11 août 2011

La Venise que nous aimons. Chronique gourmande

Quand on rencontre sur la lagune une de ces embarcations traditionnelles au gréement aurique, que l'on appelle aussi gréement latin, et si un heureux hasard fait qu'on navigue soi-même sur un sandolo, si le ciel est clair, les chenaux silencieux, si une cloche au loin se met à sonner et que devant nous des oiseaux s'envolent en poussant leur cri, il est facile de se croire revenu aux temps anciens, quand un peuple laborieux sillonnait les eaux de la lagune pour pêcher, chasser, pour transporter bêtes et marchandises.
 
Aucun des bruits caractéristiques du monde moderne ne vient troubler le silence des eaux. Le glissement des barques, la rame qui s'enfonce dans l'eau, le vent dans les herbes... C'est un bonheur extraordinaire qui se renouvelle à chaque fois. Parfois, lorsque nous faisons halte au beau milieu de nulle part, le vent nous porte des senteurs incroyables, d'herbe et de terre, de fleurs et de vase. Je n'ai jamais retrouvé cela ailleurs, sauf parfois en hiver sur le Bassin d'Arcachon.
 

Ces émotions esthétiques creusent l'appétit. L'humeur exacerbée par tant de sensations, la beauté des lieux, la fatigue aussi, suscitent vers le milieu du jour une ferveur venue de très loin en nous. On est pris soudain d'une envie de nourritures roboratives. Heureux hasard : certains plats traditionnels, mitonnés à l'ancienne, nous attendent à chaque fois. Pasta e fagioli bien sûr, mais aussi Guazzetto de foie de volaille et de champignons, Anguilles marinées,Bigoli au ragoût de canard sauvage, Fritelle et Torta di mandorla... Souvent, nous déjeunions dans une de ces baraques de bois et de briques, bâties sur des îlots il y a longtemps pour la chasse. 
 
Toutes en rondeurs avec la cheminée au centre, elles se dressent au milieu de nulle part. Une vieille cuisinière à bois ronronnait doucement et, très jeune, j'imaginais que le retour d'une expédition polaire, quand l'équipage regagnait l'igloo où attendaient chaleur et nourriture, devait ressembler à cela. Plus tard, à la lecture du festin que l'ami Fritz organise pour ses amis dans le roman d'Erkmann-Chatrian, je ressentais le même plaisir, cette sensation qui vous prend tout entier, réchauffe et apaise. Ces petits riens qui font la vie bonne et le bonheur tranquille. Mais il serait cruel de vous parler de ces plats délicieux sans vous en communiquer la recette. C'est aujourd'hui dimanche, jour où l'on peut s'arrêter un peu et laisser de côté les préoccupations qui nous assaillent et nous empêchent de vivre. Alors, aux fourneaux !

Guazzetto de ma grand-mère
 

Ce plat est très ancien. A l'origine, il était mijoté dans les familles modestes pour utiliser les foies de volailles qui se perdent vite. A l'automne, on utilise les funghi porcini qu'on trouve dans les forêts de Vénétie, il en existe plusieurs variétés toutes très parfumées. Peu à peu, ce plat s'est ennobli, on trouve même des recettes utilisant des truffes blanches, autre produit des forêts de la Sérénissime. Je sers ce plat avec de la polenta. Avant la découverte du maïs, on faisait de la bouillie d'épeautre, de millet ou de pois chiche pour aller avec.

Il faut : 4 à 6 foies de volaille (canard ou autre), 1 gros oignon, 250 à 300 grammes. de cèpes frais ou séchés), 1 gousse d'ail,
du persil, du sel et du poivre et de l'huile d'olive et du beurre frais.

Préparer la polenta, la réservez au chaud. Hacher l'ail et le persil. Tailler les champignons en lamelles au couteau, les faire revenir pendant 5 minutes à la poêle préalablement nappée d'une à deux cuillères d'huile d'olive avec l'ail et le persil. Saler et poivrer. Il faut veiller à ce que les cèpes n'attachent pas et puissent dorer tout en restant mous. Couvrir et réserver au chaud. Découper les foies en lamelles assez fines. Éplucher un oignon. Le mettre à fondre dans une poêle avec un mélange d'huile et de beurre, puis ajouter les lamelles de foie. Saler et p
oivrer. Bien surveiller, et remuer souvent, pour que obtenir un mélange rissolé et non pas grillé. Ajouter ensuite les foies rissolées avec les oignons dans la poêle des cèpes en mélangeant jusqu'à obtenir un ensemble homogène. vérifier la température et s'il le faut remettre à chauffer à feu doux tout en remuant. Le mélange doit être crémeux avec de la sauce. Vérifier l'assaisonnement et servir sur un lit de polenta en purée. décorer avec le reste de persil et d'ail haché. On peut aussi présenter le plat d'une manière plus rustique avec des losanges ou des lanières de polenta grillée et le ragoût à côté. J'ai parfois ajouté de la grappa ou du cognac dans la cuisson des foies, cela donne bien mais ce n'est plus le guazzetto traditionnel.
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Bigoli au ragoût de canard
 

C'est un des plats les plus raffinés qu'il m'est été donné de goûter à Venise. A ma connaissance un seul restaurant (clandestin ou privé devrais-je dire) le réalisait il y a encore quelques années comme on le faisait chez moi. D'abord parce qu'il faut de l'anatra, la femelle du canard sauvage, à la chair plus tendre que celle du papero, le mâle, toujours plus gras, et que ce gibier se fait plus rare. Et puis parce que les bigoli, cette sorte de spaghetti plus petits et plus épais, ne sont vraiment bons que fabriqués à la maison. Ce sont des pâtes à base d'œuf contrairement aux véritables spaghetti. Pour 700 g de farine, il faut deux œufs, du sel et 10 cl d'eau de source. Comme les vénitiens, j'utilise pour les fabriquer un torchio, appelé aussi communément bigolaro. C'est une sorte d'emporte-pièce muni d'un poussoir-manivelle en bois. Une machine à pâtes pourra faire l'affaire mais la taille sera différente. Autrefois à Venise comme dans les campagnes, tout le monde ne possédait pas cet engin. Les femmes se réunissaient alors chez l'heureux propriétaire de la machine et tout se terminait par un repas festif pris en commun. C'est pour cela que chez les très vieux vénitiens (il en reste encore), les bigoli sont toujours comme un appel à la fête.

Il faut : (pour six à huit personnes), un canard, 1 kg de bigoli, ,2 oignons, 2 gousses d'ail, du romarin frais, du laurier, du persil,
du parmesan fraîchement râpé, 25 cl de bon vin blanc, de l'huile d'olive, du sel et du poivre.

Il faut tout d'abord préparer le canard. On ne conserve ni la peau ni le gras. Ouvrir dans la longueur par le ventre et détacher la chair de la carcasse. Tailler les
morceaux obtenus en petits dés (environ 5 mm de côté). Hacher l'ail, l'oignon, le romarin et le persil. Faire chauffer deux bonnes cuillères à soupe d'huile d'olive, ajouter le hachis ail-oignon-persil. Faire fondre puis ajouter le romarin haché. Mélanger et laisser revenir. Quand le mélange est vert transparent, ajouter les dés de viande et faire revenir en remuant souvent pendant un quart d'heure. Il ne doit plus y avoir de liquide. Quand la viande a pris une jolie couleur , ajouter le vin blanc. Saler et poivrer au moulin. Laisser mijoter quelques minutes en remuant. On reconnaît que le mélange est prêt à la délicieuse odeur qui se répand dans la cuisine. Réservez au chaud. Mettre les bigoli dans un grand faitout d'eau bouillante salée. laisser cuire 10 minutes environ. Prélever les pâtes sans trop les égoutter et les ajouter au ragoût. Mélanger. Ajouter le parmesan râpé et servir aussitôt. Ce plat se mange très chaud.
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Anguilles marinées 
Voilà un autre plat typique de la lagune qui se retrouve aujourd'hui sur les meilleures tables de Vénétie. C'est je crois l'un des premiers poissons que j'ai goûté à Venise. Auparavant, je ne connaissais que les truites des Pyrénées (encore le souvenir de Fritz Kobus), les soles des brasseries Noailles ou Dubern de mon enfance à Bordeaux. Le souvenir de la mort de ces pauvres bêtes m'horrifiait car elles possèdent une grande force et sont capables de sauter hors du panier toutes seules et continuent longtemps de s'agiter même quand on leur a tranché la tête. Car l'anguille ne se conserve pas plus de 24 heures et elle n'est vraiment goûteuse que cuisinée aussitôt après sa mort. Pauvres bêtes, elles sont tellement délicieuses que leur sacrifice est vite oublié.

Il faut : 1 kg d'anguilles vivantes, une branche de céleri, une gousse d'ail, des oignons, du laurier, 500 g de tomates bien mûres, du vin blanc, de l'huile d'olive, sel et poivre.

La veille de la préparation, enlever la peau des anguilles, les couper en tronçons de 6 à 8 centimètres de long. mettre à mariner le poisson dans un plat creux avec le céleri taillé en bâtonnets, un oignon, l'ail en lamelles, des grains de poivres noir et du
vin blanc. Laisser au frais pendant 24 heures. Le lendemain, saler les morceaux et les mettre à dorer dans une grande poêle avec de l'huile d'olive très chaude. Compter environ 10 à 15 minutes. Couvrir et réserver au chaud. Faire revenir ensuite les oignons hachés à feu très vif avec les tomates coupées en lanières et les feuilles de laurier. Bien remuer pour éviter que le mélange n'attache. Délayer avec un peu d'eau et une cuillère à soupe de vin blanc. Saler et poivrer. Laisser cuire à feu moyen pendant 5 minutes. Passer la sauce au chinois. Disposer dans un plat creux la purée de tomates ainsi obtenue sur le plat, déposer dessus les morceaux d'anguilles, garnir les côtés de carrés ou losanges de polenta bien chaude couverte de beurre et de parmesan râpé, arroser avec la sauce. Un délice !

20 juillet 2011

Le temps des vacances !

Beaucoup d'énervement et de stress pour terminer tout ce qui était en train avant de boucler les valises, de ranger la maison, de donner des instructions à ceux qui restent. Il faut dire que le temps presque automnal ne met pas vraiment la joie au cœur. Peu importe, c'est le temps des vacances ! 

Dans quelques heures les retrouvailles avec le Cotentin. Là-bas, la maison a déjà repris vie depuis quelques semaines, les volets repeints, les housses enlevées des meubles, les marches du vieil escalier bien cirées, les tapis déroulés, les vieux draps de métis parfumés dans les lits, l'herbe du jardin coupée... C'est enfin l'été, du moins sur le calendrier. Déjà Constance, la dernière de mes filles, est sur place avec son grand-père et Sam le chien. Le ciel est moins clément que ces derniers jours et il y a souvent un bon feu dans la cheminée, mais l'air est à la joie. La joie du temps des vacances. Même si le thé brûlant remplace les verres d'orangeade, ce temps de latence et de retrouvailles avec un rythme de vie plus tranquille est un grand moment dans notre année. 

Qu'importe le mauvais temps, ce sont nos vacances, et elles se déroulent toujours trop rapidement, au rythme de la BBC de Jersey. La maison est confortable, le jardin magnifique, la plage est à deux pas, c'est plein de chevaux aux bouts de charmants chemins creux... 

Pas d'internet.... J'amène avec moi une pile de livres, du papier et des crayons... A bientôt et bonnes vacances à tous !

 

7 commentaires:


Michelaise a dit…
et aussi, dans les préparatifs de départ, faire la liste de tout ce qu'il faudra faire au retour... car ce temps des vacances est aussi coupure totale, on oublierait volontiers la vie qui au retour nous rattrapera. Ceci étant c'est plutôt sympa ce temps, on se prend à espérer le mois d'août et ses chaleurs écrasantes. Bonnes vacances Lorenzo
J F F chemincompostelle a dit…
Bonnes vacances !
Enitram a dit…
j'espère que vous nous apportez le soleil de Bordeaux !!!!
chantal a dit…
Bon séjour à Venise !
Anne a dit…
Bonnes vacances, Lorenzo, et au plaisir de vous retrouver bientôt sur votre blog! Anne
Anonyme a dit…
. les marches du vieil escalier bien cirées, Comme casse gueule, y a pas mieux!
Lorenzo a dit…
Que dans les films, le bois de l'escalier qui glisse ! De passage près d'une borne internet, un petit bonjour du Cotentin. Reprise de Tramezzinimag, le 20 août. 
Bonnes vacances à tous !

15 juillet 2011

La Fête du rédempteur, c'est demain

 
La Festa del Redentore est l'évènement festif le plus apprécié des vénitiens et l'un des derniers évènements totalement authentiques de la Sérénissime, où convergent l'aspect religieux traditionnel et l'attrait pour le spectacle, ce fantasmagorique feu d'artifice qui surpasse souvent ce qu'on peut voir à travers le monde. Le pont votif est fin prêt, les riverains mettent la dernière main à la décoration du portail de l'église du Redentore, partout les barques sont astiquées, décorées, on prépare les lampions qui éclaireront demain soir le bassin de San Marco qui comme chaque année depuis des siècles sera couvert d'embarcations réunissant des milliers de vénitiens venus festoyer jusqu'à l'aube. Spectacle inoubliable pour ceux qui y assistent. Quelques bémols ces dernières années avec des sonos hyper-bruyantes et agressives lancées par des DJ enragés sur certaines barges ou grosses vedettes privées pour des jeunes un peu avinés. L'ambiance est chaude mais cela reste toujours bon enfant. La lagune devant le palais des doges se remplit de bateaux, on y dîne, on trinque, on chante. Certains se baignent même pour se rafraîchir. Des milliers de lumières se reflètent sur l'eau du Bacino. Atmosphère unique qu'on ne peut oublier. Après le feu d'artifice, beaucoup partent en cortège vers le lido où il est d'usage d'attendre le lever du soleil. En attendant, on fait de la musique, on danse, on se baigne. L'atmosphère est propice aux histoires d'amour et il flotte dans l'air une humeur joyeuse revigorante !

 
La tradition veut qu'au crépuscule les embarcations toutes décorées de pampres, de guirlandes et de lanternes se dirigent vers le Bassin de Saint Marc et sur le canal de la Giudecca.Là tout le monde festoie. Des plats traditionnels, le vin coule à flots, on trinque de barque à barque, on se retrouve, on chante en attendant le feu d'artifice qui commence à 23 heures 30 et éclate dans un ciel souvent étoilé et serein pendant plus de trente minutes. Passé minuit, les plus fatigués rentrent chez eux à travers les canaux de la ville, mais la majorité des embarcations se dirige vers le Lido et ses plages. Ceux qui n'ont pas la chance d'avoir une barque ou d'être invité sur l'une d'entre elles, assistent au spectacle depuis le quai des Esclavons, les Zattere ou la piazzetta. On propose partout les plats traditionnels du Redentore. Si vous êtes en ce moment à Venise, n'hésitez-pas à vous mêler à la foule. Il y aura certes beaucoup de touristes mais les vénitiens sont tous au rendez-vous. Beaucoup reviennent à Venise pour l'occasion.

 

7 commentaires:

douille a dit…

"Quelques bémols ces dernières années avec des sonos hyper-bruyantes et agressives lancées par des DJ enragés sur certaines barges ou grosses vedettes privées pour des jeunes un peu avinés" Au moins, c'est la preuve que la ville ne meurt pas complètement. Les défenseurs de Venise ne veulent pas qu'elle devienne une ville musée, mais un peu quand même...

Michelaise a dit…

et si je comprends bien Lorenzo, vous en étiez ! en tant que "vrai" vénitien ... même si j'ai quelques doutes, malgré vos dire, sur l'autenthicité vénitienne des festivités... on a du mal à concevoir encore, sur Venise, quelque événement exempt de tourisme... l'expression est maladroite mais je crains que la sono à laquelle vous faites allusion n'ait quelque prétention "à plaire"... et contrairement à ce que fit Douille, je ne suis pas certaine que les jeunes avinés soient une preuve d'authenticité !!

Lorenzo a dit…

La musique dont je parlais dans l'extrait que Douille a relevé n'est pas diffusée par la ville, mais par la sono de certaines embarcations. on a toujours beaucoup bu durant la nuit du Redentore mais vous savez comme moi combien les jeunes générations boivent aujourd'hui. Mais je vous assure Michelaise que la fête reste authentiquement vénitienne. D'abord parce qu'il faut avoir une barque ou pouvoir être invité à bord de l'une d'elles pour participer aux réjouissances. Dîner entre amis sur l'eau en attendant le feu d'artifice que tout le monde admire en le commentant, le tout dans une véritable bonne humeur très contagieuse... Les touristes restent sur les rives et c'est vrai qu'il y a du monde aussi mais cela n'a rien à voir avec le carnaval. La procession sur le pont flottant et la messe célébrée par le patriarche attirent certes les visiteurs mais c'est avant tout une cérémonie fréquentée par les vénitiens, tous âges et classes sociales confondues.
Non, je vous l'assure, comme la Saint Martin pour les enfants, il Redentore reste typique autant que faire se peut.

Douille a dit…

Je suis allé à Venise pour la fête du rédempteur en tant que "Touriste averti"... j'étais venu pour ça parce que je voulais en être... Et je dois avouer que peu de touristes sont au courant de cette fête, d'ailleurs les hotels ne sont pas plus chers et les touristes se demandent quelle fête on peut bien préparer: "on est pas au carnaval??? mais que font ces gens, ils auraient une 2ème fête???"... Contrairement au carnaval, cette fête est autenthique...

Et perso, j'ai bien aimé les barques avec des sonos car elles sont une preuve que la ville survit... Et les jeunes avinès sont une preuve qu'il reste des jeunes...

Si vous êtes "fan" de Venise: allez au rédempteur, vous verrez que cette ville vit encore...

Lorenzo a dit…

Nous sommes donc parfois d'accord Douille et moi (à lire de manière positive SVP). Bon pour la peine, je retire le terme "avinés" mais tout de même on peut être jeune et ne pas être imbibé d'alcool dès que l'occasion se présente de faire la fête ou alors les jeunes que je connais ne sont pas des vrais ! Evviva il Redentore !

Douille a dit…

"Nous sommes donc parfois d'accord Douille et moi (à lire de manière positive SVP)."

Logique nous avons un but commun, mais avec des chemins forts peu parallèles...

la fête du rédemptore reste à 95% vénitienne parce qu'elle tombe en juillet: C'est pas la période des citytrip (avril, mais, juin, septembre, octobre) et en juillet - aout, Venise c'est plutôt la ville des voyageurs d'un jour qui viennent de la riviera... personellement, c'est une période que je trouve sympa pour visiter la ville, les hotel sont moins cher (c'est la moyenne saison) il fait juste un peu chaud, mais cela fait des soirées interminables... Surtout celle du rédempteur... Et puis Torcello, ce n'est beau qu'en été, sous le soleil...

Franchement si on aime vraiment Venise, il faut être allé une fois au rédempteur...

Bon là où je suis moins d'accors avec Lorenzo, c'est quand il fustige les sonos bruyantes, c'est une preuve que la ville n'est pas morte... J'ai vu de mes yeux la préparation d'un bateau de transport (j'aurai su prendre des photos) avec sono et lumières, ça force le respect! Si j'étais à Venise, j'en ferais autant... En plus c'est risqué, vu le prix du matériel! Le jeune qui fait ça, c'est qui aime encore sa ville, pourtant ça doit pas être facile d'être jeune dans une ville comme Venise (surtout en Italie)

corsiglia a dit…

Je crois que dans la non-croissance ou la décroissance, Venise a encore moins de chances de survivre, au moins techniquement et patrimonialement...peut être en mettant un droit d'entrée.....

En ce qui concerne les fonctionnaires français, archéologues, historiens, en Italie etc..il faudra qu'ils rentrent au pays un jour ou l'autre.....le nombre d'emplois qu'ils occupent commence à agacer les nouvelles générations d'italiens et plusieurs dossiers sont arrivés sur le bureau du président de la République et de certains maires de villes universitaires.En comptant les postes permanents et les postes d'intervenants plus les temps de travail en laboratoire à Paris,tous payés par l'argent public, cela représente au moins 5 000 emplois à équivalents salaires italiens qui ne sont pas occupés par les diplômés des universitaires italiens.Ma famille à Rome et à Sienne observe cette situation.Nous ne sommes plus en 1804 et les français, s'ils l'ont jamais été, ne sont plus des "cousins"!

14 juillet 2011

Vera da pozzo, ou l'histoire des puits vénitiens

 
N'est-ce pas un joli nom ? Ce beau vocable m'est venu aux lèvres ce matin en feuilletant un vieil album de photos trouvé un jour sur le stand d’un bouquiniste ambulant aux Santi Apostoli, oublié sur une étagère. On y voit des femmes venant puiser de l'eau dans la cour d'honneur du palais ducal. La scène se situe certainement à la fin du XIXe siècle, au vu des costumes. L’atmosphère pittoresque semble un tant soit peu artificielle, surtout quand on sait que les autrichiens firent boucher la plupart des puits en 1864, lorsque leur aqueduc permit d'alimenter en eau potable toute la ville... On est en droit de se demander si la scène n’a pas été arrangée pour les besoins du photographe. C'était courant à l'époque. Elle montre en tout cas ce que devait être le quotidien des vénitiens d’autrefois qui ne pouvaient avoir d'eau potable qu'en utilisant les nombreux puits répandus sur chaque campo, dans de nombreuses cours aussi.  
 
Le puits vénitien, unique en son genre est une trouvaille très ingénieuse, inventée dans un lieu où l'eau salée se répand partout, il a permis aux vénitiens de subsister à la Sérénissime de se développer. S’il ne sert plus à alimenter la ville en eau, sa structure architectonique fait encore aujourd'hui le bonheur de tous. Vénitiens, touristes, les adultes comme les enfants et... les chats, tout le monde apprécie ces constructions souvent très belles, qui ornent les places de la ville. Toujours différents, ils sont un vivant témoignage du quotidien de la Venise d'antan.
 
 
Le puits vénitien se distingue du puits artésien, son cousin. Car, contrairement à ce qui existe ailleurs, l'eau de ces puits ne provient jamais (ou presque) de nappes souterraines, de ruisseaux ou de sources enfouies plus ou moins profondément. Les caractéristiques hydro-géologiques de la lagune ne présentent, on le devine, aucune nappe phréatique, pas la moindre masse d'eau douce dans un sous-sol de nature argileuse, et donc pratiquement imperméable. Rien que de l'eau salée venue de la mer, adoucie parfois par l'eau des fleuves qui se jettent dans le delta. A Venise, l'eau provenait exclusivement de l'eau de pluie soigneusement recueillie par un ingénieux système de filtrage.
 
Construire un puits coûtait très cher. Il ne s’agissait pas comme ailleurs de creuser une galerie verticale et de la surmonter par une construction en maçonnerie munie d’un système de poulie comme partout ailleurs. Ici, la complexité du procédé, la quantité de matériaux nécessaires et les difficultés techniques rendaient ces constructions très onéreuses et les travaux ne se faisaient pas en quelques jours. Il fallait d’abord creuser une fosse de cinq ou six mètres de profondeur soit largement en dessous du niveau de la lagune. Cela obligeait à des travaux titanesques d’imperméabilisation et de renforcement des parois pour éviter les infiltrations. Fondamentaux, ces travaux d’utilité publique étaient le plus souvent financés par de riches familles patriciennes. Faire don d’un puits à la ville était considéré comme un acte de haute bienfaisance et donnait au donateur et à sa famille un statut de bienfaiteur reconnu par tous. Cette opération de communication était aussi une nécessité vitale pour la survie et le développement de Venise. Aussi la République encourageait-elle ce genre d’initiative. C’est pour cela qu’on voit souvent sur les puits des inscriptions somptuaires, des bas-reliefs rappelant le nom des familles qui ont pris en charge la construction de ces puits, leur blason.
 
Une fois la cavité creusée (le plus souvent un carré ou rectangle), on la recouvrait d'une maçonnerie qui remontait un peu au-dessus du niveau naturel du sol du campo, afin d'y apposer les dalles (i masegni) qui servaient au pavement des rues. Dans certains cas, les limites du puits étaient ainsi marqués au-dessus de cette maçonnerie par un tracé en pierre d'Istrie afin de bien en signaler l'emplacement. Au centre de la cuve creusée on élevait le puits sur un disque de pierre, comme une sorte de cheminée en maçonnerie à l'aide de briques spécialement conçues pour permettre à l'eau de pluie de pénétrer dans le conduit (les pozzali). Le haut du puits était terminé par ces magnifiques margelles que nous pouvons admirer encore de nos jours. La citerne sous le puits était alimentée par l'eau de pluie qui pénétrait par les pilelle, ces grilles de pierre d'Istrie qu'on voit aux quatre coins de la construction. les environs immédiats du puits sont souvent en pente si vous regardez bien, afin de permettre à l'eau de descendre vers les bouches de pierre. Cinq six mètres en dessous du niveau du sol, l'eau entrait en contact avec un filtre naturel fait à base d'une couche d'argile épaisse (la crea) qui recouvrait une couche de sable fin provenant des fleuves du delta, avant de remplir le puits lui-même par porosité. Ainsi il y a avait presque toujours de l'eau et elle était pure et fraîche. Autour du puits, la citerne était le plus souvent réalisée en forme de cloche dont le fond était ouvert, pour éviter la dispersion de l'eau dans le sous-sol alentour. L'eau pouvait ainsi se répandre en grande quantité dans le sable qui servait de filtre.

Les couvercles de bronze qui ferment ces puits datent parfois de la Sérénissime. on les cadenassait pour éviter que des gens mal intentionnés (la République avait beaucoup d'ennemis réels et imaginaires) n'empoisonne l'eau. Quand l'aqueduc amena l'eau de la terre ferme, les autrichiens firent fermer les puits pour éviter les risques d'épidémie de Choléra mais aussi par sécurité (déjà la phobie sécuritaire). Certains puits ont été construits avec des matériaux très anciens, des chapiteaux ou des bas-reliefs datant de l'époque romaine.

En 1322, un décret du Grand Conseil ordonne la construction de cinquante nouveaux puits. On en ajoutera trente en 1424. Au XVIIIe siècle on comptait 157 puits publics. Tous les palais, les cours des maisons, les bâtiments publics avaient un puits. Des 8000 qui existaient au début de l'occupation autrichienne, il n'en reste plus que 250 environ. Les autres ont souvent été vendus et on en retrouve aujourd'hui jusqu'aux États Unis et en Russie !
 
 
On a récemment retrouvé les traces d'un grands puits sur la piazza, à l'occasion de travaux de voirie, qui n'apparaissait sur aucun des plans conservés dans les archives de la Sérénissime. Présents dans les archives en revanche, la plupart des actes de donation de puits de la part de riches patriciens ou de confréries. On trouve aussi une ordonnance de la République qui prévoyait la récupération d'eau des rivières et des plans d'eau de la terre ferme qu'on acheminait en barque pour remplir les citernes en cas de sécheresse.

07 juillet 2011

Spritz Party à Bordeaux !

L'initiative appartient à un jeune vénitien d'une vingtaine d'années, musicien de son état, en Erasmus à Bordeaux, qui organisait ce soir pour fêter comme il se doit l'arrivée des grandes vacances et rendre la séparation moins difficile une soirée unique : une Fête Spritz. Le jeune homme connait bien sa ville d'adoption puisqu'il a choisi comme cadre pour sa soirée un bar-restaurant apparu il y a peu et qui est devenu en quelques mois l'un des lieux les mieux côtés et les plus en vue de Bordeaux. Du moins pour ceux qui ne s'arrêtent pas aux conventionnelles apparences et apprécient les gens pour ce qu'il sont. 

L'Ours Marin est un bar gay, une caverne d'Ali baba où on rencontre tout ce que la ville compte d'artistes, de musiciens. Les maîtres de l'établissement le définissent comme un espace convivial et simple, 100% hétéro-friendly tout sauf un ghetto ou un repère de militants. On y prend plaisir à boire un verre ou grignoter. C'était donc là que le vénitien recevait ses amis. Lancé par le biais de Facebook, la manifestation a été un franc succès et c'était sympathique de voir tous ces gens un verre de spritz à la main, se régalant de ciccheti maison : bruschetta et autres produits italiens. C'était, le temps d'une soirée, Venise à Bordeaux... A Tramezzinimag, on ne pouvait que se féliciter de l'initiative. C'est vrai que le spritz était bon ! Comme à Venise...

 

 E

07 juillet 2011

Spritz party à Bordeaux

L'initiative appartient à un jeune vénitien d'une vingtaine d'années, musicien en Erasmus à Bordeaux qui organisait ce soir pour fêter comme il se doit l'arrivée des grandes vacances et rendre la séparation moins difficile une soirée unique : une Fête Spritz. Le jeune homme connait bien sa ville d'adoption puisqu'il a choisi comme cadre pour sa soirée un bar-restaurant apparu il y a peu et qui est devenu en quelques mois l'un des lieux les mieux côtés et les plus en vue de Bordeaux. Du moins pour ceux qui ne s'arrêtent pas aux conventionnelles apparences et apprécient les gens pour ce qu'il sont. L'Ours Marin est une caverne d'Ali baba où on rencontre tout ce que la ville compte d'artistes, de musiciens. Les maîtres des lieux le définissent comme un espace convivial et simple, 100% hétéro-friendly tout sauf ghetto gay où on prend plaisir à boire un verre ou grignoter. C'était donc là que le vénitien recevait ses amis. Lancé par le biais de Facebook, la manifestation a été un franc succès et c'était sympathique de voir tous ces gens un verre de spritz à la main, se régalant de ciccheti maison : bruschetta et autres produits italiens. C'était, le temps d'une soirée, Venise à Bordeaux... A Tramezzinimag, on ne pouvait que se féliciter de l'initiative. C'est vrai que le spritz était bon ! Comme à Venise...

2 commentaires:

Robert M a dit…

une adresse à découvrir bien sympathique .

ytaba36 a dit…

The best of both worlds?

Yvonne

26 juin 2011

Au soir d'un jour torride...


L'enfant vient de reprendre ce passage difficile de la sonate. Do majeur. Le clavecin répand dans la maison son âme un peu désuète, presque déplacée par ce temps trop ensoleillé. La chaleur au dehors est devenue pesante. Pas un bruit, pas un passant. Les chats cherchent de la fraîcheur dans les recoins les plus sombres de la bibliothèque. Même les mouches économisent leurs mouvements et on ne les entend plus voler. Par la fenêtre entrouverte un air sec, parfumé et bouillant se répand. On pourrait se croire quelque part dans une ville de Méditerranée, non loin du désert. Pourtant, je suis incapable de renoncer à ma tasse de thé brûlant. La chope bleue est posée, là, sur la petite table du salon, devant le canapé rouge. Sur le plateau, une assiette de biscuits, des abricots et des cerises. Si j'étais peintre, j'aimerai dresser le portrait de ces objets inanimés parce que mes mots ne parviennent pas à rendre vrais pour le lecteur ces formes et ces couleurs qui forment le décor de ce dimanche d'été.
.
C'est aujourd'hui la Fête-Dieu, plus communément appelé maintenant la Solennité du Saint-Sacrement. Plus personne ne s'en souvient, mais ce dimanche autrefois, partout en terre chrétienne était un jour de joie et grandes réjouissances. Les enfants, vêtus de blanc, jetaient sur les chemins des jonchées de pétales de fleurs, précédé par les servants de messe en surplis rouges garnis de dentelles, des diacres, des chantres, sous la pavillée, un dais d'or et de soieries ou une grande ombrelle, passait le saint-Sacrement, le plus souvent dans un magnifique ostensoir de bronze ou d'argent ciselé porté par le prêtre. Derrière le clergé, tout le village suivait en chantant des cantiques. Sur le trajet, le cortège faisait étape devant des autels dressé pour l'occasion, les Reposoirs gorgés de fleurs odorantes et de dentelles précieuses. Chacun revêtait ses plus beaux atours... Je pense toujours à Francis Jammes qui en parle si bien :
.
"oh! ce parfum d'enfance dans la prairie trempée
d'eau et d'azur, parfum de pieuse jonchée
de joncs-fleuris sous les pas des processions
des hameaux noirs, parfum de fougère écrasée
au soir d'un jour torride, quand les inflexions
des chants ne peuvent pas mourir et que mon âme
a peur de trop aimer, parfum de lis en flammes,
comme j'en voyais dans les vieux paroissiens,
parfum des dimanches soirs dans les jardins,
parfum d'encensoirs purs qui vont à Dieu ensemble,
parfums de rosiers qui, à l'aube, tremblent..."
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A Venise aussi, il y avait une procession. Un cortège de barques et de gondoles chamarrées transportait clergé et fidèles le long des canaux. Partout sur le bord des canaux, aux balcons des maisons, sur les places, la foule applaudissait, et se signait au passage du Corpus Domini. L'infiorata (tapis de fleurs) sur l'eau, avait quelque chose de magique avec ces centaines de pétales de roses, de lilas et de jasmin qui flottaient sur l'eau verte de la lagune et jonchaient les dalles des ruelles...

1 commentaire: 

Anonyme a dit…

La fete du Corpus Domini existe encore dans le sud de l'Italie... Je reviens de vacances du Salento, l'extrême sud des Pouilles, d'un petit village à mi-chemin entre la Mer ionienne et l'Adriatique, et dimanche dernier nous avons pu assister à cette procession - en mode mineur pour une si petite commune - où tous les enfants portaient des paniers de pétales de fleurs qu'ils ont sagement répandus devant chacune des églises où la petite foule s’arrêtait pour attendre la sortie d'un autre saint sacrement entouré d'un prêtre et d'une nouvelle "confraternità" laquelle portait également un immense bâton orné de rubans et d'un bouquet campestre.
Et cela n'avait absolument rien de touristique. Malgré la présence d'une vingtaine d'enfants, l'age moyen des participants laisse toutefois présager que dans quelques années nous n'assisterons plus à un tel cortège...

Gabriella

Coups de Cœur N°44

Bottega della Latta
& Tabaccheria San Rocco  
S.Polo 3119, sur le campo
vaporetto : Arrêt S. Tomà

Acheté en 1972 par Giorgio et Annamaria Pasetti , l'endroit situé au cœur de Venise, sur le célèbre campo San Rocco, n'était qu'un petit débit de tabacs où les riverains venaient acheter leurs cigarettes et jouer au totocalcio. Repris par leurs enfants Monica et Luca, la boutique s'est transformée, devenant en quelques années un must. Spécialisé dans les cigares de la Havane, on y trouve toutes les marques de tabac et les vénitiens peuvent toujours venir tenter leur chance aux lotos et autres loteries dont les gens sont friands. On y trouve aussi des carnets de ticket pour le vaporetto. Mais ce n'est pas pour le tabac ni pour les titres de transport que nous avons eu le coup de cœur, bien que personnellement, je continue d'apprécier un bon cigare après le repas, voire dans la journée, et que je n'ai jamais cessé de fumer la pipe. Quand je vivais à Venise, j'achetais mon mélange préféré, le Scottish mixture de Davidoff, la fameuse boite verte en métal, à la seule civette de la ville, calle dell'Ovo près du Rialto. C'est surtout que les Pasetti commercialisent ces merveilleux jouets de métal à ressort qu'on trouve de plus en plus difficilement. Créations ou rééditions, ces pièces sont davantage destinées aux collectionneurs qu'aux enfants (les normes de sécurité que le monde moderne a inventé). On y trouve un choix incroyable que je n'ai pas vu ailleurs à ce jour, sauf du temps de Petenello, à Sta Margherita.
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Paul Auster

Le carnet rouge
Actes Sud

Ce carnet rouge n'est pas une invention d'auteur. Il existe bel et bien. Depuis des années, l'écrivain y consigne des événements bizarres, mystérieux ou invraisemblables dont il a pu un jour être la victime ou le témoin, ou qui lui ont été racontés. Ces faits extraordinaires sont consignés en quelques pages acérées et précises qui, sous un humour assez vif, révèle son inquiétude et son questionnement. La réalité rejoint parfois la fiction et c'est toujours surprenant.
Ce que Paul Auster désigne lui-même comme un "art poétique sans théorie", devient un de ces bijoux merveilleusement travaillés où les mots sont des gemmes précieux dont on a du mal à se détacher. Cet authentique carnet est un joyau. Petit par la taille, c'est un grand livre qui révèle à ceux qui ne le connaîtraient pas encore tout l'univers austérien. Le genre de lecture que vous pouvez m'imaginer en train de lire à une terrasse de café sur les Zattere, quand la saison n'est pas trop avancée et que, tempéré par une douce brise marine, le soleil, à travers les bâches bleues, reste supportable...
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Venise Vivaldi Versailles

du 24/06 au 17/07/2011

Festival de musique
Château de Versailles

Extraordinaire festival que celui organisé au Château à l'occasion de la sortie de l'intégrale des œuvres de Vivaldi chez le label Naïve. Du dur comme on dit trivialement, et pendant trois semaines : concerts, festivités grandioses sur le grand canal et dans les jardins, soirées vénitiennes et carnavalesques à l'Orangerie, feux d'artifice et jeux d'eau... Le programme est alléchant. Télérama lui consacre plusieurs pages dans son numéro de la semaine. On pourra y entendre les plus grands noms de la musique baroque, tous ceux qui ont participé à la grande aventure de l'intégrale des œuvres connues du prêtre roux chez Naïve : Cecilia Bartoli, Philippe Jaroussky, Jordi Savall, William Christie, Fabio Biondi, Rinaldo Alessandrini, David Grimal, Jean-Christophe Spinosi, et l'acteur John Malkovich, qui sera Casanova dans une mise en scène de Michael Sturminger. Renseignements et réservations en cliquant ici
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Venezia
Rosenmüller, Legrenzi & Stradella
The Rare Fruits Council
dirigé par Manfredo Kraemer
Label Ambronay Editions, 2011.
Un disque tout en finesse, conçu par Manfredo Kraemer autour d’œuvres visionnaires et d'une grande intensité, totalement baroques. Un bonheur tout au long de l'audition vraiment. Les trois compositeurs venus d'horizons différents se sont croisés dans la cité des doges à la fin des années 1670. Rien ne permet de dire qu'ils se soient rencontrés. Mais plus de 300 ans après, par le miracle de la technique, nait un échange artistique splendide que nous offrent les éditions Ambronay, par le biais du Rare Fruits Council. Tout est beau dans ce disque, magnifié par une prise de son de haut niveau. C'est plein de fraîcheur, de spontanéité qui traduit bien la structure encore en recherche des sonates en cette fin du XVIIe siècle vénitien.

Comme l'écrit si bien Alexandre Barrère dans sa chronique pour Muse "[...] Manfredo Kraemer en peintre de lumières, a habilement joué sur les combinaisons de timbres et les effectifs, [...] Le discours sait à chaque détour se faire dense et complexe, tout en ne reniant pas un certain hédonisme mélodique, et cette succession de sonates constitue un hymne au contrepoint et à la diversité. Si Rosenmuller n’hésite pas à perpétuer un style archaïsant propre à la première moitié du XVIIème siècle, Legrenzi n’abandonne pas pour autant l’enchevêtrement des pupitres au profit de la primauté mélodique... Avec Stradella, le langage s’épure, se tourne vers l’avenir, tend l’oreille vers une sorte de Corelli en plus frais, audacieux et spectaculaire, au risque de déséquilibrer le discours." Plus d'une heure de plaisir à consommer sans modération.