« Cette musique qui nous atteint le cœur
quand la lumière vient à manquer »
Il y a parfois dans la vie des rencontres qui nous changent sans qu'on s'y attende. Une personne, un geste, un objet, un évènement et plus rien n'est comme avant. Cela peut-être un grand malheur ou une merveilleuse chance, Rarement l'un et l'autre, Dramatique ou joyeuse, la conséquence de cette rencontre nous transforme à jamais. C'est peut-être cela le destin.
Le destin, justement, quand il se manifeste chez le jeune Mirco Mencacci
prend la forme d'un fusil chargé qu'il n'aurait pas fallu toucher. Ce
jeune garçon de huit ans, intelligent, gouailleur, passionné de cinéma
et de bricolage., apprécié par tous, grandissait jusqu'à cet accident
dans un petit village de Toscane, où il vit avec ses parents, pas riches
mais aimants. Soudain, tout bascule. Mirco perd quasiment la vue. Lui
qui se remplissait des beautés de la campagne toscane où il jouait avec
ses camarades, mais aussi des nombreux films qu'avec son père il allait
voir au cinéma du village, ne voit plus que des ombres colorées... La
loi italienne de l'époque (nous sommes en 1970) interdit de scolariser les enfants handicapés au milieu des enfants "normaux".
Notre héros se retrouve à Gênes, dans un institut fameux où les jeunes
aveugles poursuivent leurs études et apprennent à devenir rempailleur ou
tisserand... Dans cette école religieuse dirigée d'une main de fer par
un directeur borné, lui-même aveugle, il doit apprendre la solitude et
l'obscurité.
A lire ces lignes, on entrevoir un mélodrame. Mais il n'en est rien. Mirco est un gamin courageux et curieux, intelligent aussi, qui conserve toute sa vivacité et sa rage de vivre. Il est d'instinct porté à la lutte et à la résistance. Dès son arrivée, tout s'enchaîne. Il va se faire un bon copain d'un bon petit gros joufflu pétri de gentillesse, puis se lier avec la fille de la concierge. qui deviendra "sa fiancée". Mais la rencontre qui va changer sa nuit en féerie, c'est la découverte d'un magnétophone à bandes qui va l'aider à apprivoiser tous les bruits extraordinaires qui l'entourent, créant peu à peu un univers sonore tellement lumineux et parlant, qu'on à l'impression de le voir. La vie de Mirco va en être bouleversée, puisque qu'en enregistrant ces sons, en les organisant, en les montant, il va se sortir de la triste destinée que prévoyait pour lui l'institut. Dans la foulée, il va associer à son destin les autres pensionnaires qui vont rentrer dans son jeu, et l'institution elle-même dont les règles et les principes vont voler en éclat.
Ce
très beau film, inspiré de la vie du plus brillant et talentueux
ingénieur du son italien devenu aveugle à dix ans, pourrait être signé Comencini.
Du vrai bon cinéma italien. Léger et précis, incisif même, il
transporte le spectateur dans un monde d'émotion où la sensiblerie
pleurnicharde n'a rien à voir. Et pourtant difficile de n'avoir pas la
larme à l'œil tant l'émotion est partout ; dans l'image du père qui
prend dans ses bras son fils inanimé, le visage en sang, et se précipite
à l'hôpital, dans la difficulté que l'on ressent avec l'enfant quand il
doit appréhender son nouvel univers, dans la tristesse qui envahit
l'écran quand on réalise que le petit héros a définitivement perdu la
vue : «l'ampoule est cassée, l'ampoule est cassée»
répète-t-il en allumant et éteignant la lumière qu'il ne voit plus,
mais aussi dans ces moments de grâce où les sons se mélangent et
s'assemblent comme par magie sous les doigts de Mirco, révélant
à son maître un talent incroyable que rien dans la rigidité des règles
de l'école ne permet de développer, où les méchants de la bande
s'adoucissent et se rangent à ses côtés. Il y a aussi une scène
d'anthologie , quand une demi-douzaine de petits aveugles conduits par
Mirco et la fille de la concierge, se rend au cinéma du quartier qui
projette un film comique... C'est drôle, poignant, revigorant.
Mais à quoi bon vous raconter le film, je ne puis que vous recommander de le découvrir par vous-même. l'Utopia le présentait en version française à destination des enfants des écoles et des collèges. Car ce beau film a une grande valeur pédagogique. Non seulement parce que les voyants ont toujours beaucoup de mal avec les non-voyants, dont on oublie le plus souvent qu'ils sont des personnes avant que d'être des aveugles, mais aussi parce que cette leçon de vie est bien utile dans une époque mortifère où de fausses valeurs cherchent à s'imposer et n' y réussissent parfois que trop bien. Il existe en DVD sous-titré en français.
Rosso come il cielo
(Rouge comme le ciel)
film de Cristiano Bortone
avec Luca Capriotti, Francesca Maturanza,
Simone Gulli, Paolo Sassanelli.
avec Luca Capriotti, Francesca Maturanza,
Simone Gulli, Paolo Sassanelli.
Italie, 2004
Pour vous faire une idée, voici la bande-annonce :
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3 commentaires:
Anonyme a dit…
Très beau film c'est vrai tendre mais jamais dans le pathos.
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