21 novembre 2007

Bonne fête de la Salute

Comme chaque année depuis des siècles, c'est aujourd'hui la solennité de la Salute, avec le pèlerinage de la population de Venise, patriarche en tête, à l'église éponyme, en passant par le pont votif en bois.

En ce jour dédié à la présentation de Marie au Temple, les vénitiens depuis la grande peste de 1631 ont l'habitude de se rendre en grande pompe à l'église de la Salute en passant depuis San Marco par un pont votif qui enjambe pour l'occasion le grand canal. Chaque année la foule est très nombreuse entourant le patriarche et l'ensemble des autorités constituées.
Il reste peu de fêtes populaires que les vénitiens aiment à célébrer entre eux sans que les touristes s'en emparent. La fête de la salute est peut-être la dernière authentique festivité datant de la Sérénissime qui réunisse croyants et non croyants dans une même communion aux traditions ancestrales. Toujours la même ferveur et les mêmes rites tous les ans, le 21 novembre. Una façon pour les vénitiens de marquer l'amour qu'ils portent à leur ville. Qu'ils vivent dans le centre storico ou sur la terra-ferma, ils vont en pèlerinage à l'église de la Madonna della Salute en remerciement à la vierge noire d'avoir sauvé la Sérénissime de la grande peste de 1630.
Cette fête automnale a toujours un côté magique, peut-être parce que la plupart du temps, aux belles journées de l'été de la Saint Martin que nous avons vécu la semaine dernière, succède avec la nouvelle lune, un temps maussade, brumeux, grisâtre et où la pluie se met à tomber. C'est un moment toujours émouvant qui semble fasciner les rares touristes qui séjournent à Venise en cette période. Mêlés au flux des pèlerins, ils suivent le même parcours, les yeux grands ouverts. Rien à voir avec le Redentore. Encore moins avec le carnaval. Tout est d'aujourd'hui et pourtant hors du temps. Calli et Campi sont remplis de monde, aux murmures des prières et des invocations ferventes s'ajoute le cri des marchands de bonbons et autres sucreries traditionnelles. On vend des cierges mais aussi des ballons. La tradition veut que l'on se rende en barque tôt le matin à la première messe. Un tableau célèbre de Canaletto montre cet afflux de gondoles et de barques en tout genre qui amènent les fidèles aux pieds de la belle église de Baldassare Longhena.

Après le sacré vient le profane avec les nourritures terrestres. L'usage est de servir ce jour là la Castradina, une soupe roborative faite à base de mouton cuit et recuit, et de chou (la variété la plus répandue en Italie qu'on appelle souvent en France le "Chou de Milan", en latin "Brassica oleracea sabauda"), pour se souvenir - c'est ce que dit la légende - qu'au temps de la Grande Peste, la ville mise en quarantaine, le dernier navire qui entra dans le port transportait des gigots de mouton en provenance d'Istrie. Ce qui permit de nourrir la population. Cette tradition est arrivée jusqu'à nous. 
 
Il existe même depuis 1997, une très sérieuse confrérie de la castradina fondée par l'architecte Marino Alessandri qui défend la recette traditionnelle de ce plat typique servi dans toutes les familles vénitiennes la nuit du 21 novembre. Preuve et affirmation d'une authentique "venezianità" (traduire par vénitienneté me semble acceptable) ce plat typique a pourtant failli disparaître en même temps que s'allégeait la cuisine de la lagune, se mettant au goût des plus jeunes pour une cuisine plus simple et moins longue à préparer. L'étranger a qui l'on sert ce plat pour la première fois, se demande toujours ce qu'on lui propose de manger. Soupe fumante, tenant davantage du ragoût, voire de la purée, que d'un potage, la castradina a un fumet merveilleux et quand on y a goûté, il est impossible de ne pas l'aimer. En fermant les yeux, on imagine une foule bigarrée répandue sur toute la longueur de la riva degli Schiavoni, des hommes et des femmes provenant de toutes les régions de l'Adriatique, de Bosnie, de Dalmatie, d'Albanie, de Grèce, portant des paquets, chargeant et déchargeant des marchandises. Leurs barques de petit tonnage, légères mais très rapides faisaient sans cesse la navette entre les côtes d'Istrie et Venise. Ces bateaux transportaient surtout des denrées alimentaires que la Sérénissime ne produisait pas en assez grande quantité ou qui n'existaient pas dans la Péninsule. Par cette voie maritime sont arrivées de nombreux aliments qui ont profondément marqué de leur empreinte la cuisine vénitienne, modifiant parfois complètement et à jamais, les habitudes alimentaires de la population. Dans beaucoup de plats vénitiens on sent les parfums de la Dalmatie, comme le riz in cavroman, mélange de riz rond et de mouton haché, le mouton bouilli servi avec des pommes de terre, l'agneau à l'orientale, rôti après avoir été enduit de beurre et de lait... Mais c'est la castradina qui porte le plus, encore aujourd'hui, la marque de l'histoire tout en étant un symbole religieux pour les vénitiens comme l'agneau pascal ou les 13 desserts des marseillais à Noël. 
 
La castradina est un plat qui évoque le souvenir des terres perdues outre-mer que l'on appelait "le altre Venezie" (les autres Venises) plus que des colonies ou des territoires occupés. On pourrait débattre longtemps de ce que fut la venezianità dans ces pays de la côte adriatique : une harmonie totale avec la république que Bonaparte et les autrichiens ont détruit à Campo Formio
 
Mais revenons à notre mouton. La castradina est donc un plat que l'on déguste à Venise chaque 21 novembre depuis 1631, année de la première fête solennelle de la Salute. Les vénitiens ne plaisantent pas avec la Santé (Salute en italien). La viande qui arrivait de Dalmatie était salée, fumée et séchée. Elle provenait de jeunes moutons castrés. Toutes les connaissances de l'époque en matière d'hygiène participaient à la confection de ces conserves de viande qui avec les légumes secs, la farine et certains légumes de grande conservation comme les choux ou la citrouilles, permettaient d'affronter les périodes de quarantaine et de faire face à toute urgence sanitaire. Nous qui possédons les antibiotiques et les réfrigérateurs, il nous est difficile de comprendre le soin apporté à ces denrées. 
 
Elio Zorzi dans son livre "Osterie Veneziane", paru en 1928, nous apprend que "la première mention de ce plat se trouve dans un des plus anciens documents relatifs aux denrées alimentaires de la République : dans l'édit fixant les prix établi par le Doge Sebastiano Ziani daté de 1173 on parle de "sicce carnis" de Romanie et Schiavonie. La castradina est en fait de la viande de mouton, taillée par moitié en longueur, salée puis fumée puis mise à sécher à l'air et conservée dans les entrepôts et les magasins" (pardonnez-moi cette traduction rapide et maladroite). 
 
Il est pratiquement impossible de déterminer précisément comment et à quel moment un plat provenant des Balkans a pu être assimilé à la plus vénitienne des fêtes religieuses typiquement . Quoiqu'il en soit, la recette s'est transmise de génération en génération. De nos jours la viande ne provient plus de Dalmatie mais de Sauris, près de Udine, à plus de 1200 mètres d'altitude, dans les montagnes. Venise n'a pratiquement plus aucun lien avec ces terres du Levant qui furent son domaine sinon ce plat, dont on retrouve des variantes jusqu'en Macédoine voire en Turquie sur les bords de la mer Noire.
 
Jusqu'à ce soir 23 heures 30, et pour la 377e fois, il sera possible de se rendre à l'église de la Salute à pied, par le pont qui part de Sta Maria del Giglio jusqu'à la calle S. Gregorio à Dorsoduro. Des milliers de cierges brûleront sur le chemin et autour de l'autel ou siège la fameuse icône miraculeuse de la vierge noire. Et il y aura tellement de monde que, comme chaque année des sens uniques seront mis en place pour les piétons !

20 novembre 2007

La photo du jour

Les gondoliers prêts pour le calendrier 2008

Sans commentaire

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3 commentaires:
Anonyme a dit…
J'aime tellement votre blog, puis-je publier une de vos photos avec le lien sur votre blog sur mon blog que je viens de créer sur My Space ? J' ai envoyé aussi le lien votre blog à un ami Vénitien exilé au Brésil, journaliste (il dirige la revue Planeta à Sao Paulo) il le trouve magnifique. Sunny
Lorenzo a dit…
Bien volontiers et merci !
Anonyme a dit…
Je rêve de flâner en gondole la nuit. M.17

19 novembre 2007

Un site pour les nostalgiques

Quand on aimerait se trouver là, sur un campo ou en chemin vers la Piazza, prendre le traghetto à Sta Sofia pour aller au marché, errer devant les vitrines qui se garnissent peu à peu de guirlandes et de rubans, prendre un café bouillant dans un petit bar où les gondoliers désœuvrés jouent à la belote. Quand on aimerait être à Venise et qu'on est ailleurs, il faut penser au jour où l'on reviendra et trouver des substitutions. Voilà un site qui en renouvelant quatre fois par jour ses images donnent quasiment en direct l'impression d'être à sa fenêtre à Venise. C'est très court et la musique fait un peu supermarché, c'est quatre fois par jour sur Earth-TV. Allez jeter un coup d’œil :
 
Bonne journée à tous. Il fait encore assez beau sur Venise. La température est fraîche (12° à midi) mais on est loin encore du grand froid de l'hiver. Le ciel est clair. Il y a peu de monde. Très belle lumière mais la nuit tombe vite. C'est bientôt la Fête de la Salute dont je vous reparlerai.

18 novembre 2007

Vie quotidienne

Les journées à Venise comme partout ailleurs sont rythmées par les travaux et les obligations de chacun. Les uns et les autres vont et viennent ici comme dans toutes les villes du monde. Avec quelque chose en plus. La lumière, la toponymie des lieux, ce décor magnifique qui ne peut laisser personne indifférent. Même quand on est né ici, même quand on y vit depuis toujours. On a parfois envie de sortir de cet univers tellement beau, tellement unique. Mais une fois loin de Venise, on ne pense qu'à y retourner...

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2 commentaires:

Pierre a dit…
Quels jolis moments tu nous réserves Lorenzo merci pour ce blog
Anonyme a dit…
Le quotidien exaltant d'acheter ses timbres al Fondaco dei tedeschi,
même sans les fresques de Giorgione et de Titien ou de s'approvisionner de lattughino e ruccola alla barca à San Barnaba...
M.17

17 novembre 2007

COUPS DE CŒUR N°20

Venise, Vivaldi et les sonates opus 1 
Antonio Vivaldi, Suonate da camera a tre, due violini 
e violone e cembalo (1705) 
Enrico Gatti et l'ensemble Aurora 
Livre et 2 CD
Glossa, Editiones Singulares, 2007. 

Alors là c'est la trouvaille du trimestre : un superbe ouvrage et un magnifique enregistrement de l'Opera Prima du prêtre roux, dans la très belle collection de la maison Glossa. Un objet d'art à tirage numéroté à un prix accessible (27,50 €) qui présente le premier travail édité connu de Vivaldi . Une centaine de pages consacrées à Venise à l'époque où des musicologues de renom (Michael Talbot, Adriano Olivieri, Alessandro Borin, Stefano Russomanno et Enrico Gatti lui-même, dans une langue claire et limpide (admirable traduction) présentent la musique, le monde de l'édition, l'art et la vie dans la Sérénissime à l'aube du XVIIIe siècle. L'enregistrement est sublime. Les instruments (d'époque ou répliques) sonnent parfaitement, montrant la virtuosité du compositeur encore jeune (il approche de la trentaine quand il compose ces sonates), mais aussi les faiblesses de certaines compositions. L'Ensemble Aurora est à mon avis un des meilleurs du monde baroque actuel et Enrico Gatti est un formidable virtuose tout en discrétion et en intelligence. On est déjà dans le monde unique de Vivaldi, tout en retrouvant de nombreuses parentés : Arcangelo Corelli pour l'inspiration, Jean Sébastien Bach pour le cousinage, pour ne citer qu'eux. Œuvre juvénile que son auteur sans la désavouer ne semble pas avoir beaucoup estimé puisqu'il en réutilisa très peu le matériau, mais cet opus 1 a vraiment un charme incroyable. Je souhaite vraiment que le Père Noël dépose ce bel objet dans vos petits souliers ! 

Le pain italien 
Adèle Orteschi & Alain Gelberger 
Collection 1 produit 100 recettes, 
Editions Minerva. 
Autant livre de cuisine qu'ouvrage d'art avec une belle présentation et une mise en page très agréable. L'auteur, Adèle Orteschi est d’origine vénitienne. Elle a déjà publié de nombreux ouvrages sur la cuisine italienne et le bassin méditerranéen, dont Les Pâtes du Terroir italien, chez Minerva. Dans cet ouvrage, elle prouve qu’à partir d’un produit aussi simple que le pain (italien), décliné en de nombreuses variétés régionales, il est possible de réaliser d’incroyables recettes, originales ou traditionnelles, et surtout délectables. Les recettes de pain sont ainsi expliquées et déclinées de différentes manières : focacce, bruschetta deviennent antipasti, crostini, et... tramezzini ou même de succulents desserts, mariés avec tous les trésors de l’Italie : mozzarella, ricotta, anchois, tomates, huile d’olive et plein d'autres produits. Tours de mains, astuces illustrées par de vraiment belles illustrations viennent enrichir cet ouvrage gorgé de soleil. 100 recettes familiales et exceptionnelles mises en images par Alain Gelberger, talentueux photographe culinaire. 

Caffé-Torrefazione Costa Rica 
Rio Terà an Leonardo 
Cannaregio 1337, 
Venise. 
041 71 04 71 
Saviez-vous qu'on peut trouver à Venise, un espresso extraordinairement bon pour 80 centimes (ce qui représente tout de même 5 de nos bons vieux francs et 1.000 Lires italiennes). Rien à voir avec les cafés servis en France à prix d'or ou l'addition corsée (un comble ici !) du Quadri ou du Florian... Il existe en effet un petit bar installé depuis 1930 dans le sestier de Cannaregio, la Torrefazione Costa Rica. C'est avant tout un torréfacteur, mais aussi un bar apprécié des habitants du quartier et des gens de passage. L'atmosphère est d'un autre temps, années 50 voire avant, dans un décor très simple et surréaliste à la fois. comme un tableau de Magritte. C'est je crois le seul endroit au monde où les sous-tasses sont installées à demeure sur le comptoir en attendant d'y recevoir votre tasse remplie d'un nectar onctueux et parfumé. L'accueil est chaleureux et extrêmement poli. Un lieu unique, moment de civilisation, où il est encore possible de déguster, le temps d'un café, la sensation unique que l'argent que l'on dépense et la courtoisie valent encore quelque chose. Un bonheur.

Pizzeria Kebab Le Piramidi 
6342 Castello, 
Salizzada Ss Giovanni e Paolo 
Venezia 
041 520 04 74 
Je n'ai pas l'habitude de recommander les pizzerie et autres kebab qui fleurissent aussi à Venise et procèdent davantage du Junk food à l'américaine que le mouvement SlowFood (et l'Académie Italienne de la cuisine dont j'ai l'honneur d'être membre). Cependant ce petit bar tenu par l'égyptien Anwar Taha Dldar, est sympathique. On y fabrique des pizzas sans prétention et il est facile de s'y restaurer à peu de frais. L'accueil est chaleureux et puis c'est la cantine préférée de mes amis du club sportif Arsenale G.Giaquinto dont l'équipe de basket a montré certaines années de réelles qualités parmi les amateurs italiens. La Palasport où ils s'entraînent (en salle) est cette salle de sport qui jouxte le musée naval à Castello. Vu leur appétit (et les carcasses qu'il faut alimenter !) et leur habitude de la bonne cuisine de la mamma, il n'y a pas de doute, dans la catégorie restauration sur le pouce, c'est une bonne adresse. 

Bar Clodia 
calle delle Rasse 
San Marco, Venise. 
Les meilleurs tramezzini du centro storico. le spritz est bon et le vin blanc aussi. Quand vous êtes dans les environs de la Piazza et sauf à vouloir vous offrir un déjeuner plantureux confortable et cher, évitez les restaurants traditionnels. Les plus renommés sont devenus hors de prix et toujours bondés, remplis par de gros américains sur le retour (mais ils restent toujours très bons - les restaurants pas les gros américains bien entendu !) et les autres sont de vrais pièges à gogo avec leur "menu turistico" où le seul fait de respirer l'air de la salle vous coûte déjà cher (pane e coperto). Le Clodia comme son voisin le Forst permettent de se restaurer à la vénitienne en dégustant un spritz ou un'ombra sans se ruiner et dans une atmosphère typique. Mais vous connaissez depuis longtemps la consigne pour ne pas être assimilé aux hordes (convenons donc de les appeler ainsi dorénavant) : allez là où vont les vénitiens et faites l'effort de vous exprimer en italien ou excusez vous de ne pas parler le dialecte. Consommez debout et payez à la fin... Au Clodia vous verrez beaucoup de gens du coin, des gondoliers, des vendeuses des magasins voisins, des employés de banque ou le maire lui-même toujours en pleine discussion avec un opposant ou un collaborateur. 

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7 commentaires : 

 Anonyme a dit… 
 Triste d'avoir annulé mon voyage de novembre, je vous lis avec bonheur. A vous lire, nous sommes voisins à Dorsoduro. Venise est mon jardin secret. M. 
19 novembre, 2007 

Lorenzo a dit… Comme l'amour maternel chanté par Victor Hugo, et en paraphrasant le poète : Venise est un jardin secret dont chacun à sa part et où tous l'ont en entier ! 
19 novembre, 2007 

 Anonyme a dit… 
 J'aime vous lire. 
 M. ou M.17 (moins anonyme). 
 23 novembre, 2007 

 Anonyme a dit… 
 Je suis Amoureuse de Venise. 
 M.17 
 23 novembre, 2007 

 Anonyme a dit… 
 Je vous lis depuis peu, cet été, mais quel immense bonheur. Sans doute, nous nous  sommes   déjà croisés ou nous nous croiserons à Dorsoduro. Je vous ai dis que Venise est  mon jardin  secret. 
M.17 
23 novembre, 2007 

 Lorenzo a dit… ah les mystères de Venise... 
 23 novembre, 2007 

Veneziamia a dit… 
 Je connais bien le Caffé-Torrefazione Costa Rica, j'y fait le plein de café quand je suis à Venise. Bravo d'en parler. 
 28 janvier, 2011 

TraMeZziniMag, pourquoi ce titre ?

Publié pour la première fois en mai 2005, de retour d'un énième voyage à Venise avec mes enfants, ce blog présentait en quelques lignes le pourquoi de son titre. Comme on continue de me demander ce qu'il signifie, et en dépit de l'évolution de son contenu, tout d'abord moins exclusivement vénitien qu'aujourd'hui, j'ai repris mes explications que je vous livre à nouveau.
..Ceux qui vont à Venise connaissent sans aucun doute ces sandwiches en forme de triangle, que l'on trouve dans tous les bars pour un peu plus d'un euro : tonno-uova, prosciutto-funghi... On les appelle des tramezzini. Les vénitiens les consomment debout au comptoir, avec un verre de blanc ou un prosecco, ce délicieux vin pétillant. Les meilleurs sont servis depuis des années dans un petit bar des environs de l'Arsenal, mais dans chaque quartier, il y en a de très bons. Ils sont un peu le symbole d'un art de vivre comme le spritz, le Bellini, ou le gianduiotto de chez Nico...(cf. TraMeZziniMag du 16/08/2005,  ICI).
..
C'est parce que j'avais envie de parler de tout cela que j'ai créé ce blog et que j'ai choisi ce nom. Raconter à ceux qui ne savent pas, les délices d'une ville unique au monde, mal connue et pourtant si célèbre. Rappeler à ceux qui la connaissent, les délices que Venise apporte à nos cœurs. Mais aussi, parce que je voudrais aussi, modestement, contribuer à la mieux faire apprécier, au-delà des clichés qui l'encombrent depuis 150 ans et l'empêchent de vivre, en l'étouffant peu à peu. Car, c'est un paradoxe, Venise crève du tourisme. Il n'enrichit que les boutiquiers et les marchands de soupe et appauvrit les vrais vénitiens, rongeant l'âme de la ville comme la pollution en ronge les pierres. Là est le vrai mal qui tue Venise peu à peu, transformant les commerces de proximité en pièges à touristes, obligeant les habitants à quitter le centre historique pour la terre ferme et en rendant la vie presque aussi chère qu'à New-York ou à Londres. J'espère montrer une Venise différente au fil des pages et de mes humeurs. Aider le voyageur à sortir des sentiers battus - c'est bien ici le cas de le dire - et lui apprendre à voir autre chose et à devenir, à son tour, un "bon vénitien"pour paraphraser Henri de Régnier.
...
Peu à peu au fil des jours, des rencontres, des commentaires, s'est dessinée comme une ligne éditoriale. Modestement. Dans quelques heures, quelques jours, TraMeZziniMag atteindra son 55.000e lecteur ! 
 
A celui-là, s'il vient pour la première fois, je souhaite que ces quelques textes et les images qui les accompagnent, apportent du plaisir et lui donnent envie de se précipiter à Venise. Mais qu'importe les nombres et les statistiques : depuis plus de deux ans, ce rendez-vous quotidien m'est un vrai plaisir. Grâce à vous, lecteurs.
.
S'il est parfois difficile de trouver l'inspiration, si les textes trop souvent manquent de rigueur et ne sont pas assez travaillés, les illustrations un peu trop courantes et les sujets peu originaux, mon bonheur vient de la satisfaction de mes lecteurs. N'y voyez aucune prétention. Écrire comme à beaucoup m'est un besoin. Vital. Savoir que, par la grâce de la technique (Ah ! cher Jacques Ellul mon maître !), je contribue un peu à la défense de Venise, justifie ces longues heures passées devant mon clavier. 
 
Mais n'est-ce pas déjà trop prétendre que de vouloir simplement écrire sur Venise, après tous ceux qui l'on fait avec tellement plus de talent que moi ? J'essaie simplement, jour après jour de laisser les mots exprimer mon amour pour la Sérénissime. J'espère n'être point trop bavard. En fait, je voudrais seulement pouvoir montrer montrer Venise telle qu'elle est : une symphonie de couleurs, de sons, de parfums, mais aussi un lieu où l'on vit comme partout ailleurs avec un supplément d'âme qui fait la différence. Entrouvrir une porte sur la magie de la ville et laisser l'alchimie de nos cœurs faire le reste. Sans commentaire ni fioriture.
 
Illustration : "remorqueur", huile de Zoran Music.

15 novembre 2007

La mia Venezia (première partie)

 Tous les amoureux de la Sérénissime ont tendance à vouloir se l'approprier. Ils conservent jalousement leurs bonnes adresses, le secret de leurs itinéraires et ne voient jamais d'un bon oeil qu'un autre connaisse le même bar, la même cour avec son somptueux puits renaissance. Mais cette universalité de Venise a aussi un bon côté : il se forme par la magie des moyens de communication modernes une gigantesque communauté de coeur, sympathique et active qui partage son amour. Venise mérite bien ainsi le surnom qu'on lui donnait autrefois : "la Dominante"... Je crois que même en le voulant, on n'en finit jamais avec Venise. Et puis pourquoi en finir avec cette passion qui nous lie à l'un des plus beaux et des plus magiques lieux de vie du monde ?

"I love bácaro", me disait une amie japonaise. Comme elle, j'adore les bacari, ces vrais bars vénitiens où l'on sert du vin tiré des barriques et des cicheti, les tapas vénitiens, toujours délicieux. Le mot viendrait du latin "ciccus" qui veut dire en petite quantité. Le terme bacaro viendrait quant à lui de Bacchus (Bacco en italien)... Un verre de prosecco, une assiette de petits poissons grillés, des anchois, un oeuf dur, du jambon, des artichauts grillés marinés à l'huile, des boulettes de viande, des gros haricots blancs... Autrefois on trouvait peu de variétés de ces amuse-gueules, ils permettaient de boire davantage sans être trop vite malade. C'est devenu une institution maintenant, et chaque bacaro y va de sa spécialité plus ou moins sophistiquée qu'il cherche à attirer de nombreux clients étrangers ou qu'il veuille maintenir l'authenticité et l'esprit "casalinga".

Les touristes se plaignent souvent de l'accueil froid voire désagréable. On y parle volontiers en dialecte. C'est un peu comme lorsque vous débarquez avec votre appareil photo en bandoulière dans un pub au fin fonds du Pays de Galles ou en Écosse. Cela dérange. Mais dès qu'ils se rendent compte que vous essayez de vous plier aux usages locaux, que vous ne réclamez ni coca ni pizza, tout s'arrange et si, lors de votre séjour vous y retournez plusieurs fois, vous finirez par être admis et le patron vous accueillera d'un gentil sourire. C'est ainsi. Mais j'ai le souvenir de bouchons lyonnais où on se demande jusqu'à l'addition (et même après) si on n'est pas un ennemi personnel du patron tellement l'accueil est glacial et agressif... Les bacari vénitiens, il faut y aller un peu avant midi et en début de soirée, quand les cicheti sont juste terminés et sortent tous frais de la cuisine. C'est là qu'ils sont les meilleurs et puis on voit les gens arriver, il y a peu de monde.

Quelques bonnes adresses : Ai do Mori, Canareggio 429 (calle dei do Mori), Osteria Al Garanghelo, Castello 1641 (via Garibaldi), cantina da Alberto - attention à l'aventure, un lieu réellement peu accueillant pour les touristes du genre de ceux contre qui nous déversons notre ostracisme - Cannaregio 5401 (calle larga Giacinto Gallina, I Promessi sposi, Cannaregio 4367 (Calle dell'Oca, près de la Strada Nova), Al Bomba, Canareggio 4297 (située aussi Calle dell'Oca, cette petite rue parallèle à la Strada Nova entre Sta Sofia et Sti Apostoli), Alle Alpi di Dante (Corte Nova). Antica Adelaide à Cannaregio aussi, (3728 calle larga del Dose Priuli) Mais il y en a heureusement plein d'autres.


Masaneta alla Venexiana
Parler des cicheti me donne envie de vous détailler mes préférés. Tout d'abord en ce moment, un délice qu'on trouve dans les meilleurs endroits : le Carcinus mediterraneus, en vénitien la Masaneta, la femelle fécondée du crabe commun qu'on trouve en abondance en Méditerranée mais seulement pendant une assez courte période dès la fin août et jusqu'aux premiers jours de décembre si le temps a été clément. C'est en ce moment même la meilleure période car la femelle, dont la chair est plus fine que celle de son compagnon, est en période de pré-ovulation, sa vieille carapace se fait très tendre. C'est un délice. 

La préparation n'est pas compliquée. La seule difficulté (pour les âmes sensibles) c'est que ces dames crabes doivent être fraîches donc vivantes au moment où, terribles bourreaux que nous sommes, nous allons les plonger dans de l'eau bouillante salée (il faut auparavant bien les laver). Laissez cuire 5 à 6 minutes pas plus. Éteindre ensuite le feu et laissez tiédir. 

Égoutter les crabes et détacher les pattes et avec l'aide d'une fourchette, détachez le dessus de la carapace puis séparez la partie supérieure de la carapace du reste du corps, mettre le tout dans un saladier, assaisonnez avec une sauce faite d'huile d'olive, d'ail et de persil haché, salez et poivrez. 

Laissez reposer au moins une heure pour que la chair s'imbibe de la totalité de la sauce. Servir avec des morceaux de polenta grillée et une bouteille de Soave ou de Pinot grigio selon votre goût.


Il y a aussi les Polpette, ces petites boulettes faites d'un mélange de viande de boeuf et de veau mélangées à du pain trempé dans du lait, assaisonnées d'ail et de persil, la Bacalà mantecata (brandade de morue) servie sur des petites tartines de pain grillé ou la Bacalà alla Giudia (plus rare aujourd'hui, ce sont des filets frits). le Rumegal (panse de boeuf bouillie marinée à l'huile), et plein d'autres spécialités le plus souvent à base de poisson ou de crustacés frits ou grillés.





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2 commentaires: 
(Parues sur TraMeZziniMag l'original, avant sa suppression par Google) 

Anonyme a dit…
Je me réjouis de découvrir Venise à la "Tramezzini" !!!
Je vais emporter chacun de vos posts pour être sûre de rien oublier et d'honorer cette ville comme elle le mérite. Ce que vous écrivez sur les "bacari" me rappellent ces petits bars merveilleux ds la vieille ville de San Sébastian. 
Sunny 
17 novembre, 2007 

Lorenzo a dit…
Il y a quelques ressemblances en effet. Les basques et les vénitiens sont des cousins et puis la bacalà ne fait elle partie de la gastronomie des deux peuples ? Le particularisme de leurs langues ?  
17 novembre, 2007


14 novembre 2007

L'ordinaire des jours de novembre

Et bien voilà, ce dimanche a marqué la fin de l'été de la saint Martin. Si le ciel reste pur et le soleil très présent, le froid a fait son entrée sur la lagune. l'air est vif comme en montagne quand il va neiger, le vent glacial et la lumière plus diaphane. On dirait que les couleurs hier encore très vives ont été délavées, diluées dans une sorte de transparence humide. C'est à ce moment de l'année que l’on s'aperçoit si on aime vraiment vivre à Venise. Les rues éloignées du parcours des touristes se font très silencieuses et le bruit des pas résonne davantage. L'éclat des vitrines réchauffe ça et là le promeneur. Il fait nuit très vite. L'hiver est partout. J'aime ces fins de journées plongées dans le silence, les gens pressés de rentrer au chaud chez eux, les pierres qui brillent sous l'humidité. Venise semble appartenir toute entière à celui qui continue de marcher et va sans but précis par les ruelles sombres. Une expérience unique que je conseille à tous ceux qui veulent pénétrer la vraie vie vénitienne et s'en imprégner. Voir et sentir Venise en hiver, c'est la découvrir telle qu'elle est. Sans fioriture.

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3 commentaires:


Florence BRIEU-GALAUP a dit…
Bonjour, Je suis folle amoureuse de Venise. Mon mari m'a fait découvrir la ville en 1995 et depuis ce jour, nous nous y rendons tous les ans. J'ai fait des études de lettres et j'ai choisi Venise comme sujet de ma thèse. Elle vient d'être publiée aux éditions de l'Harmattan (Venise, un refuge romantique (1830-1848). J'avais moi aussi envie de créer un site sur Venise mais dans ses rapports avec la littérature (vaste sujet). Ce qui est amusant c'est que les voyageurs du XIXe siècle rendent la ville intemporelle. Concernant Venise même, leurs commentaires pourraient émaner de voyageurs contemporains. J'aime beaucoup votre blog et votre approche de ce lieu qu'il faut protéger. J'essaierai de le consulter souvent.
Lorenzo a dit…
Je serai ravi de découvrir votre ouvrage et de le faire découvrir aux lecteurs de TraMeZziniMag. La seule différence entre les voyageurs du XIXe et nous, c'est que la technique a permis à Venise de s'inscrire dans la modernité tout en conservant cette intemporalité, phénomène unique dans l'histoire de l'humanité : un monde du passé qui vit au présent. Il y aussi la misère qui faisait de Venise des années 1830-1900 un bout de tiers-monde parfois sordide et qui a heureusement disparu de nos jours. Les enfants ne vont plus pieds-nus en guenilles, les filles ne sont plus prostituées par des matrones édentées et on ne meurt plus du Choléra. Les poètes invertis trop raffinés ne pédiquent plus les jeunes garçons faméliques dans les arrières-cours des grands hôtels de la Riva dei Schiavoni.
Tietie007 a dit…
Nous avions visité Venise en février 2004, juste après le Carnaval, et l'atmosphère était superbe ! Nous avions eu la chance de voir la neige, ce qui fut fantastique ! Pour mon contact à Venise, je suis passé par l'Alliance Française, et de nombreux enseignants vénitiens m'ont contacté. Je suis donc en contact avec le Lycée Benedetti. Bonne soirée.

13 novembre 2007

Le son de Venise



Venise ce sont des couleurs, des reflets, des odeurs mais aussi des sons. Le bruit das pas sur les dalles des rues, les gondoles qui glissent sur l'eau des canaux et les cloches. Les nombreuses cloches des églises de Venise qui rythment la cadence des jours et forment un décor sonore inchangé depuis des siècles. Où que l'on se trouve dans la ville, on les entend qui se répondent et enchaînent leur carillon dans un ordre immuable. Lorsque je suis allé pour la première fois en Turquie, l'appel du muezzin en haut des minarets était une curiosité les premiers jours. Puis au bout de quelques semaines, si je prenais autant de plaisir à entendre cette voix - dans la plupart des endroits où nous passions, il s'agissait hélas déjà d'un enregistrement, procédé qui s'est généralisé dans tout l'Islam depuis des années - je sentais un manque indicible. Quand nous avons repassé la frontière grecque et que dans un petit village, la cloche de l'église tintinnabulait joyeusement, ce fut une grande joie. Je retrouvais ce paysage sonore si familier et qui m'avait tant manqué. Et quelques jours plus tard en arrivant à Venise nous avions l'impression que la ville en liesse accueillait ses fils prodigues. Ce n'était qu'un dimanche matin comme les autres et chaque clocher répandait ce son joyeux qui s'associe dans l'esprit de beaucoup de voyageurs à l'image de la Sérénissime, de ses gondoles et des ses palais sur le Grand canal.

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4 commentaires:


Anonyme a dit…
Ah les bruits de Venise... Ce sont aussi "...the fast gaining-waves, that beat, like passing belles, against the Stones of Venice" (John Ruskin, The Stones of Venice)
Anonyme a dit…
Oups, "bells", sans le "e" final.
Douille a dit…
Dans certaines églises en Belgique ce sont aussi des enregistrements de cloches qu'on entend...
Gérard a dit…
L'Europe , c'est quoi , finalement ? Intéressante question , non ? Eh bien , c'est ce qui nous manquera intensément lorsqu'on aura tout perdu . Ce sont deux choses : nos Églises et la Liberté . Blaise Pascal les sépara , Charles Péguy les raccorda.   Comme quoi , tout vient à qui sait les entendre .

12 novembre 2007

Poésie de rue


C'est déjà mieux que les graffitis infects qui fleurissent partout à Venise et que certains qualifient d'expression artistique : Il y a souvent sur les murs de la ville des apparitions poétiques, dues la plupart du temps à l'imagination des élèves de l'école des Beaux-Arts. Ces collages sont très souvent agréables et ne déparent guère. Et puis, faits de papier fin et à peine collés, ils disparaissent vite quand des amateurs ne se sont pas chargés de les enlever pour les récupérer. Envoyez-moi vos clichés si au hasard de vos pérégrinations vénitiennes vous êtes tombés devant des exemplaires de cet art de rue.
 

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2 commentaires:

Anonyme a dit…
Depuis que j'ai découvert votre blog sur Venise, je vous suis fidèlement chaque jour. J'aimerais vous soumettre une recherche sur le Palais de Polignac/Decazes. Que s'est-il passé dans ce palais au XVIIIème. Est-ce là qu'un mari jaloux aurait poignardé sa femme ? ou peut-être avant ? Qu'en savez-vous ? Mille merci. Sunny
Anonyme a dit…
J'ai découvert votre blog complètement par hasard, en cherchant une photo du dolce di San Martino. C'est un très beau blog, dans lequel je me retrouve pleinement. Je suis vénitienne par mon père, française par ma mère, et depuis toujours, mon coeur balance, et je vis d'aller-retours entre Paris et Venise, d'où je reviens à peine. Elle était encore plus belle que d'habitude, habillée des couleurs et des lumières extraordinaires de ce beau mois de novembre...

TraMeZziniMag salue l'introduction de Venise dans le club très select des City Note Book de la société Moleskine

Le nouveau City Note Book de Venise que la société Modo & Modo (aujourd'hui rachetée par le Groupe Société Générale), plus connue sous le nom de Moleskine est en vente depuis le 8 novembre dernier. Portant le désormais célèbre label Venezia, réalisé sous la direction artistique de Philippe Starck, c'est déjà un véritable objet-culte : le premier guide que vous écrivez vous-même. C'est une société italienne à capitaux français qui depuis 1986, sous l'impulsion de l'écrivain Bruce Chatwin, dépité de ne plus pouvoir se fournir en carnets de note fabriqués jusqu'alors par une petite société de Tours, qui a réalisé avec ce nouveau City Note Book (après Paris, Londres, San Francisco, Prague, etc...) un travail "Made in the World" en collaboration avec Venise, la ville italienne "universelle" par excellence. 
Mariage inattendu entre deux univers différents. L'entreprise utilise, cas unique, le "bouche à oreille" comme mode publicitaire dans un monde où les messages commerciaux sont omniprésents et tellement agressifs qu'ils en sont devenus insupportables. Les city books fleurissent ainsi et c'est une véritable mode qui propulse depuis quelques années les fameux petits carnets noirs au sommet, se basant sur le nombre de grands artistes et écrivains qui les auraient utilisés. Le rapprochement avec Venise, peut-être la seule ville au monde qui n'a aucunement besoin de faire de publicité tellement son image est forte, est insolite. Ce sont deux styles, deux conceptions, deux modes de vie uniques qui se rencontrent aujourd'hui. 
Mais cette rencontre n'a finalement rien de contre-nature (ce qui est déjà un phénomène à rebours des modes...) et elle se concrétise dans le soutien apporté par la société Moleskine à l'activité artistique de jeunes artistes choisis par la Fondazione Bevilacqua La Masa. Un moyen de confirmer la vitalité de Venise qui a toujours été un une référence importante dans tous les types d'expression artistique. Parcours de pierre et d'eau avec huit jeunes artistes du monde entier, le City Note Book de Venise est partout : On le trouve dans toutes les vitrines "culturelles" de la ville : à la librairie Mondadori, la librairie Toletta, la papeterie Testolini, dans les boutiques du Palazzo Ducale, du Musée Correr, de la Ca' Rezzonico, de la Ca'Pesaro et chez Feltrinelli à Mestre comme à la librairie française de San Zanipolo
Moleskine est l'expression d'un bouillonnement à l'intérieur même de la vie culturelle dans le sens le plus ample du terme. Pour l'organisation Fondaco, les petits carnets noirs représentent l'aspect humain d'un monde en perpétuelle accélération. "Éditeurs de page blanches", c'est ainsi qu'aiment se définir les responsables de ce label "libre" parce que totalement dénué de toute connotation idéologique, un agglomérat d'individualités et de contenus variés. Cela pourrait être un contresens mais en réalité le monde des petits carnets noirs est un univers authentique, un outil d'aide à la réflexion, à l'introspection puisque ces pages blanches sont un appel à l'écriture ou au dessin. A une époque où tout est technologie, il est incroyable qu'un ensemble de feuillets blancs reliés et fermé par un simple élastique puisse représenter un instrument important de vie et un signe de reconnaissance d'une communauté universelle. Il suffit pour vérifier ces propos de visiter les sites qui fleurissent sur la toile et présentent le contenu de nombreux carnets.
Le City Note book di Venezia est tout cela, un outil qu'il appartiendra au touriste ou au vénitien de remplir de rendez-vous, de sensations, de réflexions, de dessins et de collages. Un ensemble de pages blanches qui va permettre à ceux qui les posséderont de pouvoir réaliser leur guide personnel et unique de Venise... 
Une grande opportunité donc pour la Sérénissime. Le moyen de de se rapprocher encore un peu plus des grandes capitales culturelles du monde comme Londres, Paris, New York, Berlin, San Francisco, Prague, Barcelone, qui font déjà partie du network Moleskine.
L'enthousiasme des journalistes lors de la conférence de presse organisée par Fondaco, à l'origine du projet. Il faut dire que le carnet était offert à tous les journalistes présents pour qui les carnets noirs restent des objets fétiches (je sais de quoi je parle pour en consommer plus d'une quinzaine par an !) . "S'agissant d'un objet avant tout diffusé parmi les jeunes, Moleskine peut être utile pour rajeunir l'image de la cité des doges et stimuler à son égard une approche non conventionnelle" a dit le maire Massimo Cacciari

Ces paroles confirment la philosophie de l'organisation Fondaco qui, depuis trois ans, s'emploie à développer des projets concrets pour positionner Venise dans le monde de demain tout en préservant son identité unique. On ne peut que remercier la société Moleskine d'avoir cru dès le début dans leur proposition en considérant Venise comme une vitrine internationale où il faut être présent, démontrant ainsi sa modernité en dépit des incertitudes qui pèsent sur son avenir et des lourdeurs qui la figent dans un rôle de musée de cire .

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2 commentaires:


Andrée a dit…
Ets-ce qu'on les trouve en France ? Et à quel prix ?
Lorenzo a dit…
OUI, oui au fur et à mesure de leur distribution, chez les libraires et les papetiers de qualité. Le prix est de 15,50€ mais je ne veux pas faire de publicité. Ce qui est génial c'est la manière dont ces carnets sont utilisés, détournés pour devenir souvent des livres-souvenirs, des journaux de voyages voire des œuvres d'art (le site Flickr contient plusieurs centaines de photos de crantes noirs peints qui sont de véritables œuvres d'art). L'association DÉTOUR de Moleskine a un site et expose dans le monde les carnets peints et décorés. Je trouve personnellement cela très beau très attirant.