VENISE,UN LIEU MA ANCHE UN VIAGGIO NELL'EUROPA CHE MI PIACE NOT THE ONE OF THE GLOBALIZATION MAIS CELLE DES NATIONS DES PEUPLES DES CULTURES, PATRIA DELLA DEMOCRAZIA DELLA FILOSOFIA DELLA STORIA LA REINE DES VILLES AU SEIN DE L'EUROPE REINE DU MONDE
29 février 2024
En ces temps de médiocrité et d'imposture...
24 février 2024
L'hiver qui s'éloigne nous envoie son arrière-garde
Il n'est pas encore parti et n'a pas dit son dernier mot. Le bonhomme, rusé, envoie ses giboulées. Elles nous prennent par surprise. Ne sont-elles pas après tout placées sous l'égide du dieu de la guerre puisqu'on les sait naître en mars. Qui dit encore qu'il n'y a plus de saisons et que tout est chamboulé ? Apparemment le changement climatique, s'il s'avère être tout sauf une invention d'hallucinés adeptes du complot, n'a pas encore eu raison des adages paysans, des proverbes populaire de l'almanach Vermot.
by courtesy of © Catherine Hédouin - 2016 |
Car avec quelques heures d'avance sur la tradition climatique, les giboulées de mars nous tombent joyeusement dessus, aidées en cela par une mercenaire au joli nom de princesse. La tempête Pia qui provoque depuis quelques jours de fortes pluies et des vents violents dans le Nord de l'Europe et couvre désormais une bonne partie de l'Europe, routes sont bloquéeset zones côtières inondées, fleuves qui débordent faisant quelques victimes au passage et de nombreux dégâts. Pia décoiffe et fait s'envoler les parapluies, aboyer les chiens et frissonner les chats réfugiés bien au chaud quand ils le peuvent.Petit détail amusant : J'étais il y a un peu plus d'une heure, à Bordeaux, assis à une terrasse sous ciel d'un bleu très pur et un soleil primavérile - pour emprunter l'adjectif italien à Paul-Jean Toulet qui l'avait certainement lu dans un poème d'Adelsward-Fersen. Le café était digne des cafés italiens. Il me fallait rentrer à contre-coeur pour poursuivre ce travail de forçat auquel je m'astreins depuis des mois : reconstituer un à un la totalité des billets publiés dans Tramezzinimag depuis mai 2005, avec les illustrations, les vidéos, les sons et les nombreux commentaires d'origine.
La tentation était forte de délaisser mon devoir pour m'adonner à ce doux farniente, ma vraie nature en réalité, penchant honteux dans ce monde commandé par l'appât du gain et des apparences. Dehors, l'habituelle manifestation dominicale. Aujourd'hui, les ukrainiens. Quelques cris, des oriflammes bleus et jaunes. Les mêmes couleurs que celles qui décoraient quelques heures auparavant, le temps du café post-méridien et... la pluie, d'abord fine et discrète, le ciel d'un gris tellement sale, comme dans la chanson de Jacques Brel, un gris qui fait se perdre et se pendre un canal et fait l'humilité, et l'averse qui décuple sa force poussée par le vent d'est de la chanson. Encore un coup des méchants russes à moins que ce ne soit la faute des enfants de chœur ukrainiens. Ceci posé, je ne prêtais pas beaucoup d'attention à ce changement de décor, chronique attendue de ces semaines intermédiaires quand débute le Carême. j'avais à classer des photographies retrouvées dont j'avais fait mon deuil. Envoyées par une grande amie, soutien inconditionnel et lectrice de la première heure de Tramezzinimag, elles ont souvent illustré mes billets. Son œil acéré et son amour pour la Sérénissime produisent des clichés qui le plus souvent illustrent les articles du blog comme un complément naturel, évident des textes.
Le fichier qui s'ouvrit pendant que je me préparais une tasse de thé, contenait des clichés de Venise... sous la pluie ! Quand on dit qu'il n'y a pas de hasard ! Quatre d'entre eux ont été pris depuis les fenêtres du salon de l'appartement de la Calle dei Avvocati, qui donnent sur le campo sant'Angelo. Pendant plusieurs années, je m'y suis rendu, j'y ai reçu mes enfants, mes amis, il y eut des dîners entre amis, une exposition des grandes peintures d'une amie suédoise. Situé à l'étage noble, il était assez haut pour permettre une vision globale du campo mais le bâtiment très ancien faisait cet étage - celui du dessous, à l'entresol était occupé une partie de l'année par une artiste parisienne, et celui au-dessus de celui de Catherine, abrita pendant quelques mois une autre amie, vasco-parisienne, historienne de l'art venue inventorier l'ensemble de l’œuvre de Clementina et Lucio Andrich, couple d'artistes au talent éclectique, conservée dans leur villa de Torcello, sur les marais de la Rose.
Comme Catherine, la couleur rose saumon de la façade du palais de l'autre côté de la calle, me fascinait. Lorsque j'occupais l'appartement, je déplaçais canapé, fauteuil et bureau du salon pour pouvoir avoir à la fois la perspective du campo avec le campanile penché de Santo Stefano et cette façade muette dont l'enduit montrait des nuances changeantes selon les heures, était éclairé par une ogive gothique en pierre d'Istrie murée depuis longtemps. Quand il pleuvait - comme sur la photo ci-dessous - la visions était magique. L'immeuble rénové et les appartements refaits, je suis persuadé que l'actuelle occupante des lieux aime à contempler cette vue.
by courtesy of © Catherine Hédouin - 2016 |
Une situation assez proche de la rue donc pour assister à son spectacle sans cesse renouvelé, chaque jour et chaque moment de la journée en faisant un palcoscenico que n'aurait pas renié Mario Praz, Luchino Visconti ou son émule Franco Zefirelli. Vous entretenant de la pluie et des giboulées, ces quelques images instantanés capturés par Catherine Hédouin pendant l'été 2016, ne font-elles pas spectacle vivant, ballet de figurants hallucinés dont on ne sait que trop bien les préoccupations, celles-là même que Michel Butor a si joliment rapporté dans le somptueux San Marco dont il a été plusieurs fois questions dans ces pages.
En légende, ne pourrait-on pas - toujours sur un ton humoristique gentiment ironique - que même s'il pleuvait des hallebardes de bois et de fer, les touristes continueraient à arpenter les rues de la ville. Seuls les vénitiens savent aller par les ruelles étroites et les ponts glissants avec leurs parapluies, voir le désarroi des touristes est touchant. Un dépliant récent est à leur disposition pour savoir comment circuler avec un parapluie sans éborgner personne ni bloquer le flux des passants. Être bon vénitien n'est pas toujours inné, il y a des conventions et des usages à apprendre. Qu'on se le dise.
by courtesy of © Catherine Hédouin - 2016 |
Sur la première photographie, le lecteur avisé aura remarqué le cocasse d'une photographe immortalisant celle qui depuis la fenêtre du salon la prend eu même moment en photo... Je ne sais pas vous, mais on est en présence d'un de ces clins d’œil délicieux, qu'on peut classer dans la fameuse catégorie, tendre ou drôle, de l'arroseur arrosé !
Un grand merci à l'amie Catherine, pour ses photos, sa patience et son humour, à qui je dédie cette petite vidéo du vidéaste Phil Brammer que m'a adressé en 2016 un ami britannique
«Passeggiando sotto la pioggia, Venezia »(Promenade sous la pluie, Venise) a été filmé par Phil Brammer, le 23 avril 2016 dans les sestieri de San Marco et de Cannaregio.
23 février 2024
« Produire la civilisation en masse, comme la betterave... »
Retrouvé ce texte de Lévi-Strauss. L'extrait m'avait été envoyé par mon ami Antoine, journaliste et grand reporter, homme de radio et de passions. Parmi tout les messages que je recevais qui, pour la plupart, concernaient Venise mes publications sur Tramezzinimag, Antoine a fait partie, avec deux ou trois autres amis très chers, de ces correspondants dont on attend toujours avec impatience le courrier. Nos échanges épistolaires, avant d'être «dématérialisés» sur Hotmail, Yahoo ou Gmail, avaient la forme tant aimée de feuillets de papiers glissés dans une enveloppe aux jolis timbres dont l'oblitération portaient la date d'envoi. Toujours une surprise, un bonheur réveillé à chaque fois, A chaque missive, c'était comme un peu de soleil qui arrivait.
Qui prend désormais le temps d'écrire à la main ? On dit que les plus jeunes ne savent pas comment remplir une adresse ni où coller le timbre sur une enveloppe. On cherche les boites à lettres et les bureaux de poste se font rares, presque tous devenus des bazars où on peut acheter tout. Propos de ringards, je sais. J'assume cette nostalgie. L'attente du facteur qui passait deux fois par jour, le regret des lettres en papier pelure et leurs enveloppes encadrées d'une bande tricolore réservés aux envois «Par Avion», les cartes postales postées tôt dès la première levée et qui parvenaient à leur destinataire le soir-même, les télégrammes qu'on recevait en mains propres, porteurs de sinistres nouvelles ou de joyeuses annonces. Je pourrais paraphraser Gainsbourg, Je me «souviens des jours anciens» et «je pleure»... mes «sanglots longs ne pourront rien y changer».
Était-ce de l'aveuglement ou un trait de mon caractère naturellement porté vers la joie et l'optimisme, mais cela me semble un vrai bonheur que d'avoir connu cette époque où notre civilisation se
déployait, les guerres n'étaient que des souvenirs,
vivre semblait ne pouvoir être que joyeux. On se moquait des postes
italiennes, espagnoles et des pays qu'on disait moins civilisés. On se
moquait aussi de leurs trains toujours en retard. Puis notre époque moderne a
laissé s'emballer la technique, le progrès est devenu une fin en soi,
l'argent aussi. On nous enseignait que ce n'étaient que des outils qui allaient faciliter la vie de tous, façonner
l'égalité et par ricochet la fraternité. On sait aujourd'hui combien
progrès, technique, communication et pognon grignotent jour après jour
nos libertés, La Liberté. Et c'est la voix de Léo Ferré que j'entends
dans ma tête en tapant ces lignes « Avec le temps, va, tout s'en va... tout s'évanouit...»
Antoine donc, dans un courriel m'avait adressé cet extrait de l'ouvrage célèbre de l'anthropologue Claude Levi-Strauss. Je ne sais plus à quel propos. C'est en le lisant que j'ai pensé à cette notion du « Spirito del Viaggiatore » qui est devenu un libellé du blog et sera bientôt je l'espère, le titre d'une collection des Éditions Deltae.
Ceux d'aujourd'hui n'ont rien connu de cette époque. C'était déjà la fin de ce monde porté par nos grands-parents, ceux qui ne voulaient plus de guerre, plus de misère, plus d'injustice. Un réalisateur disait sa surprise en tournant un film se déroulant dans les années 80, de voir ses jeunes acteurs de vingt ans ne pas savoir comment utiliser le cadran d'un téléphone pour y faire un numéro pris dans un annuaire en papier... La mélancolie ne doit pas tourner à l'aigreur ni aux regrets. Les premières automobiles étaient réservées à une élite, n'importe qui aujourd'hui possède une voiture et les voyages sont plus rapides, les distances abolies...
On peut voir les choses ainsi et penser qu'en dépit de ce que nous avons perdu, oublié ou sacrifié du passé, tout est pour le mieux ; qu'il suffit de quelques ajustements, quelques recadrages pour qu'enfin le monde vive un nouvel âge d'or... Et pourtant, combien les signaux se font de plus en plus voyants ! Partout la démocratie recule, mise en cause par ceux-là même qui devraient la défendre, partout les égoïsmes prennent le dessus sur la solidarité, l'empathie, le partage. La fraternité est devenue communautariste, les esprits ne connaissent plus les nuances, il y a ce qui est blanc et il y a ce qui est noir... C'est là-dedans que nos enfants grandissent. Vettore Zanetti. Coll. Part.
Venise - Tramezzinimag a toujours défendu cette idée - est un laboratoire. On peut y observer à la fois les pires choses, les choix les plus imbéciles, les comportements les plus détestables qui à un moment ou à un autre se reproduisent ailleurs. On peut y retrouver des idées, des techniques et des systèmes spécifiques qui peuvent être implantés ailleurs. C'est l'exemple de la protection des eaux que dès le Moyen-Âge la Sérénissime sut mettre en place, celui de la gestion des communications et des infrastructures qui fascina Le Corbusier et inspira l'architecture des villes nouvelles, etc. Aujourd'hui la Venise contemporaine doit affronter, comme ailleurs, la déliquescence de ses élites qui, à de rares exceptions, travaillent pour leur propre intérêt et semblent n'avoir pour devise que le triste "après nous le déluge"* qu'on attribue à tort à l'un de nos rois.
« Voyages, coffrets magiques aux promesses rêveuses, vous ne livrerez plus vos trésors intacts. Une civilisation proliférante et surexcitée trouble à jamais le silence des mers. Les parfums des tropiques et la fraîcheur des êtres sont viciés par une fermentation aux relents suspects, qui mortifie nos désirs et nous voue à cueillir des souvenirs à demi corrompus.
« Aujourd'hui où des îles polynésiennes noyées de béton sont transformées en
porte-avions pesamment ancrés au fond des mers du Sud, où l'Asie tout entière prend le visage d'une zone maladive, où les bidonvilles rongent l'Afrique, où l'aviation commerciale et militaire flétrit la candeur de la forêt américaine ou mélanésienne avant même d'en pouvoir détruire la virginité, comment la prétendue évasion du voyage pourrait-elle réussir autre chose que nous confronter aux formes les plus malheureuses de notre existence historique ? Cette grande civilisation occidentale, créatrice des merveilles dont nous jouissons, elle n'a certes pas réussi à les produire sans contrepartie. Comme son œuvre la plus fameuse, pile où s'élaborent des architectures d'une complexité inconnue, l'ordre et l'harmonie de l'occident exigent l'élimination d'une masse prodigieuse de sous-produits maléfiques dont la terre est infectée. Ce que d'abord vous nous montrez, voyages, c'est notre ordure lancée au visage de l'humanité.
« Je comprends alors la passion, la folie, la duperie des récits de voyage. Ils apportent l'illusion de ce qui n'existe plus et qui devrait être encore, pour que nous échappions à l'accablante évidence que vingt-mille ans d'histoire sont joués. Il n'y a plus rien à faire : la civilisation n'est plus cette fleur fragile qu'on préservait, qu'on développait à
grand peine dans quelques coins abrités d'un terroir riche en espèces rustiques, menaçantes sans doute par leur diversité, mais qui permettaient aussi de varier et de revigorer les semis. L'humanité s'installe dans la monoculture, elle s'apprête à produire la civilisation en masse, comme la betterave. Son ordinaire ne comporte plus que ce plat. »
15 février 2024
Archives : Le livre d'or de Tramezzinimag retrouvé !
Chers Lecteurs, vous vous souvenez peut-être du Livre d'Or de notre blog qui permettait de laisser un message comme on le fait lors d'une réception ou d'une cérémonie, un vernissage, etc. Il fut actif en ligne à partir de 2007.
Perdu en même temps que le reste en 2016, nous en avons enfin retrouvé des bribes que nous venons de poster sur une page spécifique que vous trouverez parmi les autres pages dans la rubrique : Les Hors-Textes de Tramezzinimag : cliquer ICI
11 février 2024
Relectures et commentaires...
Le 13 août 2009, je tempérais les propos publiés la veille (ICI) sur l'arrivée prochaine de l'armée dans les rues de Venise contre l'avis de la municipalité d'alors, progressiste et démocrate. Les militaires font leur métier certes mais ils doivent le faire dans un cadre bien précis (pour défendre le peuple souverain et son territoire ou ses alliés). Mais les ajouter aux forces de police apparemment parce que cela rassurerait les gens est une mesure qui nous paraissait dangereuse en 2009 comme de nos jours...
Elle nous habitue à cette présence armée qui un jour peut être utilisée à des fins d'oppression violente et menacer notre liberté et nos droits. Le 13 août donc, le billet se voulait rassurant et rectifiait le précédent où nous nous étions fait l'écho des rumeurs qui parlaient d'un bataillon entier appelé être déployé dans la ville comme dans une république bananière ( ce que Venise même au temps de sa toute puissance n'aura été). Les dernières lignes sur les «bonnes raisons qui pourraient être invoquées» ont ainsi pris un sens prophétique...
je vous invite à jeter un coup d’œil sur ces billets (le sommaire du site est en entier sur la colonne de gauche), et à retourner voir d'autres billets sur le MOSE encore en gestation à l'époque, des photographies de la Venise d'il y a quinze ans ou plus.
Et puis, nous avons pu retrouver les commentaires - très nombreux à l'époque - de nos lecteurs. peut-être vous y retrouverez-vous ou reconnaîtrez-vous les signatures d'amis disparus, devenus blogueurs à la suite de Tramezzinimag ou à peu près à la même époque, qui tous ensemble avec nous ont forgé une image de Venise enfin détachée des clichés d'autrefois.
Ajoutez-en, faites vivre par vos commentaires, vos réactions, vos avis, vos idées.
Notre Tramezzinimag déploie depuis 2005 la même philosophie où prime la joie, l'amour et la sérénité. Venise est un monde et sa beauté, sa lumière, les sons et bien entendu ses habitants. Le leit motiv pourrait en être ces mots de Tommaso Paradiso «Non Avere Paura...
Bon dimanche !
08 février 2024
Tramezzinimag remonte le temps avec Wayback Machine !
Comme je l'annonçais en fin d'année, Tramezzinimag, s'il n'a pas retrouvé le nombre de lecteurs quotidien et a perdu plus de 80% de ses abonnés depuis ce jour fatidique du 28 juillet 2016 où le site fut avalé par un robot gourmand avec la totalité des archives, notes, vidéos, sons, photos, ou par la volonté inique de certaines personnes que les billets dérangèrent, a résisté. Tramezzinimag II a pris la suite et vaillamment, avec une équipe réduite au minimum, nous avons reconstitué le blog.
En retrouver les pages perdues est donc depuis des mois notre mission. Bien des billets sont encore à repêcher sur la Toile (encore un terme qu'on n'emploie plus 19 ans après la naissance de Tramezzinimag...
Sa résurrection, avec le soutien de lecteurs fidèles, tous devenus de vrais amis, mais aussi grâce à un outil web dont nous ne vanterons jamais assez les mérites, l'extraordinaire Wayback Machine - littéralement « machine à revenir en arrière » -, inventé un organisme à but non lucratif, Internet Archive (**) qui permet d'accéder aux clichés instantanés de pages web qu'il stocke depuis sa création. Sans cette gigantesque bibliothèque numérique, les 2148 billets publiés entre le 7 mai 2005 et le 16 août 2016 auraient été irrémédiablement perdus.
Le temps passé à reconstituer les pages anciennes, repostées avec les dates d'origine (même année, même même jour, même heure) pour en faciliter la recherche par les lecteurs, se fait au détriment de la création de nouveaux billets.
Mais ce n'est que temporaire, nous avons tellement d'idées de sujets à évoquer pour nos lecteurs et la relecture des billets d'il y a huit, douze ou dix-huit ans nous permet de mesurer comment les choses ont évolué ou se sont dégradées pour Venise, les vénitiens et la lagune.
Notes :
02 janvier 2024
Les Voeux de Tramezzinimag à nos fidèles lecteurs
Bon Ano Novo !
Buon Anno a Tutti !
Happy New Year !
Bonne Année à tous !
Godt nytår
til alle !
Καλή χρονιά σε όλους !
¡ Feliz Año Nuevo a todos !
שנה טובה לכולם
Новым годом вас
всех!
新年明けましておめでとう!
Hyvää uutta vuotta teille kaikille!
سال خوبی داشته باشید
30 décembre 2023
Une douce paix violette sur le sentier du soir. Journal retrouvé
«Trahi.[...] Comme par quiconque vient ici à Venise puis repart.Comme par quiconque reste ici une semaine, deux semaines, un mois ou six ou un an. Et puis s'en va, retourne à la maison. Chez lui. Trahit Venise, me trahit. Oui, me trahit parce qu(il m'abandonne comme on abandonne u Pour souffrir encore plus, parce que ln amoureux qui finit par se trouver invivable parce que sale, parce qu'ennuyeux, parce que dépassé. Un amoureux sans colonne vertébrale parce que prêt- et il le fait à chaque fois en tout état de cause - à accueillir avec un sourire aimable chaque retour. Si retour il y a. Il l'espère. Parfois en vain, d'autres fois, le débarquement advient à coup sûr. Pour souffrir encore plus parce que la séparation se répètera encore et encore. Et il le sait. « Mais quand reviens-tu ?» : j'en ai assez d'entendre répondre «Bientôt». Parce que«bientôt», c'est quand ? **
«Non avere paura, mi prendero cura, io di te»... Ces paroles d'une chanson de Tommaso Paradiso résonnent dans ma tête. Parfaite illustration de ce que j'ai ressenti depuis ce matin sur le quai de la gare d'Antibes, quand le train s'ébranla emportant avec mon ami Francesco, toute la Venise et ma vie d'avant. Prendre soin, aimer contre vents et marées, soutenir, portzer et puis un jour laisser partir ceux qui sont nés de nous, de notre amour, de notre folie...No, non avere paura
Quando vai a dormire sola
Se la stanza sembra vuota
E se senti il cuore in gola
Non avere paura
Mi prenderò cura, io di teNo, non avere paura
Quando a un tratto si fa buio
E la luna non è accesa
E vorresti una parola
Ma hai solo un rossetto
Mi prenderò cura, io di te...
cette photographie est les suivantes sont de Serge Assier - Tous Droits Réservés |
Quelques années plus tard, lui aussi est parti. Pour éviter de souffrir du départ de tous ceux qui viennent à Venise et semblent vouloir y rester mais finissent toujours par retourner d'où ils viennent...
Par une sorte de maléfice, moi qui n'ai jamais rien tant souhaité que de poser un jour et à tout jamais mes malles remplies de livres et de souvenirs sur les dalles de la Sérénissime, je trahis sans cesse mon vœu et ma ville, ne réalisant pas l'un et abandonnant l'autre à chaque fois et pleurant de le faire... Mes enfants peut-être, un jour.
Cet ouvrage est un bonheur de lecture. Il est illustré par les photographies de Serge Assier, choisies dans l'ouvrage « Les Coulisses de Venise ». Tramezzinimag en montre quelques unes et je reviendrai sur le rapport intime de Michel Butor, voyageur, avec la Sérénissime. Lorsque Antoine Lalanne-Desmet se rendit chez l'écrivain pour l'enregistrer, j'avais prévu de l'accompagner. Je n'ai pas pu. Nous aurions parlé de Venise comme il m'en parla lors de notre promenade bordelaise. Je retrouve dans le Chevalier morose un peu de la conversation que nous avions eu.
Nous avions évoqué devant le tableau médiocre de «Saint Mommolin guérissant un possédé» de Guillaume Cureau, un peintre local de la fin du XVIe siècle, récemment rénové qui venait d'être en partie lacéré par des petits voyous tchétchènes du voisinage, la perception de la beauté au fil des âges, l'usage qu'en firent le christianisme, comme le prolongement de la pensée antique. Le sujet me passionnait. C'est cette thématique que j'avais choisi à San Sebastiano, quand je suivais - trop épisodiquement - les cours d'Histoire des Arts.
Je voulais mettre en avant des évidences de lien, de transmission, entre l'art païen et l'art chrétien byzantin puis européen... Je m'étais plongé dans la peinture du Trecento, cette période incroyable de l'Ars Nova, univers féérique pour le petit étudiant français mal dégrossi que j'étais. Ce quatorzième siècle qui semblait tellement éloigné des temps antiques, grossier, mal débourré que la plupart des intellectuels concevaient comme affadie en comparaison de toutes les somptuosités de la Renaissance à venir. Je me souviens d'une conversation qui portait sur la peinture vénitienne, lors d'un dîner au Palais Polignac. La maîtresse des lieux, l'incomparable duchesse Solange, m'interrogeait sur mes préférences dans l'art ancien. Je parlais de ce XIVe siècle que je découvrais avec passion. Elle me fit répéter, « vous voulez dire le quattrocento, Laurent ?», « - Non, non Madame la duchesse, le trecento, avec ses ors et ses visages figés qui pourtant s'animent et semblent venir de bien plus loin que les temps précédents, comme un pont entre l'art antique et nous». Et je citais Paolo et Lorenzo Veneziano, Jacobo Del Fiore, m'agitais tellement que j'en faisais tomber ma serviette et failli renverser mon verre que je secouais trop vivement. On n'en voulu pas trop de cet éclat, puisque je fus par la suite souvent convié au Palais. On eut l'indulgence de ne pas me tenir rigueur de m'être emporté. Une simple conversation de courtoisie autour de la table ducale se devait de ne rien bousculer des usages et de la bienséance...
Nous eûmes l'occasion de poursuivre le débat, j'expliquais à la duchesse combien je trouvais fascinante cette peinture, à la fois hiératique et naïve, pompeuse et rustique, mais remplie d'une fougue contenue, d'une modernité en train de mûrir surgie du monde byzantin qui m'a toujours fasciné...
«Lors de mon premier voyage à Venise, il y a plus de cinquante ans,il y avait au Palais des Doges, sous l'invocation de Marco Polo, une magnifique exposition sur la Chine.Venise m'apparaissait déjà comme une charnière, comme un hublot par lequel épier un monde dans l'autre, le trou de serrure...»***Mes propos amusèrent Butor. Il évoqua l'art asiatique et me parla de cette fameuse exposition de 1954 au Palais des doges qui l'avait beaucoup marqué et montrait à l'évidence le rôle fondemental de Venise dans l'art et la propagation des idées.
Je jubilais : cette idée de Venise-laboratoire, lieu d'innovation, d'invention dont la connaissance ne peut qu'aider le reste du monde dans ses réflexions, ses problèmes... Dans tous les domaines, Venise montre l'exemple, qu'il soit bon et à suivre, ou mauvais et à éviter.
Les religions, l'art, la beauté...Vastes sujets. Je n'avais que vaguement entendu parler de l'exposition qu'il évoquait, mais je me souviens de celle qui fut organisé par les Présidents Sandro Pertini et François Mitterrand en 1983, «7000 ans de Chine à Venise». Près de quarante après, cette somptueuse exposition prolongeait celle qui fascina Butor et qu'il évoque dans le petit texte introduisant le Récit-Scénario évoqué plus haut.***
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Notes :
* Traduction : Je suis à la rue, sans domicile. (Mode de dire en dialecte.)
** Francesco Rapazzini, «Un été vénitien»,(Bartillat, Paris 2018), p.181
*** Michel Butor, Le Chevalier morose, (Hermann,Editeurs,2017), p.18