26 septembre 2009

T.S. Eliot, à la mémoire d'un grand poète

Quand il rencontra son compatriote Henry James à Venise, le jeune écrivain sorti de Harvard, né dans le Missouri le 25 septembre 1888, ne pouvait imaginer qu'il recevrait un jour le Prix Nobel de littérature, ni qu'il deviendrait tellement britannique, qu'au moment où on célèbre son anniversaire (121 ans et pas une année de purgatoire depuis sa mort en 1965), beaucoup d'anglais médusés découvrent étonnés qu'il était né américain. Ce grand poète, ami d'Alain-Fournier, Jules laforgue, Yeats, James Joyce, Virginia Woolf, William Austen, Scott Fitzgerarld et tant d'autres, reste trop méconnu du grand public en France. Il est vrai que son œuvre peut parfois paraître difficile. Pourtant qui sait que c'est à partir de son livre pour enfants « Old Passum's book of practical cats » qu'est née la célébrissime comédie musicale Cats qui n'en finit pas d'attirer les foules de Broadway et du West End ! Ce « classique, royaliste et anglo-catholique » était l'ami d'Ezra Pound. Ses positions parfois rigides et très conservatrices lui ont valu des accusations d'antisémitisme dont il chercha toute sa vie à se défaire. Comme le dit un jour un théologien londonien : « Peut-on s'affirmer fondamentalement chrétien et être antisémite ? Cela ne se peut sinon comment regarder le visage du Christ en agonie, juif parmi les juifs, et continuer de l'aimer et de le suivre ? ». 
 
Il aimait trop la liberté et les arts pour être tenté par le totalitarisme. En 1949, le congrès international du Pen Club qui eut lieu à Venise le dédouane pourtant de ces allégations. Chrétien engagé, il dérangeait l'intelligentsia issue de la résistance obnubilée par le communisme perçu alors comme libératrice et garante de la liberté (!!!). Il existe une excellente biographie (en français), parue il y a quelques années, que je vous recommande : « T.S. Eliot ou le monde en poussières » par Stéphane Giocanti (Éditions Lattès).

 

1 commentaire:

J F F a dit…

Très intéressant, bon esprit,

Merci

25 septembre 2009

La plus ancienne église de Venise



San Giacomo del Rialto dont une partie remonte au IXe siècle. La grande horloge sur sa façade possède 24 heures comme le voulait le système vénitien en vigueur jusqu'à la fin de la République. En effet, comme on comptait les jours différemment à Venise que dans le reste du monde, on avait un système horaire particulier. A l'intérieur plusieurs plaques votives mentionnent les noms des premiers donateurs de l'église. parmi eux figure le nom d'un de mes ancêtres, certainement la plus ancienne mention de notre patronyme parvenue jusqu'à nous.

5 commentaires:

Les Idées Heureuses a dit…

Et pendant ce temps, le "gobbio" prie pour pouvoir retrouver sa position normale: il a du en voir passer des heures et des heures...

Wictoria a dit…

je n'avais jamais vu semblable horloge et j'ignorais même leur existence, toute cela me fascine et me pousse à faire quelques recherches :)

J F a dit…

La plus ancienne, dédiée à Saint Jacques le Majeur ? Il n'y a pas de hasard :
- vers 742 : installation des premières maisons à Ri(vo)alto
- 810-811 : transfert du gouvernement de Venise à Rialto
- 813 : "découverte" du tombeau de l'apôtre en Espagne
- 828 : "arrivée" du corps de Saint Marc...
15 ans après les "événements de Galice" la cité lagunaire contrecarre le pèlerinage à destination de Santiago de Compostelle. Un flot de chrétiens itinérants, tournés vers le sud-ouest, vers le front stratégique anti-musulman. Autant de revenus qui échappaient à la cité marchande.

Politique, pèlerinages, commerce, reliques, vastes sujets...

Votre blog, que je recommande souvent, est toujours aussi passionnant.

Bientôt un article sur Venise dans
www.grandslieux.over-blog.com

Lorenzo a dit…

L'adresse est notée !

ladivinecomédie a dit…

Pour ce qui voudraient avoir un petit bout de Venise dans leur transistor, sachez que France Musique délocalisera quelques unes de ses émissions au Palazzo Bru Zane le temps d'un week-end du vendredi 2 au dimanche 4 octobre 2009.
Le programme détaillé est ici http://sites.radiofrance.fr/francemusique/ev/fiche.php?eve_id=250000172

22 septembre 2009


Il existe un lieu méconnu en plein centre, à deux pas du grand canal et du pont de l'Accademia où sont désormais réunis les bustes et médaillons des plus illustres vénitiens d'autrefois. Hommes politiques, savants, navigateurs, artistes, poètes, juristes et médecins, leurs portraits sont présentés au regard du public comme en un vaste panthéon vénitien. Il s'agit du Palais Loredan dont je vous reparlerai en détail dans un prochain billet.
 

3 commentaires:

AnnaLivia a dit…

J'ai pu visiter ce lieu la semaine dernière. Il est ouvert dans le cadre de la Biennale mais l'étage n'est pas accessible... Quel beau puits!

Venise86 a dit…

Honte à moi, je n'ai encore visité aucun des lieux "nobles" de Venise... Je suis allée nez au vent par les ruelles, les places, et les gens...

AnnaLivia a dit…

Pas de honte à avoir Venise86, généralement, lorsque je visite les intérieurs, c'est qu'il ne fait pas beau. Sinon, moi aussi je flâne le nez au vent...

21 septembre 2009

Mes itinéraires vénitiens


On me demandait l'autre jour de parler des endroits où j'ai vécu à Venise quand j'étais étudiant. Cette petite rétrospective (que je vais essayer de rendre le moins nostalgique possible pour ne pas donner l'impression de trop vivre dans ce passé vénitien qui continue d'orienter toute mon existence, et pour ne pas inquiéter certaines de mes lectrices qui finissent par penser que je suis un homme bien triste !), m'amuse en fait. N'y voyez ni regret ni introspection. C'est un petit jeu de piste qui ramène à la surface bien des souvenirs, le plus souvent heureux.
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En arrivant à Venise, mon premier chez moi ne faisait même pas 15 m². Il s'agissait d'un petit réduit fraîchement blanchi à la chaux meublé d'un lit étroit, d'une penderie et d'une chaise. Baptisée chambre par la propriétaire de l'auberge, la pièce donnait sur un puits de jour d'où remontaient à heures régulières des remugles d'égouts assez désagréables. Mais c'était chez moi. J'y ai séjourné deux mois. La signora Biasin m'avait laissé décorer les murs de cartes postales et de photos. Il y a avait cette madone de Bellini qu'on peut admirer à San Zaccaria, une reproduction de la Tempête de Giorgione, le plan de Venise, et quelques photos de ma famille et de mes amis. J'ai passé là des heures merveilleuses. Mon premier logis vénitien, mais aussi mon premier lieu de vie hors du giron familial !
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Puis j'ai commencé à travailler dans la pensione. L'université allait commencer, j'avais décidé de rester à Venise. En échange des heures passées à l'accueil et à aider pour le ménage des chambres, on avait mis à ma disposition un magazzino au 1875 calle dell'Aseo, au rez-de-chaussée de l'immeuble où les Biasin avaient leur appartement - transformé en annexe officieuse -. La belle façade de briques moulurées avait une certaine allure dans cette rue étroite qui part de la Strada Nova, juste à l'angle du Teatro Italia. Mon logis possédait deux fenêtres qui s'ouvraient sur un jardin rempli d'oiseaux et où les enfants venaient jouer après l'école. Cela sentait bon. Je n'étais pas encore installé dans un véritable appartement. Loin de là. Pourtant je m'y sentais bien. Il fallait pour y accéder, suivre un long couloir encombré par les poubelles de toute la maison. C'était une pièce carrée avec un évier de buanderie et une cuisinière qui servait aussi de chauffage. Un recoin avait été aménagé avec des toilettes et un lavabo. J'allais au premier pour me doucher. Un canapé-lit, un fauteuil, un bureau, deux chaises et une bibliothèque composaient mon mobilier. J'y ajoutais tapis, tentures, quelques lampes de-ci- de-là et le magazzino se transforma en quelques semaines en un sympathique studio d'étudiant.
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Vous pouvez imaginer mon bonheur. Je restais là près de deux ans jusqu'à ce que je rencontre Giuliano G., alors galeriste à la Fenice. Avec l'appui du peintre Arbit Blatas et le soutien du consul de France de l'époque, je fus embauché dans la galerie. Ce ne fut pas une sinécure - j'en reparlerai - mais cela me valut l'usage d'un appartement plus grand, Fondamenta delle Capuccine, près de Sant'Alvise. L'immeuble fort ancien abritait autrefois l'atelier d'un artisan. L'appartement qui me fut dévolu avait trois grandes fenêtres situées assez haut qui donnaient sur les terrains de sport de la paroisse. Après le chant des oiseaux, je vécus au rythme des parties de foot et de basket. Après mon joli petit taudis du ghetto, le "chalet" représentait le luxe. Je partageais l'entrée de la maison avec un vieux monsieur terriblement sourd qui ne parlait qu'en dialecte. Très haut de plafond, tapissé de lambris comme un chalet de montagne, mon appartement avait une vraie cheminée, des poutres apparentes et un mobilier très confortable. J'avais une vraie cuisine et une vraie salle de bain ! La chambre était juste assez grande pour contenir un grand lit. Il y faisait doux en hiver et frais en été. Tout était ingénieusement agencé et joliment décoré. C'est dans cet appartement que la petite Rosa, ma jolie chatte grise a fait ses premiers pas de chat indépendant... Les mois ont passés. J'ai vécu dans mon petit chalet suisse deux hivers agréables. Puis mes relations avec mon employeur devenant assez difficiles, j'ai déménagé pour Dorsoduro. Des amis persans, étudiants en architecture quittaient l'appartement qu'ils occupaient en collocation. Je visitais les lieux.
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La maison située calle Navarro, entre les Zattere et San Vio, me plut dès que j'en franchis le seuil. L'appartement était situé au dernier étage. Appartenant à Federico A., étudiant en médecine, il était occupé, outre son jeune propriétaire, par les deux persans et une étudiante en lettres, prénommée Betti. Une vaste cuisine à l'ancienne, pièce commune de la tribu, trois grandes chambres bien éclairées et le grenier aménagé qui servait de tanière à Federico. Après un grand nettoyage (mes deux amis fumaient beaucoup et n'ouvraient jamais les fenêtres de leur chambre), mon nouveau logis pris pimpante figure. Une armoire et une commode pour mes vêtements , un divan pour dormir, un fauteuil, un bureau, et des étagères pour mes livres. Je venais d'acquérir la première pièce de ma petite collection d'art contemporain, un magnifique bronze d'Augusto Mürer, ce faune à la flûte qui m'a depuis suivi dans tous mes déménagements. C'est calle Navarro que j'ai découvert mon désir d'écrire et ma passion pour Venise. Installé devant la fenêtre de ma chambre, face aux toits du quartier, avec le campanile de Santo Stefano en face, les oiseaux qui pépiaient sur les rebords des toitures de l'autre côté de la rue, ce décor inspira mes premières nouvelles et aussi les articles que le journal Sud-Ouest me commanda, à l'époque où Pierre Veilletet en était le rédacteur en chef.
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Puis ce fut le retour en France. La manifestation que je décidais d'organiser à Bordeaux en hommage à Venise ne devait me retenir que quelques semaines. Noël passa et j'étais encore à Bordeaux. Celle qui allait devenir ma femme me mit en demeure de choisir. Il me fallait décider. Nous aurions pu nous marier et partir vivre en Italie. Le consul m'y encourageait, persuadé qu'avec mes connaissances, mes compétences et n'importe quel concours du quai d'Orsay qu'il m'aurait aidé à préparer, je deviendrais un jour per forza consul, quand ce poste qui ne demeurerait pas éternellement politique, serait confié à des enseignants ou à des attachés culturels. Ce visionnaire avait vu juste. Quelques années après son départ, c'est l'attaché culturel, et le lecteur d'italien, qui occupèrent tour à tour la charge, bien dénudée et version allégée, de représentant de la France à Venise... 
 
Mais ce ne fut pas mon destin. La vie, les habitudes, quatre merveilleux enfants, allaient m'éloigner définitivement de la Sérénissime. Fort heureusement les liens du sang me permirent de ne jamais m'en éloigner trop longtemps et la jolie petite maison de la Toletta permit pendant quelques années ma cure vénitienne. Mais des impératifs patrimoniaux et la disparition de notre dernière parente nous fermèrent définitivement la porte de cette maison et de son merveilleux jardin. Je retourne toujours à Venise mais je n'ai plus de lieu où poser mes affaires, déballer mes livres, qui soit mien. Je sais que ce n'est que temporaire, "Dieu voulant" comme on dit chez moi...

9 commentaires:

maite a dit…

Voilà qui n'est pas trop nostalgique...Vous devriez vraiment publier vos "mémoires" ; je ne suis pas la première à vous le dire. Je vous souhaite de retrouver un nid douillet dans ce lieu qui fait partie intégrante de vous. A presto !

Evelyne a dit…

Tout à fait d'accord avec Maïté, j'ai beaucoup aimé les débuts de votre vie à Venise.Dans mon carnet j'ai noté: "Il est des paysages peints qu'on traverse ou qu'on contemple, d'autres dans lesquels on peut se promener, d'autres encore où l'on voudrait demeurer ou vivre. Tous ces paysages atteignent l'excellence. Toutefois ceux où l'on voudrait vivre sont supérieurs aux autres." Bonne journée.

AnnaLivia a dit…

Merci pour ce beau texte Lorenzo! Parlant de vos anciens quartiers, je suis passée au campo S. Vio qui est en ce moment complètement chamboulé. Ils refont toute la surface, le puits est caché, et la casa Pinto inaccessible. D'ailleurs très peu nombreux sont les campi qui n'étaient pas en travaux. Venise avait des airs de chantier... Ça brise un peu le charme, mais j'imagine que c'est nécessaire.

VenetiaMicio a dit…

Bravo Lorenzo, je n'ai pas ressenti de nostalgie aujourd'hui. J'ai apprécié le petit jeu de piste
(j'adorais cela quand j'étais petite fille)à la recherche de vos petits billets glissés dans des cachettes secrètes et c'est toujours avec autant de plaisir que je vous lis.
Bonne soirée

Anne a dit…

J'aime vraiment beaucoup lire vos textes souvenirs écrits avec sentiment et délicatesse. S'il y a de la nostalgie, elle s'accompagne d'un doux sourire. Publiez-en d'autres, s'il vous plaît, sur votre blog ou rassemblés dans un livre.
Anne

Venise86 a dit…

Vous aurez compris... depuis le temps que nous vous pressons d'écrire, pour notre bonheur, vos impressions de Venise... Je ne vais être qu'une de plus parmi les autres... Merci Lorenzo.

autourdupuits a dit…

A quand un livre?
C'est chaque fois un plaisir que de vous lire.

Myriam a dit…

A quand la suite ?
C'est toujours avec beaucoup de plaisir que je lis votre prose.

Lorenzo a dit…

Que de compliments chères lectrices que de compliments ! A mon tour laissez-moi vous remercier pour votre fidélité et votre enthousiasme !

20 septembre 2009

Le cadet et la mer


 
Ce jeune Morosiniero (nom donné familièrement par les vénitiens aux cadets de l'école navale de Venise) qui pourrait illustrer un roman de Dona Leon, se rend-il compte de la symbolique des reflets dans lesquels il a pénétré ? La rigueur de son uniforme, le guichet automatique et tout autour de lui, au-dessus même, la lagune, grise, remuante, et pourtant paisible... Un symbole qu'on voudrait éternel : la Jeunesse et Venise à jamais.

6 commentaires:

VenetiaMicio a dit…

C'est tout simplement magique et magnifique !
Un miroir pour la bellissima, j'aimerais avoir le même lorsque je vais prélever quelques billets !!!
Qui a pris cette photo ? et où se trouve le jeune morosiniero ?
Bon dimanche Lorenzo.
Danielle

Enitram a dit…

Quelle belle harmonie de couleurs, le sable la mer, la mer le sable, dans cette alternance reflétée dans le miroir… Et la silhouette noire qui rejoindra l'autre, sur le sable ???
Une véritable ode à Venezia. Merci Lorenzo, quel beau choix en ce dimanche pluvieux !

maite a dit…

Cette photo est magnifique et pleine de poésie.
Sans transition aucune : plutôt que d'acheter un bien à Venise, ce qui est, à y bien réfléchir, un peu utopique, on pourrait louer à l'année un appart à plusieurs ; ça serait plus facilement gérable et l'engagement serait moindre à tout point de vue. Qu'en pensez-vous ?

Michelaise a dit…

Alors là, bravo, une parfaite réussite : tout y est, la mise en page, les couleurs, le sujet... BRAVO Lorenzo pour ce petit chef d’œuvre photographique...

Venise86 a dit…

Quelques portes miroir sur le Dorsoduro m'ont fait rêver de même ! Venise à l'infini d'elle même !

Lorenzo a dit…

à propos la scène se déroule sur la riva de sette martiri, au bout de la grande fondamenta qui mène à San Elena où se trouve l'école navale.

19 septembre 2009

Est-ce qu'il existe encore des vénitiens ? Si oui, où sont-ils passés ?

C'est une question qu'on ne peut pas éviter de se poser quand, en se promenant dans les rues de la Sérénissime, on entend parler toutes les langues du monde et de moins en moins le vénitien. Des commerçants ont même installés dans leur vitrine des compteurs affichant en temps réel le nombre exact d'habitants...
 
Voilà la mi-septembre, il y a maintenant assez de recul pour commencer à tirer les premières conclusions sur la saison estivale 2009, avec la Biennale et quelques jours après la clôture de la 66e Mostra du Cinéma. Avec une météo trop clémente pendant pratiquement trois mois d'affilée (il n'avait pas fait aussi chaud depuis longtemps), le thermomètre a plusieurs fois atteint les 34° dans le centre historique, une masse incroyable de touristes écrasés par l'insupportable chaleur et assoiffés, de moins en moins respectueux, de plus en plus adeptes de la formule "mordi e fuggi" (je consomme et je repars), qui comme le dénonce depuis longtemps Stefano Mattiuzzi, commerçant sous les arcades de San Marco : «... Non seulement n'apportent aucun bénéfice économique à la ville, mais entraînent des dommages de plus en plus coûteux pour la ville ».  
 
Tramezzinimag en a souvent parlé. «La faute en revient aux politiques incapables de gérer leur ville » s'exclame sans mâcher ses mots Sebastiano Costalonga, leader du parti berlusconien à Venise, qui louche bien évidemment sur le fauteuil de Massimo Cacciari, et qui oublie de rappeler les liens de son patron avec les organismes financiers et immobiliers qui eux louchent sur le casino, les grands hôtels et rêvent de faire de Venise un Disneyland-Las Vegas pour Happy Few et se réjouissent de faire main-basse sur les immeubles délaissés. L'incroyable manne financière du tourisme de masse est un appât de taille pour les politiques affairiste de la Berlusconie.
 
L'été 2009 restera dans les mémoires parce que c'est la période où le seuil fatidique des 60.000 habitants a été atteint. Oui, vous avez bien lu : il ne reste plus aujourd'hui que 60.000 vénitiens dans le centre historique, selon le compteur de Venessia.com installé le 21 mars 2008, dans le but de suivre en temps réel le décompte de la population vénitienne résidente (voir la photo). Un chiffre qui fait réfléchir. Jamais dans l'histoire, les vénitiens n'ont été aussi peu nombreux. On peut s'en inquiéter en ce que cela transforme de plus en plus Venise en musée à ciel ouvert. Comment rester une ville à part entière. La cité des Doges pourra-t-elle rester longtemps métropole régionale ?
 
«...Voilà presque un an et demi que le groupe Vanessia.com a installé dans la vitrine de la Farmacia Morelli à S.Bortolomeo le monitoring de la population vénitienne. C'était en mars 2008 et Venise avait 60.720 habitants», explique Matteo Secchi, porte-parole de Venessia.com et il ajoute tristement : «aujourd'hui, nous en sommes à 60.054 et nous approchons du niveau des 60.000, niveau reconnu comme le minimum vital pour une ville moderne. Depuis des années les différentes administrations ont pensé à construire un centre hospitaliers à Zelarino, des ponts inutiles à des coûts prohibitifs, un tramway dangereux, ils ont organisé le transfert des ressources et des projets économiques vers l'eldorado du XXIe siècle, la terraferma, mais jamais aucune solution pour enrayer l'exode massif de la population...». 
 
Et qu'en pensent les vénitiens ? : «Ils sont pleins d'amertume après trente ans de fausses promesses et de projets». C'est pourquoi Venessia.com a décidé d'organiser sous peu les "Funérailles de Venise". Afin d'attirer l'attention de l'opinion publique mondiale sur ce problème majeur encore peu connu. «Derrière la carte postale, il y a une population aujourd'hui décimée et proche de l'extinction», explique Matteo Secchi avec des paroles dures et sans espoir.
 
 
Le crépuscule colore le bassin de San Marco comme une toile de Monet, San Giorgio et la Giudecca se parent de mille couleurs diaprées comme les a vues et copiées le Tintoret en son temps. Le temps d'un soupir et comme à l'improviste, la sirène d'un bateau de croisière géant retentit pour saluer son entrée à Venise. Deux vedettes remplies de touristes torses nus filent plein gaz vers le Lido de Cavallino, laissant derrière elles un sillage d'écume. Comme un symbole... Le compte à rebours est-il inexorablement lancé ?

6 commentaires:

Anne a dit…

Venise est indissociable des Vénitiens, c'est une évidence.
Anne

Anonyme a dit…

resistere! resistere! resistere!

Guillaume

Lorenzo a dit…

Nous reparlerons des "Funérailles de Venise" organisées par Venessia.com. Mais nous devons tous là où nous sommes, relayer cette information et alerter l'opinion. Il y a des sijets plus graves, plus douloureux, mais le dépeuplement de Venise est un phénomène de société hautement symbolique. "Matter of culture and civilisation" diraient nos amis anglo-saxons.

Evelyne a dit…

Je connais quelques parisiens qui s'installent à Venise pour leur retraite....

Venise86 a dit…

J'aimerai pouvoir venir vivre à Venise... La vie m'appelle ailleurs. Pourtant c'est à Venise que je trouve la commission européenne de la démocratie par le droit, qui me donne de l'espoir ce soir face à certaines décisions nationales qui me hérissent !! Venise est vivante, européenne comme toujours, et il faut la relier au contemporain vivant, pour ne pas en faire un musée gentil gentil dans nos têtes ! Même s'il s'agit d'un musée des arts et traditions populaires animé de vrais personnages sauvegardés !!
Si Venise peut être un avenir, elle ne deviendra pas une ville musée !!

Lorenzo a dit…

Fin octobre aura lieu à l'Arsenal le VeniceCamp, grande messe du numérique qui verra Venise projetée à la pointe du progrès technique. On peut, c'est évident cumuler la préservation des trésors du passé et les plus belles innovations technologiques.il en a toujours été ainsi à Venise depuis sa création après tout !

18 septembre 2009

Après les abeilles, les lapins...

 

Lions ailés, pigeons qui marchent, rhinocéros portraituré, anges aux cheveux dorés, chats et chiens, touristes égarés, abeilles qui butinent et maintenant un lapin... Ah Venise, quelle belle et unique ménagerie !

3 commentaires:

Aldo a dit…

Autre lapin rencontré au hasard de mes ballades internettesques sur Venise Vedi Vici. Les lapins seraient-ils en train de supplanter les chats.

Lorenzo a dit…

Lapin 10. Une énigme aussi. Que peut bien signifier ce pochoir sympathique ? Cela ne marche qu'en français "coniglio dieci", cela devient très décalé !

tia o'c a dit…

Jesus!!! Poor animal, victim of the changing fashion :-)

17 septembre 2009

Les Brèves : Le MOSE terminé à 60 %, parole de ministre.


Survolant en hélicoptère le chantier du MOSE, ces énormes portes qui devraient empêcher les grandes marées venues de l’Adriatique de pénétrer dans la lagune, Altero Matteoli, l'actuel ministre des infrastructures et du transport. Il a ensuite rencontré dans les locaux de l’Arsenal où sera installé le poste de commandement du MOSE, le maire de Venise, Massimo Cacciari et les édiles. Le président de la région, Giancarlo Galan, qui accompagnait le ministre dans son survol des eaux lagunaires, s’est félicité de l’avancée des travaux, soulignant que le MOSE n’était plus un problème politique mais technique. 
 
Si la Commune de Venise qui avait déposé en son temps 14 projets alternatifs tous bien moins coûteux que ce chantier qui fait travailler plus de 700 personnes, a abandonné la partie devant la détermination du gouvernement Berlusconi, personne en effet ne peut encore certifier que ça va marcher. En tout cas les travaux auront coûté 4500 millions d’euros. 
 
Le président de la Magistrature des Eaux, Patrizio Cuccioletta, a fait remarquer pour sa part, que les activités de sauvegarde de la lagune et de la ville confiées au Consorzio Venezia Nuova sont réalisées à 80 %. Tout le monde était satisfait aujourd’hui, sauf peut-être le maire de Venise qui a demandé au ministre ce que le gouvernement comptait faire pour financer les travaux indispensables dans le centre historique. 
 
Le ministre a répondu que le gouvernement allait s’employer à trouver les fonds nécessaires. Rendez-vous est pris pour la mise en place d’un nouveau plan de sauvegarde qui, on peut l’espérer, verra sa réalisation effective et son financement servir réellement à Venise, contrairement au plan de 1966 dont les fonds ont été engloutis on ne sait où et par on ne sait qui…. Peut-on y croire ?
 

 

 

 

 

3 commentaires:

Aldo a dit…

La parole du ministre a subi une certaine inflation. Sur le site du projet MOSE, le chiffre d'avancement des travaux indiqué pour septembre est de 54%. Six petits pourcents qui représentent tout de même 270 millions d'euros !

Lorenzo a dit…

Les hommes politiques ne s'encombrent ni de précisions ni de détails. Il voulait certainement dire 54% mais c'est moins médiatique certainement ! Et puis pour un homme comme Matteoli que représentent 270 millions d'euros !

Anonyme a dit…

beaucoup appris