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Cela me rappelle de vieux souvenirs. Lorsque mon père mourut, en 1980, nous habitions une vieille et grande maison, face au Jardin Public. Je ne savais plus quoi décider. Arrêter mes études ? Travailler ? Partir ? Je songeais à rentrer dans une communauté religieuse, je pensais devenir pasteur... Je voulais écrire mais il fallait manger. Et je savais bien qu'il nous faudrait vite quitter cette trop grande maison. De l'autre côté du Pavé (c'est le nom que nous avons toujours donné à ce joli cours où nous habitions alors, entre l'entrepôt Lainé et la statue de Jeanne d'Arc), un immeuble était en rénovation. La façade cachée par de grandes toiles semblait presque terminée. C'était un matin d'avril ou de mai, je ne sais plus très bien. Il faisait très beau. La lumière était un peu comme aujourd'hui, les oiseaux chantaient, le ciel était très bleu et je me lamentais, "Que dois-je faire ? Ou dois je diriger mes pas ?"
J'allais déjà souvent en Italie et une ou deux fois par an à Venise, mais je n'avais jamais songé m'y installer. je rêvassais ainsi à la fenêtre quand soudain les ouvriers en face enlevèrent les bâches bleues. Des hommes s'affairaient à mi-étage, installant des enseignes. Lorsqu'ils retirèrent l'échafaudage, je vis, ô surprise, le lion de Saint Marc, l'aile déployée, la patte posée fièrement sur les Evangiles ! Cet immeuble allait devenir la direction régionale de la compagnie Generali Assicurazioni ! J'ai su aussitôt que ma destination serait Venise. Définitivement. Je pris ce hasard comme un signe. A la question que je venais de me poser, la magnifique enseigne de laiton doré apportait une réponse évidente. Venise me faisait signe et choisissait mon destin. Quinze jours plus tard, je débarquais sur le quai de la gare, à Santa Lucia.
Quelques années plus tard, j'ai eu la chance de rencontrer François Mitterrand à Dorsoduro. Il était avec Ida Barbarigo, son amie vénitienne, épouse du peintre Zoran Music chez qui il logeait, et Claude Cheysson je crois. Comme il m'interrogeait sur ce qui m'avait guidé vers Venise, je lui racontais cette anecdote. ll la prit très au sérieux et me félicita en me disant qu'il fallait suivre les signes que la providence parfois nous adresse. "Trop souvent", me dit-il, "on refuse d'y croire et bien souvent, nous comprenons trop tard". Je n'ai jamais partagé les opinions politiques du président, mais je me suis toujours senti très proche de sa pensée philosophique et littéraire. Son amour pour Venise et son désir de créer une réelle politique italienne en France contrairement à tous ses prédécesseurs ne pouvaient cependant que me séduire. Et puis cette manière qu'il avait d'écouter, de se mouvoir et de vous parler. Un être hors du commun dans une ville extra-ordinaire, un matin de printemps sous un ciel très pur. Cela ne pouvait que marquer le jeune homme romantique et exalté que j'étais alors !
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Quelques années plus tard, j'ai eu la chance de rencontrer François Mitterrand à Dorsoduro. Il était avec Ida Barbarigo, son amie vénitienne, épouse du peintre Zoran Music chez qui il logeait, et Claude Cheysson je crois. Comme il m'interrogeait sur ce qui m'avait guidé vers Venise, je lui racontais cette anecdote. ll la prit très au sérieux et me félicita en me disant qu'il fallait suivre les signes que la providence parfois nous adresse. "Trop souvent", me dit-il, "on refuse d'y croire et bien souvent, nous comprenons trop tard". Je n'ai jamais partagé les opinions politiques du président, mais je me suis toujours senti très proche de sa pensée philosophique et littéraire. Son amour pour Venise et son désir de créer une réelle politique italienne en France contrairement à tous ses prédécesseurs ne pouvaient cependant que me séduire. Et puis cette manière qu'il avait d'écouter, de se mouvoir et de vous parler. Un être hors du commun dans une ville extra-ordinaire, un matin de printemps sous un ciel très pur. Cela ne pouvait que marquer le jeune homme romantique et exalté que j'étais alors !
posted by lorenzo at 09:05
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