C'était le 14 mai 1990. Une chaude journée de printemps. Notre ami Charles-Henri de Védrines,     émérite accoucheur bordelais aujourd'hui retiré, est en retard. La maman, détendue, s'impatiente un peu. Et s'il ne venait     pas.     Beaucoup de naissance autour de nous, la clinique est bondée. Le bébé     est prêt à arriver. Le médecin est enfin là, souriant et tranquille. Les infirmières, la     sage-femme, tout le monde est paisible. En partant vers la salle de     travail rejoindre ma femme, je passe devant une chambre. La porte est     entrouverte et un rayon de soleil éclaire le linoléum. je pense à une     rosace en marbre aux tons acidulés du pavement de San Marco. Au même instant, j'entends les premières mesures du "Printemps" des "Quatre Saisons"     de Vivaldi dans une interprétation pleine de fougue et de  sensualité. Joli signe qui accompagnera la naissance de notre seconde  fille, Alix-Victoria-Marie-José.     Un adorable bébé, souriant devenue une jeune fille équilibrée au     caractère paisible, bien dans ses baskets, qui adore Venise et avance     joyeusement sur le chemin de la vie. 
Avec nos trois autres enfants,  elle    est le miel de mon existence, le soleil de mes jours, le baume  sur  mes   plaies, la justification de notre engagement. D'aucuns certainement me   reprocheront   ce manque de pudeur et se moqueront... Afficher ainsi l'amour que l'on   porte à ses  enfants  et dire la place qu'ils ont dans notre vie, cela   se tait de nos  jours.  Pourtant, partageant avec eux la passion de   Venise, l'amour du  Beau et  la confiance en la Providence, célébrer   l'anniversaire de l'un  d'entre  eux, me semble parfaitement en   adéquation avec ce qui a motivé  la  création de ce blog : "Surpris par la joie, impatient comme le vent..." Et tant pis pour les esprits chagrins ou tordus ! : 
JOYEUX ANNIVERSAIRE, ALIX !
  © photo de Claire Normand - Avril 2006. Tous droits réservés.
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 En quelque endroit que j'aille, il faut fendre la [presse /D'un peuple d'importuns qui fourmillent sans cesse. /L'un me heurte d'un ais dont je suis tout froissé ;/Je vois d'un autre coup mon chapeau renversé. /Là, d'un enterrement la funèbre ordonnance /D'un pas lugubre et lent vers l'église s'avance ;/Et plus loin des laquais l'un l'autre s’agaçant, /Font aboyer les chiens et jurer les passants. /Des paveurs en ce lieu me bouchent le passage ; /Là, je trouve une croix de funeste présage, /Et des couvreurs grimpés au toit d'une maison /En font pleuvoir l'ardoise et la tuile à foison. /Là, sur une charrette une poutre branlante /Vient menaçant de loin la foule qu'elle augmente ; /Six chevaux attelés à ce fardeau pesant /Ont peine à l'émouvoir sur le pavé glissant. /D'un carrosse en tournant il accroche une roue, /Et du choc le renverse en un grand tas de boue : /Quand un autre à l'instant s'efforçant de passer, /Dans le même embarras se vient embarrasser./
En quelque endroit que j'aille, il faut fendre la [presse /D'un peuple d'importuns qui fourmillent sans cesse. /L'un me heurte d'un ais dont je suis tout froissé ;/Je vois d'un autre coup mon chapeau renversé. /Là, d'un enterrement la funèbre ordonnance /D'un pas lugubre et lent vers l'église s'avance ;/Et plus loin des laquais l'un l'autre s’agaçant, /Font aboyer les chiens et jurer les passants. /Des paveurs en ce lieu me bouchent le passage ; /Là, je trouve une croix de funeste présage, /Et des couvreurs grimpés au toit d'une maison /En font pleuvoir l'ardoise et la tuile à foison. /Là, sur une charrette une poutre branlante /Vient menaçant de loin la foule qu'elle augmente ; /Six chevaux attelés à ce fardeau pesant /Ont peine à l'émouvoir sur le pavé glissant. /D'un carrosse en tournant il accroche une roue, /Et du choc le renverse en un grand tas de boue : /Quand un autre à l'instant s'efforçant de passer, /Dans le même embarras se vient embarrasser./ Vingt carrosses bientôt arrivant à la file /Y sont en moins de rien suivis de plus de mille ; /Et, pour surcroît de maux, un sort malencontreux /Conduit en cet endroit un grand troupeau de bœufs ;/Chacun prétend passer ; l'un mugit, l'autre jure. /Des mulets en sonnant augmentent le murmure. /Aussitôt cent chevaux dans la foule appelés /De l'embarras qui croit ferment les défilés, /Et partout les passants, enchaînant les brigades, /Au milieu de la paix font voir les barricades. /On n'entend que des cris poussés confusément : /Dieu, pour s'y faire ouïr, tonnerait vainement..."
Vingt carrosses bientôt arrivant à la file /Y sont en moins de rien suivis de plus de mille ; /Et, pour surcroît de maux, un sort malencontreux /Conduit en cet endroit un grand troupeau de bœufs ;/Chacun prétend passer ; l'un mugit, l'autre jure. /Des mulets en sonnant augmentent le murmure. /Aussitôt cent chevaux dans la foule appelés /De l'embarras qui croit ferment les défilés, /Et partout les passants, enchaînant les brigades, /Au milieu de la paix font voir les barricades. /On n'entend que des cris poussés confusément : /Dieu, pour s'y faire ouïr, tonnerait vainement..."





 son    amour pour Venise et qui exprime ses joies et ses colères chaque jour    depuis douze mois. Mais je dois avouer qu'un de mes meilleurs moments   de  la journée, lorsque je quitte mon cabinet, c'est, une tasse de thé    fumant sur ma table,
son    amour pour Venise et qui exprime ses joies et ses colères chaque jour    depuis douze mois. Mais je dois avouer qu'un de mes meilleurs moments   de  la journée, lorsque je quitte mon cabinet, c'est, une tasse de thé    fumant sur ma table, 
 Hier     le Jardin Public débordait des mêmes, vautrés sur les pelouses où  ils    laissent mille traces de leur passage le soir : bouteilles vides,     papiers gras, kleenex ou papier toilette, branches cassées et fleurs     arrachées. les barbares sont partout. A Venise aussi me direz-vous,  mais    quand on veut les oublier, éviter les hordes de veaux déguisés  en    touristes, il suffit de se perdre dans les dédales et quelques  ponts    plus loin, on n'entend plus rien que le bruit de nos pas, le  chant des    oiseaux et le cri des enfants qui jouent dans les cours des  maisons,    sous le regard des chats endormis sur la margelle d'un  puits. Là-bas,    même dans un quartier populaire et décati, rien de  sordide ne vient vous    agresser l’œil. Et si les graffitis et les  tags se répandent aussi,    ils ne se retrouvent que dans les quartiers  du centre. A Bordeaux, les    barbares sont partout, autour des  Quinconces, sur les marches du  Grand Théâtre, sur les quais. Une  invasion. et ils saccagent, ils  consomment   le décor... Saint Michel,  hier encore si pittoresque, est  devenu un   champ de déjections canines  arpenté par de jeunes islamistes  allumés et   agressifs et de babas  drogués... Mais bon, voilà, nous en  sommes tous   là, on ne fait pas  toujours et à tout moment ce que l'on  veut..
Hier     le Jardin Public débordait des mêmes, vautrés sur les pelouses où  ils    laissent mille traces de leur passage le soir : bouteilles vides,     papiers gras, kleenex ou papier toilette, branches cassées et fleurs     arrachées. les barbares sont partout. A Venise aussi me direz-vous,  mais    quand on veut les oublier, éviter les hordes de veaux déguisés  en    touristes, il suffit de se perdre dans les dédales et quelques  ponts    plus loin, on n'entend plus rien que le bruit de nos pas, le  chant des    oiseaux et le cri des enfants qui jouent dans les cours des  maisons,    sous le regard des chats endormis sur la margelle d'un  puits. Là-bas,    même dans un quartier populaire et décati, rien de  sordide ne vient vous    agresser l’œil. Et si les graffitis et les  tags se répandent aussi,    ils ne se retrouvent que dans les quartiers  du centre. A Bordeaux, les    barbares sont partout, autour des  Quinconces, sur les marches du  Grand Théâtre, sur les quais. Une  invasion. et ils saccagent, ils  consomment   le décor... Saint Michel,  hier encore si pittoresque, est  devenu un   champ de déjections canines  arpenté par de jeunes islamistes  allumés et   agressifs et de babas  drogués... Mais bon, voilà, nous en  sommes tous   là, on ne fait pas  toujours et à tout moment ce que l'on  veut.. 


 
 







 
   C'est  celle-là qu'il a peinte, mais dont il ne parle jamais. Les mois et les  mois qu'il y a passés ont-ils donc disparu de son souvenir ? Jamais il  ne prononce le nom de la ville quand nous sommes ensemble, quoique nous  pensions l'un et l'autre à elle. Nulle part elle n'est plus présente que  dans cet atelier. Elle est dans ces toiles retournées et que j'imagine à  ma guise, tout en regardant dans une vitrine quelqu'une de ces fioles  transparentes rapportées de là-bas et qui semblent toujours contenir de  l'eau de la lagune, tandis que, sur le parquet, se roule un chat qui  porte au cou un de ces colliers en boules de verre coloré qu'on fabrique  à Murano, – un chat trapu, rond et baroque, qui a l'air de ces animaux  un peu diaboliques dont Carpaccio animait ses compositions et dont il  ornait ses terrains semés de fleurettes délicates, sous les pas de ses  San Giorgio et de ses Santa Orsala.
C'est  celle-là qu'il a peinte, mais dont il ne parle jamais. Les mois et les  mois qu'il y a passés ont-ils donc disparu de son souvenir ? Jamais il  ne prononce le nom de la ville quand nous sommes ensemble, quoique nous  pensions l'un et l'autre à elle. Nulle part elle n'est plus présente que  dans cet atelier. Elle est dans ces toiles retournées et que j'imagine à  ma guise, tout en regardant dans une vitrine quelqu'une de ces fioles  transparentes rapportées de là-bas et qui semblent toujours contenir de  l'eau de la lagune, tandis que, sur le parquet, se roule un chat qui  porte au cou un de ces colliers en boules de verre coloré qu'on fabrique  à Murano, – un chat trapu, rond et baroque, qui a l'air de ces animaux  un peu diaboliques dont Carpaccio animait ses compositions et dont il  ornait ses terrains semés de fleurettes délicates, sous les pas de ses  San Giorgio et de ses Santa Orsala.


 Je  suis presque certain que le même lieu pris en photo une heure après,  montrerait les leoncini (la petite place surélevée qui est devant le  palais patriarcal, où on déposait autrefois les noyés pour qu'on vienne  les reconnaitre) garnis de papiers gras et de bouteilles vides, comme  souvent dès que la bonne saison revient... Bien entendu, s'il y avait  davantage de lieux adaptés aux touristes peu argentés, des espaces verts  avec des bancs et des tables, des toilettes publiques, des corbeilles  plus nombreuses et des "stewards" ou des "hôtesses" pour rappeler les usages à tout ce monde, les choses seraient différentes. mais Venise n'est pas
Je  suis presque certain que le même lieu pris en photo une heure après,  montrerait les leoncini (la petite place surélevée qui est devant le  palais patriarcal, où on déposait autrefois les noyés pour qu'on vienne  les reconnaitre) garnis de papiers gras et de bouteilles vides, comme  souvent dès que la bonne saison revient... Bien entendu, s'il y avait  davantage de lieux adaptés aux touristes peu argentés, des espaces verts  avec des bancs et des tables, des toilettes publiques, des corbeilles  plus nombreuses et des "stewards" ou des "hôtesses" pour rappeler les usages à tout ce monde, les choses seraient différentes. mais Venise n'est pas 

 Avant tout, vivez comme vous le feriez n'importe où ailleurs :
Avant tout, vivez comme vous le feriez n'importe où ailleurs :  en  regardant les enfants courir après les mouettes. Entendre les cloches  de l'église répondre à celles des églises voisines et rentrer chez soi  préparer le repas. Les tulipes dans un vase sur la belle nappe bleue, le  rayon de soleil qui illumine le pavement de la cuisine, l'odeur des  glycines partout dans la ville et bientôt, les cris des enfants qui  sortent de l'école... Ailleurs, les cris des barcaroï qui  chahutent et plaisantent en livrant leur marchandise au marché, les  gondoliers qui sortent du bar entourés de l'odeur du café qu'ils  viennent de boire, le livreur de brioches qui s'en va par les calli,  le  panier sur la tête comme autrefois. Les ouvriers qui poussent leur  chariot; les carabiniers, toujours grands, toujours impeccables qui se  donnent un air sévère, surtout devant les filles
en  regardant les enfants courir après les mouettes. Entendre les cloches  de l'église répondre à celles des églises voisines et rentrer chez soi  préparer le repas. Les tulipes dans un vase sur la belle nappe bleue, le  rayon de soleil qui illumine le pavement de la cuisine, l'odeur des  glycines partout dans la ville et bientôt, les cris des enfants qui  sortent de l'école... Ailleurs, les cris des barcaroï qui  chahutent et plaisantent en livrant leur marchandise au marché, les  gondoliers qui sortent du bar entourés de l'odeur du café qu'ils  viennent de boire, le livreur de brioches qui s'en va par les calli,  le  panier sur la tête comme autrefois. Les ouvriers qui poussent leur  chariot; les carabiniers, toujours grands, toujours impeccables qui se  donnent un air sévère, surtout devant les filles (et devant les vitrines où ils aiment se contempler)... Tout ce monde  est le même qu'ailleurs, mais ici il y a quelque chose de plus. La  lumière, les odeurs, le décor ? Tout cela à la fois sans doute. C'est  Venise au quotidien. C'est la Venise que j'aime. La prochaine fois que  vous y allez, humez cet air unique, ouvrez grand vos yeux à Castello, à  Dorsoduro comme à Canareggio. Vous verrez, une heure de quotidien  ordinaire vous fera plus de bien qu'une nuit de sommeil. Vous reviendrez  réjoui, affamé et heureux ! Essayez.
  (et devant les vitrines où ils aiment se contempler)... Tout ce monde  est le même qu'ailleurs, mais ici il y a quelque chose de plus. La  lumière, les odeurs, le décor ? Tout cela à la fois sans doute. C'est  Venise au quotidien. C'est la Venise que j'aime. La prochaine fois que  vous y allez, humez cet air unique, ouvrez grand vos yeux à Castello, à  Dorsoduro comme à Canareggio. Vous verrez, une heure de quotidien  ordinaire vous fera plus de bien qu'une nuit de sommeil. Vous reviendrez  réjoui, affamé et heureux ! Essayez.

