10 novembre 2006

Restitution ou sauvegarde ?

Le patrimoine artistique né à Venise au fil des siècles a toujours été éminemment recherché. De tout temps, les voyageurs ont aimé rapporter de leur séjour dans la Cité des Doges peintures, verreries, objets d'orfèvres, livres et gravures, brocarts et soieries. Au XVIIIe siècle, l'atelier de Guardi comme celui de Canaletto, les Bellotto et autres vedutistes reproduisaient presque à la chaîne des vues pittoresques de la ville qui ornent aujourd'hui les murs des plus grands châteaux et de tous les musées du monde.
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Avec l'invasion des armées de Napoléon et le pillage systématique à peine camouflé par des velléités d'organisation et de classement rationnel au bénéfice de l'humanité (surtout l'humanité proche, famille et amis du corse), l'appropriation de ces beaux objets nés du savoir-faire des artisans vénitiens s'accéléra. C'est ainsi qu'on retrouve régulièrement chez les antiquaires, sous le marteau des commissaires-priseurs et dans les successions, dations et donations de la vieille Europe comme aux Amériques de très beaux objets qui au fil des temps deviennent de plus en plus côtés parce que de plus en plus rares.
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Tout ce discours pour vous parler d'un manuscrit qui après maintes péripéties se retrouve sur le catalogue d'un éminent et très sérieux libraire parisien, la maison Clavreuil, (pour la petite histoire, cette librairie est aussi spécialisée dans les parutions napoléoniennes...) Un bijou, une pièce de musée, un témoignage important du passé de la Sérénissime. Il s'agit du texte relatant l'installation en 1683 de la supérieure du couvent de Santa Maria delle Vergine qui était dans l'enceinte même de l'Arsenal.
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Fondé au XIIe siècle par le pape Alexandre III et l'Empereur Barberousse pour y installer sa fille comme première abbesse en 1177, il était régi par la règle des augustines, cette communauté fondée à Hippone par Saint Augustin lui-même pour sa sœur. Dans ce beau document, la supérieure , c'est la Nobildonna Maria Gioconda Contarini, la propre sœur du doge Ludovico Contarini. Issue d'une des plus grandes familles vénitiennes, elle naquit dans ce beau palais qu'on peut toujours admirer sur le Grand Canal à moins que ce soit à la Ca d'Oro qui appartenait aussi à cette illustre famille. Elle était la tante du célèbre général, né cette année-là (et mort en 1721) que l'on prénommera Agostino en l'honneur de sa tante religieuse. Son couvent fit couler beaucoup d'encre jusqu'à sa disparition au XVIIIe siècle.
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C'est en effet là que plusieurs scandales éclatèrent en 1295 puis en 1499 après qu'il fut découvert à chaque fois un "commerce charnel" entre les fils et les filles de Dieu qui avaient pourtant fait vœu de chasteté... On trouvait beaucoup de religieuses dans ce monastère mais peu de vierges. A la décharge de ses femmes de tous âge, il faut rappeler que beaucoup s'y retrouvaient par la volonté d'un père ou d'un frère (ça ne vous rappelle pas le mode de fonctionnement de certaines sociétés contemporaines dont la religion n'est pas vraiment très libérale e envers les femmes ?) sans vocation religieuse particulière. Mais à l'époque de notre Gioconda Contarini, l'ordre avait dû revenir...
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Bien sur, il existe dans de nombreuses collections, publiques ou privées, des ouvrages de ce type et de cette qualité. Cependant, puisque depuis une quinzaine d'années il est devenu évident que le patrimoine artistique des nations doit, autant que faire se peut, leur être restitué. Ce manuscrit daté de 1566 devrait reprendre sa place sinon au monastère d'où il a été enlevé du moins à la bibliothèque Marciana ou dans le fonds des Archives Historiques, ou bien encore à la Querini Stampalia. Je viens d'alerter diverses associations capables financièrement d'assumer l'acquisition de cet ouvrage pour le restituer à Venise ainsi que des amis dans l'administration de la ville. Mais une décision est longue à prendre et l'objet peut être rapidement acquis par un riche collectionneur. J'aurai essayé. 15.000 euros ce n'est pas une bagatelle. Mais pour une administration ou une fondation, ce n'est pas grand chose.
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Alors je me suis mis à rêver. Nous réussissions à rassembler des bonnes volontés dans le monde entier pour rabattre les manuscrits, les livres, les tableaux, les objets de qualité qui participent du passé historique de la cité des doges (et que souvent la France a dispersé du temps heureusement bref de son administration) afin de les lui restituer, rassemblant ainsi au même endroit les plus grands témoignages comme les plus humbles du passé grandiose et universel de Venise. Mais le rêve n'est pas la réalité...

09 novembre 2006

Le Colbert à Bordeaux

publié par Lorenzo

Le Colbert à Venise

C'est aujourd'hui le 9 novembre. Il y a 36 ans mourrait dans sa maison de Colombey, le Général de Gaulle. Cet anniversaire m'a fait penser aux liens qui auraient pu exister entre le fondateur de la Ve République et Venise. A ma connaissance, il n'y est jamais venu. Cependant, j'ai trouvé un lien qui me permet aussi de relier la mémoire de l'homme du 18 juin à Bordeaux et Bordeaux à Venise : le Croiseur Colbert.
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Autrefois orgueil et fleuron de la Royale, navire amiral de l'Escadre de Méditerranée, admiré par le monde entier, ce navire transporta en 1967 le Général et Madame de Gaulle au Canada. C'est à son bord qu'il prépara son fameux discours. Aménagé pour permettre au couple présidentiel de vivre le mieux possible pendant la traversée (les hublots du carré de l'Amiral où logeait le chef de l’État furent transformés en fenêtres et une véritable cheminée fut installée), un lit spécial fut réalisé (la grande taille du Général), il a rendu longtemps de fiers services à la Flotte et termina sa carrière militaire en participant à la Guerre du Golfe. C'est aussi à bord du Colbert que la dépouille du Maréchal Liautey fut rapatriée en France.
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Désarmé en 1991, il finit de vieillir depuis un certain nombre d'années sur les quais de Bordeaux et beaucoup souhaitent sa disparition. Transformé en musée flottant, il passionne petits et grands et c'est le monument le plus visité de la ville. Tas de rouille, certainement amianté, il ne partira pas en Inde mais à la casse. Une association d'excités bordelais "coulez le Colbert" attendent son départ pour faire la fête. Les imbéciles. Ils ne comprennent pas grand chose. Certes aujourd'hui le bateau est en très mauvais état. Il est moins visité du coup. Et il gêne la vue des riverains qui oublient qu'autrefois tous se plaignaient de la présence des cargos et des grues qui faisaient beaucoup de bruit. J'ai même entendu dire qu'il cachait la vue... Pour ceux qui ne connaissent pas Bordeaux, en face ce n'est pas la Giudecca ni San Giorgio, c'est une friche industrielle d'une laideur absolue avec quelques usines encore en activité. Avoir ce bateau sous ses fenêtres moi cela ne me dérangerait pas; c'est comme si le vent du large venait souffler derrière les vitres. J'espère qu'il sera simplement déplacé et confié à une organisation capable de l'entretenir et de l'animer... Je fais partie de ceux qui le regretteraient à cause du "Vive le Québec Libre" hurlé par le général à la tribune, et parce que loin de n'être qu'un symbole guerrier, il est la marque d'une époque où la présence française était toujours ressentie comme rassurante, forte et apaisante.
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Lorsqu'il mouillait dans les eaux somptueuses qui font face à la Piazza, des centaines d'embarcations s'en approchaient et il était autant fêté que le regretté France, le Clemenceau ou la Jeanne. Mais si je suis toujours ému en pensant à lui c'est aussi que, lors d'une visite qu'il fit à Venise, en 1984 je crois, j'ai eu l'honneur de monter à bord à la suite de Christian Calvy, alors Consul de France, et des autorités vénitiennes. Pour le jeune français que j'étais, cette réception d'apparat sur un navire français - et quel navire - fut un évènement. J'ai raconté en son temps dans je ne sais plus quel périodique cette soirée. Il mouillait au large à l'époque. Sa beauté était saisissante ; rutilant, abordant le grand pavois avec San Giorgio auréolé d'un superbe coucher de soleil à sa droite et le Lido dont les réverbères allumés donnaient une image irréelle de scène de théâtre...
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Quand il est revenu, pour son dernier voyage en tant que navire amiral, il était amarré sur les esclavons. Les photos reproduites ici montrent cette ultime visite de courtoisie. Chaque fois que je monte à bord maintenant je me souviens. La musique, le décor (il y avait ce soir là je l'ai dit, un coucher de soleil des plus majestueux et le spectacle des vedettes amenant les invités, les sifflets incessants pour les accueillir, les marins en grande tenue et dans un garde à vous impeccable, les jeunes filles ravissantes dans leurs robes fleuries).
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Nous étions arrivés avec "l'Ile de France", le bateau du consulat. Le seul bateau immatriculé à Venise qui avait le droit de battre pavillon étranger. Vestige d'un vieux privilège donné aux navires de la couronne de France par la Sérénissime en remerciement de je ne sais plus quelle aide,et qui se poursuivit jusque dans les années 80. Tombé en désuétude puisque nous n'entretenons plus de consulat général et donc plus de flottille privée, ce n'est plus qu'un souvenir ! Vous imaginez combien nous étions fiers de pouvoir nous faire conduire par cette vedette rutilante tout en acajou avec le drapeau français flottant au vent. On ne passait jamais inaperçu. J'en souris aujourd'hui. C'était une autre époque, presque un autre monde...

08 novembre 2006

Promenade


Quelqu'un (pas de signature sur le mèl) vient de m'envoyer cette photo. Elle décrit sans fioriture l'atmosphère de la ville, sa tranquille beauté, sa décrépitude aussi et rappelle que Venise n'est pas qu'un musée mais un lieu de vie quotidienne...

07 novembre 2006

Eaux calmes et vertes que déchire la rame...

Chroniques d'un quotidien sans histoire

Le temps passe toujours trop vite à Venise. Pourtant, il est facile de faire durer chaque geste, chaque action. Je m'y emploie dès que j'ai posé le pied sur le quai de la gare.
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Humer l'air qu'on respire sur le quai, devant la gare. Sentir avec chaque parcelle de son corps cette atmosphère unique qui saisit dès le premier regard jeté sur ce spectacle toujours semblable et pourtant à chaque fois différent. Passées les premières minutes de jubilation (cette fois mes enfants poussaient des cris de sauvages en arrivant tant leur impatience était grande de revenir enfin), le coeur battant comme un amoureux qui retrouve sa belle, nous prenons le chemin de la maison. Hélas nous avons peu de jours. 

Le vaporetto, notre lent cortège sur le Canalezzo vers l'Accademia. Tiens le kiosque est fermé aujourd'hui. Peu de monde encore en ce matin un peu gris. Que sera cette première journée ? un pont, et c'est la Toletta. Le portail vert au fond de la ruelle. La clé tourne dans la serrure. La maison bien préparée embaume l'encaustique et le linge fraîchement repassé. Graziella a bien fait les choses. Les radiateurs sont allumés. Les pièces du rez-de-chaussée sont un peu humides. Le jardin est tel que nous l'avons laissé la dernière fois. Le palmier dans la cour semble un peu triste. Sur la table du salon, un vase que nous allons remplir de fleurs et le courrier arrivé ici pendant notre absence. Des petits riens qui me font me sentir vraiment ici chez moi bien plus qu'ailleurs au monde. 
Je n'ai pas encore défait les valises que déjà les enfants sont sortis. le CD de Pedrini est la première musique que j'écoute en rangeant nos affaires. La bouilloire chante aussi. Une bonne tasse de thé et je pars retrouver les enfants sur le campo. Il faut faire les courses. Fruits et légumes chez le marchand flottant de San Barnaba. Le reste chez Billa. Une tarte aux amandes achetées au restaurant des Zattere en rentrant et ce sera un festin. Il faut bien fêter nos retrouvailles avec la Sérénissime. 
A part deux ou trois expositions, une visite aux amis, et l'inévitable gianduiotto de chez Nico, la messe à San Giorgio, ce sera un week-end de calme et de farniente. Jean a les cheveux trop longs, il ira peut-être chez mon coiffeur, celui près de la Lista di Spagna. Constance veut retrouver le magasin où il y a ces extraordinaires poupées dont le visage est calqué sur des visages humains. Alix a l'intention de se reposer au soleil des Zattere et Margot n'a pas de temps à perdre. Son concours blanc est pour la rentrée. C'est décidé, elle sortira peu... Tiens, elle est partie avec les autres ! Venise ensorcelle mes enfants ! Ai-je bien fait de leur instiller dès le biberon ce poison délicieux qu'est notre amour pour la Cité des Doges ? 
Et moi ? Je voudrais faire un tour chez l'antiquaire de la calle delle Carozze près de San Samuele... J'irai aussi me gaver de pâtisseries. Je vais cuisiner souvent : poissons frits, risotto di verdure, lasagnes de canards, zabayon all'arancia...  
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Et puis je dois écrire, recopier mes notes, trier, corriger, élaguer, dépouiller. Lire bien sûr : une dizaine de livres attend dans ma valise. Ah ! quelques jours à Venise. Loin de tout et pourtant au milieu de tout. Non, au centre du monde, puisque Venise pour nous est le point de départ et le point d'arrivée, l'épicentre de nos préoccupations, de nos désirs et de nos vies.
Écrit dans l'euphorie du retour, le 31 octobre.

COUPS DE CŒUR N°11

The Magic Numbers"The Magic Numbers"
Heavenly Recordings, 
EMI. 2005
 En sirotant un délicieux Fragolino et des polpette bien chaudes, j’ai découvert l’autre jour ce disque dont tout le monde me parlait depuis l’été dernier. J’ai mis du temps me direz-vous à juste titre. C’est que j’ai la (très) mauvaise habitude de n’écouter jamais que de la musique ancienne. Non pas que je sois sectaire. Mais j’aime ce son depuis mon enfance. Je sors peu du baroque, avec quelques incursions dans la musique du XVIIIe siècle et rarement dans celle du XIXe. Alors le XXIe… Je me dis souvent que c’est pour les oreilles de mes enfants dont le MP3 regorgent davantage de ces chansons à la mode que de Gabrielli ou Marcello ! Cependant, il m’arrive de découvrir des sons agréables, qui ne me font pas fuir à cause de ces bou boum boum qui me donnent vite la migraine. C’est vrai que mes oreilles en sont restées à l’éventail sonore des Cat Stevens, Bob Dylan ou Leonard Cohen. Ajoutez Jack Johnson et les papas and mamas et vous connaitrez mes goûts - et connaissances (limitées) en matière de musique pop. J’aime quand c’est doux, agréable, reposant, chaud. Je bondis lorsque les Who, Cure ou autres Pink Floyd prennent leurs instruments et que ça hurle et pète dans tous les sens. C’est comme ça. Mais The Magic numbers, c’est autre chose. Mes tympans ont aimé. Musique heureuse et paisible s’il en est. Un peu mélancolique parfois. Parfait pour un après-midi relax ou farniente rime avec copains. Tant que je suis dans les disques pop lounge, je voulais signaler à ceux qui ne le connaissent pas encore : mon amie Claire vient de m’offrir "Ballad of the broken seas" par Isabel Campbell et Mark Lanegan. Superbe. Particulièrement la chanson "it's hard to kill a bad thing" et surtout "dusty wreath" qui convient bien à mes soirées au coin du feu où parfois la nostalgie me tient, agréable sensation finalement que cette musique d'aujourd'hui qui porte et se laisse écouter et réécouter à n'importe quelle occasion.
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Vivaldi, Virtuoso Cantatas
Philippe Jaroussky
Ensemble Artaserse
Ed. Virgin Classics
J'ai déjà parlé de ce contre-ténor dont j'aime beaucoup la voix surtout dans ce disque sublime. Pas un soupçàn d'affectation ni de maniérisme. Tout est délicat mais vif. Viril. Mes mots paraîtront peut-être un peu forts. Ecoutez-le et vous me direz... Voilà un commentaire de Arnaud Thierry, déniché sur le Net. Je le trouve fort pertinent : "De toute évidence, Philippe Jaroussky semble promis à une carrière assez exceptionnelle. Le timbre si particulier de sa voix est de nature à provoquer chez l’auditeur des émotions indescriptibles. Mais il ne s’en tient pas seulement à cela. Il obéit aux impératifs techniques propres à son registre de contre-ténor : un legato d’une fluidité exemplaire et un aigu qui monte avec une souplesse étonnante. Ne négligeons pas la remarquable prestation de l’Ensemble Artaserse pour qui, de toute évidence, la musique de Vivaldi est une seconde nature. Une prise de son trop claire aurait pu nuire à cette interprétation et le preneur de son l’a bien compris. Son enregistrement demeure très équilibré, avec du relief et de la précision. Cela nous vaut un disque captivant qu’il convient de saluer respectueusement."
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Venise et l'Orient
Aurélie Clemente-Ruiz
Ed. Gallimard.
Hors série Découvertes. 2006
Il paragone entre deux destins intimement liés. Deux mondes aussi qui faillirent n'en plus faire qu'un... Devenue une grande puissance grâce à sa suprématie commerciale en Méditerranée, Venise a su établir très tôt des liens privilégiés avec les grandes dynasties musulmanes, les Ayyoubides, les Mamelouks et les Ottomans. Du XIVe au XVlle siècle s'ensuivent d'importants échanges culturels et artistiques entre la cité maritime et les grandes villes du Proche-Orient : Alexandrie, Le Caire, Damas, Jérusalem, Istanbul. Dans le même temps où Venise se pare de palais d'inspiration orientale, où ses grands peintres - Carpaccio, Bellini, Lotto - se plaisent à peupler leurs tableaux de personnages enturbannés ou de précieux tapis venus de Turquie ou d’Égypte, s'opère une formidable transmission des savoirs et des techniques entre l'Orient et la République vénitienne, de l'art du verre à celui du métal. Et Venise d'exporter à son tour des objets de luxe à la mode orientale vers les grandes capitales d'Europe. Un petit livre dépliant d'une vingtaine de pages qui est une parfaite introduction à la magnifique exposition qui a lieu actuellement à l'Institut du Monde Arabe à Paris. Mais je vais vous en reparler.
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Une saison à Venise
Wodzimierz Odojewski
Traduit du polonais par Agnès Wisniewski et Charles Zaremba.
Ed. Les Allusifs.
J'ai lu dans le train, d'un trait et avec délectation ce joli petit livre. Son format, sa couverture, le papier la typographie sert d'écrin à un petit joyau écrit par un polonais dont je n'avais jamais entendu parler et qui m'a entraîné dans un voyage déroutant et loufoque. Une famille un peu comme la mienne: des fous de Venise et cette folie traverse les générations. C'est enfin le tour de de Marek, il va accompagner sa mère et découvrir enfin le palais des Doges et le pont du Rialto. Il a tout préparé. Il sait tout du plan de la ville, il a appris par cœur le nom des et des canaux, il a découpé des dizaines de photos. Mais ce voyage est programmé en 1939. Au lieu du voyage, c'est l'invasion et la guerre. Le séjour vénitien est remplacé par un départ précipité chez une tante qui mène une vie "hygiénique" et souhaite transformer sa villa Art nouveau en pension de vacances. Une inondatyion va bouleverser la réalité et ramener notre petit monde vers le paradis. Une bassine deviendra gondole, la table de ping-pong fera très bien la place Saint-Marc et le piano animera las terrasses des cafés, quelques planches à repasser serviront de passerelles et si les adultes veulent bien jouer le jeu pour un soir…L'auteur "réussit en quelques lignes à restituer cette force de l’enfance qui gomme le danger pour redessiner le rêve et le rendre plus brillant que la réalité. Son écriture n’est jamais naïve ou condescendante, elle transcrit au plus juste ce glissement vers l’imaginaire, quand le regard accepte de passer de l’autre côté du miroir. Marek n’ira jamais à Venise, la sienne est autrement plus poétique" écrit Christine Ferniot dans Télérama. Lisez-le, il y a longtemps que je n'ai pas trouvé une description de Venise aussi vraie !

05 novembre 2006

Exposition Missa Yoshida, Galeria Graziussi, Venise 1984


J'ai retrouvé ce soir des photos qui me font chavirer plus de vingt ans en arrière... C'était la première exposition qu'il m'avait été donné d'organiser à la galerie près de la Fenice. Giuliano Graziussi, le galeriste invitait Missa Yoshida, la compagne japonaise de son ami sérigraphe,. Il m'avait donné carte blanche. Son installation m'avait beaucoup plu : une immense bande de gaze, pareille au tissu qu'on utilise pour les voiles de mariées, sur laquelle elle avait peint au gesso des colonnes et des formes architecturales. Sobriété toute japonaise et en même temps hommage à la civilisation occidentale et en particulier à son ascendance romaine.

 
La photo ci-dessus montre un bout de l'installation. A gauche l'artiste et votre serviteur, Agnès Calvy, et Massimo un ami compositeur descendant de Casanova attendant les invités. Nous avions décidé avec l'artiste de recevoir les invités avec simplement du saké. Cela changerait des éternelles coupes de prosecco et des petits fours. Lorsque la foule des invités se pressa comme à l'accoutumée, ils furent assez surpris par ce qui était exposé bien sur mais aussi par la sobriété du cocktail : des bouteilles de saké et des centaines de petits verres.

 

Le soir, un dîner réunissait les personnalités que Giuliano m'avait chargé d'inviter, les artistes, les gens de la Biennale, les journalistes et les habitués de la galerie. Ce fut un dîner traditionnel. J'avais chois cette trattoria près du Rialto où on sert un délicieux cochon de lait. Il y avait une soixantaine de convives. Un ensemble de jeunes chanteurs anima la soirée avec des airs de musique ancienne (j'ai déjà parlé d'eux dans un précédent post).
  
Le peintre Ludovico de Luigi entre Carla Graziussi et Agnès Calvy, la fille du consul de France d'alors, le sympathique Christian Calvy, à qui je dois énormément et sans qui ma vie vénitienne n'aurait jamais pu être ce qu'elle fut.