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21 novembre 2016

Venise hier et Venise aujourd'hui : combien les choses ont changé !


Si Ambroise Tardieu, archéologue et généalogiste, qui fit de son long séjour à Venise un récit parue dans la revue de Lyon en 1884, puis dans un ouvrage regroupant le récit de tous ses voyages en Italie et Afrique, pourrait dire encore aujourd'hui que "A Venise la belle société parle français" et que "Les artistes, les hommes de lettres, les savants sont recherchés, fêtés." 

Il ne reconnaitrait plus rien de la ville qu'il a fréquenté et aimé durant sa vie vénitienne ; "tout est d'un bon marché sans égal. A Venise, la vie coûte moitié comme en France"...
  
Enthousiaste, il semble n'avoir pas connu la venise aux remugles nauséabonds qui incommodèrent tant Thomas Mann et son professeur Ashenbach : "On se figure généralement que l'air de Venise est malsain ; qu'il doit y avoir une atmosphère humide  aux personnes atteintes de phtisie ; on le recommande spécialement aux anémiques ; à ces derniers, le calme de la ville convient à merveille car on n'entend aucun bruit de voiture". Que dirait-il aujourd'hui du bruit des moteurs de bateau qui pétaradent sur le grand canal ?

"On ne rencontre aucun chien dans les rues de Venise. Cela tient, dit-on, à la taxe élevée qui leur est appliquée." je me suis pris à rêver en lisant cela, que remettre une taxe et revenir à l'obligation de la muselière comme il y a encore trente ans pourrait faire cesser cette invasion. Surtout quand peu à peu le chat, animal souverain à Venise, grand allié de sa salubrité, disparait des rues de la Sérénissime.

24 août 2016

Grossière erreur ou clin d'oeil dans la Pléiade ?


"Conçu et réalisé spécialement à l'occasion de la Quinzaine de la Pléiade 2015" comme l'indique le dos de son étui, ce joli petit album consacré à Casanova rédigé par Michel Delon à qui l'on doit aussi le bel album Diderot paru en 2004, contient une grossière erreur. Elle l'est tellement que de deux choses l'une, soit la personne chargée des recherches iconographiques a été pressée par le temps lorsqu'il a fallu rédiger les légendes des illustrations ou procéder à la relecture ou les auteurs se sont amusés à faire un pied de nez aux lecteurs comme à Giacomo Casanova, sur le même ton, disons de la même manière que lui-même aurait aimé le faire.

Mais de quoi s'agit-il pour que TraMeZziniMag en fasse ainsi tout un foin ? Non, il ne s'agit pas du récit, alerte, joliment troussé. Tout à fait dans l'esprit du personnage dont il narre et commente la vie. L'iconographie est bien choisie. le volume est élégant comme toujours chez la Pléiade. Et puis soudain, patatras. La page 176 s'ouvre sur la photographie d'une statue de bronze que les vénitiens aiment beaucoup - et les amoureux de Venise. Celle de Carlo Goldoni, réalisée en 1883 par Antonio dal Zotto

Mais que lit-on en légende de cette 156e illustration de l'album ? Vous l'avez deviné : Statue de Casanova, Venise. Rien de plus... Abasourdi devant l'énormité de la méprise, j'ai jeté un coup d’œil sur la Table des illustrations. A la page 211, le numéro 156 reproduit l'erreur : "Statue de Casanova, Venise. © Photo12/Alamy.

Photo12 est une agence française d'archives et d'illustration de dimension européenne qui a pignon sur rue, au propre comme au figuré dont les collections rassemblent plus de 10 millions d'images... Des gens sérieux, une banque de données très complète.  Si on cherche statue de Casanova sur leur catalogue, on ne trouve qu'une vieille photo d'archive représentant un général Casanova qui trônait à Corte. En cherchant des images de Goldoni, on retrouve bien l'illustration de l'album, sous la référence B67G45 provenant du fonds Alamy que l'agence représente. Prise par Peter Forsberg, photographe britannique qui travaille aussi pour le Fonds Getty

Le cliché a coûté un peu moins de 50$ euros à la maison Gallimard et l'envoi des données nécessaires à sa publication comportaient obligatoirement les mentions détaillées de la prise de vue et donc l'appellation exacte du sujet photographié... Un enfant de 10 ans n'aurait pas fait l'erreur. Gageons que Anne Lemaire, responsable éditoriale chez Gallimard (elle participe aussi à la magnifique collection Découvertes) et Claire Balladur celle-la même qui était chargée de la recherche iconographique, étaient troublées par le charme du chevalier de Seingalt et le délice et la qualité du texte de Michel Delon ! Mais quel dommage que l'excellence de cette collection soit ainsi entachée d'une erreur aussi grossière. Mais Casanova comme Goldoni auront déjà pardonné à ces dames ! Nous aussi n'est-ce pas ? Et puis cette erreur fut l'occasion d'un billet estival sur le nouveau blog encore en gestation...

07 avril 2007

Clin d'oeil

Lu sur la vitrine d'une osteria dont le patron est plein de cet humour vénitien toujours grinçant et caustique : "La Pizza nous ne savons pas la faire pour la bonne raison que nous sommes trop bouchés pour apprendre".

01 septembre 2006

Poor poor Mister Andrew Conte. Poor poor Venice !

Andrew Conte est un sympathique citoyen américain de Pittsburgh. Marié, père de deux enfants de 6 et 3 ans, il a eu le bonheur et la chance de passer quelques jours à Venise cet été. Ce n'était pas son premier voyage, non. C'est à Venise qu'il fit avec beaucoup d'originalité, son voyage de noces. Il y retourna quelques années après une deuxième fois, un anniversaire en quelque sorte, visitant avec passion églises et musées. Mais c'était la première fois qu'il y venait avec toute sa petite famille.
 
Avisé, il avait renoncé à réserver une chambre d'hôtel avec toutes les contraintes que cela suppose quand on a des enfants en bas âge. Il avait donc loué un appartement. Une sorte d'ersatz d'appartement dirai-je plutôt. Nickel chrome : tout neuf, tout propre, rassurant. Aseptisé comme un décor de cinéma. Si vous aimez le genre, j'ai l'adresse. Juste ce qu'il faut de couleur locale. 
Voilà notre famille Conte qui débarque à l'aéroport. Point de bus ou de vaporetto, un taxi (il en relève d'ailleurs le prix prohibitif mais pour un américain !) car les chers petits auraient souffert, l'heure du dîner approchant et les dernières tartines de peanut butter trop loin, il craignait une rébellion insupportable (chers petits anges). On passe sa vie chez un psy pour moins que ça de l'autre côté de l'Atlantique ! Le voilà donc en taxi se prenant pour l'ineffable Georges Clooney (vous savez le néo-bellâtre qui se promenait à Hollywood avec son cochon dressé et fit longtemps croire à la gent féminine de la planète qu'il maniait le bistouri comme un dieu...). La lagune, le grand canal et c'est l'arrivée, la remise des clés, l'installation. On notera au passage que l'appartement a l'air conditionné (nécessité absolue pour un américain) et que, bien que complètement aménagée la cuisine ne leur a jamais servi...
Pour le confort des enfants, entre les pigeons de Saint Marc et les toboggans des Giardini Publici, Monsieur Andrew Conte préféra pendant toute la durée de son séjour se faire servir un petit déjeuner très neutre. Impossible pour lui d'imaginer que se rendre chez le boulanger du coin ou chez le petit épicier, d'écumer le marché du Rialto pour ramener fruits et légumes frais, poissons et viandes, serait pour les enfants une expérience culturelle défrisante et somme toute éducative. Non, ce pauvre Monsieur Andrew Conte aura préféré nourrir sa famille de panini et de pizza tourista (c'est ainsi que j'appelle ces pizzas de la taille d'une tarte au sucre en général peu cuites garnies de sauce tomate épaisse et parfois de dés de jambon blanc industriel...) arrosés de Fanta pour les gosses et de bière pour leurs géniteurs ! 
Il raconte ainsi un mémorable pique-nique sur un campo où trône un monumental lion ailé  (les lecteurs avisés auront reconnu). Assis sur le piédestal, la tribu Conte a délicieusement déjeuné puis, pour aider à la digestion certainement, les chers petits sont ensuite partis escalader le lion vert-de-grisé (selon l'expression même de Andrew Conte). Pour ceux qui ne l'ont pas reconnu, il s'agit du monument à Daniele Manin, sur le campo du même nom, derrière San Luca... 
Notre héros vante cette péripétie comme une joyeuse aventure à imiter, sans se rendre compte qu'il y a là de quoi donner des palpitations à l'Avocat Augusto Salvadori, le courageux assesseur au tourisme, parti en guerre contre la sauvagerie des touristes qui compissent les murs, s'installent pour pique-niquer au pied de la basilique Saint Marc, jettent leurs canettes de Coca-Cola vides dans les canaux et prennent la ville pour un Luna-park géant... 
De quoi aussi renforcer l'offensive des patrons de Disney qui souhaitent mettre la main sur Venise pour en faire, justement, un gigantesque complexe touristico-ludique comme ils en ont le secret. Un accord dans ce sens a d'ailleurs été signé avec les financiers de Las Vegas...
C'est un début... Après tout, en bon yankee qui se respecte, ce pauvre Monsieur Andrew Conte ne pourra que s'en féliciter : ses chers petits pourront se gaver de bouffe industrielle à chaque coin de rue et grimper sur les monuments - après avoir fait la queue bien sûr - en toute impunité...

Certes mes propos sont un peu outrés. Ce sympathique américain livre aux gens de Pittsburgh des adresses pour un séjour réussi à Venise vu sous l'angle du mode de vie américain et c'est cela que Tramezzinimag cherche à dénoncer. Cette main mise de plus en plus prégnante d'un style de vie, où tout doit être à portée de main, facile, surtout pour les enfants qu'il ne faut jamais forcer, et le monsieur ne donne de Venise qu'une idée tellement proche d'un parc d'attraction. Pourtant c'est un lettré, un homme de culture... Mes enfants m'accompagnent toujours dans les musées et les galeries, les églises et les salles de concert. Ils ont la liberté de jouer, de courir et de réclamer des glaces ou des limonades mais nous n'avons jamais, leur mère et moi, cédé aux sirènes de l'américanisation des mœurs. Ils savent ce que Non veut dire quand les parents prononcent ce mot et ils ont appris tôt les règles et les usages. Délurés et épanouis comme le sont les enfants en bonne santé, ils sont aussi sages et calmes quand cela est nécessaire, polis et respectueux avec le reste du monde comme ils le sont en famille, avec nous et entre eux. Comme des milliers d'autres enfants élevés et aimés. Ils transmettront un jour cela à leur tour.

Pour la lecture du texte d' Andrew Conte, publié dans le Pittsburgh Tribune Review, le 06/08/2006 sous le titre (alléchant avant lecture) "The Sounds of Venice", il est à la disposition des lecteurs de Tramezzinimag en cliquant sur le lien ICI
Crédits photographiques : © Andrew Conte & The Pittsburgh Tribune Review.

posted by lorenzo at 00:55

27 août 2006

Le condom de Venise : vogue la gondole contre le sida...

Demain, lundi 28 août 2006, des gondoles d'un type particulier partiront du Squero san Trovaso vers 19 heures... Petites, munies d'un felze, 5000 barques noires contenant chacune 7 préservatifs colorés comme une fête de carnaval, vendues habituellement 15 euros, seront ainsi distribuées...
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C'est la dernière trouvaille du comité vénitien de lutte contre le Sida avec l'aide d'une société au nom évocateur : la société Casanova, spécialiste des préservatifs "colorés comme du verre de Venise" (c'est l'image utilisée dans un des ses discours par un parlementaire italien). Cela peut faire sourire, mais c'est tout à fait sérieux. La société est l'un des premiers fournisseurs de la Péninsule depuis sa création. Elle portait alors le nom d'une antique pharmacie "al Perdon", à San Apponal et fournit en leur temps Lord Byron ou Rudolph Valentino... Mais avant tout, il vous faut savoir que beaucoup d'historiens sont d'accord pour attribuer à Venise l'origine du préservatif. Le Marquis de Sade parle ainsi dans sa "Philosophie dans le boudoir" d'un "petit sac de peau de Venise, vulgairement nommé condom, dans lequel la semence coule, sans risquer d'atteindre le but"... 

Mais revenons à l'évènement de demain. Sous la présidence du NH Comte Girolamo Marcello au nom de la Sérénissime, une vingtaine de personnalités locales parraineront chacune un de ces vaisseaux. parmi elles, citons le peintre Ludovico de Luigi, la comtesse Fiora Crespi, vice-présidente de l'A.N.A.I.D.S., le consul d'Espagne, Antonio Simionato, secrétaire du corps consulaire à Venise qu'il représentait ...
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Mais cette manifestation placée dans la lignée traditionnelle des campagnes contre le sida, en voulant rappeler aux jeunes la nécessité de se protéger, soulève déjà une polémique. Aldo Rosso, le président du syndicat des gondoliers n'apprécie pas l'appropriation de l'image la plus forte de Venise pour une campagne prophylactique de ce genre. "Pourquoi n'ont-ils pas pris le pont du Rialto ou une bricola" (ces poteaux de bois qui marquent l'entrée des palais vénitiens et sont peints aux couleurs des propriétaires de ces palais)... Les auteurs de la manifestation ont répliqué en expliquant que le choix de la gondole voulait exprimer une comparaison entre la fragilité de la Cité des Doges et la fragilité de l'être humain que menace le Sida comme les eaux et l'érosion menace la ville... Je vous laisse juge mais pourquoi polémiquer après tout. Il s'agit de prévention et tous les moyens sont bons, car suivant l'adage, "'il vaut mieux prévenir que guérir"...
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Mais revenons au produit lui-même. Avec la gondole lancée demain, la boîte "bricola" existe avec à l'intérieur 30 capotes vendue 35 euros. Si on peut acheter cette protection à l'unité dans un bel emballage pour 1 euro, on trouve aussi des boites à l'ancienne, ornées de très belles peintures s'inspirant de la Commedia dell'arte, le chapeau de paille des gondoliers en réduction avec 7 capotes, un fac similé d'une rareté bibliophilique, "La Ninfomania o sia il Furore Uterino", livre interdit par l'inquisition imprimé à Venise en 1783 (25 préservatifs) pour 30 euros. Il existe aussi un CD reproduisant le célèbre guide de 1796, "Il forestiere illuminato", avec 10 préservatifs...
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Bref un marketing peut-être un peu outré mais dynamique et terriblement inventif. Et pour les touristes, un nouveau souvenir pour le moins original à ramener d'un séjour vénitien ! En tout cas, moi je dis bravo. Voilà une initiative qui montre au monde que Venise n'est pas un musée figé dans son passé ni un parc d'attractions à la Walt Disney, mais un lieu de vie, en pleine évolution et tourné vers l'avenir.
posted by lorenzo at 23:10

22 juin 2006

02 décembre 2005

Idées reçues.


C'est fou comme les idées reçues ont la vie dure. Je discutais, lors d'un récent dîner en ville avec ma voisine de table, une charmante octogénaire reconnue ici pour son soutien aux artistes. Nous parlions de Venise, évidemment. Elle me dit soudain, avec beaucoup d'assurance dans la voix, "Venise est un délice mais c'est tellement morbide. Le paradis des déviants et des invertis. Une ville de tuberculeux romantiques"... Je ne répondis rien, bien entendu. Elle ajouta aussitôt "de toute façon elle s'effondre et s'enfonce, c'est délicieux à voir mais ça pue!". Cela fit beaucoup rire nos voisins. Il ne manquait que ces sales pigeons porteurs de maladie, la chaude-pisse de Casanova et Thomas Mann bénissant Adelsward Fersen marié à Barrès... 

Non Venise n'est pas une cité de mort, elle est bien mal en point certes mais elle vit. Il suffit de quitter les hauts lieux envahis chaque jour par les hordes de barbares venus d'Asie, d'Amérique ou de chez nous, pour s'en rendre compte. Elle vit, elle tressaille, elle gigote, elle s'amuse. Et sa vitalité est comme un pied de nez à ces clichés rassis. Promenez-vous en hiver du côté de Santa Margherita, non loin des facultés. Vous verrez des centaines de jeunes passer, rire, plaisanter, boire un verre ou un café dans les nombreux bars de l'endroit. Le matin, autour du kiosque à journaux, on discute ferme des gesticulations de l'infâme Berlusconi, on commente les résultats sportifs. Les tavernes enfumées de Cannareggio, celles des fondamente qui entourent l'Anzolo Rafaele, San Sebastiano, sont pleines de monde. Il s'y fait de la très bonne musique. Dans les ateliers, les artistes créent, et les musiciens inventent dans leurs studios les musiques de demain. A l'école d'Architecture les élèves travaillent avec les meilleurs maîtres de toute l'Italie. Les collèges et les lycées sont remplis d'une jeunesse belle et pimpante. 

Où est le mouroir décrit par cette néo-intellectuelle prétentieuse ? Voilà trente ans que j'entends ainsi parler de Venise : on l'associe aux amours troubles et délurées, à des sexualités déviantes ou à la mort avec ses cortèges de déliquescences et de corrosions en tout genre. Non, pour moi la Venise que je vois, celle où je vis c'est celle que le Président de Brosses sut décrire, celle que visitèrent Rousseau et Mozart, la cité lumineuse de Goldoni, de Guardi ; une fête joyeuse, un paysage clair et lumineux. Car Venise est toute de lumière et de reflets n'est-ce pas. Depuis quand la lumière rutilante et les reflets qui palpitent sont-ils les décors de la mort et du sordide ?

30 novembre 2005

Les brioches de Robert De Niro

Robert De Niro ha una faccia cupissima anche quando non recita. Era assolutamente di cattivo umore e anche ingrassato di almeno dieci chili, e vestito con una maglietta neanche pulitissima, e con le ciabatte. Ma era Robert De Niro e aveva intorno una specie di alone lucente di splendore/invidiabilità/fascino/charme, che non aveva nulla a che fare con niente di oggettivo, eppure c'era. Era un brutto uomo grasso e antipatico e irresistibile. Non tutti gli attori americani possiedono questa invidiabile caratteristica : i più sembrano ragionieri, baristi, banconisti di Mc Donald's. De Niro, no. De Niro ha carisma. Puè essere vestito da ragioniere, avere la faccia da banconista, ma è De Niro comunque. E c'era un vassoio di brioches.Allora è successo che De Niro si è mangiato prima una brioche, poi due, poi tre, poi tutte le brioches del vassoio ; e, arrivato all'ultima, ha sollevato lo sguardo, ha incrociato il mio (io facevo signorilmente finta di stare facendo colazione con un banconista di Mc Donald's) e ha detto, con la sua voce grave: "Do you mind?". E qui è successo che io, forse stremata dalla lunga compostezza che mi ero imposta, ho detto qualcosa come: "Veramente si", e lui si Ò messo a ridere (senza esagerare, diciamo una specie di vago sorriso accompagnato da baluginare di denti) e mi ha ceduto la brioche. Abbiamo cominciato a parlare : di brioche. Di Venezia. Del Festival del cinema. Del motoscafo del padrone di casa. E alla fine, mentre si alzava da tavola, De Niro mi ha chiesto se mi era piaciuta la mia brioche. Io avrei detto si, tranne che lui ha continuato a parlare senza darmi il tempo di rispondere. Ha detto che le donne vanno pazze per le brioches (lui le chiamava "croissants"); e anche che le donne sono pazze per tutte le cose dolci ; e che lui è una donna, perchè gli piacciono i dolci. E sembrava molto soddisfatto del ragionamento. Io, non so perchè, forse per l'evidente idiozia della conversazione, gli ho chiesto, a bruciapelo : "Ma lei non si stanca mai di dover fare De Niro?" E allora, per un momento, mi è sembrato vivo e vero e fatto di carne come tutti. Ha girato intorno al tavolo, mi è venuto vicino e ha detto : "Si, ma non lo dico a nessuno" e io ho avuto l'impressione che, per mantenere il segreto, mi avrebbe strangolato senza difficoltà. 
 Antonella Boralevi (1)
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Ce petit texte assez drôle de la Boralevi pour introduire mon sujet : les croissants. "Pâte abaissée en triangle et roulée sur elle-même pour former un croissant" dit un dictionnaire de cuisine. Cette pâtisserie très riche en beurre a été créée à Budapest en 1686 pour commémorer la défaite des turcs a été introduite en France par la reine Marie-Antoinette. Le plus souvent au beurre, on le trouve aussi fourré de chocolat, de pâte d'amandes ou de compote de fruits. Il peut aussi servir à préparer des sandwiches. Un croissant nature au beurre fournit 400 calories... Forum Italia faisait sur son site un sondage : "Come ti piacciono i Cornetti" (les croissants, tu les aimes comment ?) : nature, à la crème, à la confiture ou au nutella. Une majorité écrasante d'italiens (mâles en général !) ont voté pour le nutella. 
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Je les suis dans leur choix. Pour le plaisir qu'apporte un délicieux croissant à la pâte onctueuse fourré de la fameuse crème à la noisette (et non pas de crème au chocolat) le dessus délicatement glacé au sucre comme on en sert à Rome ou à Naples, le matin avec un cappuccino... Un petit moment de paradis. Les petits croissants bien rondouillards et tellement onctueux de Rosa-Salva à Venise, avec juste assez de crème pâtissière pour répandre sur le palais une douce sensation qui se mêle divinement à l'arôme du café macchiato et plus simplement tous ceux qu'on vous sert dans n'importe quel bar entre le café de la gare Santa Lucia et la Piazza... Ceux qu'on déguste enveloppés dans une petite serviette en papier avec le logo du café imprimé dessus, debout en buvant un café bien chaud l'hiver, en attendant le vaporetto... Les cornetti (on dit aussi "brioche" en Italie)bien chauds du petit boulanger de la Lista di Spagna, le premier ouvert le matin dans tout Venise, quand la nuit se retire à peine, et dont les fours répandent un parfum merveilleux jusqu'aux Santi Apostoli... 

Cette odeur que j'associe depuis toujours à la vision que j'eus le premier matin de mon premier séjour seul à Venise : vers sept heures du matin, partant pour rejoindre mon cours d'italien à la Dante Alighieri, à l'Arsenal, je croisais un jeune garçon d'une quinzaine d'année, tout de blanc vêtu, les cheveux longs et ondulés comme dans les tableaux du Carpaccio. Il portait en équilibre sur la tête un grand plateau de tôle rempli de croissants fumants. Il avançait ainsi, devant moi, montant et descendant gracieusement les marches des ponts, en direction du Rialto, en sifflotant. Je pensais à cette scène du film de Lionel Bart, "Oliver!"Mark Lester se promène avec Jack Wild au milieu du marché de Londres par un beau matin d'été... 

Pendant trois semaines, je croisais presque chaque jour cet enfant joyeux qui portait avec tant de grâce son précieux chargement de brioches. Un matin, alors que je sortais de la ruelle où se trouvait la maison où j'habitais, nous nous sommes retrouvés face à face. Souriant, l'enfant a attrapé un croissant qu'il m'a donné ; "ciao" me lança-t-il en reprenant sa route. J'ai encore le goût de ce croissant dans la bouche, je sens encore l'air qui était très doux en ce matin d'été,je revois la lumière très pure et le décor, le pont des Guglie, le palais Labia et San Geremia, à sept heures du matin... Nous sommes devenus ensuite assez bons amis. Le croissant du jeune livreur devint un rite matutinal. Il s'appelait Paolino et venait avoir quinze ans. C'était le fils du patron. Il fornaio di Cannareggio. Je me demande parfois ce qu'il est devenu. Est-il toujours livreur de croissants ou bien est-ce lui qui à son tour prépare ces délicieux cornetti parfumés ?

(1) : Pour les non italianophones, Antonella Boralevi est une femme assez inévitable en Italie. Florentine vivant à Milan, elle est de toutes les fêtes, de toutes les émissions télévisées où elle apparait comme la passionaria de la cause féminine bon ton. Ultra-mondaine, elle écrit des romans sirupeux qui ont du succès. Elle sait se mettre en avant et on la voit partout en compagnie des plus grandes célébrités. Elle a de l'esprit. Elle est drôle et a beaucoup d'ennemis.

11 novembre 2005

Trovar casa a Venezia *



Quand on vous dit qu'il est vraiment difficile pour les vénitiens de trouver à se loger à Venise...Tout le monde s'arrange comme il peut. Même un trou minuscule est devenu précieux. Sur la photo, communiquée par il sior Stefano du site www.Vanessia.com, un mini-appartement facilement transportable et déménageable... Cave canem. 

 posted by lorenzo at 23:38

08 novembre 2005

Urgences, urgences...

« C’est incroyable, papa » me disait ce matin ma fille Constance (huit ans), en parlant de sa sœur aînée, « Margot n’est pas contente parce qu’ils ont ouvert de nouveau les urgences pour des jeunes qui font du feu dans les voitures et elle dit que cela va faire comme le 11 juillet »… Je n’ai pas compris tout de suite ce qu’elle voulait dire. Et puis une vieille dame affolée rencontrée sur le chemin de l’école qui criait à la cantonade « c’est la guerre civile » m’a permis de traduire les propos déformés par ma petite fille : l'état d'urgence, les incendies de voitures et le 11 septembre... 
J’ai éclaté de rire, laissant la vieille dame éplorée devant tant de légèreté « alors que l’heure est grave »… J’ai ri devant ce bon mot innocent qui m’a simplement rappelé, s’il était besoin, combien nous devrions relativiser les évènements et prendre du recul. Oui la situation est préoccupante, oui le désarroi que traduit ces manifestations inadmissibles ne peut que dérouter et nous interroger. Mais, dans ma prise de position contre la constitution européenne, lorsque je prétendais que le oui entraînerait de gros désordres, tout le monde se gaussait. Le non a au moins empêché que ce qui se passe en ce moment soit démultiplié et se déroule dans d’autres lieux et d’autres milieux que nos banlieues et avec une bien plus forte intensité . 
Je crains hélas que ces piteux évènements ne soient que la preuve de l’inanité de nos dirigeants, nationaux et européens; leur incapacité à gouverner, puisque gouverner c’est prévoir. A force de manquer de conviction, à force de se mettre lâchement à la traîne des puissances ultra-libérales, étatiques ou multinationales, voilà ce que l’on récolte. En politique comme dans tout autre domaine, l'expérience prouve qu'il est vain de suivre lâchement les modes. A trahir ce qu'on est vraiment, on est toujours puni.
Point d’homme providentiel (je suis convaincu que les gens ont besoin d'un sage, une figure paternelle à la tête de l'Etat, arbitre et référence, loin de toutes les querelles partisanes), point de discours engageant la nation pour que tous se mettent au travail pour cohabiter, coopérer et bâtir ensemble la société dont nos enfants auront besoin pour vivre et prospérer. Au lieu de ça, nous avons des combats de chefaillons, méprisables apparatchiks de droite ou de gauche, qui ne songent qu’a conserver ou conquérir le pouvoir, pour leur propre intérêt ou celui de leur caste. La gouvernance liée à tout ce qui est économique et entre les mains des financiers et des agences de notation (comment avons-nous pu accepter cela ?)

Et pour rajouter à cette trivialité, les médias, qui font monter la pression comme le pâtissier fait monter sa crème. Plus on parle de ces évènements, plus ils se développent, plus la population se met à craindre et à réagir et les passions se réveillent. La part la moins belle en chacun de nous s’éveille. Le monde est encore rempli des remugles de cette peste brune que cinquante ans de relative tranquillité n'ont pas totalement effacé... Il y a longtemps que je n’ai pas entendu autant de propos racistes et xénophobes, autant d’insanités sur les jeunes, les arabes. Et tout cela parce que des bandes de voyous organisées, sans autre motivation que la violence pour la violence, sortent dans la rue et cassent. Les autres, ceux qui peinent, ceux qui sont en situation précaire et remplissent leurs obligations sociales – et ils sont la majorité – risquent maintenant de vivre les pogroms comme les juifs en Pologne ou en Russie il n’y a pas si longtemps… 
Oui, le bon mot rigolo de ma petite dernière n’est finalement pas anodin. Il me rappelle que face à tout événement, même grave, il faut prendre du recul et chercher à comprendre pour se faire sa propre opinion et qu’il faut toujours garder son sang-froid. Non, ce n’est pas la guerre civile comme les journaux chinois ou américains l’annoncent à leurs concitoyens, les priant d’éviter de se rendre en France. C’est simplement une plaie purulente qui saigne depuis longtemps mais qu’on n’a jamais su ou voulu soigner. Comment guérir une blessure quand à chaque instant, le soignant en ravive une autre par sa maladresse et son incompétence. 

C’est le corps entier qui est malade. La tête tout d’abord, puis les membres et quasiment toutes les cellules sont atteintes. Par le doute, par le découragement, maintenant par la crainte. Cela arrange bien du monde en fait, ceux dont le corps est déjà pourrissant et qui préfèrent ne pas être seuls dans l’ambulance. Il n’y a pas de raison. Ceux qui savent être incapables eux-mêmes de résister longtemps au virus. Ils pourront faire accepter plus facilement des traitements de choc pour éviter la contagion. 
Non, il ne faut pas s’inquiéter outre mesure. Que la sagesse modère nos propos et nos opinions. Les mêmes imbéciles continueront de parader sur les chaînes de télévision pour amuser les français en fin de semaine, les mêmes footballeurs millionaires continueront de taper sans conviction dans leur ballon, les mêmes députés s’endormiront dans l’Hémicycle, les mêmes fonctionnaires européens produiront leurs règlements iniques et la froidure de l’hiver bientôt calmera les flammes. 
Mais attention au printemps qui revient. Il risque de faire très chaud alors, et le Tamiflu social n’est pas encore en fabrication dans notre pauvre hôpital européen, loin s'en faut…
posted by lorenzo at 20:27