26 janvier 2006

Connaissez vous Lucian Freud ?


 Connaissez-vous Lucian Freud ? Petit fils du célèbre psychanalyste, né en 1922, naturalisé anglais en 1933 et dernier rand peintre anglais vivant. Le Musée Correr l'a exposé dans une grande rétrospective qui a attiré des visiteurs du monde entier. Il aurait pu être présenté au pavillon anglais à la place de Bacon, puisque lui au moins, toujours vivant et créateur, répond bien à la définition d'artiste contemporain. Figure emblématique de l'art figuratif contemporain, il a été célébré dans les belles salles du Musée de la Piazza San Marco, pendant une bonne partie de l'année 2005. A la Biennale justement il avait été reçu... en 1954 en même temps que ses compatriotes, Francis Bacon et Ben Nicholson. Cette belle exposition présentait à la fois une synthèse de son travail de manière chronologique et d'un échantillonnage de ses thèmes préférés, car il n'y a pas que le portrait dans son œuvre, bien que ce soit par les portraits qu'il est le mieux connu.

Mais ce qui était encore plus intéressant dans cette "rétrospective", c'est la preuve physique de la culture allemande dans l’œuvre de cet anglais d'éducation et de vie, ce qui l'éloigne bien entendu de Bacon. Freud exprime sa germanité jusque dans ses exagérations, ses désordres et ses errements. Dans son regard tout simplement. La manière si particulière qu'il a de traiter la lumière, le rattache ainsi aux canons de la Neu Schlickelt (la nouvelle objectivité) version tudesque du "réalisme magique". Enfin à la vue de ces corps allongés, aux formes parfois distendues jusqu'à la douleur, on ne peut que sentir la filiation à Egon Schiele.

Les 90 œuvres exposées (dont 15 eaux-fortes) montraient ainsi les fameux portraits, mais aussi des motifs floraux, des scènes de la banlieue de Londres, avec des vues d'intérieur comme "large interior at Paddington" de 1968... Mais, comme le fait remarquer Lidia Panzeri, critique d'art de la revue Giornale d'Arte, ce qui domine son oeuvre demeure la figure humaine. A commencer par "the girl with roses", portrait de l'ex-femme du peintre, Kitty Epstein, qui avait été exposé ,à la Biennale en 1954. Il faut citer ensuite les différentes versions dans les années 70 des portraits très marqués de tristesse de sa mère restée veuve."Freud se colle au personnage, le figeant quasiment par sa fureur introspective jusqu'à en dénicher la nature la plus intime, sans aucune inhibition. Il ne s'arrête pas plus à la désagrégation d'un corps féminin vieilli et défait qu'à la présentation en gros plan des parties génitales masculines comme dans le "David and Eli" de 2003."

Ce manque total de pitié, il le montre aussi dans ses autoportraits comme celui où il s'est représenté entièrement nu à l'exception des chaussures, brandissant sa palette et son pinceau "Painter Working Reflection" de 1993, déjà exposé au palais Grassi en 95 dans le cadre le l'exposition "Identità ed Alterità" organisée par Jean Clair. Un thème sur lequel il revient dans ses œuvres les plus récentes comme "the painter is Surprised by a naked admirer". L'artiste, cette fois-ci habillé, une admiratrice nue, accrochée littéralement à sa jambe. C'est la jeune et très jolie Alexandra Williams-Wynn, fille de Sir Watkin, le riche mécène gallois,  très liée au peintre
à l'époque du tableau.

23 janvier 2006

Images du quotidien

Amicalement dédié à ce très aimable lecteur bordelais 
 virulent et inconnu  qui déverse ses aigres rancœurs
  qui signe «Ich Bin Nieman», ô combien spirituel...
 

Puisque certains lecteurs n'apprécient pas mes souvenirs vénitiens et mes commentaires, sur des lieux ou des moment jugés trop mondains, faisant l'amalgame facile entre la "jet set" des tabloïds (certains en seraient flattés, pas moi) et notre vie vénitienne, simple, normale, ordinaire - sans qualité particulière, voici quelques photos glanées sur le net qui traduisent bien Venise au quotidien. Loin des clichés et des idées convenues...
 
Pourquoi après tout devrait-on cacher son amour pour cette ville ? Parce qu'il s'agit de Venise et que des milliers l'ont fait - certes bien mieux que nous - avant nous ? Pourquoi dénigrer cet univers si particulier où nous nous sentons bien, sous prétexte qu'il est envahi par des millions de visiteurs chaque année, lieu-commun de notre époque revenue de tout ? 
 
Les fatigués stressés de la vie, les overbookés, les speedés bourrés de nicotine, de Xanax et de télé-poubelle, passez donc votre chemin. Et que personne ne se formalise.
 
Sur TraMezZiniMag, on prend le temps de vivre, au rythme vénitien. E' cosi. Un'ombra, d'appétissants tramezzini deux chiaccherate... Le vol d'un pigeon, le bruit d'une barque qui glisse sur l'eau d'un canal, les cloches qui répondent à la Marangona et appellent à fêter le jour nouveau... On savoure ici chaque instant de sérénité, loin des trépidations d'un monde devenu fou, triste et inculte.
 
Heureusement qu'il y a encore de véritables amoureux du temps qui passe, adeptes du bonheur paisible... Car à Venise encore, cela reste possible. Et ça n'a rien à voir avec ces néo-cultures qui fleurissent un peu partout dans notre monde finissant et dont on nous rabat les oreilles. 
 
Quand je suis à Venise, sirotant un délicieux macchiato sur le campo Santa Margherita, en regardant mes enfants jouer avec d'autres, avec cette lumière unique, cette douceur de l'air et cette paix, cette poésie du temps qui passe, j'envoie au diable les enfants damnés du New Age ou du No Future, pour qui rien ne trouve grâce que, jetés en vrac, la dérision, la laideur, le bruit, la nuit, le noir. Toute la désespérance de ces enfants gâtés d'un monde pourrissant.

Drôle tout de même que la ville qualifiée longtemps, et parfois encore de décadente par certains esprits malades qui s'en régalaient, apparait aujourd'hui comme l'idée d'une cité idéale où on trouve un bonheur et une paix qu'aucun autre lieu urbain ne peut jamais donner dans sa totalité. Ceux que la Sérénissime ennuie, qu'ils passent donc leur chemin !





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4 Commentaires:
 
Anonymous said...

Moi j'aime bien votre blog, il est bien écrit, agréable à lire, belles photos. des infos intéressantes je l'ai recommandé à plein d'amies. Continuez.

23 janvier, 2006
 
lorenzo said...

Merci.

24 janvier, 2006
 
Cotton Gérard said...

Encore un soutien à votre site .
Il vient d'Orléans .
Il adore bien sûr " l'île magique " de là-bas et aussi les rencontres , mondanités , cocktails et autres démarches formidablement intéressantes .
Goûteuses .
Comme s'il était devenu extravagant d'aimer ... la vie .
Vivent les bulles du champagne et du prosecco réunis !
Et avec quelle façon vous arrivez à les faire cohabiter !
Certains n'aiment pas les mondanités ! Mais quelle horreur , ces certains : on s'en fiche nous , notre madeleine c'est bien d'une certaine façon l'île magique et sa désinvolture élégante de se défier du Temps .
Retrouvé .
Quel talent que le vôtre !
J'suis un fan !
Que garderais-je donc de cet endroit si particulier quand tout s'effondrera ?
Garder pour moi et par moi .
Des couleurs donc .
De l'antique , de l'indigo , de l'inexcusable , la mer .
Turquoise .
De l'avenir .
J'insiste donc ; quel talent et quelles superbes promenades je fais en votre compagnie .
Pour l'occasion , alors merci à vous !

24 janvier, 2006
 
lorenzo said...

Ne soyons pas pessimiste, Venise ne sombrera pas. Ou alors nous sombrerons tous, notre époque a les moyens de préserver les lieux et les monuments du monde comme jamais avant nous aucune civilisation n'avait pu le faire. Il ne tient qu'à nous...

30 janvier, 2006

COUPS DE CŒUR N°2

Antoine et Marie, deux parisiens rencontrés récemment par le biais de ce blog, m'ont demandé d'autres adresses de restaurants. Je vous livre ici quelques lieux que j'aime bien et où on mange bien. Ils sortent de l'ordinaire vénitien qui fait de beaucoup trop de restaurants et trop souvent hélas des adeptes du "menu turistico", finalement toujours frais mais de moins en moins inventif et s'éloignant de plus en plus de la vraie cuisine vénitienne déjà sacrément ébranlée depuis la première guerre mondiale (cf. l'excellent ouvrage d'Alvise Zorzi "la cuisine des doges" dont j'ai déjà parlé).

ALLA ZUCCA
S.Croce, 1762
ponte del megio, entre San Giacomo dell'Orio et San Stae
tel.: 041-5241570. Fermé le dimanche
Située près du pittoresque campo san Giacomo dell'Orio, à l'angle d'un pont et d'un canal, tout près du Palais Mocenigo et de San Stae, à deux pas de l'arrêt du vaporetto, cette trattoria est née il y a vingt cinq ans. Autrefois repère d'étudiants, on pouvait y dîner de risotto à la citrouille ou aux champignons, de pizzas garnies de légumes frais, et boir un agréable vin de pays. Les temps ont changé, les clients ont vieilli et les propriétaires ont passé la main. Le décor demeure assez rustique, la clientèle faite pour l'essentiel de voisins et de gondoliers. Si on y mange toujours aussi bien, les prix sont un peu plus élevés mais restent très raisonnables. L'ambiance y est restée très chaleureuse. C'est aussi fermé le dimanche comme trop de bons endroits.
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ANTICA TRATTORIA BANDIERETTE
Castello 6671, Barbaria delle Tole
Tel./fax 041 522 06 19. Fermé lundi soir et mardi.
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Quans nous logions chez la rayonnante Caroline Delahaie à la Ca'Bragadin, le maître de maison, Gérard, nous avait recommandé une trattoria voisine, située sur la Barbaria delle Tole, cette rue très animée au nom pittoresque dont l'origine vient des anciennes scieries qui y étaient installées autrefois. Il y avait sur la Fondamenta Nuove, et tout le long des bords de lagune des chantiers navals. L'endroit où est aujourd'hui, parmi de nombreux magasins le restaurant dont nous parlons, était autrefois le lieu d'arrivée des nombreuses régates organisées par la République. Les vainqueurs recevaient - c'est encore comme cela aujourd'hui - des bannières de tissus aux couleurs des quartiers ou des corportions. D'où le nom de la trattoria. Mais dans le quartier, les vénitiens continuent de l'appeler "da Tiraca" (en dialecte vénitien le mot "Tiraca" veut dire "bretelle"), simplement parce que l'ancien propriétaire était célèbre pour ses nombreuses et originales bretelles.
Lieu accueillant, où l'on continue de préparer des plats typiques essentiellement à base de poissons. Des préparations simples mais toujours à base de produits très frais et de qualité. C'est du "comme à la maison" et après y avoir goûté, plus personne n'en doute, je vousl'assure. C'est pour ça que dans la salle on entend surtour parler vénitiene t que le dimanche c'est rempli de familles qui viennent passer un agréable moment "casalinga". C'est à deux pas de Zanipolo (SS. Giovanni e Paolo). Vous y serez bien accueillis et vous ne regretterez pas votre soirée ! 
Au passage, je signale la pâtisserie RosaSalva, aux pieds de la statue du Colleone. Dès les premiers rayons de soleil du printemps, la terrasse est très agréable. Le café y est bon et vous pourrez choisir pour l'accompagner les délicieuses patisseries à base d'amande de la maison (essayez donc la "torta di Mandorla", tarte sablée garnie d'une pâte faite d'amandes hachées, de noisettes et recouvert de sucre glace, un délice vraiment). Les tramezzini sont très bons, ainsi que les croque-monsieurs ("toast" en italien). Le bar voisin est aussi très agréable. Une bonne étape après la visite de la basilique et avant d'entamer une longue promenade sur les quais du Nord, face à San Michele.
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Avez vous déjà goûté les BAICOLI ,
ces fameux biscuits très secs que les marins emportaient avec eux ?Plusieurs pâtissiers en fabriquent encore mais les plus célèbres sont ceux de Colussi. Le pâtissier Marchini en propose aussi et les expédie dans le monde entier. Un ami médecin, le docteur de Vanni, me disait toujours que c'est le seul biscuit manufacturé au monde sans un seul produit chimique artificiel, naturellement sec avec 10 grammes de matière grasse pour 100 grammes de biscuit, autant de protéines et le reste en carbo-hydrates. ce qui donne un délice de 440 calories pour 100 grammes. Voilà ce qui explique le goût des marins pour ce biscuit coupe-faim et léger en même temps. En plus la boite est jolie. les affiches publicitaires de Colussi datant des années 30 se vendent une fortune. Parfois, on trouve de vieux modèles de boîtes chez les brocanteurs de Venise. J'en ai trouvé une illustrée de marquises et de masques datant des années 1940, un jour sur un mercatino d'antiquités à Rome, pour trois sous. La prochaine fois que vous allez à Venise, goûtez-les. On en trouve parait-il à Paris mais je ne sais pas encore où.
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posted by lorenzo at 15:41

19 janvier 2006

Berlusconi, vous en pensez quoi vous ?

Je sors d'une séance de cinéma édifiante. En V.O., je viens de voir "Viva Zapatero" de Sabina Guzzanti. Issue de la nomenklatura (son père est sénateur de centre-droit), cette jeune comédienne est féroce et possède au plus haut degré l'art de la satire et sa dent est dure. Virée parce qu'elle aurait insulté le Président du Conseil en disant trop haut des vérités trop vraies, elle a surpris tout le monde lors de la projection hors sélection officielle de son documentaire à la Mostra de Venise, avec la secrète approbation des organisateurs du festival. Médusée l'Italie a acclamé ce film. Quand je vous dis qu'en dépit de tout, la démocratie est joyeuse et que tous les espoirs sont permis ! En tout cas ne perdons pas de vue ce qui se passe de l'autre côté des Alpes. En général c'est un laboratoire expérimental qui s'étend ensuite comme tâche d'huile en Europe... Faisons mentir la tradition, ne mettons pas sur le trône un émule du Cavaliere ! Juste à titre informatif, voici un texte d'Ignacio Ramonet, du Monde Diplomatique, daté de 2002. Tout y était dit.