Une fidèle lectrice de Tramezzinimag
me cite "Les turbans de Venise" de Nedim Gürsel qu'elle est en train de
lire. C'est effectivement un excellent petit roman, paru en 2001, et
l'auteur a depuis à son actif plusieurs ouvrages passionnants notamment
"de Ville en ville, ombres et traces", paru chez Seuil et "Un long été à
Istanbul" dans la collection Imaginaire de Gallimard.
Je ne sais pas vous, mais moi ce mot "turban"
m'a toujours fasciné. Il évoque, quand on se préoccupe de Venise, la
grande époque où la Sérénissime dominait Constantinople et faisait la
fortune des souks du Caire, d'Alexandrie, de Smyrne, de Tripoli et de
Bagdad. Saviez-vous que la plupart des turbans et des tarbouz
et des fez étaient fabriqués à Venise justement ? Des navires amenaient
chaque semaine des cargaisons entières de ces longs morceaux de tissus
de mousseline ou de soie, de laine ou de cotonnade.
La
fabrique qui fournissait la cour du sultan était particulièrement
surveillée par la police secrète. On craignait qu'un apothicaire habile
au service de séditieux ou d'une puissance ennemie, empoisonne les
tissus pour attenter à la vie du calife et de sa famille. Les cachemires
importés d'Inde mais le plus souvent fabriqués à la manière de dans les
ateliers de la ville, plaisaient beaucoup. Surtout en hiver, car ils
étaient plus chauds. Les turbans c'est dans l'imaginaire, senz'altro, les peintures et les croquis de Bellini qu'il réalisa lors de son séjour chez le sultan Mehmet II .
C'est
l'idée que je me fais du marché du Rialto, du côté de la bourse des
marchands, avec les marins coptes, les esclaves éthiopiens qui
débarquaient les ballots d'épices, les fruits secs, les cuivres et les
métaux que d'habiles artisans dans les échoppes des alentours allaient
bientôt transformer avec talent. Les riches négociants juifs de Péra qui
venaient eux-même
s'assurer de la qualité des marchandises achetées et présentaient au
Fondaco dei turchi celles qu'ils venaient vendre...
Les marchands juifs venus d'Orient à Venise pour affaire avaient le droit de porter le turban (comme le caftan d'ailleurs)
de la même couleur que les musulmans et les chrétiens. Personne ne
pouvait ainsi les distinguer des autres marchands étrangers. La stricte
réglementation de la République qui obligeait les juifs demeurant sur
les territoires de la Sérénissime ne s'appliquaient pas pour eux.
C'était une aubaine, qui permettait à ces habiles négociants de servir
d'intermédiaire dans des affaires entre juifs du ghetto et chrétiens de
la ville. La république avait en effet intérêt à fermer les yeux
puisqu'elle y trouvait un intérêt financier certain...
1 commentaire:
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Merci pour toutes ces précisions, à bientôt. Vichka
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