09 avril 2007

Les barbares sont de retour !

120.000 personnes ont été recensées sur la piazza San Marco ce samedi de Pâques. Ce n'est pas de pélerins dont il s'agit venus fêter la résurrection du Christ dans la basilique de Saint Marc mais des badauds venus du monde entier - et en particulier d'Italie, de France et des autres pays voisins.

Le double de la population effective de la cité des Doges aujourd'hui ! Cela veut dire les pontons du vaporetto engorgés comme le métro Châtelet ou Les Halles aux heures de pointe, cela veut dire plusieurs centaines de tonnes de déchets et de papiers gras, des canettes vides et des bouteilles de bière brisées dans les rues, cela veut dire des litres d'urine qui viendront attaquer les pierres déjà bien malades de certains bâtiments et empesteront l'atmosphère. 
Pour le bonheur des pigeons et des vendeurs de souvenirs et autres pacotilles fabriquées en Inde ou en Chine, les hordes vont se précipiter entre le Rialto et le pont des soupirs pour quelques heures qu'elles voudront croire tellement romantiques ou follement culturelles. Elles défileront bruyamment dans les salles du palais des doges et fouleront (tout aussi bruyamment) les pavements de mosaïque de la basilique. Certains iront voir la vue imprenable qu'on a du haut du campanile, d'autres regarderont de près les Maures qui sonnent la grande cloche d'airain de la tour de l'horloge. La plupart camperont au bord du bassin de San Marco, sous les galeries du Palais, dans le jardin royal, le long du quai qui mène au Harry's Bar avec leurs sandwiches, leurs pizzas caoutchouteuses trop cher payées, et leurs canettes de Fanta. 
Ils trouveront tout trop cher, tout trop beau et croiront avoir tout vu en ne voyant rien du tout. Les plus hardis s'aventureront jusqu'à l'Arsenal et les jardins de la Biennale, en musardant le long des Schiavoni. D'autres pousseront l'exploration jusqu'à San Giovanni e Paolo, Sta Maria dei Mendicoli, les Frari... Pour 500 visiteurs de l'Accademia, il y en aura 100 à la Querini Stampalia, 10.000 à la tour de l'horloge, 20.000 au Campanile et une petite dizaine à Sant'Elena, au fin fond de Castello. Une petite dizaine seulement débarquera au Lazarée des Arméniens quant une bonne centaine attendra la motonave pour Torcello à chacun des départs de la journée... Le reste arpentera les alentours de la place jusqu'à l'heure du retour. Puis quand viendra le soir, des centaines de bus rechargeront leur cargaison de visiteurs harassés et transpirant, les trains seront pris d'assaut et les balayeurs pourront commencer à nettoyer la piazza et les ruelles alentour. Le calme qui succédera à la rumeur impressionnante que je puis entendre depuis notre jardin à Dorsoduro, sera comme à chaque fois une agréable sensation. Les rues ne seront plus encombrées, on se surprendra même à parler tout bas pour ne pas troubler l'atmosphère redevenue paisible, tranquille, familière. Les barbares auront levé le camp. Mais nous savons tous que dès l'aube, ils seront de retour...

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