18 juin 2012

"I Writers"... de drôles d'écrivains à Venise

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Venise, trésor historique et fragile, n'est pas épargnée par les tags et les graffitis qui fleurissent depuis des années aux quatre coins du monde. Un groupe de vénitiens vient de réaliser la cartographie de ces actes gratuits de vandalisme. Tramezzinimag s'est souvent fait l'écho de cette vérole qui peu à peu défigure la Sérénissime. Monuments célèbres, colonnes antiques de marbre, margelles de puits, murs de maisons dans les coins les plus retirés de la ville, sont continuellement souillées par des écrits tracés à l'encre indélébile à l'aide de ces peintures en spray que l'on retrouve souvent par terre, vides et abandonnés par les auteurs de ces souillures. Pont du Rialto, Piazza San Marco, Santa Maria dei Miracoli, Lions de l'Arsenal, et des tas d'autres lieux symboliques de la cité des doges, pas un monument qui soit épargné.
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D'après les enquêtes effectuées par la police locale, il semblerait que ces actes de vandalisme caractérisé soient le fait de bandes venant de l'extérieur de la ville. Il s'agirait d'une sorte de défi qui pousserait ceux qu'on nomme désormais - avec un sens de la dérision qui n'appartient qu'aux vénitiens - i Writers  à se rendre à Venise pour laisser un signe dans les endroits les plus visibles possibles. A ce jour, l'administration municipale n'a pas réussi à juguler ce phénomène. Le manque de surveillance nocturne laisse toute latitude à ces voyous pour agir sans risquer de se faire prendre. Il y a encore vingt ans, les vigiles chargés de surveiller les commerces arpentaient chaque nuit la ville. Nombreux, ils n'auraient jamais permis que cette lèpre se développe. Personnellement, je ne crois pas qu'il ne s'agisse que de gens venant de la terraferma ou de l'étranger car pour circuler vite et sans être vu à Venise, même avec peu de patrouilles nocturnes, il faut parfaitement connaître le réseau de calle et de campi...
Heureusement, les vénitiens qui n'en peuvent plus, sont décidés à ne pas rester sans rien faire. Le mouvement Venessia.com auquel TraMeZziniMag est fier d'appartenir a déjà médiatisé sa réaction, non pas en couvrant de la même peinture qu'ils utilisent (je prônerai davantage le goudron et les plumes ce serait encore mieux !), mais en organisant une séance très médiatisée de restauration : de nuit, armés de brosses et de peinture blanche, ils ont nettoyé un des lieux symboliques souillés par ces imbéciles de writers, un mur du Fontego dei Tedeschi, au pied du Rialto. Il y a eu ensuite la création sur Facebook du groupe I Nostri Masegni Puliti e Splendenti (dalles nettoyés et resplendissantes), à l'initiative de Cecilia Tonon qui a réalisé un inventaire photographique très complet des graffitis dans le centre historique. Le groupe s'emploie depuis sa naissance à alerter l'opinion en attirant les médias nationaux et internationaux, afin de pousser l'administration à se positionner.

A ce jour, Allessandro Maggioni, l'adjoint chargé des Travaux Publics est le seul a avoir réagi. Dans une conférence de presse, l'assesseur a promis l'installation de caméra de vidéo-surveillance autour du pont du Rialto. On a aussi évoqué la possibilité de faire appel au mécénat pour financer le nettoyage des graffitis qui pullulent sur le pont. L'administration s'est engagée à nettoyer pendant les douze prochains mois les souillures qui ornent les parois des immeubles et des monuments de quatre itinéraires particulièrement touchés ( de la Piazzale Roma au Rialto en passant par l'Accademia, de San Polo au Rialto, du Rialto à la Piazza San Marco, de la Stazion eau Rialto en passant par la Strada Nova). Le coût de l'opération est estimé à un peu plus de 200.000 euros. Il faudra ajouter à cette somme le coût du nettoyage du pont du Rialto (12.000 euros à ce jour), 22.000 euros pour nettoyer l'Area Marciana, à San Marco et 6.000 pour le nettoyage de six lieux emblématiques choisis par le groupe Facebook.

L'invasion de ces writers iconoclastes ne représente certes pas une énorme dépense pour la ville mais ces sommes auraient pu être bien mieux employées. Tout le monde s'y met. Même l’Association des Guides Touristiques de Venise qui a récolté des fonds pour le nettoyage des deux colonnes de la Piazzetta.
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A la demande de plusieurs lecteurs de Tramezzinimag, nous venons de prendre contact avec la municipalité afin d'envisager le lancement d'une campagne de dons pour participer au nettoyage de ces souillures. Nous vous tiendrons au courant dès que quelque chose nous sera proposé.
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Remerciements à Gioia Tiozzio.