02 juillet 2005

Il y a vingt ans disparaissait Liliana Magrini

Parmi la très abondante littérature consacrée à Venise, il est un petit livre publié en 1956 dans la collection blanche de Gallimard. Les amoureux de Venise le connaissent. Il s'agit du « Carnet vénitien » de Liliana Magrini
 
Une grande dame discrète dont la biographie détaillée mériterait d'être écrite.
collaboratrice de Camus et de Guilloux, Amie de nombreux auteurs comme Louis Guilloux, d'Albert Camus, dont elle fut très intime et avec qui elle entretint une correspondance assidue, traductrice de Malrauxet de Giono notamment, et proche d'artistes aussi (on dirait plutôt «plasticiens» de nos jours), c'était une figure de la vie parisienne littéraire. Elle avait publié auparavant (en 1953) chez l'éditeur qui l'employait un roman, aujourd'hui introuvable, « La Vestale », toujours dans la célèbre collection blanche un roman, qui reçut un joli succès d'estime de la part de la critique. On dit que Camus et Guilloux participèrent à la correction ou du moins à la relecture de ces deux publications en français. Après avoir vécue de nombreuses années en France, elle était repartie en Italie. C'est avec son carnet vénitien, sorte de journal et de notes sur Venise , que Liliana Magrini s'est fait un nom.
«Il en est des lieux italiens et français comme des êtres. Certains, on les aime avec mauvaise conscience. C'est parfois le cas pour Venise. Ce n'est pas qu'on ne puisse donner des raisons à cet amour, et même elles abondent : mais il se trouve qu'elles ne sont pas toujours bonnes pour un esprit et un cœur exigeants.»

Cet ouvrage a été avec le « Petit Prince » et « l'Ami Fritz », l'une de mes premières lectures sérieuses de petit garçon. J'en ai longtemps su par cœur  des passages entiers et j'ai appris la Sérénissime pour beaucoup avec ce petit livre trouvé un jour dans la bibliothèque de ma mère. Il est toujours dans mes bagages lorsque je reviens à Venise. 

Femme engagée, elle s'est consacrée ensuite à Rome ou ailleurs en Italie à l'éducation et à l'évolution de la société italienne. Jusqu'à sa mort, elle se consacra à l'IPALMO (Istituto per le relazioni tra l'Italia, i paesi dell'Africa, America Latina e Medio Oriente), organisation qui fut fondée en 1972 à Rome par un groupe d'intellectuels et de politiques représentant toutes les tendances politiques démocrates d'Italie : Franco Maria Malfatti, Luigi Granelli, Piero Bassetti, Marcella Glisenti  - qui fut une grande amie de Liliana Magrini, Giancarlo Paietta, Renato Sandri, Dina Forti, Luciano De Pascalis, Giuseppe Scanni et le vénitien Gianni De Michelis. L'institut outil créé pour doter l'Italie d'un instrument d'étude et de contacts avec les réalités émergentes du Tiers Monde. Lilian Magrini participa à la création et à la rédaction du mensuel «Politica Internazionale» jusquà a sa mort, survenue le 2 juillet 1985, à l'hôpital de Mestre.

Elle se spécialisa dans les relations avec l'Afrique noire et, après avoir passé près de dix ans à Paris, elle retourna à Venise. Elle cessa de publier des textes de fiction et publia un certain nombre d'articles et d'essais liés aux relation internationales politiques et culturelles avec l'Afrique. Ni le Carnet Vénitien ni La Vestale n'ont été à ma connaissance traduits et publiés en italien.

Lien vers l'article de Marcella Glisenti paru en octobre 1985 dans la revue Politica Internazionale : ici

Mais revenons au Carnet vénitien. Il n'est plus disponible chez Gallimard mais on le trouve souvent dans les librairies d'occasion. Un in-12 broché de 199 pages écrites directement en français. Les héritiers de Liliana Magrini  - elle a eu deux filles qui vivent à Venise - possèdent le manuscrit de l'ouvrage et, bien évidemment elles disposent des droits sur les ouvrages de leur mère. Gallimard interrogé n'envisage aucunement de les rééditer pour l'instant et certains laissent entendre qu'ils ne feraient aucune opposition si une nouvelle édition, enrichie peut-être de notes et de commentaires, devait voir le jour... Les héritiers ne refuseraient certainement pas de ramener à la lumière ces très belles pages de leur mère. 

J'ai toujours en tête la création, un jour, d'une maison d'édition qui serait consacrée à Venise à la suite de Tramezzinimag... Le Carnet vénitien ne pourrait que figurer à son catalogue, avec d'autres ouvrages consacrés à la Sérénissime, souvent oubliés aujourd'hui ou introuvables... Les facilités qu'apportent la technique - les bons côtés dont parlait aussi Jacques Ellul dans sa critique de la modernité - devraient permettre de publier de jolis petits livres qui feraient la joie des Fous de Venise... Si parmi mes lecteurs, certains veulent tenter l'aventure, n'hésitez-pas à me contacter. Ne serait-ce pas merveilleux de voir ce projet prendre forme dans les prochains mois ? Dieu voulant...





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