Je viens de retrouver sur une clé USB, un enregistrement terriblement émouvant, d'une grâce et d'une splendeur ineffables. Commovente comme on dit en italien, vraiment. La voix de cette grande cantatrice américaine se prête joliment à cette musique dédiée à Venise par Reynaldo Hahn. Penser à ces arias en vénitien que le compositeur composa sur les rives de la lagune, me renvoie à mes années vénitiennes, mes années de jeunesse.
A la Dante Alighieri, en 1980 ou 81, je ne sais plus très bien, j'avais rencontré la petite nièce de Reynamdo Hahn, Annette, jeune et jolie juive rayonnante et très libre avec son amie Anna Neushafer, jeune épouse d'un pasteur luthérien. Leur italien était binen plus académique que le mien, encore truffé de gallicisme et... d'anglicismes. Nos cours dans les bâtiments dont les fenêtres ouvrent sur le rio qui longe la façade principale de l'Arsenal, les longues discussions à la terrasse du café d'en face, nos dîners chez les Gradella, dans leur ravissante maison derrière l'Accademia ou au Centro Tedesco, sur la terrasse du Barbarigo... Je ne sais pas ce qu'elles sont devenues. Nous avons correspondu quelques temps puis les liens se sont distendus et la vie nous a pris dans sa spirale infernale...
Et comme un souvenir ne revient jamais seul, mon amie Violaine m'a envoyé hier ce croquis retrouvé en rangeant son bureau. Réalisé en 84, à Malamocco où elle résidait alors. Nous avons évoqué nos balades à pied le long du Lido pour retourner à Venise, ou aller lire et dessiner dans le vieux cimetière juif du Lido, auquel on accédait facilement à l'époque, avant les barbares qui le saccagèrent. Un jour, en longeant une friche un peu avant l'Excelsior, qui servait plus ou moins de décharge sauvage, nous avions trouvé plusieurs malles-cabines, certainement abandonnées là par le personnel de l'un des grands hôtels du Lido. elles étaient très abîmées, mais avaient encore belle figure, avec leurs cintres et leurs tiroirs. Nous avions projeté d'en ramener une à la maison...