Paolo Giordano
La solitude des nombres premiers
Titre original : La solitudine dei numeri primi
Traduit de l'italien par Nathalie Bauer
Editions du Seuil
Ce roman raconte l’histoire douloureuse et émouvante de deux adolescents
d'aujourd'hui qui se croisent, se reconnaissent, s’éloignent, se
rapprochent, sans jamais réussir à se trouver. C’est beau et infiniment
triste. Alice et Mattia ont vécu tous deux dans leur enfance de ces
tragédies qui bouleversent une vie et abiment l'âme. Alice est
anorexique. Mattia est couvert de scarifications. Ils sont comparés,
dans le roman, à "deux nombres premiers, divisibles uniquement par 1 ou par eux-mêmes … Ce sont des nombres soupçonneux et solitaires"... Mattia, mathématicien surdoué, apprendra plus tard qu’il existe aussi des "nombres
premiers jumeaux, presque voisins, car il y a toujours entre eux un
nombre pair qui les empêche de se toucher vraiment". Comme les
nombres premiers, ces deux-là sont condamnés à une solitude profonde, à
la fois choisie et subie. Relations distantes et apparemment dénuées
d’affection avec les parents, inadaptation à la vie sociale... Alice en
veut à son père qu’elle rend responsable de son infirmité, suite à une
chute de ski. Le garçon vit sous le poids de la culpabilité depuis ses
10 ans, quand a disparu sa sœur jumelle, attardée mentale, laissée sans
surveillance et jamais retrouvée... Il s’enferme dans l’étude des
mathématiques, incapable de nouer la moindre amitié avec quiconque, même
avec Alice. Alice a désespérément besoin d’amour et d’affection mais
bien sûr ceux qui l'attirent la rejettent.
Roman d'apprentissage comme chaque époque en a produit, où le lecteur
suit, page après page, le douloureux cheminement de ces deux jeunes
gens. C'est poignant, captivant, parfois drôle. Souvent émouvant. Il
montre aussi du doigt l'irresponsabilité de certains parents, obligeant
les adolescents à se prendre eux-même en charge, s'ils veulent en finir
avec les fantômes d'une enfance endolorie et survivre. Triste constat de
l'état de la famille italienne dont nous n'avons pas à nous gausser en
France, quand on voit comment les choses se passent ici aussi, de plus
en plus souvent...
Le roman est enfin disponible en français. Son auteur, jeune scientifique de 25 ans (il prépare un doctorat en physique théorique) a remporté l'année dernière le célèbre prix "Strega",
avec cet extraordinaire texte, son premier roman paru en 2008 et déjà
vendu à plus d'un million d'exemplaires. Son succès parmi la jeunesse
italienne est immense et j'espère que les français vont s'en emparer à
leur tour, tant la traduction de Nathalie Bauer restranscrit à la perfection l'esprit et la musique de Paolo Giordano.
Une fois n'est pas coutume, comme toute la blogosphère italienne l'a
fait avant moi, voici la photo de l'auteur. Gageons, mesdemoiselles et
mesdames, que ce ne sera certainement pas un obstacle à l'achat du
livre...
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Alain Buisine
Nudités de Venise
Ed. Zulma.
C’est au XVIe siècle que le nu triomphe à Venise. Il devient omniprésent
en peinture, jusqu’à couvrir les façades des palais le long du Grand
Canal. On peut voir alors des gondoles glisser sur les immenses nus de Giorgione qui se reflètent dans l’eau. Le maître de Castelfranco est bientôt suivi par tous les grands peintres vénitiens, Titien, Tintoret, Véronèse.
Figures mythologiques et bibliques autorisent la célébration de la
nudité féminine : Suzanne exposée au voyeurisme des vieillards, Danaé
recevant l’aurifère semence divine, Léda subissant les assauts du cygne…
Venise valorise la couleur, incarne les chairs dans la somptuosité des
chromatismes. Une manifestation picturale qu’accompagne l’épanouissement
érotique d’une ville devenue le grand bordel de l’Europe, la Venise de Casanova, Baffo, lord Byron,
où se rendent les libertins fortunés pour profiter des charmes des
courtisanes. Un très intéressant ouvrage paru en 2004, agréablement
écrit par l'un des universitaires français les plus sensibles à la magie
et à la grandeur de Venise.
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Gabrieli - Frescobaldi - Guami
Musique vénitienne pour cuivres
Ensemble HR Brass dirigé par Edward Tarr
Label Capriccio - 2009.C'est vers 1570 que fut fondée à Saint-Marc un ensemble de cuivres permanent, sous l'impulsion de Andrea Gabrieli, sur le modèle du somptueux ensemble instrumenta que Roland de Lassus
avait créé à la cour de Munich. La renommée de Gabrieli et l'attrait de
Venise qui était le seul état de la péninsule à pouvoir se permettre
d'entretenir un tel ensemble d'une manière permanente, attirèrent vite
des compositeurs de toute l’Italie qui se mirent à écrire des œuvres
pour cuivres. Le disque en présente un assez large éventail, avec en
tête Gabrieli et Frescobaldi : Lappi, Guami, Gussago, Massaino. L’ensemble hr brass de la Radio de Hesse (d’où les initiales) joue sur des instruments modernes, mais dans un mode d’exécution teinté de l’enseignement de la musicologie moderne. "On
notera en particulier l’accompagnement continu par un orgue positif
accordé selon le tempérament mésotonique. Naturellement, l'ensemble
allemand joue avec les équilibres acoustiques et la spatialisation
poly-chorale qu’offrait l’acoustique de Saint-Marc de Venise, où l’on
avait pour habitude de placer les sous-ensembles instrumentaux et vocaux
à divers endroits de la basilique pour créer un effet de stéréophonie,
effet polychoral". (Abeille Musique). C'est un superbe enregistrement (la prise de son est de 1992 !) qui devrait ravir autant les baroqueux que les modernes.
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Sonates pour flûte des fils Bach
Barthold Kuijken, flûte
Ewald Demeyere, clavecin
Label Accent - 2009.
Deux interprètes d'exception pour un répertoire à la lisière entre
baroque et style galant. Une délicieuse musique trop rarement
interprétée par des artistes de ce niveau, qui seuls peuvent en faire
ressortir les délicates nuances et les riches couleurs.Un disque
lumineux et plein de charme.Wilhelm F. Bach (1710-1784), Johann Christian Bach (1735-1782), Carl Philip Emanuel Bach (1714-1788) Johann Christoph Friedrich Bach
(1732-1795) sont rassemblés pour notre plus grand bonheur. C'est un
disque plein de joie et de sérénité, un des ces enregistrements profonds
et tranquilles qu'on aime emporter avec soi et écouter quand on voyage.
C'est ce que je vais faire quand nous partirons pour les vacances de
Pâques vers notre cher bassin d'Arcachon a défaut de nous rendre tous
ensemble à Venise.
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Baldassare Galuppi
La Clémence de Titus (Intégrale)
Orchestre Baroque de Savaria
dirigé par Fabio Pirona
Label Hungaroton - 2009.
Baldassare Galuppi (1706-1785) fut un compositeur très productif puisqu’il a plus de cent opéras à son actif dont la "Clémence de Titus", écrit bien avant celui de Mozart. La magnanimité de l’empereur Titus Vespasien a inspiré de nombreux musiciens, qui ont tous utilisé le livret de Pietro Metastasio (écrit en 1734) plus ou moins modifié. L’opéra en trois actes de Galuppi , enregistré pour la première fois (et en intégrale) dans ce disque, a été créé en 1760 au Teatro San Salvatore
de Venise. Il figura pendant de nombreuses années à l’affiche de tous
les théâtres européens avant de tomber dans l’oubli. Cette première
discographique mondiale nous permet de découvrir une œuvre de grande
qualité, témoignage de l’art musical vénitien dans les dernières grandes
années de la République.
Ayant beaucoup voyagé - il est à Londres de 1741 à 1743, puis à Saint-Pétersbourg de 1765 à 1768 à l’invitation personnelle de Catherine II - , Galuppi s'est imprégné des diverses influences européennes. Très proche de Carl Philipp Emmanuel Bach mais aussi de Goldoni, sa musique fut ardemment défendue par Jean-Jacques Rousseau ou Casanova. On dit que de nombreuses œuvres de l'auteur auraient été attribuées à tort à Vivaldi…
Justice lui soit ici enfin rendue grâce à cet opéra, d’autant qu’il
occupe une place importante dans l’évolution de la comédie lyrique.
Cette Clémence appartient à l’esthétique de l’opera seria vénitien et regorge d’airs magnifiques et poignants. On y retrouve toutes les caractéristiques de l’écriture de Galuppi : son sens de l’orchestration, de l’harmonie et du rythme. Accompagnés sur instruments d’époque par l’Orchestre Baroque Savaria Baroque, les chanteurs, très vibrants, redonnent pleinement vie à cette œuvre négligée mais pas du tout démodée.
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Le Club-sandwich
Dans le précédent Coups de coeur (N°29), je vous parlais du livre d'Arrigo Cipriani paru chez Plaibac, dans lequel le propriétaire du Harry's Bar et du Harry's Dolci,
livre quelques unes des recettes emblématiques de ces lieux magiques.
J'avais envie de vous donner la version Tramezzinimag du club sandwich
, ce grand classique incontournable des fins de weekend où sans avoir
envie de se mettre en cuisine, on a envie de bien manger devant un bon
film ou en en poursuivant l'interminable partie de Monopoly. De quoi faire passer en douceur le terrible stress du dimanche soir.
Il faut par personne : 3 tranches de pain de mie (l'idéal étant le
pain de mie anglais carré de grande taille ou le pain de mie maison à
condition qu'il soit taillé dans le sens de la longueur), des tomates, des feuilles de salade, du concombre, 2 tranches de bacon (du vrai pas du Herta) ou de la poitrine fumée, 1 blanc de poulet, du Brie ou tout autre fromage (mes enfants sont partagés, certains préfèrent le cheddar ou le cantal extra-doux ? les autres ne veulent que du Brie), de la mayonnaise (sans moutarde), du beurre.
Beurrer les tranches de pain de mie et les mettre à griller. Couper les
blancs de poulet sans la peau en escalope et les faire bouillir dans un
bouillon de légumes ou de poulet, l'essentiel étant que le liquide soit
bien assaisonné. Attention, il ne s'agit pas de laisser la viande trop
longtemps dans l'eau mais juste le temps nécessaire pour la rendre
blanche et tendre. Dans une poêle faire dorer les tranches de bacon, les
réserver au chaud puis passer rapidement sur le feu les escalopes de
poulet pour que l'extérieur s'imbibe du suc de cuisson du bacon. Les
maintenir au chaud.
Quand le pain est grillé, recouvrir généreusement
chaque tranche de mayonnaise (sur la partie beurrée bien sûr),
puis disposer des feuilles de salade, des tranches fines de tomates, le
poulet, une deuxième tranche de pain, une couche de mayonnaise, les
morceaux de fromage, une tranche de bacon puis des tranches (taillées très fines)
de concombre, de la salade et couvrir avec la dernière tranche de pain.
Presser le tout pour que l'appareil s'agglomère sans que le pain soit
écrasé.
Couper en quatre morceaux les faire tenir chacun avec une pique
si nécessaire et servir aussitôt. Régal assuré. Détail important : on
mange plus facilement le sandwich-club avec fourchette et couteau qu'à
la main en regardant "Raisons et Sentiments" ou "The Sound of Music"
! Et on peut le farcir avec plein d'ingrédients différents, sachant
cependant que le vrai est au poulet et au bacon, mais avec du saumon
fumé et du thon ce n'est pas mal non plus. Bon appétit.