C'est
la question que se pose un de mes amis vénitiens, membre du groupe
40xVenezia et que j'ai trouvé important de relayer sur Tramezzinimag.
D'une part pour ceux qui pourraient avoir des idées constructives et
intéressantes, mais aussi pour rappeler à tous les Fous de Venise que
nous sommes, que
notre amour pour elle suppose aussi des devoirs. Venise a beau être un
lieu – et un concept - unique au monde, c’est aussi une ville comme les
autres avec des problèmes et des besoins semblables à ceux de toutes les
villes du monde.
.
A
ceci près que le tourisme, loin d'aider la population à s'épanouir et à
bien vivre, l'étouffe et l'encercle comme une dangereuse maladie. Cette pollution devient une lèpre contre laquelle il faut lutter.
Certes, ce ne sont pas les touristes en eux-mêmes qui portent la
responsabilité de cette asphyxie, mais les pouvoirs publics et
l’ensemble des protagonistes.
de ce tourisme de masse. Depuis quelques années, des associations très
déterminées tentent de prendre en main la destinée des citadins
vénitiens. Un de leurs membres, Matteo Savini pose la question clairement : "Quale futuro per Venezia ?" Et pour tenter d'y répondre efficacement, il propose de lancer un concours d'idées. Modestement, TrameziniMag propose à ses lecteurs de réfléchir aussi à la problématique
- je n'aime pas trop de mot - que soulève cette question. Les réponses
reçues (vous pouvez utiliser les commentaires mais un courriel serait
préférable) feraient l'objet d'une analyse publiée dans un prochain
billet et adressée au mouvement 40xVenezia.
."Quel avenir pour Venise ?" Se demande Matteo. La question est souvent posée dans les forums, sur les blogs, dans les journaux. Mais pourquoi chercher avec autant de ténacité à donner un avenir à Venise ? Mon ami s’est posé la question et y a souvent réfléchi. Sa réponse est limpide : "avant tout par amour. Simplement. Quelle pourrait être l’autre raison qui nous pousse à vouloir que survive cette hérésie de la nature, cette offense à la modernité, avec son rythme totalement anachronique et son silence dérangeant qui nous met face à nous-même à chaque coin de rue, qui ravive sans cesse en nous ces questions éternelles comme le pourquoi de notre existence, notre raison d’être ? Oui, par amour. Cet amour qui se lit entre les lignes de la nostalgie, chez ceux qui veulent retrouver des images familières : celle des chats qui dorment sur les margelles des puits ou patrouillent dans les ruelles, des vieux lampadaires de bronze, des vieilles dames en bigoudis qui prennent l’air du soir sur les bancs des campi, cet amour de qui cherchent l’appui des techniques les plus modernes, de ceux qui aiment à imaginer un avenir de modernité pour un lieu unique qui n’a rien de moderne, parangon de l’altérité face au reste du monde. Cet amour qui pousse à partager notre appartenance à un prodige, nous qui sommes faits comme la cité elle-même, de sel et de marbre et des fréquents brouillards, nous qui cultivons au fond de nos cœurs le bruit d’une rame qui sort de l’eau d’un sombre canal, dans l’aube de la lagune… Puissions-nous faire éprouver à nos enfants et aux enfants de leurs enfants, l’émerveillement chaque jour renouvelé que nous éprouvons quand nous sortons de chez nous, leur faire ressentir cette émotion profonde de savoir que Venise est en nous, un état d’âme avant même que d’être une ville."
Matteo appelle ainsi ceux qui ont le désir d’un partage émotionnel - en apparence inutile pour les esprits efficaces et distraits, mais fondamentalement utile si on veut pouvoir inventer à la ville un avenir durable, un futur soutenable pour parler le jargon à la mode - à une réflexion profonde, philosophique plus que scientifique. Même si cela peut paraître inutile. Mais après tout, "ne doit-on jamais faire que des choses utiles ?"
..
Venise n’est-elle pas, intrinsèquement, la seule véritable expression de la Poétique de la ville pour reprendre le titre de Pierre Sansot (paru chez Payot) ? N’est-elle pas la seule authentique construction humaine, née de contingences vitales, inventée dans la violence extrême, défi à la nature, ayant su perdurer à travers les siècles et les civilisations, et par-là même l’unique et la plus aboutie des créations humaines encore debout, temple de l’esprit et expression absolue de la nature non pas asservie par l’homme mais associée à ses besoins ? Les solutions pour l’avenir de Venise ne seront jamais celles qu’on envisage pour l’avenir des autres métropoles.
En revanche, les solutions que Venise inventera seront autant d’expériences qui serviront à la sauvegarde et au développement des villes de demain. Il en fut ainsi dès sa création. Ce sera encore le cas demain si les vénitiens parviennent à résister à l’emprise des grands prédateurs financiers et industriels, si la communauté des vénitiens, d’origine et d’adoption, reste soudée dans son amour pour cette idée unique, cette cité idéale. Si tous refusent d’envisager les problèmes techniques selon les critères imposés par la modernité qu'on essaie de nous vendre avec toutes les arrières-pensées qu'elle cache. Venise sera alors le modèle de l'urbis de demain et nous l’aurons sauvée, lui chantant comme un hymne triomphant le "Rien n'a pu t'ébranler" de Cicéron à Catalina !
."Quel avenir pour Venise ?" Se demande Matteo. La question est souvent posée dans les forums, sur les blogs, dans les journaux. Mais pourquoi chercher avec autant de ténacité à donner un avenir à Venise ? Mon ami s’est posé la question et y a souvent réfléchi. Sa réponse est limpide : "avant tout par amour. Simplement. Quelle pourrait être l’autre raison qui nous pousse à vouloir que survive cette hérésie de la nature, cette offense à la modernité, avec son rythme totalement anachronique et son silence dérangeant qui nous met face à nous-même à chaque coin de rue, qui ravive sans cesse en nous ces questions éternelles comme le pourquoi de notre existence, notre raison d’être ? Oui, par amour. Cet amour qui se lit entre les lignes de la nostalgie, chez ceux qui veulent retrouver des images familières : celle des chats qui dorment sur les margelles des puits ou patrouillent dans les ruelles, des vieux lampadaires de bronze, des vieilles dames en bigoudis qui prennent l’air du soir sur les bancs des campi, cet amour de qui cherchent l’appui des techniques les plus modernes, de ceux qui aiment à imaginer un avenir de modernité pour un lieu unique qui n’a rien de moderne, parangon de l’altérité face au reste du monde. Cet amour qui pousse à partager notre appartenance à un prodige, nous qui sommes faits comme la cité elle-même, de sel et de marbre et des fréquents brouillards, nous qui cultivons au fond de nos cœurs le bruit d’une rame qui sort de l’eau d’un sombre canal, dans l’aube de la lagune… Puissions-nous faire éprouver à nos enfants et aux enfants de leurs enfants, l’émerveillement chaque jour renouvelé que nous éprouvons quand nous sortons de chez nous, leur faire ressentir cette émotion profonde de savoir que Venise est en nous, un état d’âme avant même que d’être une ville."
Matteo appelle ainsi ceux qui ont le désir d’un partage émotionnel - en apparence inutile pour les esprits efficaces et distraits, mais fondamentalement utile si on veut pouvoir inventer à la ville un avenir durable, un futur soutenable pour parler le jargon à la mode - à une réflexion profonde, philosophique plus que scientifique. Même si cela peut paraître inutile. Mais après tout, "ne doit-on jamais faire que des choses utiles ?"
..
Venise n’est-elle pas, intrinsèquement, la seule véritable expression de la Poétique de la ville pour reprendre le titre de Pierre Sansot (paru chez Payot) ? N’est-elle pas la seule authentique construction humaine, née de contingences vitales, inventée dans la violence extrême, défi à la nature, ayant su perdurer à travers les siècles et les civilisations, et par-là même l’unique et la plus aboutie des créations humaines encore debout, temple de l’esprit et expression absolue de la nature non pas asservie par l’homme mais associée à ses besoins ? Les solutions pour l’avenir de Venise ne seront jamais celles qu’on envisage pour l’avenir des autres métropoles.
En revanche, les solutions que Venise inventera seront autant d’expériences qui serviront à la sauvegarde et au développement des villes de demain. Il en fut ainsi dès sa création. Ce sera encore le cas demain si les vénitiens parviennent à résister à l’emprise des grands prédateurs financiers et industriels, si la communauté des vénitiens, d’origine et d’adoption, reste soudée dans son amour pour cette idée unique, cette cité idéale. Si tous refusent d’envisager les problèmes techniques selon les critères imposés par la modernité qu'on essaie de nous vendre avec toutes les arrières-pensées qu'elle cache. Venise sera alors le modèle de l'urbis de demain et nous l’aurons sauvée, lui chantant comme un hymne triomphant le "Rien n'a pu t'ébranler" de Cicéron à Catalina !