où tout n'est pas bon à dire, j'estime que nous devons dire la vérité. C'est une chose vitale pour la liberté. La phrase de monsieur de Beaumarchais, "Les faits sont sacrés, les commentaires sont libres" devrait être le serment prononcé par tous ceux qui font profession d'informer. 
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Dire que les tagueurs sont des iconoclastes dangereux fait ricaner. Avoir dépassé le demi-siècle et dire cela de jeunes gens vigoureux qui inventent le monde de demain est pour beaucoup un crime de lèse-majesté. Surtout ne critiquons pas notre belle jeunesse. Pourtant ces writers comme on les a baptisé, commettent par la laideur de leurs graffitis un crime contre la beauté. Leurs graffitis n'ont rien à voir avec l'Art Urbain, le street art, qui s'il investit les mêmes supports dans les villes, est avant tout une démarche esthétique, une posture artistique qui le plus souvent s'intègre bien aux lieux où il est apposé, ne les défigure ni les endommage et constitue une forme reconnue d'activité artistique. Ces pochoirs et autres collages ont une durée de vie volontairement limitée. Ils expriment, souvent avec beaucoup d'humour, un message, personnel ou générique, où l'humour et la beauté sont toujours présents. Ce n'est hélas jamais le cas de ces tags sauvages. Rien à voir avec le sympathique collage ci-dessous qui ne nuit en rien à l'harmonie des lieux. .
Photographie : © Eric Ségelle - Tous Droits Réservés.
Je suis un esprit simple. Pour moi, avant toute autre chose, il y a l'amour et la beauté. Les merveilles que plus de vingt millions d'êtres humains viennent admirer en troupeau chaque année ont été érigées par des hommes qu'emplissait l'amour du beau. C'est la certitude de sa transcendance qui leur dicta ces réalisations, permettant la contemplation de merveilles qui sont autant de représentations imparfaites du Royaume de Dieu. En souillant les murs de Venise, les jeunes barbares font le travail du diable. Ils nous habituent à l'immonde, à la pestilence, au dégoût. Ils illustrent la désespérance, le désamour. La haine. Le mépris des autres aussi. Il est de bon ton chez certains de voir dans cette débauche d'immondices la désorientation de cette pauvre jeunesse à qui la société a offert la paix, le confort, la sécurité, satisfaisant à tous leurs instincts même les plus bas, au lieu de les contraindre à la guerre, à la peur, au manque. Les tagueurs des nuits de Venise ne sont pas des révolutionnaires en révolte contre le système. Ce sont de sales enfants pourris qui crachent sur la beauté, qui renient l'esthétique des temps passés, en refusent le modèle et gueulent la vacuité de leur vie dans le tumulte infect d'une musique enivrante et la fumée de leurs pétards. Nous en sommes responsables. "Pas assez de coups de pied au cul" me disait un vieil instituteur l'autre jour. De quoi être pessimiste, vous l'avouerez, car aucune punition n'est possible. Aucune rééducation à l'art et à la beauté, à la transcendance et au respect du bien commun ne pourrait fonctionner. Les bien-pensants crieraient aussitôt à la répression et nous passerions pour des ayatollahs... . ..
En attendant, le Gazzettino s'en faisait l'écho hier ou avant-hier : la guerre aux murs souillés est déclarée et Tout l'arsenal répressif est en route, mais s'il est satisfaisant de savoir que l'autorité publique a enfin pris la mesure du défi, ce n'est pas le plus important. Ce qui compte c'est qu'on permette enfin aux visiteurs comme aux quelques vénitiens qui restent de ne pas être partout et à tout moment, confrontés à ces tags hideux, signatures hiéroglyphiques bizarroïdes qui servent à marquer le territoire de ces ersatz de révoltés comme en usent les canidés avec leur urine. Retrouver une ville certes décatie dans bien trop d'endroits, mais qui demeure le vivant manifeste de l'amour des hommes pour la beauté, leur participation à la transcendance.
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L'annonce de cette guerre ouverte officiellement a été accueillie avec joie par les vénitiens. (un vieux gondolier connu pour ses saillies, s'est écrié dans son bar favori en lisant le journal "Tiens, ça y est enfin, la chasse est ouverte !"). Les contrevenants pris sur le fait seront traduits devant les tribunaux pour dégradation récidivante et les peines seront lourdes. En attendant, tous à nos éponges, nos brosses et nos pinceaux pour nettoyer les façades et faire oublier cette laideur !

28 juin 2012

San Gregorio au temps des Habsbourg

Le cloître de San Gregorio par Antonietta Brandeis (1849-1920)

Originaire de Erdmannsdorf-Zillerthal, en Bohème (aujourd'hui Myslakowice en Tchéquie), elle fut élève de l'école des Beaux-Arts de Prague avant de suivre à Venise, les cours de Michelangelo Grigoletti alors directeur de l'Accademia. Elle a produit une grande quantité de peintures sur Venise dans l'esprit des védutistes que TraMeZziniMag aime particulièrement.

25 juin 2012

Touristes...

Venise. Une journée ordinaire près de San Marco.

Mes lieux secrets : les bibliothèques de Venise


Ils n'ont rien de bien original, ces lieux où j'aime m'installer à Venise pour travailler, enrichir ma connaissance de la ville et de son histoire, écrire aussi. Les lecteurs de Tramezzinimag ont compris depuis longtemps que lire et écrire sont le moteur de mes jours. Si j'écris n'importe où, j'ai besoin pour lire et réfléchir  à ce que je lis, de lieux spécifiques. La Querini le soir, la Fondation Cini, les Archives d’État aux Frari, la petite bibliothèque de l'institut d'études orientales de l'Université... Autant de lieux qui ne seront jamais envahis par les foules et demeurent des endroits merveilleux, tant par leur cadre, que leur emplacement, leur histoire et... leur odeur, faite de poussière et de ce mélange d'huile de lin et de térébenthine qu'on utilise ici pour faire briller les sols en terrazzo comme les boiseries des murs.
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Ceux qui me lisent savent combien les salles de la Querini Stampalia ont compté pour moi. Les longues soirées studieuses quand la nuit tombée sur la ville recouvrait tout d'une chape de mystère et de rêve, avec par les fenêtres grandes ouvertes le parfum de l'herbe coupée du jardin, le clapotis de l'eau de la fontaine, une cloche au loin... A l'étage des Archives, on respire une odeur particulière de poussière et d'herbes rares, certainement le parfum des poudres utilisées pour chasser les insectes et prévenir la moisissure des vélins anciens. C'est pour moi l'odeur du passé glorieux de Venise.
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Dans les belles salles de la Fondation Cini, la lumière pénètre par de grandes baies vitrées et joue avec chaque forme, égayant le silence recueilli qu'elle anime soudain d'une farandole muette où des milliers de grains de poussière dansent joyeusement... Il y a aussi les salles de l'Ateneo Veneto, et bien sur la Marciana...
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Autant de sanctuaires du livre, remplis de trésors passionnants à découvrir. Une vie entière ne suffirait pas pour tout lire, tout humer, tout feuilleter... Fort heureusement, d'autres après nous en découvriront les joies. Aucune tablette numérique, même la plus sophistiquée, ne remplacera jamais le bonheur qu'il y a à prendre un livre dans des rayonnages anciens, à le poser sur la table sous la lampe, à l'ouvrir respectueusement puis à en tourner les pages, humant tous les parfums qui s'en exhalent, vapeurs odoriférantes venues des temps anciens, particules de l'air qu'on respirait autrefois.

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24 juin 2012

COUPS DE CŒUR N°47

Antoine et Marie, deux parisiens rencontrés récemment par le biais de ce blog, nous ont demandé "d'autres" adresses de restaurants. Je vous livre ici deux endroits que j'aime et où on mange bien. Ils sortent de l'ordinaire vénitien et n'ont rien en commun avec ces gargotes adeptes du "menu turistico", tout de même toujours frais mais de moins en moins inventif et s'éloignant de plus en plus de la vraie cuisine vénitienne déjà sacrément ébranlée depuis la première guerre mondiale (cf. l'excellent ouvrage d'Alvise Zorzi "la cuisine des doges" dont nous avons déjà parlé). 

ALLA ZUCCA
S.Croce, 1762
ponte del megio
tel.: 041-5241570. 
Fermé le dimanche
Située près du pittoresque campo San Giacomo dell'Orio, à l'angle d'un pont et d'un canal, 'tout près du Palais Mocenigo et de San Stae), à deux pas de l'arrêt du vaporetto, cette trattoria est née il y a vingt cinq ans. Autrefois repère d'étudiants, on pouvait y dîner de risotto à la citrouille ou aux champignons, de pizzas garnies de légumes frais, et boire un agréable vin de pays. Les temps ont changé, les clients ont vieilli et les propriétaires ont passé la main. Le décor demeure assez rustique, la clientèle faite pour l'essentiel de voisins et de gondoliers. Si on y mange toujours aussi bien, les prix sont un peu plus élevés mais restent très raisonnables. L'ambiance y est restée très chaleureuse. C'est aussi fermé le dimanche comme trop de bons endroits.
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ANTICA TRATTORIA BANDIERETTE
Castello 6671, Barbaria delle Tole
Tel. : 041 522 06 19
Quand nous logions chez la rayonnante Caroline Delahaie à sa Ca'Bragadin, le maître de maison, Gérard, nous avait recommandé une trattoria voisine, située sur la Barbaria delle Tole, cette rue très animée au nom pittoresque dont l'origine vient des anciennes scieries qui y étaient installées autrefois. Il y avait sur la Fondamenta Nuove, et tout le long des bords de lagune des chantiers navals. L'endroit où est aujourd'hui, parmi de nombreux magasins le restaurant dont nous parlons, était autrefois le lieu d'arrivée des nombreuses régates organisées par la République. Les vainqueurs recevaient - c'est encore comme cela aujourd'hui - des bannières de tissus aux couleurs des quartiers ou des corporations. D'où le nom de la trattoria. Mais dans le quartier, les vénitiens continuent de l'appeler "da Tiraca" (en dialecte vénitien le mot "Tiraca" veut dire "bretelle"), simplement parce que l'ancien propriétaire était célèbre pour ses nombreuses et originales bretelles. Lieu accueillant, où l'on continue de préparer des plats typiques essentiellement à base de poissons. Des préparations simples mais toujours à base de produits très frais et de qualité. C'est du "comme à la maison" et après y avoir goûté, plus personne n'en doute, je vous l'assure. C'est pour ça que dans la salle on entend surtout parler vénitien et que le dimanche c'est rempli de familles qui viennent passer un agréable moment "casalinga". C'est à deux pas de Zanipolo (SS. Giovanni e Paolo). Vous y serez bien accueillis et vous ne regretterez pas votre soirée ! Au passage, je signale la pâtisserie RosaSalva, aux pieds de la statue du Colleone. Dès les premiers rayons de soleil du printemps, la terrasse est très agréable. Le café y est bon et vous pourrez choisir pour l'accompagner les délicieuses pâtisseries à base d'amande de la maison (essayez donc la "torta di Mandorla" rectangle de pâte sablée garnie d'une pâte faite d'amandes hachées, de noisettes et recouvert de sucre glace, un délice vraiment). Les tramezzini y sont très bons, ainsi que le croque-monsieur ("toast" en italien). Le bar voisin est aussi très agréable. Une bonne étape après la visite de la basilique et avant d'entamer une longue promenade sur les quais du Nord, face à San Michele.


Avez vous déjà goûté les BAICOLI ?
Ces fameux biscuits très secs que les marins emportaient avec eux ?Plusieurs pâtissiers en fabriquent encore mais les plus célèbres sont ceux de Colussi. Le pâtissier Marchini en propose aussi et les expédie dans le monde entier. Un ami médecin, le docteur De Vanni, disait toujours que c'est le seul biscuit manufacturé au monde sans un seul produit chimique artificiel, naturellement sec avec 10 grammes de matière grasse pour 100 grammes de biscuit, autant de protéines et le reste en carbo-hydrates. ce qui donne un délice avec 440 calories pour 100 grammes. Voilà ce qui explique le goût des marins pour ce biscuit coupe-faim et léger en même temps. En plus la boite est jolie. les affiches publicitaires originales de Colussi datant des années 30 se vendent une fortune. Parfois, on trouve de vieux modèles de boîtes chez les brocanteurs de Venise. J'en ai trouvé une illustrée de marquises et de masques datant des années 1940, un jour sur un mercatino d'antiquités à Rome, pour trois sous. La prochaine fois que vous allez à Venise, goûtez-les. On en trouve parait-il à Paris.

Bon dimanche !




23 juin 2012

L'Amerigo Vespucci mouillait à Venise

Le fringant voilier de la marine italienne était à Venise il y a quelques semaines. C'était à l'occasion du 151e anniversaire de la Regia Marina (la Royale italienne). Ce magnifique navire-école à la coque noire rayée de blanc est très reconnaissable, avec sa luxueuse proue dorée. Sa masse élégantissime sied bien au décor unique du Bacino di San Marco ne trouvez-vous pas ? Né sous le fascisme, il est la réplique avec son sistership, le Cristoforo Colombo (cédé aux soviétiques en 1948 et devenu le Dunaj, détruit en 1971) d'une frégate du XIXe siècle. Si vous avez pris des photos du navire et de ses visiteurs, n'hésitez-pas à nous les envoyer, nous les publierons dans ces colonnes.