Sauf erreur de ma part, Bobo Ferruzzi aura 80 ans cette année ! Il peint toujours autant, se passionne toujours autant pour les antiquités vénitiennes et demeure un vrai grand authentique vénitien. Je suis fier d’avoir travaillé pour lui (j'ai tenu sa galerie de San Vio, sur la Fondamenta Venier, là où se trouve aujourd'hui la boutique de la Guggenheim), de l’avoir exposé à Bordeaux (seulement une dizaine de jours hélas, en 1985), heureux d’avoir pu assister à certaines séances de peinture, à San Giorgio ou à Burano où tel les védutistes du XVIIIe siècle, il s’imprégnait de toutes les sensations que Venise offre à chacun de nos sens, avant de transcrire sur la toile sa vision d’un des plus beaux lieux du monde. Heureux aussi d'avoir partagé quelques temps l'intimité de sa famille, dans sa ravissante maison du campo dietro gli incurabili... On y croisait d'authentiques figures vénitiennes, des anonymes comme de célébrités... J'habitais alors à deux pas, au 445 de la calle Navarro, au dernier étage de la maison de Federico Allegri, à côté de chez l'architecte De Michelis.
Je me souviens de cette belle phrase de Pablo Neruda, écrite en 1966 : “[...] La pittura di Bobo Ferruzzi ha rotto le serrature e illuminato gli angoli con una luce azzurra.” ("La peinture de Bobo Ferruzzi a brisé les carcans et éclaire les recoins d’une lumière bleue"). Elle illumine toujours mon quotidien, puisque j'ai la chance d'avoir sous les yeux une vue du rio delle torreselle, appelé aussi rio delle Piere Bianche sur certaines cartes plus anciennes.