11 septembre 2005

Toutes les heures, 1200 enfants meurent de faim dans le monde !


«Une tragédie qui interpelle la conscience du monde ». 

Lu dans le numéro italien de l'Osservatore Romano du 9 septembre dernier un article alarmant « Une tragédie qui interpelle la conscience du monde », titre le journal, citant le rapport des Nations Unies sur le développement humain.

«La pauvreté tue chaque heure dans le monde 1200 enfants. Le fossé entre riches et pauvres se creuse. Les 500 personnes les plus riches gagnent plus ensemble que les 416 millions de personnes les plus pauvres du globe. Telles sont certaines des données du rapport 2005 de l’ONU sur le développement humain rendu hier ».

Radio Vatican qui a repris les commentaires de l’article, dénonce des « disparités inacceptables », alors que le monde accuse du retard sur les « objectifs du millénaire » fixés pour 2015 et prévoyant à l’origine la diminution de 50 % de la pauvreté. Ainsi d’ici dix ans, 827 millions de personnes tomberont encore dans un état de pauvreté extrême. Les objectifs ne seront pas atteints non plus pour ce qui est de la réduction de la mortalité des enfants et de leur instruction.

Depuis 1990, plus de 130 millions de personnes sont sorties de la pauvreté extrême, en 18 pays, mais la situation a empiré et 10 millions d’enfants meurent chaque année pour des causes évitables. Au moins 2,5 milliards de personnes vivent encore avec moins de 2 dollars par jour, et 115 millions d’enfants ne vont pas à l’école. Parmi eux, seulement 30 millions ont eu accès à une instruction ces dernières années. L’eau potable est un bien très précieux : mais plus d’un milliard de personnes n’en dispose pas. Et 2,6 milliards n’ont pas de service sanitaire. 

Le rapport propose la mise en place d’un calendrier pour arriver à des aides de la part des pays riches égal à 0,07 % du PIB d’ici 2015. Il indique en outre - scandaleux constat - que certains pays riches sont parmi les donneurs les moins généreux. Sur le commerce, l’ONU condamne des taxes iniques aux dépens des pays pauvres.
Parmi les obstacles principaux à la lutte contre la misère, le rapport dénonce les conflits armés. Le développement des pays pauvres, dit le texte, est la clef de la bataille pour la paix globale et la sécurité du monde. 
posted by lorenzo at 15:54

Une maison à Venise

Entre 1980 et 1986, j'ai vécu dans différents quartiers de Venise. Chaque fois, le logement trouvé correspondait à mes moyens, aux opportunités des rencontres et des amitiés. Je ne pouvais pas dire comme Colette "est-ce ma dernière maison ?" mais à chaque fois, j'essayais d'en faire un lieu agréable, confortable et accueillant. 
 
Mon tout premier chez moi – je quittais à peine la grande maison familiale de Bordeaux – fut un réduit de quelques mètres carrés que j'échangeais contre des heures de ménage et d'accueil chez la Signora Biasin, sur la fondamenta près du ponte delle Guglie, à deux pas du ghetto. Un lit, une table, une chaise, un lavabo, une patère sur la porte et deux étagères. La fenêtre donnait sur une cour aveugle et sale. Peu m'importait, j'étais à Venise...
 
Ensuite, ma situation de garçon d'hôtel officialisée à la questure, on mit à ma disposition un studio, en réalité un magazzino, sorte de grand cellier situé au rez de chaussée des maisons vénitiennes (le fameux piano terrà souvent inondé en cas d'aqua alta). C'était calle delle Spezier, derrière la Strada Nova. Près du Cinéma Italia désaffecté aujourd'hui. Une vieille façade en briques moulées datant du XVIe siècle. Le luxe : une vraie salle de bain (mais où la douche ne fut jamais installée), deux fenêtres sur un jardin plein de fleurs et d'oiseaux. J'y suis resté deux ans. Je devais monter à l'étage, chez la propriétaire pour me doucher... Mon entrée chez le galeriste contemporain Giuliano Graziussi fut l'occasion de mon troisième déménagement. Mon nouveau patron en m'embauchant - au noir évidemment - me loua un appartement rénové sur la fondamenta delle Capucine, loin du centre, au fond de la Venise pittoresque de Cannaregio. Pas un touriste n'y passait jamais. Un petit paradis. J'avais même une cheminée qui fonctionnait. Mon chat Rosa et moi y avons passé des moments merveilleux, l'hiver quand il neigeait. Thé brûlant et Gloria de Vivaldi...
 
le salon de la maison à la Toletta
Ma collaboration ensuite avec Bobo Ferruzzi, le dernier grand védutiste vénitien, dont la galerie était à l'époque là ou se trouve aujourd'hui la boutique de la Guggenheim, me permit de m'offrir un loyer plus conséquent et je changeais de quartier : j'arrivais à Dorsoduro et il n'était plus question de rez-de-chaussée. Je m'installais chez un étudiant en médecine, baba et végétarien, à peine plus âgé que moi, Federico Allegri. C'était au dernier étage d'une vieille maison brinquebalante, au 442, calle Navaro, mon voisin le plus proche était l'architecte De Michelis, le frère du ministre qui venait souvent sur la terrasse à l'aplomb de mes fenêtres et bâtit avec mon jeune chat une amitié très assidue. Mes fenêtres donnaient sur les toits, une grande cuisine campagnarde toute illuminée de soleil, une salle de bain, une grande pièce à vivre, le téléphone. Le sol en terrazzo. Le paradis. J'installais ma table devant la fenêtre et mon chat trouva sa place entre les pots de géranium et de jasmin. Voilà pour le décor de ma vie vénitienne d'étudiant. On y réalisa un film présenté à la mostra, "Sapore del Grano" dont le héros nommé Lorenzo par l'auteur qui aurait souhaité que j'interprète le personnage principal dans la version initiale du scénario. On y voit notre cuisine figée à jamais sur la pellicule dans sa décoration d'alors.
 
Il y eut aussi un épisode de quelques semaines à San Pantalon, un été à Malamocco, à côté de chez Hugo Pratt, où je vécus les plus délicieux moments que je devais jamais vivre avec celle qui devait devenir ma femme quelques années plus tard ; Il y eut, quelques semaines plus tard, l'appartement - qu'après toute cette bohème, je trouvais somptueux - de la cantatrice Margaret Zimmermann. J'aimais beaucoup sa voix et elle me faisait penser à Romy Schneider sans la mélancolie dans le regard...

Avant, avec mes parents, il y avait dans mes premiers souvenirs d'enfance, le calme feutré de l'Hotel Londra. Les visites à la maison de la Toletta qui sentait le chat et le lilas... Plus tard, les soirs compliqués et les nuits étoilées pendant la Mostra du cinéma à l'hôtel Excelsior et grâce à Hervé Guibert, l'Hôtel des bains... Je fréquentais beaucoup d'autres maisons : le palais Clary, siège alors du Consulat Général de France. La jolie maison du juge Gradella et de sa belle épouse dont nous étions tous amoureux, m'ouvrait aussi ses portes et son délicieux jardin situé devant l'Accademia. Giusi Gradella et lui m'accueillirent avec leurs deux splendides filles. Jolis souvenirs aussi dans le délicieux jardin au bord du rio qui longe l'entrée d'eau du Palais Clary, où vivait Liselotte Höhs, , la maman de mon ami Manfred Manera, chez qui je rencontrais l'énigmatique et pétulante Sybille, la fille du poète Peyre de Mandiargues, l'appartement d'Arbit Blatas et de Regina Resnik à la Giudecca où je devais croiser un jour  Rostropovich...
 
La vie n'était pas vraiment difficile. Certes désargenté, j'étais jeune, assez joli garçon, un peu viveur, passionné et perpétuellement amoureux. Mal habillé (ma garde-robe était fort réduite) mais bien élevé, beaucoup de portes s'ouvraient sur le jeune homme de bonne famille seul à l'étranger. C'est ainsi que la vieille Comtesse Marcello m'invita souvent chez elle. Nous bavardions en français qu'elle parlait avec uninimitable accent aristocrate. Il y avait aussi la maison de l'avocat Visentini, qui dirigeait alors le Palais Grassi, le palais de la Comtesse Foscari, grand-mère de mon ami Jacopo, où flottait le souvenir de Lord Byron Je me souviens aussi du charmant casino de la Comtesse Rapazzini, à la Giudecca où j'allais, invité par son fils Francesco, devenu depuis écrivain et parisien d'adoption... Je pénétrais aussi pour des dîners toujours magnifiques au Palais Polignac, chez le duc et la duchesse Decazes, où mon ami, leur petit-fils Roger de Montebello s'interrogeait comme moi sur une possible installation à demeure à Venise. Un jour peut-être malgré  l'hiver... Plus récemment, il y a eu la merveilleuse et décatie Ca'Bragadin ou Caroline Delahaie et son compagnon Gérard accueillaient divinement leurs hôtes. 

Mais depuis toujours, le rêve d'une maison à moi, avec un jardin, dans un quartier tranquille, près d'un canal, me hantait. C'est cette année que j'ai pu le réaliser, trouvant enfin ce que je cherchais. Oh, elle n'est pas totalement mienne, seulement lors de mes séjours vénitiens. C'est une longue histoire. Un grand jardin ensoleillé, une cour avec un vieux puits et six pièces agréablement meublées sur deux niveaux, le tout dans une rue calme, en plein centre, à quelques pas de San Barnaba, non loin de l'Accademia. Le paradis à Venise.
 
il giardino della casa
 

posted by lorenzo at 15:53

16 août 2005

Tramezzinimag, pourquoi ce titre ?


Publié pour la première fois en mai dernier, de retour de Venise, ce blog présentait en quelques lignes le pourquoi de son titre. Comme on continue de me demander ce qu'il signifie, et en dépit de l'évolution de son contenu, moins exclusivement vénitien aujourd'hui, j'ai repris mes explications que je vous livre à nouveau.

Ceux qui vont à Venise connaissent sans aucun doute ces délicieux sandwiches en forme de triangle, que l'on trouve dans tous les bars pour un peu plus d'un euro : tonno-uova, prosciutto-funghi... Les vénitiens les consomment debout au comptoir, avec un verre de blanc ou un prosecco, ce délicieux vin pétillant. Les meilleurs sont servis depuis des années dans un petit bar des environs de l'Arsenal, mais dans chaque quartier, il y en a de délicieux. Ils sont un peu le symbole d'un art de vivre comme le spritz, le Bellini, ou le gianduiotto de chez Nico... C'est parce que j'avais envie de parler de tout cela que j'ai créé ce blog. Raconter à ceux qui ne savent pas, les délices d'une ville unique au monde, mal connue et pourtant si célèbre. Parce que je voudrais modestement, contribuer à la mieux faire apprécier, au-delà des clichés qui l'encombrent depuis 150 ans et l'empêchent de vivre, en l'étouffant peu à peu. Car, c'est un paradoxe, Venise crève du tourisme. Il n'enrichit que les boutiquiers et appauvrit les vrais vénitiens, rongeant l'âme de la ville comme la pollution en ronge les pierres. Là est le vrai mal qui tue Venise peu à peu, transformant les commerces de proximité en boutiques à touristes, obligeant les habitants à quitter le centre historique pour la terre ferme et en rendant la vie presque aussi chère qu'à New York ou à Londres. J'espère montrer une Venise différente au fil des pages et de mes humeurs. Aider le voyageur à sortir des sentiers battus - c'est bien ici le cas de le dire - et lui apprendre à voir autre chose et à devenir, à son tour, un "bon vénitien"pour paraphraser Henri de Régnier.

posted by lorenzo at 23:10

Bon voyage, Natsuko !


Je voudrais saluer une grande amie japonaise qui part bientôt pour Hong-Kong où elle va préparer une maîtrise. Natsuko Fukue est de Fukuoka, ville jumelée avec Bordeaux. elle est à l'image ce sa ville, dynamique et jeune. Sa passion, outre la musique et le cinéma ? : la pâtisserie et la cuisine en général. Elle fait le meilleur gâteau au chocolat jamais dégusté dans ce bas monde et ses sushis sont parfaits.

C'est aussi une excellence pianiste, une bonne photographe, une élève douée et une amie très chère et attentive. Elle a vécu une année parmi nous, en pleine tempête, la dernière année dans notre grande merveilleuse maison. Au moment où pour moi tout se délitait, elle était là, attentive, douce, prévenante. Nous avons beaucoup parlé, beaucoup ri, elle, les enfants et moi. Nous avons fait plein de bons petits plats, visité des tas de galeries, des librairies et pratiquement tous musées de Bordeaux et des environs. Nous avons souvent pris le thé, boisson pour laquelle nous avons tous deux une vraie passion.

Bonne route à Natsuko sur le chemin de la vie. Que ses pas la ramènent un jour chez nous. Et comme disent les chinois, nous luis disons tous : " Dix mille ans à Natsuko"!


15 août 2005

Une bibliographie sur Venise à visiter souvent

Les gens qui gèrent Il Campiello (lien ICI) sont un peu comme des voisins qu'on croise mais qu'on ne fréquente pas ou pas encore. l'occasion en fait ne nous en a encore jamais été donnée. Héritiers d'une jolie petite maison située dans un quartier très tranquille, à deux pas de la Piazzale Roma et de la Prison, Il Campiello (c'est le nom de baptême de la maison et le nom de leur site) a l'air de plaire beaucoup car leur livre d'or est plein de gentils mots enthousiastes. D'ailleurs, c'est toujours plein et je crois que les habitués se passent le mot pour être certains de pouvoir y loger. Allez donc faire un tour sur leur site et visitez virtuellement l'endroit. Ce n'est pas un palais certes, mais une maison authentique et apparemment remplie de bonnes ondes, un cadre idéal pour séjourner à Venise en famille ou entre amis sans se ruiner !Une courette-jardin donne sur le canal, face à l'église de Santa maria Maggiore. Calme absolu. D'ailleurs l'adresse est jolie : 2234 calle della madonna. La proximité de la prison et des entrepôts du port ne sont pas un inconvénient. A Venise même les terrains vagues et les friches industrielles sont pleines de poésie. La nuit quand il fait doux l'été, se promener dans ce quartier est un régal? je vous assure qu'on s'attend à croiser Corto Maltese bras dessus bras dessous avec Ugo Pratt devisant dans les ruelles sombres.

C'est un quartier pittoresque peu touché par les hordes de barbares qui ne quittent guère San Marco ou le Rialto. Non loin de là, près de San Sebastiano où se situait du temps de ma vie vénitienne la Faculté des Lettres, au bout d'une fondamenta sans intérêt particulier habitait un vieil homme dont j'ai malheureusement oublié le nom avec qui j'ai souvent parlé. J'ai encore dans l'oreille le son très particulier de sa voix, nasillarde et forte. Il avait certainement beaucoup voyagé. Il avait aussi beaucoup rêvé et pas mal bu. Il servait quand on allait chez lui un vin rare, réputé rendre fou et pour cela interdit, un Clinto des piémonts de Frioul à l'incroyable arôme, mélange de framboise et de myrrhe. Un grand grillage entourait sa maison au-dessus des murs du jardin. Et là c'était un autre monde : des singes, des perroquets, un renard des sables, tout une faune exotique et très bruyante. Que sont devenus tous ces animaux ? Le pâté de maison a été restauré. Je n'ai trouvé personne pour me renseigner sur le vieil homme. Pourtant, ce n'est pas un effet du Clinto, je vous l'assure. Il a bien existé.


14 août 2005

Pax Tibi Marce Evangelista Meus


Théo de San Barnaba

Sur le joli campo de San Barnaba existe depuis de nombreuses années un petit bar sans prétention fréquenté par les gens du quartier mais aussi par de nombreux musiciens et des peintres. Le patron, grand amateur de musique avait chaque jour la visite d'un chat ordinaire dénommé Theo


Mais pas si ordinaire en fait. Theo, gatto genetico, pareil à des centaines de ses congénères qui occupaient les cours et les ruelles de Venise (avant que des fonctionnaires venus de Rome décident qu'il fallait réduire cette colonie traditionnellement implantée à Venise depuis la nuit des temps), arpentait le quartier. 

Bien nourri par les mammagatti qui elles aussi, surtout à Dorsoduro, étaient légion, il menait une vie calme et sereine. Très organisée aussi : le matin il allait à Santa Margarita, où il retrouvait ses congénères devant les étals de poisson. Quand midi sonnait, on le voyait au soleil, sur la margelle d'un puits, le rebord d'une fenêtre ou au milieu de la Corte dei Furlani où il demeurait, non loin de la Ca Rezzonico. Plusieurs minets, bien plus jeunes qui lui ressemblaient, vivaient dans les environs, preuve de ses amours passées. Il en avait pincé un temps pour la chatte du bedeau de San Barnaba mais cette infidèle lui avait préféré un jeune rouquin paresseux vivant du côté de San Trovaso. Bref notre Theo était une vedette. 

Chaque jour ou presque, lorsque le bar "Ai artisti" se remplissait de monde et que des musiciens jouaient, ou même quand le patron mettait un disque, Theo arrivait. Dès qu'il entendait la musique (sa maison était sur la fondamenta de l'autre côté du canal), il grattait pour sortir ou sautait par la fenêtre et il rappliquait. Il s'installait à gauche de l'entrée, sous le téléphone et se couchait sur les annuaires près du comptoir. Ceux qui l'ont connu vous le confirmeront, il semblait vraiment aux anges. Il ronronnait de plaisir surtout quand on lui mettait les Quatre Saisons de Vivaldi, et plus que tout, quand les violons glissaient et répandaient leurs trilles joyeuses et résonnaient sur la place. C'est ainsi que Franco Gelli a voulu immortaliser notre amateur de musique dans une lithographie parue aux Edizioni di Ghen, aujourd'hui introuvable et qui siégea longtemps, joliment encadrée, sur un des murs du bar. L'estaminet n'est plus, mais tous se souviennent de Theo !

Cette anecdote me fait penser à un très bel ouvrage, publié en 1991 par Robert de Laroche, grand amateur de chats, chez Casterman, avec des photos de Jean-Michel Labat, intitulé "Chats de Venise". Je le recommande à tous les amoureux des chats et de Venise. 
J'espère que Robert de Laroche, s'il lit ce modeste journal, ne m'en voudra pas d'une aussi plate présentation de son superbe livre !

Notre maison

Entre 1980 et 1986, j'ai vécu dans différents quartiers de Venise. Je voudrais, lorsque j'en aurai le temps décrire chacun de ces lieux, tous magiques et responsables autant que l'environnement général, de mon attirance et mon amour pour Venise. De passage, depuis, j'ai habité chez des amis, dans des chambres d'hôtes, des couvents, des hôtels. Là encore plein de lieux que j'aimerai recommander sans vouloir non plus trop les galvauder. Car à Venise comme ailleurs quand une adresse devient un lieu à la mode, elle disparait vite dans l'engrenage de la mode et de l'affluence. Car il reste à Venise des endroits secrets comme Ugo Pratt savait en parler. Il en existe peu ou plus beaucoup. Alors, je ne vous révèlerai pas tout ce que je connais. A vous aussi de partir à la découverte !

Mais revenons à mes campements vénitiens. Cette fois-ci, nous avions décidé de nous installer chez nous. Après des semaines de recherches sur internet, avec l'aide d'amis vivant sur place, nous avons fini par trouver notre bonheur : une ravissante petite maison avec une cour et grand jardin en plein centre, dans le quartier de Dorsoduro. laissez-moi vous présenter notre domus. Je ne vais pas vous la décrire comme le ferait un agent immobilier. Vous en auriez vite assez. Non, laissez-moi simplement vous raconter comment on y est bien. 

Tellement bien qu'en mai dernier, quand nous sommes arrivés, après avoir investi la maison, modifier un peu la décoration et refait l'aménagement à notre goût, nous n'avons quasiment plus bougé. Longs petits déjeuners dans la sala di pranzo, farniente dans le jardin sous les glycines, siestes dans les chambres, soirées lecture dans le salon, sous une grande tapisserie Renaissance un peu usée. Bref, un séjour calme, paisible, comme la maison. Il faut dire qu'elle donne sur un jardin très vert, très ombragé, très fleuri, lui-même entouré de jardins. Une cour avec en son milieu un puits médiéval. Un salon joliment meublé, une salle à manger, une cuisine et une chambre monacale (la mienne). Voilà pour le rez de chaussée. A l'étage, trois belles chambres, très claires avec des kilims multicolores sur le pavement du sol. Une salle de bain, deux salles d'eau. Une jolie petite bicoque comme on en rêverait au fond d'une ruelle ensoleillée, n'importe où, à Bordeaux ou à Paris.

J'ai passé mon temps entre deux pages d'écriture à cuisiner : pâtes et risotti bien entendu mais aussi crumble de légumes, fondant au chocolat et aux framboises, tartares de betteraves au mascarpone, lasagnes de canards à la Torcelliana... Je crois que je vais m'amuser à donner mes recettes dans ce blog ! Quelques jours après notre arrivée, les glycines étaient tellement fleuries que l'odeur imprégnait la maison de bas en haut. On sent d'ailleurs ce parfum chaque année à cette période dans tout Venise tellement cette plante y est répandue.



Carpaccio, illustrateur d'histoires

L'envoi des Ambassadeurs, du cycle de Saint Ursule conservé dans les Galeries de l'Accademia fait partie depuis toujours de mon Musée imaginaire.


Vittore Carpaccio (1460-1526) est pour moi le peintre vénitien par excellence. Je ne suis pas critique d'art et mes compétences en la matière se résument à ce que j'ai lu ou appris à l'Université, à San Sebastiano, quand j'étais étudiant à Venise. Mais c'est ce que mon cœur ressent et comprend de ces œuvres géniales, qui me pousse à vous faire partager quelques uns de mes émois artistiques. Et tant pis pour les critiques et les grincheux que mon enthousiasme ne manquera pas de faire surgir. J'aime Carpaccio, mais aussi les Bellini, Mantegna, Basaiti, et tous ces grands artistes qui ont laissé partout dans Venise de merveilleux chefs-d’œuvre. Chaque semaine, je vous présenterai une pièce du catalogue de mon "Musée Imaginaire", pour reprendre la belle expression d'André Malraux.