La petite photo agrandie et pas très nette que j'ai mis l'autre jour en illustration d'une phrase qu'aurait pu dire un personnage de la Recherche a suscité bien des réactions et des interrogations. Profitons-en pour rétablir une vérité et en finir avec les approximations de certains guides.
Marcel Proust, lorsqu'il débarque en 1900 à Venise en compagnie de sa mère, n'est pas descendu au Danieli dont il parle bien entendu (c'était le rendez-vous mondain comme le Florian ou le Quadri, pour le thé ou le dîner). Il loge à l'Albergo Europa, hôtel de qualité lui aussi mais situé de l'autre côté de San Marco, près de San Moïse et du Ridotto, à la Ca'Giustiniani devenu depuis le siège de la Biennale. Verdi y logeait quand il dirigeait ses opéras à la Fenice, Théophile Gautier y séjourna aussi. Sur la photo jaunie, vous noterez une terrasse de bois avec des balustrades et des lampadaires juste au dessus du niveau de l'eau. Au fond, une guérite de bois. Cette terrasse, aujourd'hui remplacée par un balcon en pierre d'Istrie, était située alors devant le palais, à hauteur des ouvertures du rez de chaussée. On voit bien à gauche la forme des encorbellements qui entourent les fenêtres de l'entresol juste au-dessus des ouvertures carrées du rez de chaussée. On retrouve ces sculptures sur la gravure du XIXe qui montre le palais avant que soit installée cette terrasse - solarium.
A quoi peut penser Marcel Proust ? A Albertine dit quelqu'un sur un site. Je crois qu'il laisse simplement son regard errer devant lui, l'animation du Grand Canal, le traghetto qui passe non loin, les peotte remplies de fruits et de légumes, les gondoles qui transportent de belels vénitiennes et de riches anglais romantiques. Il a tellement voulu ce voyage depuis tant d'année comme sa grand-mère qui elle, n'y viendra jamais. Il pense à Ruskin que sa mère a traduit pour lui dans le train, aux tableaux de Guardi, de Gentile Bellini, de Carpaccio dont il se servira dans la Recherche. Il songe peut-être à une de ces mélodies ampoulées de son ami Reynaldo Hähn qui séjourne à Venise lui aussi, ou aux magnifiques costumes de Mariano Fortuny qu'il vient de découvrir, non loin de là dans le palais du brillant espagnol...
Mais ces détails sur le séjour de Proust à venise me donnent envie de continuer à parler de peinture. Celle que l'écrivain aimait et dont il a rempli les décors de ses chapitres tout au long de la Recherche, mais aussi dans ses lettres, ses articles.
Il y a aussi dans la Venise d'aujourd'hui des choses à dire à propos de peinture : l'exposition de la collection Pontus Hulten à Santo Stefano, l'ouverture du Palais Grassi revu par François Pinault, la grande fête que le milliardaire breton a donné à l'Arsenal pour ses 920 invités, somptueuse réception où Marcel Proust aurait été à l'aise, auprès de la Duchesse de Marlborough et de l'Impératrice d'Iran.
J'aimerai vous parler aussi de la réouverture de la Ca'Pesaro, le musée d'art moderne de Venise où de nouvelles salles se sont ouvertes à la gloire des artistes vénitiens contemporains. La restauration du Palais Fortuny aussi et les projets en cours. Voilà de nombreux articles en perspective... Mais où vais-je trouver le temps d"écrire tout cela... Je cherche, je cherche...
Il y a aussi dans la Venise d'aujourd'hui des choses à dire à propos de peinture : l'exposition de la collection Pontus Hulten à Santo Stefano, l'ouverture du Palais Grassi revu par François Pinault, la grande fête que le milliardaire breton a donné à l'Arsenal pour ses 920 invités, somptueuse réception où Marcel Proust aurait été à l'aise, auprès de la Duchesse de Marlborough et de l'Impératrice d'Iran. J'aimerai vous parler aussi de la réouverture de la Ca'Pesaro, le musée d'art moderne de Venise où de nouvelles salles se sont ouvertes à la gloire des artistes vénitiens contemporains. La restauration du Palais Fortuny aussi et les projets en cours. Voilà de nombreux articles en perspective... Mais où vais-je trouver le temps d"écrire tout cela... Je cherche, je cherche...

















Mais
J'imagine ainsi que tous ceux qui vivent derrière ces façades embellies par le soleil, sont endormis ou assoupis. C'est l'un des miracles de Venise. On ressent toujours ainsi à marcher dans les rues de la Sérénissime, dès que la bonne saison revient, une immense sérénité. C'est l'un des meilleurs remèdes que je connaisse à l'inquiétude, à la nervosité, à l'angoisse : Si vous venez d'arriver à Venise, si vos ennuis, vos soucis, vos craintes vous ont accompagné et semblent ne pas vouloir vous quitter, alors, posez vite vos bagages, chaussez vos mocassins les plus confortables, prenez un livre que vous aimez et sortez dans les rues. Marchez, marchez... Allez vous perdre là où le soleil habille les maisons d'un vêtement de grâce. Saluez d'un geste discret de la tête les rares passants que vous croiserez. N'hésitez pas à vous perdre. 
Rêvez. Si vous désirez lire ou noter vos impressions, mettez-vous à la recherche d'un coin vraiment tranquille. Je vous recommande le parvis de 




En quelque endroit que j'aille, il faut fendre la [presse /D'un peuple d'importuns qui fourmillent sans cesse. /L'un me heurte d'un ais dont je suis tout froissé ;/Je vois d'un autre coup mon chapeau renversé. /Là, d'un enterrement la funèbre ordonnance /D'un pas lugubre et lent vers l'église s'avance ;/Et plus loin des laquais l'un l'autre s’agaçant, /Font aboyer les chiens et jurer les passants. /Des paveurs en ce lieu me bouchent le passage ; /Là, je trouve une croix de funeste présage, /Et des couvreurs grimpés au toit d'une maison /En font pleuvoir l'ardoise et la tuile à foison. /Là, sur une charrette une poutre branlante /Vient menaçant de loin la foule qu'elle augmente ; /Six chevaux attelés à ce fardeau pesant /Ont peine à l'émouvoir sur le pavé glissant. /D'un carrosse en tournant il accroche une roue, /Et du choc le renverse en un grand tas de boue : /Quand un autre à l'instant s'efforçant de passer, /Dans le même embarras se vient embarrasser./
Vingt carrosses bientôt arrivant à la file /Y sont en moins de rien suivis de plus de mille ; /Et, pour surcroît de maux, un sort malencontreux /Conduit en cet endroit un grand troupeau de bœufs ;/Chacun prétend passer ; l'un mugit, l'autre jure. /Des mulets en sonnant augmentent le murmure. /Aussitôt cent chevaux dans la foule appelés /De l'embarras qui croit ferment les défilés, /Et partout les passants, enchaînant les brigades, /Au milieu de la paix font voir les barricades. /On n'entend que des cris poussés confusément : /Dieu, pour s'y faire ouïr, tonnerait vainement..."





son amour pour Venise et qui exprime ses joies et ses colères chaque jour depuis douze mois. Mais je dois avouer qu'un de mes meilleurs moments de la journée, lorsque je quitte mon cabinet, c'est, une tasse de thé fumant sur ma table, 
Hier le Jardin Public débordait des mêmes, vautrés sur les pelouses où ils laissent mille traces de leur passage le soir : bouteilles vides, papiers gras, kleenex ou papier toilette, branches cassées et fleurs arrachées. les barbares sont partout. A Venise aussi me direz-vous, mais quand on veut les oublier, éviter les hordes de veaux déguisés en touristes, il suffit de se perdre dans les dédales et quelques ponts plus loin, on n'entend plus rien que le bruit de nos pas, le chant des oiseaux et le cri des enfants qui jouent dans les cours des maisons, sous le regard des chats endormis sur la margelle d'un puits. Là-bas, même dans un quartier populaire et décati, rien de sordide ne vient vous agresser l’œil. Et si les graffitis et les tags se répandent aussi, ils ne se retrouvent que dans les quartiers du centre. A Bordeaux, les barbares sont partout, autour des Quinconces, sur les marches du Grand Théâtre, sur les quais. Une invasion. et ils saccagent, ils consomment le décor... Saint Michel, hier encore si pittoresque, est devenu un champ de déjections canines arpenté par de jeunes islamistes allumés et agressifs et de babas drogués... Mais bon, voilà, nous en sommes tous là, on ne fait pas toujours et à tout moment ce que l'on veut.. 


