 J'ai
 déjà eu l'occasion de vous parler sur ce site, de Dachine Rainer, cette
 extraordinaire vieille dame rencontrée à Venise en 1984 ou 85. J'ai 
relu son Giornale di Venezia, recueil de poèmes composés la plupart 
pendant son séjour vénitien, et qu'elle termina entre Dwelley House, son
 manoir écossais et Twickenham, où elle s'était retirée, chez sa fille 
Thérèse.
J'ai
 déjà eu l'occasion de vous parler sur ce site, de Dachine Rainer, cette
 extraordinaire vieille dame rencontrée à Venise en 1984 ou 85. J'ai 
relu son Giornale di Venezia, recueil de poèmes composés la plupart 
pendant son séjour vénitien, et qu'elle termina entre Dwelley House, son
 manoir écossais et Twickenham, où elle s'était retirée, chez sa fille 
Thérèse. 
Dachine était persuadée qu'on en voulait à sa vie et qu'un gang lié à l'Establishment cherchait à l'empoisonner. De fait, dans une lettre datée de mars 1987 ou elle répondait à mon invitation (je lui proposais de venir se reposer et travailler chez moi),
 elle m'expliquait qu'elle venait de mettre en vente sa propriété 
qu'elle aimait tant parce qu'elle y subissait mille pressions. Elle me 
disait même souffrir d'un empoisonnement chronique au mercure que rien 
d'autre qu'un complot ne pouvait expliquer selon elle... Qu'en fut-il en
 réalité ? Interrogée, sa fille reste très évasive. Discrète. Ses amis 
américains ou irlandais n'hésitent pas à se lancer dans de terribles 
diatribes contre l'Establishment britannique et les hommes en noir qui n'oublient jamais rien... 
 
On nage en plein roman et ma petite Miss Marple,
 qui a connu les affres de l'emprisonnement et des violences policières 
pour ses actions contre la guerre, sa dénonciation du fascisme latent et
 des exactions du capitalisme -  comme du bolchévisme d'ailleurs - dans les années 1930 à 1950, fut en même temps l'amie et l'hagiographe d'Ezra Pound et de sa femme Olga Rudge.
 Cela en fait un personnage atypique de l'intelligentsia anglaise. Une 
femme d'une grande liberté d'esprit, une de ces intellectuelles comme le
 XXe siècle en a produit. je pense à Virginia Woolf, Edna O'Brien ou à Marguerite Yourcenar. De Yourcenar, elle avait la culture, de Woolf cette attitude purement anglo-saxonne.
comme du bolchévisme d'ailleurs - dans les années 1930 à 1950, fut en même temps l'amie et l'hagiographe d'Ezra Pound et de sa femme Olga Rudge.
 Cela en fait un personnage atypique de l'intelligentsia anglaise. Une 
femme d'une grande liberté d'esprit, une de ces intellectuelles comme le
 XXe siècle en a produit. je pense à Virginia Woolf, Edna O'Brien ou à Marguerite Yourcenar. De Yourcenar, elle avait la culture, de Woolf cette attitude purement anglo-saxonne.   
Un
 mélange de high-tea-biscuits-tweed attitude et de whisky sec. Elle 
était totalement imprévisible pourtant. S'apitoyant sur le sort des 
chats abandonnés de Venise, elle ne pensait plus qu'aux moyens 
d'approvisionner les différentes associations qui s'occupent de la gent 
féline dans la cité des doges. Lorsque j'eus à résoudre de graves 
problèmes avec le galeriste de la Fenice qui m'avait employé, elle se 
révéla redoutable tacticienne, s'impliqua dans ma vie en recherchant 
solutions et parades. Elle vivait dans l’œuvre d'Ezra Pound, homme des 
droites extrêmes, dont le travail git encore malheureusement dans un 
injuste purgatoire que ses prises de position ne justifient absolument 
pas. Nos visites à Olga Rudge (qui repose aujourd'hui à ses côtés au cimetière de San Michele)
 furent toujours pour moi un régal. Les deux femmes parlaient bien 
évidemment du maître avec force détails. Olga Rudge nous parla un jour 
de la passion de Pound pour Vivaldi
 qu'il contribua à faire redécouvrir dans les années 30. J'ai eu la 
chance d'entendre plusieurs enregistrements d'émissions faites par Ezra 
Pound où il parlait de Venise et de Vivaldi, dans la maison même où il 
composa plusieurs de ses grands poèmes.  
 
Dans ces moments-là, 
Dachine ressemblait à une petite fille reçue par sa directrice de 
pensionnat ! Un jour, elle raconta à Olga une soirée au théâtre Malibran
 où nous nous étions réfugiés un soir de carnaval. Venise était ce 
soir-là entièrement sonorisée et les hauts-parleurs diffusaient à 
outrance de la musique rock.  La
 ville était envahie par le bruit. Un paroxysme de décibels, si vous 
m'autorisez cette expression. Au théâtre, le concert fut si beau, si 
ample, si agréable à nos oreilles et tellement reposant.
La
 ville était envahie par le bruit. Un paroxysme de décibels, si vous 
m'autorisez cette expression. Au théâtre, le concert fut si beau, si 
ample, si agréable à nos oreilles et tellement reposant.   
En sortant, 
j'étais tellement joyeux : tellement content d'avoir pu fuir ce bruit 
insupportable, je venais de régler mes problèmes avec G. grâce à 
l'intervention du consul (je dois à cet excellent homme beaucoup de ma réussite à Venise comme après en France !), j'avais trouvé en quelques jours un nouvel appartement et le journal allait publier mon article sur Moebius. Bref,
 mon euphorie se matérialisa en une sorte de ballet effréné. je tournais
 autour de Dachine en riant, comme un cabri, comme un enfant. Elle 
riait, tentait de parler, se remettait à rire tout en avançant et en me 
traitant de gamin, mais je n'arrêtais pas de tourner autour d'elle en 
chantant et en riant. Nous avançâmes ainsi jusqu'à la Piazza presque vide... 
 
J'ai eu la surprise de découvrir longtemps après la version poétisée dans le Giornale di Venezia que Dachine publia en revenant de Venise : «I walked, he danced». Le souvenir de cet enfer sonore du carnaval de cette année-là est décrit dans son poème «Rock Music» qu'elle m'a dédicacé. 
 
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