Dix-neuvième année - Nouvelle édition. Les Hors-Textes de Tramezzinimag :

14 mars 2021

L'aventure de Cool Cousin se termine mais le carnet d'adresses de Tramezzinimag demeure !

Les brillants inventeurs du concept de Cool Cousin ont décidé de mettre un terme à l'aventure. Tous les cousins du monde ont pu faire l'expérience de contacts formidables et pour ce qui est de Venise, nous étions cinq à avoir été contactés qui avaient accepté de mettre à disposition, comme on le fait pour des parents venus nous visiter, ce que les jeunes appellent des "spots", donner à voir des lieux méconnus sans crier sur les toits les bonnes adresses et les heureuses trouvailles. La philosophie était simple, joyeuse et intelligente. Quelques milliers de bitcoins plus tard, les ingénieux fondateurs sont passés à autre chose. Ce n'est pas un véritable abandon, beaucoup d'entre nous y ont gagné des amis et avons pu bénéficier de l'exponentielle croissance du Cuz, la crypto-monnaie inventée en même temps que la startup, en 2016... 
 
Mais pour ceux d'entre nos lecteurs qui n'avaient pas suivi, revenons aux débuts. Cool Cousin est une start-up financée par capital-risque (venture backed companies) fondée pour révolutionner la façon dont les gens voyagent. Au départ, une étude sur les nouvelles manières de voyager montrant que le tourisme avait contribué pour la seule année 2016 pour 7,6 billions de dollars à l'économie mondiale, ce qui représentait 10,6% du PIB total mondial, soit un emploi sur 10 sur la planète ! La fameuse génération Y, connue pour son pouvoir d'achat accru, est une force motrice considérable de cette industrie florissante. Les membres de cette génération, aujourd'hui considérée comme la plus grande génération vivante de la planète, dépensent en moyenne 4.500 $ pour en moyenne 35 jours de voyage chaque année. 
 
 
Depuis son lancement en juin 2016, jusqu'à ces derniers mois plusieurs millions de voyageurs ont ainsi utilisé Cool Cousin qui permettait d'explorer d'une autre manière près de 70 villes tout autour de la planète. Pour ce faire, un millier de guides, tous choisis pour inspirer confiance et dénommés les Cousins ont offert leur assistance, donnant des adresses, des conseils, répondant aux questions des cousins vivant sur place. Couronné par le New York Times, le L.A Times, The Guardian et National Geographic comme une « application devenue incontournable pour les voyageurs », Cool Cousin s'est parfaitement positionnée pour devenir le lieu où les voyageurs grand public adoptent la crypto-monnaie.  
« Rechercher des informations de voyage pertinentes en ligne est devenu une tâche impossible. Le modèle commercial qui maintient Internet gratuit a noyé nos flux d'informations non pertinentes, créant une surcharge et des boucles de rétroaction auxquelles nous ne pouvons pas échapper. Les voyageurs chevronnés sont conscients des manipulations en ligne, mais ont encore du mal à éviter les faux-avis, les arnaques et les contenus biaisés stimulés par les budgets marketing des entreprises et les moteurs de recherches ultra-puissants qui modifient sans cesse leurs pages de recherche. En conséquence, une grande partie du temps de vacances d'un voyageur (et d'argent donc) est gaspillée sur des expériences médiocres qui ne correspondent pas à ses goûts, à l'ambiance dont il avait rêvé...»
Les inventeurs de CC l'ont vite compris : la meilleure source d'informations sur un lieu surtout quand il est éminemment touristique, reste un ami sur place, un parent. Un initié de confiance qui connaît vos goûts et peut vous diriger vers des endroits qui vous conviennent. Cool Cousin a voulu être ce qui se rapproche le plus d'avoir un ami de confiance dans toutes les villes du monde.
« Fondé comme un antidote à la frustration croissante des services de voyage en ligne, CC relie directement les voyageurs à des habitants partageant les mêmes idées - alias Cousins - pour un échange ouvert et impartial de connaissances et de services locaux. À l'aide de l'application, les voyageurs peuvent rechercher dans une liste de cousins dans leur destination, explorer leur guide personnel de la ville et obtenir des conseils et des services personnalisés. Les voyageurs utilisant Cool Cousin se connectent en moyenne à 4 cousins et se renseignent sur l'hébergement, le calendrier de leur visite, les problèmes de trajet, les événements actuels et d'autres intérêts logistiques et personnels - exactement ce pour quoi les gens se tournent vers les agents de voyages.» 
Et cela a fonctionné. Comme mes acolytes, je recevais pas mal de messages dont le contenu était parfois surprenant, comme cette jeune femme qui voulait offrir à ses deux mamans un séjour inoubliable à Venise et me demanda de leur trouver un hôtel avec spa dont la chambre ouvrirait directement dans l'eau et leur permettrait de sortir en jetski... Toutes les demandes n'étaient pas aussi caricaturales, loin s'en faut. Et combien de messages de remerciements après, confirmant le plus souvent mes commentaires sur les lieux que je recommandais. Certains sont même revenus et nous nous sommes rencontrés autour d'un café ou d'un prosecco.
 
Je voyais aussi dans ce rôle qu'il m'avait été demandé d'endosser le moyen de diffuser un message sur la fragilité de Venise, la nécessité de se comporter respectueusement avec la Sérénissime, rappelant chaque fois que cela était possible, de respecter quelques règles, de faire autant que possible comme les vénitiens, de chercher à s'adapter... Bref, tous les conseils que les guides devraient - la plupart le font - asséner aux touristes dont ils ont la charge. J'espère que j'aurai ainsi pendant ces années Cool Cousin, modestement contribué à la Défense de Venise ! L'avenir dira si cette idée de la fragilité de Venise, ville vivante et unique, modèle universel dans bien des domaines, se sera répandue suffisamment pour que chaque visiteur aie à cœur, réellement, de la respecter et de la faire respecter...

Avec « La Venise de Lorenzo », qui a reçu depuis les débuts de l'application plusieurs centaines de milliers de visiteurs, les city-guides
Cool Cousin, de Taipei, Melbourne, Londres, Tokyo, Montréal, Vancouver, Dublin, Sao Paulo, etc., ne seront donc bientôt plus visibles en ligne (le 31 mars sera le dernier jour !). 
 
Il faudra désormais passer par Google Maps, en cliquant sur le lien ICI. C'est moins esthétique et largement plus du tout convivial mais «pratique et fonctionnel», à l'image de notre époque pressée et efficace... Tramezzinimag continue de vous recommander ces adresses, beaucoup d'entre vous les connaissent et les apprécient aussi. Nous essaierons autant que faire se peut de tenir cette carte à jour et de l'améliorer. cela rejoint un projet qui nous a longtemps tenu à coeur avec Antoine Lalanne-Desmet d'une carte interactive de la Sérénissime, sonore autant que visuelle, regroupant les lieux préférés de Tramezzinimag, mais aussi des œuvres d'art méconnues ou célèbres, des textes d'auteurs italiens ou français, de la musique, des vidéos... Un gros boulot, mais quand on aime Venise et qu'on veut la montrer dans sa vraie réalité, on ne compte pas n'est-ce pas ?


2 commentaires:

  1. Ses amis ne l’entendront plus raconter son amour de Venise ni expliquer, avec brio et pédagogie, les mécanismes de l’économie mondiale. Gabriel Milési est décédé le 19 mars, sur les bords du Grand Canal, où il vivait depuis plusieurs années, à deux pas de la place Saint-Marc.
    Né à Foix, en 1947, de parents italiens, il était diplômé de Sciences Po Toulouse et de l’École française des attachés de presse. Sa passion de l’information le conduit vite au métier de journaliste. Il commence à France Inter, puis assiste aux dernières heures de L’Aurore, avant d’entrer au service économique du Figaro. En 1981, il retourne à France Inter, où, en 1987, il participe à la création de France Info. Sa chronique quotidienne, « Votre argent », est diffusée simultanément sur les deux stations.
    En 1988, il quitte Radio France pour Le Quotidien de Paris. Sous la houlette de Philippe Tesson, il devient rédacteur en chef du service économique. Deux ans plus tard, direction Europe 1 pour piloter les services économique et politique. Tous les matins, il fait intervenir « les dix meilleurs économistes de France », selon sa formule. Jamais à court d’idées novatrices, il crée également « Manager », émission dominicale dans laquelle un PDG est interrogé par trois autres PDG.
    Gabriel Milési a publié de nombreux ouvrages : deux biographies de Jacques ­Delors, en 1984 (Belfond) et 1995 (Éditions no 1), Les Nouvelles 200 familles, en 1990 (Belfond), Le Roman de l’euro, en 1998 (Hachette Livre), Les Dynasties du pouvoir de l’argent, en 2011 (Éditions Michel de Maule)…
    Le féru d’économie cachait aussi un passionné d’histoire et de littérature. À Venise, dont il connaissait l’ensemble des quartiers, églises et musées sur le bout des doigts, il avait entamé une carrière d’écrivain. Sortiront de son érudition et de son imagination La Vénitienne de Bonaparte et Venise trahie, en 2013 et 2018 (Éditions Michel de Maule).
    Sa dernière demeure sera évidemment la Sérénissime, où il reposera auprès de son épouse, Carine Rueff, fille de Jacques Rueff, l’auteur du fameux plan de 1958 et inspirateur du nouveau franc. Il partageait sa vie depuis 20 ans avec Patricia Peruzzi Bothe et sa fille Julie. Gabriel Milési était officier de l’ordre national du Mérite et chevalier de la Légion d’honneur.

    Yves Thréard

    RépondreSupprimer
  2. Merci Yves Thréard pour votre hommage publié dans le Figaro de dimanche dernier. Ceux des lecteurs de Tramezzinimag qui ont lu les livres de Gabriel sur Venise sont comme je le suis, avec vous, triste du départ d'un grand amoureux de Venise, un érudit et un homme de cœur et de passion.

    RépondreSupprimer

Vos commentaires :