En 1984, j'ai changé d'appartement. Le petit studio tout revêtu de bois comme un chalet de montagne que Giuliano Graziussi, (le patron de la galerie que je venais de quitter) m'avait loué, sur la fondamenta delle Capucine avait abrité mon quotidien ( et celui de mon petit chat gris, Rosa) pendant presque deux ans. J'aménageais dans ce qui devait être mon dernier appartement d'étudiant, calle Navarro, à côté de chez l'Architecte de Michelis et à deux pas de chez Bobo Ferruzzi, à Dorsoduro. Je n'avais pas grand chose à déménager mais le "traslocho" posait problème. Davide, un jeune vénitien qui possédait avec son père une petite entreprise de traslochi (déménagement), se proposa gentiment de m'aider. C'était un ami de Federico Biasin, le jeune fils de Matilda Grinziato, celle-là même qui en m'embauchant - au noir - dans son auberge, m'avait permis de m'installer à Venise et orienta ainsi mon destin...
La barque, plate et peinte en rouge, accosta vers 8 heures sur la Fondamenta devant la maison, à Cannareggio. Davide et moi avons chargé les meubles et les cartons. Rosa s'est installée à la proue, très fière et nous sommes partis, à travers les canaux. Puis il fallut décharger au bout de la calle, depuis le rio piccolo del Legname qui mène de la Giudecca au Grand Canal. Rien que de très banal en vérité. Mais déménager ainsi devient tout de suite une somme de poésie, une aventure. Un de ces moments dont on se souvient toujours. La gentillesse et l'empressement de Davide, le ronronnement du moteur à travers la ville, les odeurs et les reflets, les gens que l'on croise, le côté magique du déplacement en bateau à Venise... J'ai encore en bouche le goût du délicieux fragolino que nous bûmes au petit bar non loin de là, Davide et moi. C'était il y 22 ans...
posted by lorenzo at 21:13