Vilma Bertoni, propriétaire
avec son mari Ezio Tarantol, de la fameuse Tarantola, la librairie du campo San Luca
qui fut, pendant huit décennies, un lieu-phare de la vie intellectuelle
vénitienne. La dame avait 90 ans. elle s'en est allée paisiblement, dans sa maison de San Zaccaria, entourée par ses deux enfants, Maria Rosa et Bruno, qui géra la librairie avec sa mère après la mort du père.
La pétulante signora Bertoni fut pendant de nombreuses années un personnage incontournable du livre de la Cité des Doges. Rentrer dans la Tarantola était un vrai bonheur. Je n'en suis jamais sorti sans un ou deux livres, souvent découvert grâce à la libraire.Nous y allions en bande et c'était toujours un moment formidable. uste en face, de l'aure côté du campo, Le café était tenu par Rosa Salva. le campo était l'un des lieux où nous nous retrouvions le soir, pour la passeggiatta. La Cassa di Risparmio était ma banque. J'ai toujours conservé le livret bleu avec le lion de Saint-Marc en relief. De l'autre côté, habitait l'architecte Michel Regnault de Lamothe. C'est lui qui m'amena pour la première fois à la Tarantola. Il venait récupérer un livre qu'il avait commandé. En l'attendant, je parcourais les rayonnages et découvrit ce jour-là la poésie de Mario Stefani que je devais rencontre chez Graziussi quelques années plus tard. Tout un univers cette libraire, et autour d'elle, ce campo. Après la fermeture de la librairie, la fille de la signora Bertoni ouvrit une boutique d'artisanat de qualité qui ne démarra jamais. Il y eut ensuite une boutique de verrerie faite en Chine, une sorte de bazar, quincaillerie discount qui ne fonctionna pas davantage et baissa rideau au bout de quatre mois... Quelques mois plus tard, en plein mois d'août, la librairie revint, spécialisée désormais dans les ouvrages sur Venise. Là non plus ça n'a pas fonctionné et pour la énième fois, le local a fermé...