Affichage des articles dont le libellé est Gourmandises. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Gourmandises. Afficher tous les articles

22 mai 2024

Offrez-nous un café !

Un des plus jeunes lecteurs de Tramezzinimag (19 ans) mais aussi le plus jeune des Fous de Venise mais déjà fort érudit, m'a conseillé ce site dénommé «Buy Me A Coffee». Laissez-moi expliquer de quoi il s'agit pour ceux qui n'ont avaient entendu parler.

Il s'agit de proposer à nos lecteurs un moyen pour nous soutenir en adressant via un QR code l'équivalent d'un ou plusieurs cafés. L'idée est sympathique et je l'ai essayé auprès de sites que j'aime bien et qui ont adopté la formule.

Mais, à Buy Me A Coffee ils ne se contentent pas de proposer une adaptation contemporaine des cafés suspendus ou des appels aux dons. Ils donnent aux abonnés la possibilité d'avoir une boutique, et autres outils intéressants et bien plus légers que le sempiternel FaceBook de moins en moins utilisé par les jeunes générations.

Nous avons donc adopté Buy Me A Coffee. La page des dons est désormais opérationnelle. Les sommes engrangées, outre les cafés que nous consommerons pour ne pas nous endormir, viendront compléter le résultat des dons que certains fidèles ne manquent pas de nous adresser, nous permettant de créer une cagnotte. Celle-ci sera utilisée pour aider au fonctionnement de notre maison d'édition, modeste projet qui démarre piano piano entre Venise et Bordeaux.

Bien entendu, nous publierons régulièrement des informations concernant l'usage que nous ferons des sommes réunies : publier des ouvrages bilingues ou des traductions françaises de textes déjà publiés en italien, sur Venise et sa civilisation, de poésie, d'histoire, etc. Nous pensons aussi à apporter notre contribution à des initiatives qui nous toucheront dans l'esprit de Tramezzinimag. Ne nous sommes-nous pas baptisé après tout, et ce depuis presque vingt ans, les «Fous de Venise» dont ce site  est l'organe ? 

Phase test donc. N'hésitez-pas à nous faire part de vos ressentis et vos idées. Comme votre fidélité, la régularité et la pertinence de vos commentaires font notre bonheur ! Alors à vos claviers !


Coups de Cœur N°61

Gilles Hertzog
Le dernier Vénitien
Éditions Grasset, 2018.
ISBN 9 782246 690313
25,90€
«La prodigieuse érudition vénitienne de Gilles Hertzog fait revivre sous nos yeux un monde à jamais englouti dans la lagune en évoquant Tiepolo fils.» C'est ainsi que l'éditeur commençait sa présentation de l'ouvrage. Il n'est pas récent mais après l'avoir relu, il m'a semblé important d'en rappeler l'intérêt - et la qualité - à nos lecteurs. C'est par Kate et René, nos amis de l'excellent site Hic Sum Hic Maneo que nous l'avions découvert, en 2019. Giandomenico Tiepolo (1727-1804) a été pour la peinture ce que Goldoni fut pour le théâtre de la Venise des Doges. Homme de son époque, imprégné tardivement de l’esprit des Lumières, il a peint avec une touche naturelle cette société de divertissement, ses fêtes élégantes, ses mélancolies nostalgiques, jusqu'à ce que le rideau tombe sur la Sérénissime et que Bonaparte, à la tête des armées d'Italie, devienne son brutal et ignoble fossoyeur. Pendant trente ans, cet homme coincé aux frontières de deux mondes a été le fidèle collaborateur de son père, le grand Domenico Tiepolo, maître incontesté de la couleur et fournisseur attitré des aristocraties décadents. Longtemps éclipsé par le génie et la renommée de son père, Giandomenico finit par s'en affranchir en s'exilant tardivement dans sa villa de Zianigo, près de Padoue. Il en a orné les murs de ces célèbres fresques dédiées à la vie des polichinelles. C’est en lucide annonciateur de la fin d'une civilisation qu’il a terminé sa vie, solitaire et teintée d'un humour amer, en offrant à la Sérénissime un adieu mémorable à travers une série de dessins stupéfiants où se reflètent les fastes de la Venise disparue, remugles d’une époque où personne n'envisageait la chute de sa splendeur, le pillage de sa fortune et l’écroulement de sa grandeur millénaire.
 
Recette gourmande : Fricassée de légumes en croûte et œuf au four

Pour réaliser ce plat simple et goûteux, il va vous falloir : 1 œuf par personne, 1 belle carotte, 1 oignon, 1 courgette non non pelée, 1 branche d'aillet, 1 ou 2 gousses d'ail, du sel et du poivre, 1 cuillère à café de curcuma, autant de paprika, une poignée d'aromates frais (thym, ciboulette, basilic, 1 belle tomate fraîche, un pot de sauce tomate, une petite boite de pois chiches, du bouillon de poule ou de légumes, du tamari (ou à défaut de la sauce soja), de la pâte sablée pour la croûte (ma recette en suivant).
Un poêlon, deux ramequins allant au four (j'utilise des plats à œuf ou gratins individuels de taille parfaite).
 
Préparation :
-Tailler carotte et courgette en tagliatelles avec un économe, ciseler les herbes, hacher les gousses d'ail et couper finement l'oignon et l'aillet y compris le vert et mettre le tout de côté.
-Faire chauffer 2 cuillères à soupe d'huile d'olive dans un poêlon (j'utilise un ustensile en fonte magnifiquement culotté par les années), quand elle est assez chaude mais sans qu'elle fume, y mettre à suer l'oignon, puis quand il prend un peu de couleur, ajouter rapidement les tagliatelles de légumes, l'aillet, la tomate coupée en morceaux, les pois chiches et enfin les épices. Remuer pour bien mêler les saveurs. Ne pas hésiter à baisser le feu pour éviter que la préparation ne caramélise et n'accroche. Ajouter la sauce tomate (j'utilise soit de la sauce maison soit de la passata di pomodoro (bio et italienne évidemment), du bouillon et couvrir. Remuer. Si l'appareil ne vous paraît pas assez goûteux, rajouter épices ou sel et poivre. Laisser mijoter.
-Étaler la pâte sablée en lui conservant l'épaisseur d'une galette, découper deux disques (un par convive)du diamètre de vos ramequins et les mettre au four après les avoir badigeonnés d'un mélange de lait et de jaune d’œuf pour qu'ils prennent une belle couleur.
-Pendant ce temps, mettre à cuire les œufs dans un peu d'huile. Parfois j'utilise de la graisse de canard quand j'en dispose. Ne pas laisser cuire complètement. Les mettre de côté au chaud.
-Quand les légumes sont à point et les croûtes de pâte sablée bien dorées, dresser les légumes dans les ramequins, les recouvrir des croûtes et disposer sur chaque plat un œuf. Mettre le tout au four deux minutes pour finir la cuisson du jaune qui, sec en surface, sera resté sec à l'intérieur. 
-Sortir du four, décorer d'un peu de sauce tomates et des feuilles de basilic taillées en fines lanières.
Servir aussitôt, accompagné d'une salade verte. J'ajoute une cuillère de la sauce obtenue à ma vinaigrette.

30 avril 2024

Coups de Cœur N°60

Voici le 60ème Coup de Cœur de Tramezzinimag ! La toute première livraison de la rubrique date du 20 décembre...2005. (elle est toujours en ligne, pour la lire cliquer ICI). Presque vingt ans et des dizaines de Coups de Cœurs toujours revendiqués. Certaines bonnes adresses ne sont plus, mais livres, disques et films restent disponibles je crois. Aucun remord, aucun regret, nous ne revenons pas sur les choix que nos lecteurs sont nombreux à avoir apprécié. 

Dans ce numéro, nous reprenons plusieurs critiques présentées en novembre dernier, après avoir revu et complété leur contenu suite à des échanges avec nos lecteurs.

Prochainement (bientôt !) : une page répertoire détaillé de l'ensemble de nos coups de cœur avec les liens pour faciliter la recherche.


C.P.E. Bach, 
Concertos pour violoncelle
Nicolas Altstaedt et l'Ensemble Arcangelo dirigé par Jonathan Cohen
CD Label Hyperion, 2016
16€
Au chapitre des Concertos pour violoncelle de Carl Philipp Emanuel Bach je croyais la messe dite. L’archet aventureux d’Anner Bylsma s’y équilibrait avec la direction solaire de Gustav Leonhardt, un rien trop classique. Puis vint Ophélie Gaillard qui y mettait une fantaisie débridée, merveille qui pourtant ne me détournait pas tout à fait de Bylsma et de son Gofriller. Cette fois, je crois bien que le nouveau venu éloigne la référence qui régnait sur ce triptyque depuis bientôt trente ans. D’abord par la fusion impeccable des discours du violoncelle et de l’orchestre, ensuite par la connivence à la fois fantasque et poétique qui anime Nicolas Altstaedt et Jonathan Cohen. Ils entendent tout de ces musiques qui sont les témoins de l’Empfindsamkeit, de leurs pouvoirs expressifs, de leurs bizarreries mais aussi de leur lyrisme si singulier lors des mouvements lents où la fuite du temps s’abstrait. Ensemble ils ont composés des cadences qui de style, de ton se fondent dans la langue si novatrice de Carl Philipp Emmanuel, sinon pour le Concerto si bémol où celle du compositeur s’impose. Ensemble ils règlent des jeux d’archets savants, où tout parle, faisant de la matière concertante de petits opéras. Quel théâtre, que d’imagination, quelle fougue puis que de rêves. Venant de celui qui avait éloigné les Concertos de Haydn du classicisme où on les endort habituellement, cela n’est pas pour m’étonner. Venez entendre ici à quel point l’avenir envahit ces partitions trop longtemps oubliées par les grands violoncellistes (Discophilia - Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé).
 
Duello d'Archi a Venezia
Veracini,Locatelli, Tartini,Vivaldi 
Chouchane Siranossian, 
Venice Baroque Orchestra dirigé par Andrea Marcon
Alpha Classics, 2023 
19€
Reçu ce flamboyant CD que j'écoute en boucle depuis quelques jours. L'idée, comme nous l'expliquent la virtuose arménienne Chouchane Siranossian et Andrea Marcon, était de lancer « un duel imaginaire à coups d’archets à Venise entre les quatre mousquetaires du violon de la première moitié du XVIIIème siècle : Vivaldi, Veracini, Tartini et Locatelli ». Corelli meurt en 1713, cédant le flambeau à ses héritiers.Venise devient alors le théâtre d’une rivalité sans merci… «Le violon endosse le rôle d’arme idéale pour démontrer sa virtuosité et ses prouesses. Le but ultime étant d’étonner l’auditeur et de démontrer, parfois même en exaltant certains penchants narcissiques, sa propre bravoure. » Chouchane Siranossian, dont la virtuosité a était qualifiée de « diabolique » par The Sunday Times était l’interprète idéale de ces concertos à haut risque, avec la complicité éclairée et renouvelée d’Andrea Marcon et de son pétulant ensemble vénitien. Une bonne idée pour vos étrennes vraiment ! Pour vous en convaincre, écoutez le podcast de France-Musique (01/06/2023) : ICI.
 
Sergio Pascolo
Venezia Secolo Ventuno
Visioni e strategie per 
une rinascimento sostenibile
Anteferma edizioni,
Venezia.2020
ISBN : 978-8832050509
17€

L'ouvrage est sorti il y a trois ans. Il demeure cependant d'actualité et permet aussi de faire connaître aux lecteurs de Tramezzinimag (qui lisent l'italien) la maison d'édition qui l'a publié dont le catalogue est plein de trésors sur lesquels nous reviendrons. L'auteur, architecte de son état, nous livre un constat très clair du vivre à Venise au XXIe siècle. Comme le dit la notice, il aborde le destin de Venise, l'urbanisation globale et le destin de la planète. «Des thèmes apparemment éloignés mais qui se rejoignent. Universellement reconnue comme l'une des plus belles villes du monde, Venise est aujourd'hui menacée par la crue des eaux et la monoculture touristique ». Elle se dépeuple, elle se meurt. Comment accepter sa disparition, voire la planifier ? «Dans le scénario mondial du 21e siècle, Venise pourrait être l'une des villes les plus attrayantes de la planète car, en raison de sa durabilité intrinsèque, elle est un exemple paradigmatique de la ville du futur.» Nous n'avons jamais tenu un autre discours dans ce blog : «Une ville compacte à taille humaine, un port d'idées, un carrefour de connaissances et de savoir-faire, un pont entre l'Orient et l'Occident, où la vie est associée à la beauté, à l'harmonie et à la durabilité.» 
Ce livre propose d'«imaginer et de tracer concrètement une renaissance durable, avec une large réflexion sur l'idée de la ville insérée dans une perspective globale qui concerne l'ensemble de la planète.» Passionnant et revigorant. Venise peut-être sauvée même avec les hordes, la gabelle imposée par la junte municipale et seulement seulement 49.000 habitants là où il y en eut plus de 150.000 pendant des siècles...
 
Charles Simmons
Les locataires de l'été

Traduit de l'américain par Eric Chedaille
Libretto Poche, 2022
153pages.
ISBN 978-2-36914-668-1  
8,30€

Une belle découverte. On m'avait beaucoup parlé de l'américain Charles Simmons, romancier et journaliste récemment disparu (2017). Ce petit roman qui date de 1997 est un pur régal. Texte court (152 pages), à l’écriture vive et légère. L'histoire est assez simple : été 1968, un adolescent de quinze ans, fils unique, est en vacances, comme avec ses parents dans leur maison sur une presque-île de la Côte Atlantique des États-Unis. Passionnés par la navigation et par la mer, le garçon et Peter son père passent beaucoup de temps sur leur bateau, un petit voilier en bois, l'Angela. Mais les événements vont se compliquer avec l'arrivée dans le pavillon voisin de la fantasque Madame Mertz et de sa fille, Zina, âgée de vingt ans, apprentie photographe et, surtout, d'une éblouissante beauté. Michael, foudroyé par cette belle jeune femme, découvre l'amour, ses rêves, sa réalité, ses douleurs.
C'est Michael qui raconte cet été-là, celui de ses quinze ans et de son passage précipité et douloureux vers l'âge adulte. 
Sous l'apparente gaieté de ce roman solaire coulent en filigrane une note mélancolique et une certaine amertume. Charles Simmons aborde dans la plus grande des libertés les grands thèmes qui composent la vie : l'amour, le désir, le mariage, la recherche de soi, le temps qui passe et les illusions qui tombent... Il traite son sujet en y apportant toutes les nuances et la profondeur qu'exigent ses personnages et leurs sentiments. À lire ce roman, on songe inévitablement à Tourgueniev et à son Premier Amour, dont ce livre se veut une réécriture, mais le lecteur pensera aussi aux nouvelles de Francis Scott Fitzgerald et bien entendu à L'Attrape-Cœur de Salinger ou encore à Carson McCullers par la grande liberté de ton. La préface de Jérôme Chantreau, le traducteur met l'eau à la bouche dès la première page. Je m'y retrouve quand il explique que :« Depuis que j'avais lu "Le Bonheur des tristes" de Luc Dietrich et que j'avais appris qu'un grabd roman peut[aussi] tenir en peu de mots, je savais qu'il en existait, je les cherchais partout». Pour lui, le roman de Simmons est « un grand livre de chevet, un chef-d'œuvre de poche. Pourquoi grand ? Parce qu'il dit l'essentiel, et même un peu plus. pourquoi petit ? Parce qu'on pourrait passer devant sans le voir. Une esquisse. Un pastel. Il y a peu de livres aussi épurés [...] Et voici entre mes mains Les Locataires de l'été qui semblaient avoir été écrits avec de l'eau, sur du sable. Un récit scintillant comme le bord de la vague, à la tombée du soir. Une aquarelle qui peint l'été radieux, les premières amours et les errements du coeur. Rien de très original, avouons-le. Mais le coup de génie de Simmons, c'est d'avoir ouvert l'été en deux, et d'avoir regardé à l'intérieur. Qu'à-t-il vu ? Que personne ne prend la jeunesse au sérieux. Que la nonchalance est un crime. Que l'été finit mal.» 
Comment dire mieux ce roman qu'avec les mots de son traducteur ? Sa préface donne donner envie de lire séance tenante ce court roman (152 pages). Simmons nous rappelle combien vivre et aimer sont choses dangereuses et que les jours heureux filent comme les nuages... Les deux derniers paragraphes - et surtout les deux dernières lignes - pourraient s'entendre comme un constat d'échec, une grande désolation. Il n'en est rien, le constat fait par Michael parvenu à l'âge qu'avait son père cet été-là, s'il est lucide, n'en est pas moins l'évidence d'un bonheur. Celui de devenir enfin jeune quand, vieilli, la lucidité nous confirme qu'on met longtemps, longtemps, à à y parvenir. N'est-ce pas cela la vraie joie après laquelle nous courons toute notre vie ; cette « Quête de Joie » si bien décrite par Patrice de la Tour du Pin...

Jean-François Beauchemin
Le Roitelet
Editions Québec Amérique, 2023
144 pages.
ISBN : 
978-2764442555

16€
 
Il arrive parfois que le hasard nous mette entre les mains un livre inattendu qui nous bouleverse et nous remplit d'une vraie joie. C'est le cas de ce court récit qui nous vient du Québec. Dès sa sortie, il a enthousiasmé bien des lecteurs, critiques, auteurs ou simples amateurs de lecture. J'en suis à 100%. Je ne résiste pas à vous raconter l'anecdote, car c'est bien de cela qu'il s'agit dans ma rencontre avec l'ouvrage. Une terrasse au soleil, premiers soleils après des jours de bourrasque et de ciels bas et tristes. Une jeune femme qui lit à la table à côté. Je ne distingue pas bien le titre de son livre. Ce que je vois c'est une couverture verte à l'aspect usagé, fané, un oiseau aux ailes déployées occupe presque tout l'espace. Je pense à un bouquin d'occasion. Soudain, la jeune femme le pose, ouvert contre la table et se lève. se tournant vers moi, elle me demande si je peux veiller sur ses affaires un instant. J'acquiesce évidemment. En tendant le bras pour désigner la table, elle fait tomber le livre. Je me penche pour le ramasser, elle aussi. S'en suit un cafouillage, fou-rire de part et d'autre. Une scène à la Christophe Honoré. Finalement, je me relève le livre entre les mains, la jeune femme aussi.
Elle me remercie en me gratifiant d'un très joli sourire. A son retour, nous évoquons le livre que j'ai rapidement feuilleté. Elle m'en parle avec enthousiasme, me conseille vivement de le lire. Voilà l'histoire. Revenu chez moi, j'ai recherché ce qu'on en disait sur le net. «Magnifique récit poétique, Le roitelet de Jean-François Beauchemin donne envie de vivre, d’aimer et d’admirer la lumière qui tombe le soir, avec ceux que l’on aime» écrit Gabrielle Napoli dans la revue en attendant Nadeau (ICI) .

Un homme vit paisiblement à la campagne avec sa femme Livia, son chien Pablo et le chat Lennon. Pour cet écrivain parvenu à l’aube de la vieillesse, l’essentiel n’est plus tant dans ses actions que dans sa façon d’habiter le monde, et plus précisément dans la nécessité de l’amour. À intervalles réguliers, il reçoit la visite de son frère malheureux, éprouvé par la schizophrénie. Ici se révèlent, avec une indicible pudeur, les moments forts d’une relation fraternelle marquée par la peine, la solitude et l’inquiétude, mais sans cesse raffermie par la tendresse, la sollicitude.

« À ce moment je me suis dit pour la première fois qu’il ressemblait, avec ses cheveux courts aux vifs reflets mordorés, à ce petit oiseau délicat, le roitelet, dont le dessus de la tête est éclaboussé d’une tache jaune. Oui, c’est ça : mon frère devenait peu à peu un roitelet, un oiseau fragile dont l’or et la lumière de l’esprit s’échappaient par le haut de la tête. Je me souvenais aussi que le mot roitelet désignait un roi au pouvoir très faible, voire nul, régnant sur un pays sans prestige, un pays de songes et de chimères, pourrait-on dire.»
 
La lecture du Roitelet appelle au partage. Les mots qui disent «cette poésie de l’instant» (Gabrielle Napoli) : « le sentiment tragique de la déchirante douceur du monde », qui nous enveloppe entièrement, de la fraternité et de la beauté, « seule grammaire qui vaille ».
Réflexion sur l’amour qui nous lie tout autant que sur l’art, sur le temps qui passe et les leçons de la vie :«Je me réjouis en tout cas de m’être débarrassé de tout ce qui dans la jeunesse m’avait encombré : la méconnaissance de l’âme, la pauvreté de la pensée, la brièveté de l’amour, la vitesse ». C'est paraphraser Gabrielle Napoli que d'affirmaer que Le Roitelet est un de ces livres qu’on a envie de partager, un véritable trésor qu'il faut faire connaître. C'est aussi un texte qu'on «garde précieusement au fond de soi, tout en le partageant comme un cadeau unique». Gallimard vient d'éditer le livre dans la collection Folio (N°7304),192 pages, 7,80€

 

Recette gourmande : la Gallina Ubriaca

Traditionnellement, les Coups de Cœur de Tramezzinimag finissent par une recette culinaire vénitienne ou inspirée de la cuisine du Veneto mais pas seulement Celle qui vous est proposée aujourd'hui est liée à une petite anecdote familiale...

J'étais récemment chez une vieille dame, grande amie de la famille et l'une des dernières survivantes de la génération de mes parents chez qui elle avait longtemps servi. Elle m'a raconté une anecdote que j'avais oublié et qui mériterait un plus grand développement. Nous habitions à la campagne où mon père était médecin. La maison était grande et souvent pleine d'amis et de parents qui en appréciaient l'accueil et le confort. On y mangeait bien. Un jour d'été, mon père ramena un groupe d'amis quelques heures avant le déjeuner. Ma mère aurait préféré avoir le temps d'organiser leur visite mais comme à son habitude, elle se contenta de soupirer, sachant pertinemment qu'il était inutile de rappeler combien il est nécessaire de prévenir en cuisine assez tôt pour que tous s'organisent.

Mon père était déjà reparti visiter ses malades, laissant ma mère et la maisonnée déjà bien pleine, s'occuper de tout. Pour nourrir tout ce monde, les deux volailles déjà apprêtées ne suffiraient pas. Il fallait bien en ajouter deux autres. La cuisinière, ma grand-mère, ma mère, mes tantes et notre bonne se rendirent à l'évidence : il allait falloir tuer ces pauvres bêtes. Ce fut ma tante danoise qui suggéra de les faire boire jusqu'à les saouler. Il serait alors plus facile de leur trancher la gorge. Mais pour ce faire, il fallait les attraper, les tenir et les forcer à ingurgiter le cognac - ou l'armagnac, nous sommes en Périgord - et attendre qu'ivres, elles tombent quasiment mortes. J'imagine la tension des femmes de la maison et le petit bonhomme que j'étais alors assistant au spectacle sans comprendre de quoi il ressortait. 

Imaginez la course après les volatiles. La vieille dame ne savait plus s'il s'agissait de pintades ou de poulets. Toujours est-il qu'après maints efforts, cris et fous-rires, les cinq femmes arrivèrent à leur fin. Les bêtes totalement ivres furent égorgées, plumées et farcies et tout le monde se régala. Après ma visite, je suis allé jeter un coup d’œil dans les carnets conservés de cette époque pour tenter de retrouver une trace  de l'évènement. Dans l'un des grands cahiers de recettes de la famille, j'ai retrouvé un feuillet maculé de tâches, certainement du gras, couvert d'une écriture déliée mais hésitante. C'était en italien. Le titre : «Gallina ubriaca». C'est certainement cette recette traditionnelle de la campagne vénitienne qui donna l'idée aux femmes de la maison d'enivrer ces pauvres bêtes, poules ou pintades... 


Il vous faut
: une belle poule ou un gros poulet bien en chair, un litre de vin rouge (un merlot ou cabernet sauvignon de qualité), 1/4 litre de cognac, 150 gr de praiatoli (champignons de couche),
100g de farine ou maïzena, 150 g de pancetta fraîche, 1 gros oignon, 1 gousse d'ail, romarin, persil, un peu de thym frais, 100 g de beurre, 1 cs d'huile d'olive, sel et poivre frais moulu, grains de poivre.

Découper la volaille en six ou huit morceaux, les fariner et les disposer dans une marmite en fonte (ou autre mais à fond épais), les faire dorer à feu vif dans l'huile en remuant souvent pour éviter que la viande attache. Quand les morceaux sont dorés, ajouter le cognac en une fois et le vin, sel, poivre et le persil finement haché.Porter à ébullition pour réduire le jus puis cuire à feu doux pendant environ deux heures.

Pour la sauce : dans une casserole à fond épais, faites fondre le beurre, y ajouter la pancetta taillée en lardons, les champignons égouttés et coupés en julienne avec l'oignon, puis la branche de romarin. Faire cuire à feu doux pendant une quinzaine de minutes. Verser la sauce obtenue sur la volaille et continuer à faire cuire. 

Servir les morceaux très chauds nappés de la sauce, traditionnellement accompagnés de polenta (en purée ou en  losanges préalablement passés au grill). On peut aussi choisir un accompagnement de haricots verts frais, de gnocchis au romarin ou de purée de pommes de terre. Bon appétit.

08 février 2024

Tramezzinimag remonte le temps avec Wayback Machine !

Comme je l'annonçais en fin d'année, Tramezzinimag, s'il n'a pas retrouvé le nombre de lecteurs quotidien et a perdu plus de 80% de ses abonnés depuis ce jour fatidique du 28 juillet 2016 où le site fut avalé par un robot gourmand avec la totalité des archives, notes, vidéos, sons, photos, ou par la volonté inique de certaines personnes que les billets dérangèrent, a résisté. Tramezzinimag II a pris la suite et vaillamment, avec une équipe réduite au minimum, nous avons reconstitué le blog. 

Ce type de medium ne serait apparemment plus à la mode, parce que selon ses détracteurs in gamba (*), c'est devenu un outil trop figé, constitué de textes trop longs et trop détaillés pour les esprits d'aujourd'hui qui préfèrent survoler qu'approfondir et zappent en permanence, tous de plus en plus pressés... 
 
Simple constat, nul jugement. La vitesse, la précipitation sont des notions tellement absurdes quand il s'agit de Venise, de sa civilisation et de la vie qu'on y mène. Alors pourquoi se ranger aux idées reçues et suivre à tout prix les modes. Tramezzinimag veut rester pour ses lecteurs une sorte de revue en ligne, la Première Revue en Ligne des Fous de Venise ! Vos messages et vos soutiens montrent bien que le blog a encore sa place.

En retrouver les pages perdues est donc depuis des mois notre mission. Bien des billets sont encore à repêcher sur la Toile (encore un terme qu'on n'emploie plus 19 ans après la naissance de Tramezzinimag...

Sa résurrection, avec le soutien de lecteurs fidèles, tous devenus de vrais amis, mais aussi grâce à un outil web dont nous ne vanterons jamais assez les mérites, l'extraordinaire Wayback Machine - littéralement « machine à revenir en arrière » -, inventé  un organisme à but non lucratif, Internet Archive (**) qui permet d'accéder aux clichés instantanés de pages web qu'il stocke depuis sa création. Sans cette gigantesque bibliothèque numérique, les 2148 billets publiés entre le 7 mai 2005 et le 16 août 2016 auraient été irrémédiablement perdus. 

Le temps passé à reconstituer les pages anciennes, repostées avec les dates d'origine (même année, même même jour, même heure) pour en faciliter la recherche par les lecteurs, se fait au détriment de la création de nouveaux billets. 

Mais ce n'est que temporaire, nous avons tellement d'idées de sujets à évoquer pour nos lecteurs et la relecture des billets d'il y a huit, douze ou dix-huit ans nous permet de mesurer comment les choses ont évolué ou se sont dégradées pour Venise, les vénitiens et la lagune. 

Le plus souvent - et je l'écris avec une certaine fierté - les positions de Tramezzinimag n'ont que très rarement étaient contredites par les évènements, si ce n'est la position vis-à-vis du M.O.S.E.(***) dont nous pensions qu'il ne serait jamais qu'une grosse arnaque, juteux moyen pour certains, hommes et partis politiques, de se remplir les poches à des fins fort éloignées des intérêts vitaux de la Sérénissime et de ses habitants. L'outil fonctionne, du moins pour l'instant et c'est tant mieux.
 
Avec ma petite équipe de fidèles, je tenais à remercier ceux qui nous soutiennent et nous suivent régulièrement. Qu'ils soient abonnés depuis le tout début ou nouveaux lecteurs arrivés par hasard sur ces pages, nous les invitons à farfouiller dans les sommaire qui s'étoffe chaque jour avec les billets d'avant 2016 peu à peu reconstitués (****).
 
A titre d'exemples, vous trouverez dans pour l'année 2009 des billets toujours d'actualité quinze ans après leur parution. L'ensemble des recettes gourmandes de Tramezzinimag aussi a été reconstitué... Wayback Machine nous a permis de retrouver aussi les nombreux commentaires de nos lecteurs. Cela, je l'espère, incitera les lecteurs actuels à laisser leurs propres avis et demandes, comme le firent les lecteurs à l'époque. Plus de 1.400.000 visiteurs  de de 2005 à 2016 avec la première version, 472.894 depuis août 2016. Merci à nos lecteurs !


Notes :

*
« In gamba», littéralement « en forme» est à la fois l'équivalent italien de doué, intelligent, cool... Il est souvent utilisé pour qualifier quelqu'un « à la mode » et par extension, parfois avec ironie, désigne ceux qui suivent le mouvement, les modes et les courants dominants. 

**
Internet Archive dont l'acronyme IA est avant tout synonyme aujourd'hui d'Intelligence Artificielle dans l'esprit de tous) est un organisme à but non lucratif consacré à l’archivage du Web qui agit aussi comme bibliothèque numérique. Ces archives électroniques sont constituées de clichés instantanés (copie de pages prises à différents moments) de pages web, de logiciels, de films, de livres et d’enregistrements audio. Pour assurer la stabilité et la sécurité des données archivées, un site miroir fonctionnel est conservé à la Bibliotheca Alexandrina en Égypte. L’IA met gratuitement ses collections à la disposition des chercheurs, historiens et universitaires. Située dans le Richmond District, au sud de San Francisco, elle est membre de l'American Library Association et est officiellement reconnue comme bibliothèque par l'État de Californie.(source : Wikipedia, 08/02/2024)


 


25 décembre 2023

avec Giorgione, Tramezzinimag vous souhaite un Joyeux Noël !

 

 TraMeZziNiMag

est heureux de vous souhaiter 

 un 

Très Joyeux Noël !

Bonnes Fêtes de Noël à nos fidèles lecteurs et amis, aux auteurs, photographes, illustrateurs, journalistes, tous les Fous de Venise du monde entier qui nous soutiennent depuis la création du blog, en 2005 !  



20 août 2023

Où il est question du passé bien rangé dans de belles boîtes et de la lune bleue joliment jaune

Un titre inhabituellement long pour ce billet inspiré par les semaines passées et cet été 2023 qui fut à la fois somptueux et misérable. Il n'est pas loin de sa fin bien que demeure encore dans l'air l'espérance d'autres belles journées à venir avant l'automne. Demain, ce sera la (deuxième) pleine lune d'août, une de ces splendides lunes bleues qui font rêver les enfants poètes. 

Déjà depuis deux jours elle est là, jaune comme du sable avec son visage immortalisé par Méliès (*), sans la fusée dans l’œil mais jaune comme le réalisateur l'avait imaginée. Avec elle un changement de température mais aussi un air plus fluide, plus léger et presque frais. Un ciel bas aussi prémices de l'automne qui n'est plus très loin ; comme un avertissement. 

Surpris, les gens délaissent les terrasses et les rues sont presque vides. Il n'y a pas que le climat bien sûr, l'ambiance est morose depuis plusieurs mois et le retour des vacances s'avère encore plus douloureux que d'habitude. Les prix qui flambent (pourtant la valeur des matières premières diminue), la crainte de ceux sur qui on continue de faire pression dans les medias et qui appréhendent le retour de la pandémie. Ils me donnent envie de raconter une fois encore ce que furent les vraies pandémies de notre histoire, la fulgurance de leur extension, la mort se propageant partout à une échelle qui rend ridicule les chiffres des victimes du Covid.. 

Mais ne repartons pas dans les polémiques même si la colère est grande devant la gigantesque esbrouffe des nos dirigeants et ce presque partout dans le monde... Bref bien des raisons de se sentir tendu sur cette planète... Pourtant le beau temps revient toujours après la pluie et jamais les entreprises diaboliques - que l'on croit au démon ou pas - ne triomphent jamais. 

Rester positif, résister à la morosité, sourire à la vie... C'est certes plus facile dans nos régions méridionales où le soleil se fait bien plus rieur qu'ailleurs, où les cœurs sont rompus aux petites joies, aux bonheurs du quotidien. N'est-ce pas tout ce dont l'être humain a besoin ? 
 
Ne plus craindre, croire en Dieu, en l'autre, aux lendemains meilleurs, à la paix, à la solidarité, à l'amour, à la main tendue... Il y a du chemin à faire pour que tous nous comprenions la nécessité de nous unir, de nous entraider, de nous accepter. Les religions semblent ne plus attirer beaucoup de monde, sauf les extrêmes dont la violence, la hargne sont bien éloignées des valeurs d'amour, de paix et de tolérance pour n'être que des codes moraux rigides et hypocrites, des organisations au service des pouvoirs les plus corrompus et les plus indignes de lever un seul regard vers le Créateur. 
 
Certes, il ne faut pas généraliser, bien des communautés, des Églises, des femmes et des hommes aux vies consacrées sont des ilots de paix et d'amour, d'écoute et de patience. Ils montrent la route et ce n'est pas celle que les pouvoirs tracent pour les peuples. Ils ne veulent que des petits soldats, des esclaves soumis et pour être de notre temps, des consommateurs dociles. Ce n'est pas l'esprit de Tramezzinimag ni de ses lecteurs.

Les circonstances ayant obligé votre serviteur à passer bien plus de temps que de coutume en France (**), à la maison, j'en ai profité pour faire du rangement, trier, classer, jeter. Rester en ville, calfeutré pendant les heures les plus chaudes comme on le faisait autrefois à Palerme dans les palais de l'aristocratie où une salle sans fenêtre, souvent aux murs très épais, au sol de marbre permettait d'échapper au vent torride venu d'Afrique et aux températures semblable à celles que nous avons connu, souvent une fontaine d'eau claire rafraîchissait les lieux. Nos temps disposent de l'air conditionné, qu'on nous interdira bientôt d'utiliser car peu écologique pour les smart cities, ce projet que d'aucuns disent fascisant, concocté par des ayatollahs du marketing et relayés par dls écologistes ultras, qui nous interdira de trop se doucher, de trop manger de viande ou d'arracher les herbes folles qui enlaidissent les trottoirs. 

J'ai rangé donc. Et comme toujours j'ai redécouvert mille vestiges, humbles souvenirs de jolis moments de vie comme nous en avons tous. La première boite ouverte contenait des pochettes de photos datant de l'époque pas si lointaine où nos souvenirs restaient visibles et palpables, fixés durablement sur du papier, dans des cadres sur les meubles ou aux murs

Longtemps j'ai fait le choix de faire tirer mes photographies. Après l'argentique (Ah combien je regrette mon petit laboratoire avec son agrandisseur Crocus, l'odeur si particulière du révélateur, les clichés mis à sécher sur un fil avec des pinces à linge, l'ampoule rouge...), il y a eu les tirages en machine à la FNAC ou chez les photographes qui tentèrent de s'adapter pour subsister. Parmi les photographies retrouvées, ces petits fragments de vie vénitienne, comme les témoins d'un temps révolu. 
 
J'y reconnais l'entrée de la Biennale à l'Arsenal, impossible de bien lire la date du journal mais au livre que je lisais il doit s'agir de l'été 2015, l'année du reportage pour la RTS avec mon ami et complice Antoine Lalanne-Desmet, de l'appartement de Santa Maria Formosa, de la disparition du premier Tramezzinimag pour une raison encore jamais expliquée... Mais je suis en train de lasser le lecteur par toutes ces digressions qui se bousculent au fil de ma plume (cf. les billets de cette époque). 

Cet été-là, le hasard m'avait fait retrouver un ami de jeunesse. Je prenais un verre à la Misericordia. Il était dans le même bar avec une autre de mes amies d'avant, «du temps où je vivais à Venise». Joie des retrouvailles. Tellement de choses à nous dire. Sont arrivés des jeunes, parmi eux il y avait son fils. Même génération que mes enfants. Présentation, échanges de propos avec une bienveillance réciproque. Quelques jours plus tard, pressé de me rendre à un rendez-vous du côté de Sant'Elena, je le recroisais. Le ragazzo avait déposé sa petite amie à la bibliothèque et avait amarré sa barque sous le pont qui mène à la Querini Stampalia. Comprenant que j'étais en retard, il se proposa de m'amener là où je devais aller.
 
Cette balade improvisée jusqu'à Sant'Elena fut une sorte de flashback comme dans un film. Je me suis revu avec mes amis d'alors parcourant - à la rame, il y avait encore peu de barques à moteurs encore chez les jeunes - les rii, traversant le canalazzo, bavardant et riant.

Mes lecteurs les plus fidèles sauront pour l'avoir lu souvent lu dans mes billets que mon coeur depuis toujours se partage entre la France, l'Italie - particulièrement Venise bien évidemment -  et la Grande-Bretagne. 

L'âge venant, la nostalgie se fait bien plus assidue qu'autrefois, quand la vie active, les enfants, la nécessité d'aller à l'essentiel occupaient suffi-samment ma vie pour que remontent à la surface les souvenirs d'autrefois, petits et grands moments de l'enfance et de la jeunesse. Cette période unique où nous voulons être plus grands, plus forts, plus libres tout en nous félicitant d'être aimés, protégés, portés. Paradoxe de l'homme qui se satisfait rarement du présent, pressé d'entrer dans un avenir rêvé, promesse d'indépendance et de liberté. 



 

 

 

 

__________________

NOTES

(*) - Le voyage dans la lune, Georges Méliès, 1902.

(**) - En expliquer le pourquoi serait digne d'un mauvais roman de non-aventure avec des non-héros et des nuages toxiques. Ne perdons pas de temps avec cela. Une page tournée.

16 juin 2022

Initialement prévue pour juin 2020, la France fêtée par Proloco Lido est enfin une réalité !

Il aura fallu beaucoup de patience et de détermination à tous les organisateurs pour mener à bien cette manifestation longuement concoctée dès 2019 et qui aurait dû se dérouler du printemps à l'automne 2020 si la crise sanitaire n'était pas venue tout bouleverser. Deux ans plus tard, le projet voit le jour et c'est, ce samedi, le moment le plus attendu : la dégustation de vins et de fromages français dans un des plus jolis hôtels du Lido, la Villa Mabapa où règne le fringant Antonio Vianello, dynamique directeur de l'établissement, à la tête d'un personnel sympathique et attentif à rendre aux visiteurs leur séjour le plus agréable possible et à l'avocat Luca Serafini, membres très actifs du mouvement Proloco Lido di Venezia-Pellestrina

Samedi, dès 20 heures une soixantaine de chanceux - ceux qui ont pris soin de prendre assez tôt leur réservation et quelques invités pourront goûter des vins bordelais issus de l'agriculture biologique et des fromages artisanaux amenés par les producteurs qui les feront déguster. Un groupe de musiciens accompagnera la soirée qui se déroulera dans les jardins de la Villa Mabapa, cet hôtel de belle renommée pour son accueil son style et la qualité de sa table. A ce propos, les hôtes ne se contenteront pas de vins et de fromages, mais ils se régaleront de plats traditionnels des provinces de France réinterprétés par le cusuinier et son équipe.

Pour ceux qui sont à Venise ce jour-là, venez ! Il reste encore quelques places.


05 mars 2022

Coups de Cœur N°58

Le printemps n'est plus très loin. Déjà les grues sont revenues. Ne serait l'actualité, toujours lourde et préoccupante, les odeurs de poudre et la peur de beaucoup qui prend une autre dimension. Après la crise sanitaire, la crise ukrainienne. Alors tout est bon pour rasséréner l'atmosphère, les esprits et les cœurs. Un bon moyen pour cela, les livres, la musique et des gourmandises à partager. Tramezzinimag vous livre ses derniers Coups de Cœur, 58e numéro.

Casino Venier, Venise
Ouvrage collectif
Editions serge Safran
avec un Cahier illustré en couleur
2021; 192  pages
ISBN : 979-10-97594-57-2 
22, 90 €
Notre consul, Marie-Christine Jamet, qui enseigne la linguistique à l’université Ca’ Foscari est membre depuis longtemps de l'Alliance Françaiselle dont elle a été la directrice de 2010 à 2018 a eu l'idée géniale de ce livre qu'elle a ardemment défendu jusqu'à ce qu'enfin il voit le jour et c'est un bonheur que de le pouvoir enfin lire et offrir. Le Casino Venier est un lieu unique que la France a permis de sauver en finançant sa restauration. Je me souviens de l'inquiétude d'un assesseur à la culture, était-ce Domenico Crivellari, je ne sais plus vraiment, qui avait parlé à l'époque d'une transformation des locaux en bureau pour le service des eaux ou de l'électricité, à l'étroit dans un immeuble de l'autre côté du rio.  « Dans le sillage de Casanova, les écrivains contemporains Claire Arnot, Philippe Claudel, Lucien d’Azay, Paul Fournel, Stéphane Héaume, Dominique Muller, Dominique Pagnier, Dominique Paravel, Marc Pautrel, Alain Sagault, Gérald Tenenbaum, Michèle Teysseyre et Gabriella Zimmermann consacrent au Casino Venier de Venise un récit inédit lié à ses mystères et beautés» dit le texte de présentation de l'ouvrage. Un petit livre agréable, écrit par des plumes passionnées de Venise que Tramezzinimag recommande à ses lecteurs, ceux qui connaissent bien les lieux et ceux qui n'ont pas encore eu la chance de le visiter. Au Casino Venier, en dépit de l'état, du mobilier moderne (c'est aussi un bureau et une école de langues), on  respire l'air du XVIIIe siècle, surtout le soir, au temps du carnaval quand par les vitres des fenêtres anciennes on voit passer furtivement de jolis masques du temps de Goldoni quand la sérénissime attirait le monde entier pour ses fêtes et ses réjouissances. L'ouvrage a reçu le soutien de l’Alliance française et de la Fondation Bru-Zane. Les auteurs ont tous cédé leurs droits à l'Alliance Française qui a toujours besoin de notre soutien. Vous pouvez le commander en ligne mais aussi dans n'importe quelle librairie.

Paola Mastocola
Una Barca nel bosco 
Guanti editore, 2004 
12 €
Un roman épatant, malheureusement non (encore) traduit en français. Gaspare Torrente, fils de pêcheur et aspirant latiniste,Dès les premières lilgnes, le lecteur est plongé in media res  dans la vie d'un adolescent un peu différent.  Venu d'une petite île du sud de la péninsule, Gaspare Torrente fils de pêcheur, nageur et amateur de plongée sous-marine, débarque à Turin sur les conseils de son mentor,  son  professeur de français, une certaine Madame Pilou, pour rentrer au lycée. Le père reste dans l'île, et Gabriele s'installe avec sa mère chez la  zia Elsa. Un adolescent par tout à fait comme les  autres, qui à trize ans aime traduire Horace et lit Verlaine dans le texte. Au fil des pages, Gaspare évoque ses pérégrinations, ses attentes, ses déboires et son désarroi. La vie qu'il mène et qu'il décrit avec beaucoup d'humour (on rit beaucoup dans le livre et parfois aussi au détour d'une page, l'émotion est très forte) montre combien il se sent décalé, au mauvais endroit au mauvais moment, comme une barque dans la forêt...
Paola Mastrocola est née en 1956 à Turin où elle a fait des études de lettres. Après avoir enseigné pendant quelques années à l’Université d’Uppsala en Suède, elle est professeur dans un lycée de Turin. Elle écrit des essais et des romans pour la jeunesse, puis publie son premier roman en 2000. C’est le succès d' »Una barca nel bosco » (Prix Campiello 2004) qui lui permet de quitter l’enseignement pour se consacrer entièrement à l’écriture pour le plus grand bonheur de ses lecteurs.
 
Robert de Laroche
La Vestale de Venise. Une enquête de Flavio Foscarini
Gallimard
Coll. Folio Policier N°952, 
Parution : février 2022
 
Lucile Boulanger
Solo Bach-Abel
Label Alpha Classics
sorti en janvier 2022
2 CD. 90 mn.
22 €
Lucile Boulanger signe ici son premier récital solo. La gambiste française dont tout le monde loue la justesse et l’émotion du jeu (Le BBC Music Magazine l’a qualifiée de « Jacqueline du Pré de la viole de gambe ») met en parallèle Johan Sebastian Bach et Carl Friedrich Abel, grand maître de la viole et très proche de la famille Bach. Si Johan-Sebastian n’a jamais écrit pour la viole de gambe seule, on sait qu’il transcrivait beaucoup de ses œuvres pour plusieurs instruments. Lucile Boulanger a choisi par exemple de transcrire trois danses de la Sixième Suite,  « car elle sonne particulièrement bien à la viole puisqu’elle est écrite pour violoncelle à cinq cordes (un pas vers les six ou sept cordes de la viole ?), » explique-t-elle. « Elle est en ré, tonalité de la viole par excellence, et son style déjà un peu galant n’est pas sans rappeler celui d’Abel . (…)  Cet album me donne l’occasion de faire entendre la viole comme instrument à la fois mélodique - avec le grain de l’archet, la fragilité du son - mais aussi polyphonique. » Un très bel enregistrement, un son parfait. A écouter en lisant le livre de la Mastrocola !
   
Theotime Langlois de Swarte & Les Ombres
 
Vivaldi, Leclair, Locatelli, Violin Concertos  
Label Harmonia Mundi 
Février 2022    
HMM902649
16,99 €  
La carrière fulgurante de Théotime Langlois de Swarte n'aura pas échappé aux lecteurs de ce blog. Issu du Conservatoire National Supérieur de Paris (dans la classe de Michaël Hentz), il fonde avec le claveciniste Justin Taylor l’ensemble Le Consort (premier prix et Prix du public 2017 du Concours international du Val de Loire). L’ensemble collabore avec des artistes tels que Eva Zaïcik, Véronique Gens ou encore le violoncelliste Victor Julien-Laferrière. Les enregistrements de l’ensemble sont couronnés en 2019 par un Choc Classica (Venez Chère Ombre) et un Diapason d’Or de l’année 2019 (Opus 1). Violoniste passionné et éclectique, dont le répertoire s’étend du XVIIe siècle à la création contemporaine, il est nommé aux Victoires de la musique classique 2020 dans la catégorie Révélation soliste instrumental où il représente pour la première fois le violon baroque. Depuis, il se produit dans le monde entier. Excusez du peu ! 
Le jeune homme continue avec ce disque, son exploration du répertoire violonistique du début du XVIIIe siècle, mettant en lumière les liens qui unissent trois compositeurs-phare de l'épque : Vivaldi, père du concerto pour violon, et ses de ses plus brillants cadets, Locatelli et Leclair. Un disque qui, par-delà les jeux d'échos et de filiations, révèle l'extraordinaire versatilité d'un instrument aussi virtuose que poète.Théotime, lauréat de la Jumpstart Foundation et de la Fondation Banque Populaire,  joue sur un violon de 1665, du luthier autrichien Jakobus Stainer. Il a aussi joué et enregistré après Augustin Dumay et Pierre Amoyal sur le fameux «Davidoff» de Stradivarius du Musée de la Musique.
 
Kowen Ko (柯智棠)
Songs of the Bards (吟遊)
Label 何樂音樂 PQPMusic
CD 2018 
Ce jeune taïwanais qui s'est fait connaître en 2018 en Europe avec une chanson mélancolique «The Joy of Sorrow» est une personnalité en vogue de la scène musicale de Taipeï et ce depuis 2016. C'est un étudiant de Hong Kong qui me l'a fait connaître et je dois dire qu'à la première écoute, je croyais avoir à faire à un de ces jeunes chanteurs pop interchangeables qui ont une belle voix, un physique de jeune premier parfait pour rendre hystérique filles et garçons adolescents. Mais en réécoutant ses chansons, je suis vite revenu sur mon premier jugement, un peu trop à l'emporte-pièce. Le garçon a réellement du talent, les paroles de ses chansons ont du sens, leur poésie élaborée, l'interprétation sensible et comme souvent chez les artistes asiatiques très travaillée sans jamais perdre la sincérité et l'originalité de l’œuvre présentée. Primé en Asie dans différentes manifestations, on l'entend parfois sur les ondes européennes et c'est bien. Une mélodie et un style plus britannique qu'américain ou australien. De la pop cultivée, voilà comment je définis sa musique. Je vous invite à écouter Kowen dans «It was my way», «You are» (une de mes préférées) et bien sûr, «The Joy of Sorrow» qui figure dans un autre album. Une sorte de mélancolie ensoleillée qui accompagne bien ces premiers beaux jours et peut apaiser les coeurs meurtris par les tensions du monde d'aujourd'hui. Au point que je viens de proposer certaines de ses chansons pour un documentaire en préparation dans lequel tramezzinimag est impliqué. Ecoutez, et vous me direz si mon plaisir est partagé (ICI). 
 
C'est bientôt le printemps et déjà le temps se fait plus doux. Pourtant, en plein milieu de l'Europe, il y a le bruit des canons et l'odeur de la poudre. Devant le sillage de ce coup de force épouvantable perpétré par une Russie - pays ami mais qu'on ne reconnait plus - contre un état libre et souverain, il est difficile de rester serein. 
Pourtant il nous faut garder l'espérance. Le mal et la violence ne triomphent jamais et le bien l'emporte toujours. C'est pourquoi, nous avons souhaité ajouter sur la liste des Coups de Cœur de Tramezzinimag, la formidable  détermination des ukrainiens, unis dans la résistance contre l'envahisseur russe, la prise de position des artistes et des écrivains russes contre cette guerre fratricide, la solidarité de tous les peuples d'Europe et d'ailleurs, toutes les aides spontanées, les mains tendues pour accueillir les réfugiés !
хай Бог береже Україну та українців ! (Dieu protège l'Ukraine et les ukrainiens !)
 
Rien de tel pour gonfler nos cœurs  qu'un bon gâteau. Voici la recette de la brioche vénitienne, dite la Veneziana alla crema
 
Ingrédients :
•    Pour la pâte :
80ml de lait / 5g de levure de bière fraîche/280g de farine fine /45g sucre semoule / 2g de sel / 1 œuf moyen / 1cc d’extrait de vanille ou ½ gousse de vanille grattée /40g de beurre ramolli taillé en cubes
•    Pour la crème pâtissière (à peu près 600 ml) :
500ml de lait entier / 70g de sucre semoule / ½ gousse de vanille / 3 jaunes d’œuf / 40g de farine fine
•    Pour la décoration :
Lait entier et perles ou vermicelles de sucre.

Préparation :
Dissoudre la levure dans un bol avec le lait tiède et mettre de côté. Dans un autre bol, mettre la farine, le sucre, le sel et le levain obtenu. Mélanger le tout à la main ou au robot avec le bras épais, puis ajouter les œufs et la vanille. Le tout environ 10 mn puis ajouter le beurre ramolli par petits morceaux.
Continuer à remuer jusqu’à ce que l’appareil forme une pâte compacte.
Laisser lever qui doit doubler de volume.

Pendant ce temps, préparer la crème pâtissière : dans une casserole faire chauffer le lait ( à peu près 80° presque jusqu’à ébullition) avec 35 g de sucre et la vanille.

A part, dasn une autre casserole,, mettre les jaunes et les mélanger au fouet sans les faire monter ouyis ajouter la farine et mélanger le tout.

Quand le lait est chaud, le sortir du feu et le verser peu à peu sur les œufs en mélangeant au fouyet pour bien mélanger la crème. Mettre la casserole sur à feu moyen et continuer de remuer la crème pour éviter la formation de grumeaux.

Remuer sans cesse pendant cinq minutes jusqu’à ce que la crème soit cuite et onctueuse. Verser-là dans une terrine de verre ou d’acier pour la laisser refroidir, la couvrir avec un film alimentaire directement sur la surface de la crème pour éviter que ne se forme la fameuse peau qui gâche tout. Mes enfants détestaient quand il y avait de la peau et cette idée du film alimentaire sur la crème est une invention géniale de leur grand-mère !

Sur un plan de travail légèrement fariné, mettre la pâte gonflée et la diviser en dix parts égales. Façonnez la pâte en boules et disposez-les bien écartées sur deux plaques recouvertes de papier cuisson beurré et fariné légèrement. Recouvrez le tout d'un film alimentaire et laissez lever une heure.

Allumer le four à 180°.

Badigeonnez les brioches bien gonflées et faire une entaille en croix sur le dessus, puis versez la crème dans la découpe obtenue et complétez avec les grains de sucre juste avant d’enfourner. Faites cuire les brioches pendant environ 20 minutes, Lorsque, en tapant sur le fond, cela sonne creux, les veneziane sont cuites. Sortir du four et laisser refroidir complètement avant de servir.