Quand on vous dit qu'il est vraiment difficile pour les vénitiens de trouver à se loger à Venise...Tout le monde s'arrange comme il peut. Même un trou minuscule est devenu précieux. Sur la photo, communiquée par il sior Stefano du site www.Vanessia.com, un mini-appartement facilement transportable et déménageable... Cave canem.
posted by lorenzo at 23:38
Je vous parlais hier des marchés en plein air de Venise. celui du Rialto, le plus important, le "ventre" de la ville, et des autres "marchés de proximité",
pour emprunter le langage politico-administratfif. Rien ne peut les
remplacer en dépit des normes européennes qui imposent de plus en plus
de critères fort coûteux et souvent peu adaptés à la réalité quotidienne
et locale, telles les vitrines réfrigérées, les marchandises sous
protection plastifiée, les emballages stériles. On en discute autant à Venise qu'à Bordeaux, à Langon ou à Notting hill...
A Bordeaux justement un grand marché traditionnel a lieu depuis la nuit des temps sur la place Saint Michel, le samedi matin. Situé à deux pas des halles, "les Capucins",
il s'étend sur toute l'esplanade qui entoure la très belle église Saint
Michel et son campanile gothique en bien mauvais état mais très prisé
des touristes. Chaque samedi donc de nombreux stands proposent à une
clientèle très diverse fruits et légumes, volailles vivantes, oeufs
frais, viandes et charcuterie, miels et confitures, mais aussi du vin,
des fleurs, du pain et des pâtisseries. Bref tout ce qu'on s'attend à
trouver sur un marché. Comme à la campagne. Car nombreux encore sont les
maraîchers qui viennent vendre leur propre production : choux, poires
et pommes, poireaux et oignons, herbes frâches, salades et fleurs du
jardin. Le muscat ne vient ni d'Espagne ni des rives orientales de la Méditerranée, il arrive souvent de Macau ou de Parempuyre. Bien sûr beaucoup de stands s'approvisionnent au Marché de Brienne, le centre d'approvisionnement en gros et leur marchandise arrive d'Israël ou du Brésil.
Mais il y a encore et pour combien de temps de vrais cultivateurs qui
arrivent dès 5 heures du matin et déballent leur marchandise souvent
pleine de terre et de paille. La marchande de volaille termine de peler
les lapins, on pèse les dindons et les poules avec des balances à la
romaine. Un
vieux monsieur édenté vend uniquement des oignons, des noix, de la
menthe et du persil. Tiens, cette semaine il a des carottes. Elles sont
énormes. Pas une n'a la même taille. Elles sentent bon. Non loin de là,
de l'autre côté de la Flèche (nom donné ici au campanile
qui fut longtemps le clocher le plus haut de tout le sud de la Loire et
que Louis XIV rabaissa comme il voulait rabaisser l'arrogance des
bordelais), ce sont les "textiles" : camelots du roi et
marchands de tissu, de bimbeloterie, de vêtements, d'articles de
vaisselle, mercerie... On y trouve de tout.
L'ambiance
est bon enfant. Des musiciens roumains rivalisent de talent dans
l'espoir d'une pièce. Quelques clochards sans âge dorment sur des
caisses vides en attendant de pouvoir ramasser ce qui sera tombé par
terre et restera comestible. On se réchauffe en buvant un café chaud ou
en mangeant des frites. La marchande de merveilles montre ses doigts
brûlés par la friture et vous offre toujours quatre ou cinq pièce de
plus que la douzaine achetée.
Quand
j'étais adolescent, on ne parlait sur ce marché que portugais ou
espagnol. Aujourd'hui, la plupart des chalands sont arabes et les cafés
autour de la place servent du thé à la menthe. Je me souviens de femmes
très brunes, en jupons très colorés qui portaient les paniers sur leur
tête, des stands avec des chevreaux vivants, des chatons et des chiots.
Il y avait aussi un fromager qui nous faisait goûter chaque samedi un
cantal onctueux comme je n'en ai jamais plus retrouvé... La rumeur dit
que la Municipalité veut chasser les marchands parce qu'à cinq cent
mètres les halles ont été confiées à une société privée qui doit
rentabiliser son espace. Ainsi, deux marchés se confrontent et se
tournent le dos au lieu de se développer de concert. Déjà
les emplacements qui se libèrent suite à un décès ou un départ à la
retraite ne sont pas reproposés en dépit des demandes. La ville il est
vrai a ouvert ces dernières années plusieurs nouveaux marches de plein
air : le jeudi, il y a le marché biologique né sur la jolie petite place
Saint Pierre et qui s'y trouvait trop à l'étroit. Il a rejoint
l'emplacement d'un autre marché devenu célèbre ici, le marché du Colbert. Situé en face du croiseur "le Colbert" (désarmé et devenu un musée flottant qui fait couler beaucoup d'encre à défaut d'être coulé par ses détracteurs...).
C'est un marché du dimanche où se retrouve tout le monde : étudiants et
bourgeois, intellectuels et nouveaux-riches, snobs et artistes. On peut
y déjeuner d'huitres et de viandes rôties (la daube de taureau au
moment des corridas est un monument), on vient y boire le verre du
dimanche et savourer d'excellents cannelés...
Les habitants de la périphérie ont aussi leurs marchés et puis il reste
quelques vestiges des marchés couverts de quartier : aux Chartrons, derrière le Palais Gallien, celui du cours Victor Hugo, non loin de Saint Paul...
Rien ne remplacera l'atmosphère incomparable de ces lieux de vie où
tout le monde se retrouve, tous réunis par la joie de bien manger, par
le goût des bonnes choses, un appétit d'authenticité et d'humanité...
Allez ressentir tout cela dans un hypermarché Carrefour ou Auchan...
posted by lorenzo at 14:07