On n'a pas tout retrouvé des œuvres d'Antonio Vivaldi. De nombreuses pièces, des oratorios, des opéras, des concerti sont à ce jour perdus mais parfois, souvent dans le plus grand des hasards, une pépite resurgit. Parmi les partitions les plus abouties et les plus émouvantes, il y a ce Nisi Dominus (RV608) dont le Cum Dederit est un moment de paradis, surtout dans cette sublime interprétation pourtant vieille de plus de trente ans enregistrée par l'Academy of Ancient Music dirigé par Christopher Hogkwood, avec comme soliste, l'extraordinaire haut-de-contre James Bowman. Fermez les yeux et écoutez :
Quelle ampleur, quelle beauté. La voix et le style très pur et nuancé de James Bowman ajoute à la profondeur de la musique du prêtre roux. certains nous rabattent les oreilles avec la facilité de ses créations, leur mièvrerie, leur fadeur même. Ceux-là n'ont jamais été à Venise et ne comprennent pas que la musique de Vivaldi est remplie des sensations qui nous prennent quand on se promène dans la cité des doges, le rythme saccadé et très doux de la rame qui porte la barque, le souffle du vent, le chant de l'eau dans les canaux, la réverbération des bruits de la vie courante et au-dessus de tout cela, la grande ferveur mystique qui préside à toute création artistique véritablement vénitienne. Même si l'homme était dispensé de dire la messe, c'était un homme d'église, un religieux. Le Cum Dederit exprime cela et renvoie à leur aigreur ses pourfendeurs.
Et puis quel beau texte que cet extrait du Psaume 127 :
Cum dederit dilectis suis somnum
Ecce haereditas Domini, filii
Merces, fructus ventris.
Il comble ses bien-aimés dans son sommeil
Voici l'héritage du Seigneur, ce sont ses fils
Sa récompense, le fruit des entrailles.
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