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07 mai 2013

Castello, tout simplement...


Qui parlait ainsi de ce sestiere un peu éloigné de tout, qui a su garder toutes les caractéristiques de la Venise traditionnelle. Cannaregio était son pendant autrefois, avant que le flux ds touristes transforme tout sur son passage, de San Geremia au Rialto. Simplement Castello à Venise, le quartier le plus vaste de la ville. Hormis l'Arsenal, l'ex-cathédrale de San Pietro, la belle église conventuelle de Sant'Elena, rien de monumental. Tout y est à la mesure de l'homme, de la vie courante. Modeste. L'Arsenal bien sûr, même sans l'intervention de Dante qui nous le fait assimiler ses ateliers et ses chantiers à l'Enfer, transpire encore la puissance et le gigantisme de ce qu'il fut durant mille ans, mais les autres monuments qui restent encore du passé glorieux de la sérénissime ? 

Prenons l'église San Martino. Elle se dresse, presque solitaire, un peu cachée, loin derrière la Riva que tout le monde emprunte en venant de San Marco. Elle contient des trésors et le saint qu'elle honore est particulièrement cher aux vénitiens, notamment aux plus jeunes d'entre eux qui le fêtent bruyamment - et joyeusement - chaque année, avec bien plus d'enthousiasme que la très artificielle fête de Halloween bêtement (ou lâchement et mercantilement importée des Amériques...

San Martino di Castello est construit sur ce qui fut il y a très longtemps - bien longtemps avant que ne se construise le gigantesque Arsenal - les ilots Gemini aujourd'hui totalement emberlificotés dans la structure de la ville depuis l'aménagement de l'Arsenal et de la cathédrale. Dédiée à Saint Martin de Tours, ce saint fameux pour avoir coupé sa tunique en deux et l'avoir partagée avec un mendiant, elle contient des trésors peu connus. Comme son histoire d'ailleurs : une colonie lombarde s'était installée sur la lagune et Saint Martin était leur saint protecteur. Mais on ne sait pas trop en fait... L'église votive aurait pu aussi être édifiée par des réfugiés qui avaient fui Ravenne et auraient nommés la chapelle comme la basilique de leur cité. On trouve les premières mentions de sa construction en 932 et on sait qu'elle fut consacrée en juin cette année-là. C'est un lieu particulièrement agréable à visiter. Dans le silence de ses voûtes, la fraîcheur de ses marbres, il faut bon se poser un instant et faire silence même quand on n'est pas croyant. 

Ne manquez pas de la visiter. Du temps où je vivais à Venise, il y avait là un vieux curé très sympathique qui avait toujours une anecdote à raconter et se faisait un plaisir de montrer son église aux visiteurs. C'est ainsi qu'on y découvre des merveilles : une vierge des douleurs de Palma Il Giovane, un autel de Tullio Lombardo, et dans la sacristie trône un charmant tableau de Antonio Zanchi si ma mémoire est bonne qui représente la Vierge et Saint Joseph avec Saint Antoine de Padoue. L'église conserve aussi une précieuse relique, un tibia du saint tourangeau. 


Autre chose à voir : Parmi les dalles de marbre qui recouvrent le sol devant le maître-autel, on trouve des carreaux gravés de figures représentant les outils utilisés non loin de là dans les ateliers de l'Arsenal, par les calafati, cette confrérie d'artisans chargés de calfater les navires fabriqués dans les chantiers navals de la République. Les membres de cette corporation, qui était fort puissante, bénéficiaient de nombreux privilèges. Ses membres embarquaient parfois sur les navires de la Sérénissime afin d'assurer le calfatage des coques. Ils étaient très considérés. Ouvriers fonctionnarisés par la République, ils avaient aussi le droit de travailler pour les navires marchands privés et de percevoir une rémunération de la part des armateurs. San Martino était leur église. 


 Un billet de Tramezzinimag citait l'originalité de cette corporation qui, avec les charpentiers de navire existe encore et dispose - c'est l'unique rescapée de l'ancienne République - une société mutuelle, devenue au fil des siècles une caisse de retraite et de prévoyance. Toujours privée, toujours régie par les règles édictées du temps des doges et approuvée par le Sénat de la Sérénissime. Chaque année, le 5 mars, jour de la San Foca, martyr natif du Pont-Euxin, les voûtes de San Martino retentissent du chant des membres de cette confrérie à l'occasion d'une messe solennelle. Le prêtre y bénit des petits pains qui sont ensuite distribués à l'assistance dans des petits sachets avec une image de San Foca (ou Phocas) reprise d'une mosaïque ancienne de San Marco. Cette cérémonie est une des dernières à rester authentiquement vénitienne et n'a jamais été à ce jour, dieu merci, offerte en pâture aux touristes. Après la cérémonie, les membres de la corporation et leurs familles se retrouvent pour un repas traditionnel. Pour y avoir été invité à plusieurs reprises, je puis vous assurer que tout y est authentique, vrai, chaleureux et convivial ! 



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Le billet publié sur le site originel avait suscité 2 commentaires non archivés par Google et dont hélas la trace a été perdue. Merci Google !

Castello, tout simplement...


 
Qui parlait ainsi de ce sestiere un peu éloigné de tout, qui a su garder toutes les caractéristiques de la Venise traditionnelle. Cannaregio était son pendant autrefois, avant que le flux ds touristes transforme tout sur son passage, de San Geremia  au Rialto. Simplement Castello à Venise, le quartier le plus vaste de la ville. Hormis l'Arsenal, l'ex-cathédrale de San Pietro, la belle église conventuelle de Sant'Elena, rien de monumental. Tout y est à la mesure de l'homme, de la vie courante. Modeste. L'Arsenal bien sûr, même sans l'intervention de Dante qui nous le fait assimiler ses ateliers et ses chantiers à l'Enfer, transpire encore la puissance et le gigantisme de ce qu'il fut durant mille ans, mais les autres monuments qui restent encore du passé glorieux de la sérénissime ? 

Prenons l'église San Martino. Elle se dresse, presque solitaire, un peu cachée, loin derrière la Riva que tout le monde emprunte en venant de San Marco. Elle contient des trésors et le saint qu'elle honore est particulièrement cher aux vénitiens, notamment aux plus jeunes d'entre eux qui le fêtent bruyamment - et joyeusement - chaque année en novembre, avec bien plus d'enthousiasme que la très artificielle fête de Halloween importée des Amériques.
 
San Martino di Castello est construit sur ce qui fut il y a très longtemps - bien longtemps avant que ne se construise le gigantesque Arsenal - les ilots Gemini aujourd'hui totalement emberlificotés dans la structure de la ville depuis l'aménagement de l'Arsenal et de la cathédrale. Dédiée à Saint Martin de Tours, ce saint fameux pour avoir coupé sa tunique en deux et l'avoir partagée avec un mendiant, elle contient des trésors peu connus. Comme son histoire d'ailleurs : une colonie lombarde s'était installée sur la lagune et Saint Martin était leur saint protecteur. Mais on ne sait pas trop en fait... L'église votive aurait pu aussi être édifiée par des réfugiés qui avaient fui Ravenne et auraient nommés la chapelle comme la basilique de leur cité. On trouve les premières mentions de sa construction en 932 et on sait qu'elle fut consacrée en juin cette année-là. C'est un lieu particulièrement agréable à visiter. Dans le silence de ses voûtes, la fraîcheur de ses marbres, il faut bon se poser un instant et faire silence même quand on n'est pas croyant. 

Ne manquez pas de la visiter. Du temps où je vivais à Venise, il y avait là un vieux curé très sympathique qui avait toujours une anecdote à raconter et se faisait un plaisir de montrer son église aux visiteurs. C'est ainsi qu'on y découvre des merveilles : une vierge des douleurs de Palma Il Giovane, un autel de Tullio Lombardo, et dans la sacristie trône un charmant tableau de Antonio Zanchi si ma mémoire est bonne qui représente la Vierge et Saint Joseph avec Saint Antoine de Padoue. L'église conserve aussi une précieuse relique, un tibia du saint tourangeau. 

Autre chose à voir : Parmi les dalles de marbre qui recouvrent le sol devant le maître-autel, on trouve des carreaux gravés de figures représentant les outils utilisés non loin de là dans les ateliers de l'Arsenal, par les calafati, cette confrérie d'artisans chargés de calfater les navires fabriqués dans les chantiers navals de la République. Les membres de cette corporation, qui était fort puissante, bénéficiaient de nombreux privilèges. Ses membres embarquaient parfois sur les navires de la Sérénissime afin d'assurer le calfatage des coques. Ils étaient très considérés. Ouvriers fonctionnarisés par la République, ils avaient aussi le droit de travailler pour les navires marchands privés et de percevoir une rémunération de la part des armateurs. San Martino était leur église.


Un billet de TraMeZziniMag citait l'originalité de cette corporation qui, avec les charpentiers de navire existe encore et dispose - c'est l'unique rescapée de l'ancienne République - une société mutuelle, devenue au fil des siècles une caisse de retraite et de prévoyance. Toujours privée, toujours régie par les règles édictées du temps des doges et approuvée par le Sénat de la Sérénissime. Chaque année, le 5 mars, jour de la San Foca, martyr natif du Pont-Euxin, les voûtes de San Martino retentissent du chant des membres de cette confrérie à l'occasion d'une messe solennelle. Le prêtre y bénit des petits pains qui sont ensuite distribués à l'assistance dans des petits sachets avec une image de San Foca (ou Phocas) reprise d'une mosaïque ancienne de San Marco. Cette cérémonie est une des dernières à rester authentiquement vénitienne et n'a jamais été à ce jour, dieu merci, offerte en pâture aux touristes. Après la cérémonie, les membres de la corporation et leurs familles se retrouvent pour un repas traditionnel. Pour y avoir été invité à plusieurs reprises, je puis vous assurer que tout y est authentique, vrai, chaleureux et convivial !


02 novembre 2012

COUPS DE CŒUR (HORS SÉRIE 31) : L'émission Ports d'Attache montre Venise


Une journée ensoleillée et un ciel radieux sur Venise sans acqua alta à l'horizon. De quoi mettre de très bonne humeur les vénitiens qui n'ont pas profité du pont de la Toussaint pour quitter la lagune quelques jours. Ceux qui auront vu l'autre matin l'excellent petit documentaire canadien de la série Ports d'attache diffusé sur Arte, comprendront le sens de ces lignes. Quand, loin des chemins encombrés par les hordes de touristes, les vénitiens se retrouvent, sur ces campi tranquilles où le voyageur qui ne connait pas Venise n'ose pas trop rester, de peur de déranger, pour bavarder, pour faire jouer les enfants, boire un verre, on imagine forcément un ciel clément, une douce brise parfumée et ces bruits, tous ces bruits qui composent le décor sonore d'un lieu unique..

Cette atmosphère justement, le film de Nicolas Boucher, Etienne Deslières et Myriam Côté a su parfaitement la retranscrire. La manière de filmer la vie bourdonnante de ces places tranquilles où les plus âgés se retrouvent depuis toujours, assis sur les bancs de bois, à l'ombre des arbres, pendant que les plus jeunes papotent aux terrasses des cafés, buvant selon l'heure, un café ou le traditionnel spritz. Liant tous ces plans, les jeux endiablés des enfants. Le chant des oiseaux qui semblent vouloir participer à cette euphorie tranquille. Car tout est le plus souvent très doux dans ce décor si commun. Peut-être parce que tous les participants de la scène sont heureux et satisfaits de se retrouver là. En général, les vénitiens habitent tous dans des maisons très petites. Venir sur le campo avec les enfants et y retrouver des amis, c'est comme posséder un grand salon. C'est peu ou prou ce que confirme la très charmante Laura Scarpa, dans un anglais joliment teinté d'accent vénitien. Les cloches de l'église voisine, la rumeur du grand canal au loin avec son trafic ininterrompu de bateaux... Tout cela est unique et justifie d'un coup le choix que beaucoup ont fait de rester dans le centre historique en dépit de tous les inconvénients qu'on ne listera pas ici.

Heidi Hollinger
Diffusé très tôt (8h 50), et donc passé un peu inaperçu, ce documentaire très très bien fait. Pour une fois, ai-je envie d'ajouter. A cause des images, du rythme parfaitement adapté au rythme de Venise... Avec le même décor, pratiquement les mêmes sujets, les mêmes acteurs, que tellement de précédentes émissions, les auteurs ont su montrer là un autre spectacle. Et le spectateur se régale.  Les mots sont mal choisis car rien n'est moins du domaine de la fiction que ce documentaire. Il montre et dit la vraie cité des doges et permet aux néophytes d'apprendre l'essentiel. Si les 50 minutes de pellicule ont obligé les réalisateurs à certains raccourcis, toujours facteurs d'imprécision et parfois de méprise, l'essentiel y est et d'une façon parfaite. La musique, le son, le choix des plans, le montage, tout est un régal et on ressent le bonheur pris par l'équipe à faire ce film. TraMeZziniMag leur décerne sans hésiter un satisfecit en or ! 

Il s'agit en fait d'un épisode d'une série de documentaires tournés un peu partout dans le monde par TV5 Québec-Canada, autour de la photographe Heidi Hollinger. Chacun de ses déplacements dans une ville portuaire du monde est ainsi filmé par une équipe efficace et très douée, et c'est un bonheur que de suivre la dame dans des lieux aussi différents que Melbourne, Helsinki, La Havane, Marseille ou Valence. Au fil des mois la production a ainsi mis au monde vingt-six épisodes en deux séries qui seront, nous l'espérons, bientôt disponibles en DVD.Ci-dessous la vidéo (merci Daily Motion !)



13 commentaires :

AnnaLivia a dit…

    Oui, j'ai beaucoup aimé. J'aime cette émission en général, notamment l'épisode sur Singapour et sur Malte.
    À voir sur YouTube aussi.
    Bon weekend Lorenzo!
    03 novembre, 2012
 
liliforcole a dit…

    C'est bien fait, gentiment fait. Et en plus, l'ingénue de service n'est pas désagréable à regarder. Bon week-end.
    03 novembre, 2012 

Lorenzo a dit…

    Cela change d'une autre (fausse) ingénue insupportable de niaiserie et d'artificielle spontanéité qui "anime" l'émission d'Arte, "Prochain arrêt", la dénommée Emmanuelle Gaume. Une tête à claques. Mais cela n'engage que moi. Heureusement à chaque fois, les intervenants sur place sont bien choisis et les images bien faites, le montage sympathique.La promenade dans Rome a été un vrai plaisir.
    03 novembre, 2012
 
Lorenzo a dit…

    Hélas non AnnaLivia, sauf erreur de ma part, la vidéo n'est plus disponible sur YouTube à ce jour mais seulement sur le site de TV5 Canada.
    03 novembre, 2012
 
Bernard a dit…

    Je suis d'accord avec vous Lorenzo, cette présentatrice d'Arte est assez insupportable mais l'émission est en général assez réussie.
    03 novembre, 2012
 
Thierry a dit…

    Je vois que les machos se déchaînent sur Tramezzinimag....lol! Ayant le bonheur d'avoir renoncé volontairement, et de plein gré - comme dirait l'autre -à la télé, et sans la connaître, je plaîde pour cette petite Emmanuelle, qui doit bien avoir quelque grâce, Messieurs...hi!hi!hi!

    Pas une seule n'en manque, et si ce n'est physique, c'est qu'elle est d'ordre moral, ou spirituel....
    04 novembre, 2012
 
Thierry a dit…

    Je viens de regarder à l'instant sur gou-gueule/images....mais Lorenzo et Bernard! elle est très mignonne, cette petite....hi!hi!hi!
    04 novembre, 2012
 
Lorenzo a dit…

    pas de misogynie dans mes propos, juste de l'agacement. Certes la dame est avenante, pétulante et pétillante mais se promener dans les rues de Rome avec elle m'a vite agacé. On lui doit une émission très agréable c'est vrai, mais elle en fait tellement trop que cela en devient antipathique. De mon point de vue en tout cas. C'est une d es conséquences de la lutte pour l'égalité des sexes, les femmes dans un métier d'hommes se croient souvent obligées d'en faire dix fois plus que leurs compères et pensent ainsi compenser une "infériorité" qui n'est que dans la tête des arriérés. Soit un être humain est compétent soit il ne l'est pas. peu importe qu'il s'agisse d'un homme ou d'une femme. Emmanuelle Gaume semble ne pas l'avoir compris. Vue la qualité de son émission, Emmanuelle Gaume est compétente et largement. Pourquoi tout ce cirque qui la rend agaçante pour beaucoup ?
    04 novembre, 2012
 
Grand-Langue a dit…

    J'aboutis ici par hasard, très intéressant votre site!

    Grand-Langue
    04 novembre, 2012 

Lorenzo a dit…

    Revenez quand vous voulez, ami montérégien et invitez-vous quand bon vous semble, vous êtes le bienvenu parmi les lecteurs de Tramezzinimag !    04 novembre, 2012
 
gelinotte a dit…

    oui je l'ai vu ce reportage, il y a quelques semaines déjà. Très bien fait.
    05 novembre, 2012
 
Veneziamia a dit…

    C'est un des meilleurs documentaires sur Venise - à mon goût - simple, sympathique, réaliste...à revoir si c'est possible.
    07 novembre, 2012
 
Anonyme a dit…

    Merci de m'avoir fait découvrir ce reportage très bien fait, je l'avais manqué et il aurait été bien dommage de ne pas le voir car c'est bien ainsi que j'ai vu Venise lors de deux séjours à des années d'intervalle.
    Merci aussi pour votre site si précieux. Continuez longtemps !
    Tatie
    08 novembre, 2012

14 juin 2012

Lieux secrets de Venise : la Corte Botera

La Venise secrète, si elle tend à être envahie aussi par les hordes de visiteurs, réserve tout de même à qui parvient à s'y aventurer de délicieuses découvertes. Venise cachée, rendue mythique par les aventures de Corto Maltese, l'inénarrable héros inventé par Hugo Pratt, faite de constructions pittoresques, le plus souvent rattachées à ce qu'on nomme, par facilité, l'architecture mineure, elle offre à nos esprits émerveillés bien des motifs de rêverie. 

Il en est ainsi de la Corte Sconta detta Arcana, plus officiellement Corte Botera, que les peintres employés ces temps derniers à la restauration des célèbres nizioloti, les panneaux de rue ont malencontreusement transformée en Corte Bottera (!). Un lieu magique dont le charme ne peut laisser personne indifférent. Une grande cour à laquelle on accède à la sortie du ponte dei Gonzafelzi par une petite fondamenta suspendue récemment rénovée. Une porte basse, une grille et le visiteur débouche après un sottoportego assez court sur une cour carrée dallée de masegni antiques, ces fameuses plaques de pierre qui couvraient tout Venise autrefois et qu'on a hélas peu à peu remplacé par des dalles modernes dans la plupart des rues de la ville. La margelle d'un puits de style gothique au milieu, un escalier extérieur couvert, des bâtiments très anciens pour la plupart et les vestiges d'un portail monumental de style byzantin, qui fut autrefois l'entrée principale d'une riche demeure, le palazzo Contarini della Zoggia. C'est peut-être de cette porte-là dont il s'agit dans le livre d'Hugo Pratt, le passage magique qui permet de quitter le monde quand on s'en est lassé pour rejoindre un ailleurs mirifique...

Fatigués d'avoir à nettoyer plusieurs fois par jour déchets et déjections, bouteilles de plastique et canettes abandonnées, les riverains ont fait fermer l'accès à la cour. Seule l'entrée d'eau reste accessible mais, n'étant pas encore restaurée, personne ne se risquerait à s'y aventurer de peur de glisser et de devoir prendre un bain forcé. Il y a bien un autre accès par la rue derrière, la calle delle carrozze, mais là aussi, la porte est la plupart du temps hermétiquement close. 

En sonnant au portail, vous aurez peut-être la chance d'avoir un interlocuteur bienveillant qui vous ouvrira etacceptera de vous faire visiter l'endroit. 
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Enfant, lors de mes vacances vénitiennes, je venais y jouer avec des amis de mon âge qui habitaient au deuxième ou au troisième étage sur la cour. Ce fut un terrain de jeu extraordinaire et, avant Corto Maltese, nous y avions notre univers. Combien de ballons sont partis dans le canal, combien de parties passionnées avec mes soldats Starlux et nos petites voitures. Sconte, salto biralto, cimbani... Autant de jeux typiques qui occupaient les gamins vénitiens pendant des heures et dont je garde plein de souvenirs... Une vieille dame se tenait souvent avec sa chaise au pied de l'escalier. Ai-je jamais su son nom ? Dans l'après-midi, quand l'air se faisait plus doux, d'autres la rejoignaient. Nous partions alors courir dans les rues adjacentes jusqu'à l'heure de la Merenda, (le goûter). Biscuits et Nutella qui s'appelait encore Supercrema...




 

27 mai 2012

San Zaccaria, un matin de mai

San Zaccaria. Un matin de mai. Peu de monde dans l'église. Bellini. Le chef-d’œuvre. Le concert à la vierge. La madone assise en gloire sur un trône luxueux, entourée de saints, en extase vers son fils écoutant un ange lui faire de la musique. Tableau délicieux. Tant d'amour et de résignation dans ce regard de mère. Tant de douleur et de gloire dans ces sons qui le bercent. On ne fait plus de belle musique comme cela maintenant.

Joie et bonheur que ces retrouvailles matutinales avec la beauté. Dans la nef, une femme balaye le vieux pavement humide. Les cloches dehors sonnent à toute volée. La crypte résonne du clapotis de l'eau qui remonte des profondeurs du temps.  
C'est à chaque fois une grande paix, Venise, à l'intérieur d'une église. Quand la froidure de l'hiver rend la lumière de midi d'un blanc métallique, que les volutes de pierre et tous les ors s'animent et réchauffent le passant transi. Quand à la fin du printemps, lorsque le jour vient à mourir et teinte les vitraux de rayons roses qui rendent l'heure poignante et douloureuse alors que dehors tout n'est que rire et légèreté.
Autrefois, à San Zaccaria, on vendait à côté des cierges de jolies petites fleurs blanches appelées étoiles du berger. Les dames les accrochaient à leur revers quand elles ne les déposaient pas au pied de ce joli concert immortalisé par Bellini.

22 mai 2012

La petite Histoire mérite un grand H


A côté de la grande histoire, existent mille anecdotes, récits et relations d’évènements qui forment ce que péjorativement on nomme la petite histoire. Mais la vie des humbles, les faits divers, le quotidien des gens d’autrefois ont ils si peu d’importance pour avoir été si longtemps méprisés. Les temps modernes ont su redonner sa place à cette vision-là de l’histoire. Le chagrin de Louis XVI qui venait de perdre son fils aîné en juillet 1789 explique le repli sur soi de la famille royale et de ses proches au moment où à Paris les émeutiers s’en prenaient à La bastille. Le "rien" apposé par le roi dans son journal de chasse ce 14 juillet de sinistre mémoire a été longtemps utilisé par la propagande pour montrer aux français le mépris du monarque pour son peuple. Contre-vérité absolue qu’aucun historien sérieux et honnête n’ose plus soutenir de nos jours. Quand on sait qu’il fallait presque une journée pour aller de Paris à Versailles et qu’avec les évènements du jour, les courriers ne circulèrent pas facilement, la nouvelle de la prise de la Bastille ne parvint au roi qu’au petit matin. Pendant que le peuple de Paris s’égosillait contre les fonctionnaires de la citadelle et massacraient son malheureux gouverneur et libéraient les quatre ou cinq prisonniers (reclus pour dette ou parjure, je ne sais plus trop) qui occupaient la sinistre geôle et n’avaient pas l’air particulièrement mal traités, le roi chassait comme chaque jour pour tenter d’oublier le malheur qui le frappait. Ce fameux jour, il ne prit aucun gibier et rentra bredouille. Il nota alors au retour dans son journal de chasse ce "rien" qui lui fit tant de mal auprès de son peuple. Le chagrin du couple royal montre une grande sensibilité, un sens de la famille et un amour paternel digne de respect que l’hagiographie révolutionnaire a foulé aux pieds. Ce "Rien" de la petite histoire rejoint la grande, celle qui fait et défait les empires. Venant d’un univers privé où il aurait dû demeurer, il reste très lié à cette grande histoire. La véritable petite histoire, c’est celle que relate le londonien Samuel Pepys dans son journal et qu’on croise parfois au hasard de la lecture de ces livres qu’il était courant de tenir autrefois. Le seigneur - comme le curé de paroisse ou le bourgeois – notait les sommes qu’il percevait, celles qu’il prêtait, les évènements de la famille, les visites, les lectures, les travaux et le temps qu’il fait. Livres de raison, comme on les qualifie dans les catalogues de vente aux enchères. Ces petites informations, ordinaires le plus souvent, nous permettent de mieux comprendre comment on vivait alors. Elles mettent en lumière les mentalités et expliquent certaines réactions qui parfois peuvent nous surprendre. Rendant vivantes l’histoire de notre civilisation, elles permettent de comprendre son évolution. Bienheureux les élèves qui ont rencontré dans leurs études un de ces professeurs passionnés qui savent rendre vivante l’aventure des hommes et décrivent d’une manière vivante les grands moments inscrits au programme. J’avoue avoir été gâté tout au long de ma scolarité : En sixième mon professeur d’Histoire - Géographie, un certain Monsieur Gabarra, me fit rêver dès son premiers cours avec la vie quotidienne des spartiates et celle des athéniens, les textes que nous traduisions en cours de latin complétaient parfaitement les leçons d’histoire. La vie des héros, les grands évènements de l’antiquité se déroulaient sous nos yeux dans un décor vivant de jeux du cirque, de marchés, de courses et de processions religieuses. Plus tard les grandes foires du Moyen-Âge, les pèlerinages, la vie dans les châteaux-forts (nous avions tous des petits soldats Starlux avec lesquels nous organisions des tournois et refaisions la scène de la mort du Prince noir, la victoire de Talbot ou la bataille de Bouvines. L’année que je passais dans un collège anglais me permit de rencontrer un professeur d’histoire d’origine écossaise qui par ses descriptions de la vie quotidienne à Londres me fit comprendre la société anglaise, la formation du Royaume-Uni, ses cataclysmes tempérés, sa révolution. Il nous amenait dans les rues de Londres ou dans les environs et nous avons visité des lieux incroyables où palpitait encore toute l’histoire du royaume. Plus tard, en seconde, lorsque nous abordions le XIXe siècle, mon professeur par des lectures, des visites de musées, des films, nous fit aimer cette période souvent peu engageante de la Restauration. Bordeaux vénérait la duchesse d’Angoulême, fille de Louis XVI qui fut reine pendant quelques jours. Le musée des arts décoratifs abrite une collection unique de souvenirs de cette période et de cette princesse qui débarqua à Bordeaux et mena la révolte contre l’usurpateur corse. Je me souviens encore – c’était au début des années 70 ! – de notre visite au musée. Les vitrines qu’on ouvrit pour nous, les objets que nous avons pu toucher, les albums qu’on nous laissa feuilleter. Qui pourrait faire cela aujourd’hui ? 


Les esprits fougueux que nous étions vibrèrent aux aventures de cette princesse comme plus tard, toujours avec le même professeur, nous avons revécu l’aventure de la duchesse de Berry, mère du Duc de Bordeaux, le futur Comte de Chambord, alias Henri V pour les légitimistes. Elle fut enfermée par la police de Louis-Philippe dans la citadelle de Blaye d’où elle repartit enceinte d’un petit gentilhomme italien qu’on avait poussé dans ses bras (procédés souvent utilisés dans l’histoire, de l’antiquité à nos jours !). Le professeur nous emmena sur place. Il fit sa leçon sur les lieux même où l’infortunée princesse fut incarcérée. Quelques années plus tard, je retrouvais ce professeur. Retraité, il vivait à Paris. Le hasard me permit de bénéficier une fois encore de ses connaissances. Il m’amena au musée Hermès où je découvris toute la sellerie commandée par le gouvernement pour le couronnement d’Henri V qui n’eut jamais lieu. Qui sait que timbres, billets et pièces de monnaie à l’effigie du monarque étaient prêts à être diffusés, que les invitations et le programme des festivités étaient imprimés quand le roi, pourtant réconcilié avec ses neveux Orléans qu’il reconnut pour ses héritiers légitimes et donc héritiers légitimes de la couronne de France, fit marche arrière en refusant le drapeau tricolore, prétexte qui fut utilisé par les radicaux républicains pour que le peuple désavoue son roi et le perçoive comme un réactionnaire… Encore la petite histoire… 

Coll. Privata
lVue du palais Vendramin peint par la princesse. 
Évoquer la duchesse de Berry et son fils le comte de Chambord me ramène à Venise. La princesse, remariée habita pendant de nombreuses années le Palazzo Vendramin-Calergi (là où mourut Wagner et aujourd'hui casino municipal). Le prince, qui mourut à Fröhsdorf en Autriche, racheta et rénova le Palazzo Franchetti, situé à San Samuele, aux pieds du pont de l’Accademia. Autour de lui s’était organisée une véritable cour en exil constituée de gentilshommes de haute naissance, d’artistes et de politiques de la monarchie de juillet puis le second empire avaient chassé de France. Le prince qui vivait simplement, recevait ses visiteurs en monarque dans une salle du trône néo-gothique selon le goût de l’époque. Les cours étrangères le traitaient en roi et l’Autriche, qui occupait alors Venise, considérait le palais comme résidence royale bénéficiant de l’extra-territorialité, autorisant le drapeau blanc fleurdelysé à flotter sur la façade du Grand Canal, à deux pas du consulat français où flottait le drapeau tricolore… C’est là que Chateaubriand, mais aussi Victor Hugo et d’autres écrivains, vinrent rendre hommage à l’infortuné prince. 
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Le Palais Vendramin en 1854
On pourrait remplir de nombreux volumes avec toutes les anecdotes, plus ou moins légendées au fil du temps, qui se succédèrent pendant des siècles sur la lagune. De très bons ouvrages existent qui ne sont malheureusement pas tous disponibles et dont peu sont traduits en français. Il reste cependant à écrire une petite histoire de Venise et de ses habitants qui recenserait l’ensemble des choses que l’on raconte. Les plus connues figurent dans la plupart des bons guides modernes et les gondoliers les reprennent à l’envi quand ils promènent leurs touristes japonais ou américains. Elles sont le plus souvent intimement liées à la Grande histoire de la Sérénissime. On peut en citer quelques unes : L’histoire du petit boulanger, celle de Catherine Cornaro, Fille de Venise et reine de Chypre, celle de Jacopo Foscari, d’Othello et Desdémone, le marchand Shylock, Bianca Capello, autre Fille de Venise partie en fugitive puis fêtée comme duchesse de Toscane… "Comme autrefois, Venise demeure l’endroit cher aux intrigues. Au soleil, l’amour fait équilibre. D’autres légendes, moins connues, se transmettent dans le secret des palais, évoquant souvent de douloureux souvenirs où se mêle parfois du fantastique. Venise est une ville de mystères." Corto Maltese le sait bien qui, à l’image de son auteur Hugo Pratt, prête à certains lieux des propriétés magiques. Ce n’est pas pour rien que l’Inquisition se régala dans la Sérénissime, y trouvant un terrain totalement adapté à sa mission : éradiquer l’hérésie…

02 mai 2012

La Venise d'avant (1)


,,L'église de la Pietà que l'on peut voir aujourd'hui sur le quai des Esclavons n'est pas celle où Antonio Vivaldi dirigeait les jeunes musiciennes du couvent. Elle a été construite après sa mort. L'église qu'il connut et où eurent lieu les nombreux concerts qu'on venait écouter de toute l'Europe n'a été démolie que plus tard et remplacée par un palais aujourd'hui transformé en hôtel, l'Albergo Metropole. La gravure ci-dessus montre l'entrée de la chapelle de l'Ospedale della Pietà telle que Vivaldi et ses jeunes musiciennes l'ont connue. 

,,On peut encore voir des colonnes de l'ancien bâtiment dans le hall de l'hôtel. Est-ce l'esprit du prêtre roux qui fit décider le propriétaire de l'hôtel d'organiser chaque semaine des concerts de musique de chambre ou des récitals de chant dans un salon à côté du hall où trônent les deux colonnes vestiges de l'église reconstitue plus loin ? CertainementMais ce fut surtout à la mémoire de son fils, mort dans un accident de voitures et jeune violoniste.



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06 avril 2012

Au hasard de nos promenades...

Connaissez-vous le Palazzo Montecuccoli ? Construite au XVème siècle dans le style de Pietro Lombardo, cette vaste bâtisse se trouve au sud du Grand Canal, non loin du pont de l'Accademia, pratiquement en face du Palazzo Franchetti. 
 
Plus connue sous le nom de Ca' Contarini dal Zaffo, l'imposante demeure est couramment appelée aujourd'hui Palazzo Polignac. Ce fut la résidence de Winnerita, Princesse de Polignac, la fille de l'homme d'affaire américain Isaac Merritt Singer, fondateur de la célèbre entreprise de machines à coudre. Sa sœur qui avait épousé le Duc Jean-Elie Decazes s'étant suicidée, elle élèvera ses neveux et leur lèguera le palais. C'est sous le 5e duc, Elie, disparu l'année dernière, arrière-petit-neveu de la Princesse de Polignac, que j'ai eu le bonheur de fréquenter cette maison tellement hospitalière qui grouillait d'amis inconnus et de visiteurs illustres. Dans l'un des premiers billets de ce blog, un lecteur anonyme m'en avait fait le reproche assez crûment alors - je racontais ces rencontres incroyables pour le jeune homme que j'étais : le vieux prince de Faucigny-Lucinge sourd comme un pot quand cela l'arrangeait qui nous racontait sa jeunesse et se moquait de son neveu par adoption, l'ancien président Giscard ("celui au nom d'emprunt" comme avait dit avec malice le Général de Gaulle), le chef lyonnais Paul Bocuse... C'est dans ces murs aussi que j'appris à mieux connaître mon ami Roger de Montebello, petits-fils du duc, ses cousines Sabran, les Breteuil... Une famille très unie, drôle qui vivait simplement et s'amusait beaucoup. La duchesse Solange servait le soir après dîner du tilleul venant de leur propriété de Libourne, les dîners étaient souvent monochromes, concocté par un chef emprunté à quelque ambassade, le service impeccable et un protocole royal qui effrayait un peu - c'était voulu - le jeune homme mal dégrossi que j'étais. Combien d'après-midi passés dans le jardin à papoter... Et cette fameuse visite de la reine mère d'Angleterre venue inaugurer des vitraux restaurés de San Giovanni e Paolo qui passa prendre le thé au palais.
 
Walter Richard Sickert, l'artiste qui a peint cette toile (entre 1901- 1904) et qui avait rencontré la princesse à Dieppe fut convié quelques temps après à Venise. Il y réalisa de nombreux dessins et on connait de sa période vénitienne plusieurs belles vues du palais Polignac. Certains de ses dessins sont aujourd'hui dans des collections publiques, comme une très belle ébauche de ce tableau au crayon et à l'encre rouge, conservée à la Whitworth Art Gallery de Manchester.

03 mars 2012

Venise à l'aube



Une promenade matutinale dans Venise endormie, lorsque le jour se lève. Ces images montrent l'itinéraire choisi pour la course de santé appelée Run 5.30. le principe est simple : une course est organisée dans la ville à 5 heures 30 du matin. Course non compétitive, parcours sportif et de détente à travers la cité endormie. Un moyen de découvrir Venise au mieux de sa forme, dans le silence et la douce lumière du jour qui se lève. Je vous recommande l'aventure.

2 commentaires:

Anonyme a dit…
C'est avec intérêt que je découvre ces méditations Vénitiennes. Il est 5 H Venise s'éveille. Quel beau reportage. Je suis devenu familier de cette ville la soixantaine accomplie et j'ai la chance d'y résider plusieurs mois par an. Encore à 7 H du matin lorsque Venise se réveille elle est trop belle. Je regrette qu'elle ne soit que devenue la Venise d'un jour pas toujours. Le merchandising a fait son œuvre et Venise est devenue un produit que l'on vend sur les télé achat. Pour le prix de la moindre croisière Costa vous résidez à Venise pendant 2 mois. Évidemment à la frénésie touristique il y a le revers de la médaille. Je conseille aux visiteurs ici de lire aussi toute la série de Dona Léone qui parle d'une Venise de manière critique mais qui continue à l'aimer comme Lorenzo. Restons critiques et positifs.   
Frédéric
Lorenzo a dit…
Merci Frédéric de visiter nos pages. TraMeZziniMag abonde dans votre sens. Bienvenu donc. N'hésitez-pas à nous faire part de vos avis et commentaires. 
Venezianamente, 
Lorenzo

01 janvier 2012

Bonne Année 2012 !


Bonne Année 2012
à tous les Lecteurs et Amis Fidèles
de TraMezziniMag

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7 commentaires:

J@M a dit…
Buon 2012 !
Lorenzo a dit…
Grazie mille !
Nathanaëlle a dit…
Très belle et douce année à vous et mille mercis pour ce passionnant blog.
Les Idées Heureuses a dit…
Meilleurs Vœux Lorenzo pour cette nouvelle année qui risque de nous faire trembler.... Souhaitons espérance et sérénité, cultivons la Connaissance afin de maintenir et de construire un monde en pleine mutation. Que la passion de Venessia, pour notre part, nous aide à tenir le cap! Martine de Sclos
Condorcet a dit…
Tanti Auguri, Lorenzo !
Gérard a dit…
Bonne année 2012 à ce journal merveilleux . S'il en sort de l'acier rouge , c'est qu'il y a des mains d'or . Tous mes voeux , pour tout !
Tietie007 a dit…
Venise se vide de ses habitants ...C'est triste.

30 mai 2011

Venise en 20 bonnes adresses par Christophe Barbier pour l'Express



Christophe Barbier, le fringant éditorialiste de l'Express est un amoureux de Venise,fin connaisseur de la ville et de ses arcanes. A l'occasion de la LIVe Biennale d'Art Contemporain, il publie ce soir un article sur ses bonnes adresses de Venise.

Tramezzinimag ne partage pas toujours les mêmes enthousiasmes pour certains des lieux indiqués, trop souvent dénaturés par la présence touristique, ou pour être plus direct (et ne pas froisser certains lecteurs) par l'omniprésence des parisiens qui semblent désormais y passer leur vie - mondaine, cela s'entend ! Mais voici l'intégralité de son texte :


" Venise n'est pas une ville, c'est une idée. L'idée que l'on se fait du temps qui passe, comme coule l'eau du Grand Canal. L'idée de la beauté, immarcescible et toujours surprenante. L'idée de l'Histoire, parfois immobile en ses pierres. L'idée, enfin, que l'on se fait du hasard, donc du destin. Car il n'est pas de meilleure façon de découvrir Venise et, mieux, de se l'approprier, que de s'y perdre. A rompre les rangs dans les artères à touristes, sécures autoroutes, on gagne le droit d'être perdu, donc d'être libre. Alors s'offre une Venise inédite, qui oublie d'être sérénissime pour se faire mystérieuse. Avec le fil de ces errances, on tisse un fin maillage de raccourcis précieux et de détours délicieux, on veille à traverser un campo apprécié ou à arpenter une calle oubliée. On s'enivre alors d'un zigzag savant derrière son air d'improvisation, on se prend pour un vétéran gondolier, on se croit chez soi.

Être chez soi à Venise, c'est aussi cultiver sa plate-bande de bonnes adresses -les jeunes disent "de bons spots". Les terrasses les plus agréables selon les heures du jour. Les meilleures pizzas. Les pâtes à se damner. Les seiches les plus fraîches. A Venise, rien ne distingue une gargote pour estivants d'un restaurant inoubliable: il faut connaître... Se risquer au hasard, au vu de la densité de restaurants au canal carré, c'est courir à la mésaventure. Un truc: si l'on ne parle qu'italien autour des tables, c'est bon signe; si l'on ne parle pas du tout, c'est très bon signe. Au cas où, voici quelques adresses pour réussir son séjour à Venise.

    DÉJEUNER, DINER

    A beccafico. Devant la statue de Nicolo Tommaseo, héros de l'unité italienne, la terrasse de cette maison sobre s'étend sur un campo de rêve, à deux pas du pont de l'Académie. Fruits de mer en vedette. Frédéric Mitterrand, ministre depuis peu, y vint festoyer après avoir visité la Biennale 2009.
Campo Santo Stefano, 041.527.48.79

    Casin dei Nobili. Le meilleur rapport qualité-prix de Venise, cette pizzeria - pizzas le soir uniquement - est appréciée tant pour sa grande salle à toit ouvrant que pour la chaleur du service. Ne pas oublier de réserver.
Dorsoduro, 041.241.18.41

    Accademia Foscarini C'est la plus belle vue du Grand Canal: de cette terrasse, à l'ombre de la grande arche du pont de l'Académie, on découvre l'ultime courbe du Grand Canal, la Salute, la Douane de mer. Excellent cappuccino.
Dorsoduro, 041.522.72.81

    Acqua Pazza. Ces "eaux vives" coulent sous les fenêtres du palais où logent mes amis Paul Lombard et Louis Schweitzer quand ils sont à Venise. Les pâtes "aumm-aumm", avec aubergines et scamorza affumicata, sont à se damner. Liqueurs à volonté à la fin du repas: privilégier la mandarine et le limoncello.
Campo Sant' Angelo, 041.277.06.88

    Birraria la Corte. La meilleure adresse si l'on promène un troupeau d'enfants. Avec ses nombreuses salles et ses tables de réfectoire, cette pizzeria est idéale pour la restauration de masse mais de qualité.
Campo san Polo, 041.275.05.70

    Altanella. Une photo de François Mitterrand, expert ès bonnes tables vénitiennes, vous accueille avant que vous gagniez le balcon sur canal. Vous êtes ici sur la Giudecca, en face des Zatterre, loin des flots de touristes. Le calme est précieux, et les poissons sont imbattables.
Giudecca, 041.522.77.80

    Vini da Gigio. Sur les arrières de la Strada Nova, cette maison chaleureuse est l'une des plus remarquables de Venise. A ne pas manquer: le fromage frit avec de la polenta...
Cannaregio, 041.528.51.40

    Do Farai. Ce rendez-vous des gondoliers joue l'authenticité dans le décor, avec ses grandes tables d'auberge, ses boiseries désuètes et ses photos jaunies, et l'authenticité dans l'assiette, avec notamment des calamars irrésistibles.
Dorsoduro, 3278. 041.277.03.69

    Caffè al Ponto del Lovo. Carlo Goldoni y était attablé pendant des heures, puisant des répliques dans la conversation des clients. Depuis 1750, le café y est apprécié, proposé avec de nombreuses pâtisseries. Le décor de ce "Pont aux loups", à deux pas du Rialto, n'a presque pas changé depuis, le café s'est mis, lui, au goût des touristes.
San Marco, 041.520.84.39

    ACHETER

    Accessoires.

    Pied à terre, cette boutique propose la véritable pantoufle vénitienne, la furlane aux tissus rares et aux formes confortables. La semelle en gomme permet d'aller dans la rue s'il le faut, et de piloter sa gondole sans en abîmer le vernis. Inspirées par les chaussures des paysans du Frioul, ces pantoufles, fabriquées jadis avec des matériaux de récupération, sont désormais des petits bijoux.
Rialto, 041.528.55.13

    DécoCavalier. Angelots fessus, lions de Saint- Marc, encadrements baroques, miroirs classiques ou de sorcières, statuettes: pour les boiseries sculptées et dorées, cet artisan n'a pas son pareil. Son père, déjà, régnait en maître, et avait conquis... Anne-Aymone Giscard d'Estaing !
San Marco 2863/a. 041.523.86.21

    Design

    Madera, objets inanimés, avez-vous donc une âme? Oui, dans ce magasin d'accessoires bien faits et de bon goût -ce qui n'est pas si fréquent à Venise...
Campo San Barnaba, 041.522.41.81

    Masques

    La Pietra filosofale, cette pierre philosophale est une mine d'or qui propose les plus beaux masques de cuir de Venise - et même les seuls à respecter tous les codes de la commedia dell'arte. Derrière son établi encombré et sa moustache encombrante, ce n'est pas un artisan qui taille le cuir, mais un artiste, enfantant un Polichinelle, un Arlequin, un Pantalone... A ne pas manquer.
San Marco Frezzeria, 00-39-041-528-58-85.

    Atelier Marega, avec ses deux boutiques, cette enseigne donne dans le grand style XVIIIe siècle. Les masques sont assez communs, mais les costumes, à louer ou à vendre, sont sublimes et, rareté, on trouve ici des chaussures de style magnifiques.
Campo San Rocco, 041.522.16.34
Calle Larga, San Toma 041.71.79.66

    Il Canovaccio. Toute l'Arche de Noé est mise en masques par cette boutique, dans ce papier mâché si caractéristique, et peint à la main, qui en fait autant de pièces uniques. Les plus belles ? Le crocodile, la girafe et la licorne.
Castello, 041.521.03.93

    DÉGUSTER

    Casa del parmigiano. Tout, tout, tout le fromage italien joue une symphonie de saveurs dans cet établissement situé juste à côté du marché aux poissons et du "bossu" du Rialto, mascotte vénitienne. Le pecorino y est roi ( jetez-vous sur celui à la truffe et celui au safran), la scamorza affumicata y est reine. Et le prosciutto s'est fait une place au milieu des fromages.
Campo Bella Vienna, Rialto, 041.520.65.25

    Giacomo Rizzo. En allant du Rialto à la Ca'd'Oro, vous trouverez sur la gauche cette petite échoppe aux saveurs précieuses: huiles d'olive, sauces, truffes blanches, vinaigres balsamiques et, surtout, pâtes de toutes couleurs, tailles et formes -gondoles, Rialto, lettres et... pénis!
San Giovanni Crisostomo, 5778, Cannareggio, 041.712.23.31

    Le match des glaciers. Les gelati coulent à tous les coins de rue à Venise, mais la finale du championnat de la Sérénissime oppose Paolin (campo San Stefano) à Da Nico (Zattere). La pistache et le gianduiotto sont meilleurs chez le second, la vanille et l'After Eight chez le premier. Paolin veille plus tard, Da Nico a vue sur la Giudecca et sur les bateaux... A vous de choisir.

    DORMIR, SORTIR

    Hôtels

    Palazzo Stern, sur le Grand Canal, à côté de la Ca' Rezzonico -le musée du XVIIIe siècle-, cet hôtel est majestueux, de sa terrasse du rez-de-chaussée, qui s'avance sur l'eau, à son escalier bordé de fins piliers. Certaines chambres ont sur San Samuele une vue exceptionnelle. Et le vaporetto -lignes 1 et 2- est au pied de l'hôtel.
Dorsoduro, 041.277.08.69

    AD Place, à l'abri de la Fenice, le fameux Opéra, dans le repli d'un canal, cet établissement entortille jusqu'à une altana au panorama appréciable des chambres à la déco audacieuse.
Fondamenta della Fenice, 041.241.32.34

    Night-Club

    Piccolo mondo. Il n'y a pas de boîte de nuit à Venise. Ou plutôt, il y en a une, hélas ! Le Piccolo mondo, ce sont des banquettes d'un autre âge; une musique qui semble sortie d'un canular; un personnel vermoulu. Tout cela en fait une curiosité...
Dorsoduro, 041.520.03.71
    © Christophe Barbier / L'Express - 30/05/2011.

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La publication de ce billet avait suscité 13 commentaires heureusement conservés par Google :

Murissa Maurice a dit…

    Merci pour une poste interessante!
   Je comprend tres bon le ligne "Venise n'est pas une ville, c'est une idee." Venise est une idee si complexe et jolie que j'etait inspirer a ecrire une poeme car c'est une idee trop grand pour expliquer toute autre voie.
   J'espere que mon francais n'est pas trop terrible pour votre yeux.
   The Wanderfull Traveler

30 mai, 2011

Anonyme a dit…

    Peu de ces adresses sont mes favorites à l'exception de la trattoria Altanella, de Vini Da Gigio et de la Casa del Parmegiano pour le Crudo di Sauris ou Nico pour son Gianduiotto régressif!
    Pas un seul café du Campo San Margherita n'est cité comme le Café Rosso ou le Margaret Duchamp !
    Et pour les hôtels mes adresses favorites sont deux Pensione du Dorsoduro : Pensione Accademia & Pensione La Calcina.
    Nota-Bene : Quand faites-vous un nouveau billet sur le train de nuit Artesia un enfer ou un moyen économique et pratique de se rendre à Venise?

 31 mai, 2011

Anonyme a dit…

    J'ai effectivement croisé C. Barbier plusieurs fois à Venise ces dernières années (en plein mois d'août hélas) ce qui me le rend très sympathique, alors que je ne partage pas du tout ses idées. Il semble affectionner, comme moi, comme vous, le Dorsoduro... Merci d'avoir publié son article.
    Soazig

 31 mai, 2011

Lorenzo a dit…

    Christophe Barbier présente ses choix. Ce ne sont pas forcément ceux de Tramezzinimag. Et ceux de Tramezzinimag ne sont pas forcément les miens. Quant au train, la polémique sur le forum du Routard prend des proportions incroyables et j'envisage effectivement un billet. J'ai déjà publié à ce sujet, ce moyen de transport étant celui que j'utilise à 98% pour me rendre à Venise depuis plus de 20 ans sans jamais un seul problème à ce jour. Mais je semble être une exception.

    31 mai, 2011

Anonyme a dit…

    Je m'étonne qu'il ne parle pas de la cantinone "già schiavi" et de ses délicieux cicchetti où je l'ai vu se désaltérer. Effectivement, peut-être pas assez parisien... C'est pour nous un passage obligé chaque fin d'après-midi à Venise.
    Soazig

    31 mai, 2011

Anonyme a dit…

    Artesia c'est bientôt fini ! http://www.americas-fr.com/tourisme/actualite/trenitalia-cesse-sa-collaboration-avec-la-sncf-9059.html

    31 mai, 2011

Anonyme a dit…

    Je cherche à comprendre : Lorenzo vous n'appréciez pas les adresses données par ce journaliste, vous n'appréciez pas non plus l'omniprésence des parisiens sur certains lieux et vous relayez la pub de Barbier en entier sur votre blog, pourquoi ? Manque d'inspiration personnelle ? Lassitude ?
    Rassurez vous bientôt il y aura du monde absolument partout à Venise grâce au GPS municipal et à vos bonnes adresses...
    Parlez nous plutôt de votre Venise personnelle, c'est tellement plus intéressant que le catalogue d'adresses de luxe (mais pas seulement c'est vrai) que vous nous offrez régulièrement...
    Moi je voyage toujours avec Artésia depuis de très nombreuses années et je n'ai jamais eu de problème, mais je sais qu'ils veulent supprimer le train de nuit, ça c'est sûr GGGRRR !!! Ou alors pe
ut-être en faire un train pour VIP ?
    Cordialement.

    31 mai, 2011

J-P. a dit…

    Adresses fortes intéressantes mais ne suis pas sur Venise hélàs. Je trouve que tout ce que vous offrez avec ce divin blog est toujours super, toujours excellemment bien écrit et je sens que vous y mettez toujours votre cœur (ce pour quoi je vous lis et suis chaque jour), quelques soit l'article et son sujet. Merci à vous !
    Cordialement, J-P

    01 juin, 2011

Condorcet a dit…

   Le premier chapitre me réconcilie avec Christophe Barbier dont je ne partage ni les idées politiques, ni les adresses vénitiennes (hormis l'Altanella et la Casa del parmigiano - étonnant qu'il n'y ait pas adjoint la drogheria Mascari -). Je le soupçonne de garder par-devers lui quelques "bei posti"...

    02 juin, 2011

Lorenzo a dit…

    Comme nous tous. Pour répondre à l'étonnement de mon lecteur anonyme, je dirai simplement que Tramezzinimag est un magazine et que la diversité des lecteurs doit être satisfaite. Je peste souvent après les parisiens, le bling-bling et les Happy Few, mais ce serait de la malhonnêteté que de toujours cracher dans la soupe que j'ai longtemps pris plaisir non seulement à consommer mais à préparer. Merci en tout cas à tous les lecteurs pour leur assiduité, leur soutien et tout ces commentaires ! Bonne fête de l'Ascension à tous !

    02 juin, 2011

Charlotte a dit…

    C'est vrai il ne faut pas cracher dans la soupe, votre blog a ce petit côté bobo qui me fait sourire...
    Cordialement.

    03 juin, 2011

Lorenzo a dit…

    Ravi de vous faire sourire Charlotte.La mode effectivement rejoint l'authentique vie bourgeoise et bohème. Mon mode de vie et mes poses ont un côté bobo parce que ce mode de vie est (enfin) (re)devenu à la mode. C'est qui me fait sourire moi, c'est d'être rattrapé par elle quand comme des tas d'autres, je n'ai rien fait pour changer ou vivre différemment de comment j'ai toujours vécu... Bien à vous.

    03 juin, 2011

Anne a dit…

    Nous n'avons eu aucun problème avec le train Artesia que nous prenons depuis des années pour aller en Italie. Quant aux adresses, un récapitulatif de VOS choix, Lorenzo, serait le bienvenu.
    Bon dimanche!
    Anne

    05 juin, 2011