C'était hier dimanche, sous un soleil véritablement estival,
que se déroulait la fameuse Regata Storica, l'un des évènements
traditionnels qui réunit le long du Grand Canal la quasi totalité des
vénitiens, toutes générations confondues. Fête
authentiquement vénitienne mais aussi évènement très couru qui attire
de nombreux visiteurs venus de toute l'Italie et du monde entier, sans
que soit dénaturé pour cela le caractère typique de la manifestation.
.
On
voit ainsi coude à coude d'authentiques gondoliers et leurs familles ne
parlant que le dialecte, de jeunes japonaises toutes excitées par
l'ambiance, des parisiens très concentrés sur leur appareil numérique
dernier cri, des matrones largement octogénaires sur leurs pliants, des
associations en tous genres, handicapés, gymnastes, défenseurs des
oiseaux, adeptes de la rame ou du kayak... Toute cette foule joyeuse et
bon enfant, est là pour suivre une régate qui, une fois passé le
toujours très apprécié cortège historique, au son de la musique de Vivaldi, est parfois surprise par la "lenteur" de l'évènement. C'est que tout est lié aux seuls mouvements des bras et des jambes des participants sur leurs barques.
Rien
ne se passe vraiment en dehors de la régate elle-même, chaque course
voit la tension monter quelques minutes avant la ligne d'arrivée dans
chacune des catégories. Et les commentaires vont bon train selon que
l'on soutienne l'équipage gagnant ou son challenger. Chaque année
apporte ensuite son lot de polémiques et tous les vénitiens gardent en
mémoire le souvenir des dernières courses : la hargne devenue légendaire
entre les deux meilleurs équipages qui se disputent depuis desannées la
victoire et contestent presque toujours la décision des juges, allant
jusqu'à l'échange de mots d'oiseaux sur la tribune officielle (la fameuse Machina)
avec le maire, devant la presse et le public médusés ! Pas de
contestation donc cette année, si ce n'est la plainte de l'équipage IUAV (l'université internationale de San Servolo) contre celui de la Ca'Foscari (l'université de Venise), mais deux ou trois couacs souvent très drôles.
En tout premier, l'évènement le plus surprenant qui donne déjà lieu à de nombreux débats et à des échanges assez vifs dans les osterie de la ville, c'est le bain forcé de Ivo Redolfi Tezzat et Gianpaolo D'Este, les vainqueurs des quatre dernières années. Leur gondolino bleu a chaviré juste après le départ, devant San Marco. Envolé pour eux l'espoir de recevoir le titre de "rois de la rame"... Vous imaginez le choc pour les vénitiens : un gondolier à l'eau, c'est plutôt rare surtout quand il s'agit du fort en gueule Gianpaolo d'Este, légendaire héros pour de nombreux vénitiens !
Autre
évènement qui s'avère en fait un non-évènement, mais plutôt
l'illustration de ce qu'est devenu l'ex-service public italien
d'information sous le régime berlusconiste : La RAI
avait envoyé pour son reportage en direct, des journalistes vénitiens
mais aussi des milanais. Retransmis sur des écrans géants, l'émission
n'a été pendant toute la durée de la régate, qu'un tissu d'inepties,
d'erreurs et de contre-vérités.
Pas un mot sur le "naufrage" de l'équipage d'Este, des erreurs monumentales dans le commentaire du Corteo Storico, où l'embarcation de la reine de Chypre, Caterina Cornaro est devenue le bateau de la reine Corsaro (corsaire !?), une affiche du président Obama
qui ornait le balcon d'un palais, a fait pérorer les journalistes
pendant de longues minutes, alors que la pression montait juste avant la
ligne d'arrivée, et j'en passe. Cela a fait rire la plupart des
vénitiens mais d'autres sont très en colère. Surtout que l'émission
avait été introduite par un reportage incroyablement plat débordant de
clichés sur Venise qui s'enfonce et se dépeuple en conséquence, avec une
musique du genre "que c'est triste Venise"...
Pourtant, à voir la joyeuse animation qui règnait le long des berges du Grand Canal, sur les fondamente
et sur les bateaux , la foule d'enfants et de jeunes vénitiens, les
familles avec leurs pliants et leurs glacières, les groupes d'invités
sur le campo près du Rialto (des jeunes handicapés très enthousiastes, les 40xVenezia
qui proposaient spritz et grignotage, et des autres jeunes associations
qui peu à peu ont décidé de prendre en main l'avenir de la ville). Sur la tribune officielle, la fameuse et somptueuse Machina,
construite depuis toujours au même emplacement et de la même manière,
autour des officiels, maire et patriarche en tête, se pressaient des tas
de VIP dont je n'ai pas retenu la liste, vedettes et producteurs de cinéma venus du Lido où se déroule en ce moment la 66e Mostra, hommes politiques, chanteurs, écrivains, etc...
C'est donc l'équipage marron des cousins Rudi et Igor Vignotto qui s'est vu remettre le fanion de la victoire. l'équipage bleu de Tezzat et d'Este a été disqualifié pour avoir chaviré. En deuxième place, c'est l'équipage vert d' Andrea Bertoldini et Martino Vianello, troisième place à l'équipage blanc de Guglielmo Marzi et Gaetano Bregantin.
La Régate des Dames sur Mascarete a vu la victoire du bateau jaune-canari de Luisella Schiavon et de Giorgia Ragazzi. Seconde place à l'équipage bleu de Gloria Rogliani et Debora Scarpa, troisième, le bateau orange de Rossana Scarpa et Romina Catanzaro.
La course des jeunes sur Pupparini a été remportée par l'équipage marron de Alvise D'Este et Denis Zanella suivi par le bateau vert de Nicola Ballarin et Andrea Rosada, troisième place à l'équipage orange de Tobia Pagan et Alvise Gavagnin.
Connaissant le caractère bouillonnant de Gianpaolo d'Este, on
s'attendait à une contestation en bonne et due forme de l'équipage qui a
chaviré, Mais l'incident n'ayant pas été provoqué par un choc avec une
autre embarcation, il n'y avait malheureusement rien à redire.
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