10 avril 2007

Qu'est ce que je vous disais : I barbari sono arrivati !

Il ne manquait que le plaid écossais ou la nappe à carreaux vichy rouge pour compléter le cliché : Venise le week-end de Pâques ressemblait à une gigantesque ère de pique-nique. Ce que les italiens appellent il popolo del bivacco (le peuple du bivouac).
 
Chez nous ce terme est le plus souvent usité pour désigner les zonards et autres S.D.F. en rupture de société qui n'ont pas d'autre choix que de vivre dans la rue et se regroupent avec leurs sacs à dos, leurs chiens et leurs litrons de rouge sur les places de nos villes. A Venise, c'est un peu différent mais le spectacle ne vaut pas mieux et le résultat est le même : bouteilles vides, canettes défoncées et papiers gras jonchent le sol. Triste décor qui vient polluer le plus beau palcoscenico du monde...

Pour ceux qui ne s'installent pas à la terrasse d'une des nombreuses trattoria, le menu est presque toujours le même : à l'ombre de la basilique San Marco, devant les pauvres leoncini, les bivouaqueurs sortent de leurs sacs plastique les mêmes sandwiches élastiques jambon oeuf dur, canette de bière et yaourt à boire. Riva del Vin, c'est la pizza qui fait la base du pique-nique et du coca-cola. Pour digérer, tout ce monde se vautre par terre autour de la piazza. La ce n'est pas la place qui manque. C'est fatigant d'arpenter Venise sous un soleil de plomb et au pas de course...

Difficile de quantifier le nombre de visiteurs qui sont arrivés ces dernières heures. Rien que samedi la police estimait à 120.000 le nombre d'arrivants pour Pâques. A ceux-là se sont ajoutés les italiens des environs qui ont choisi les îles et le Lido pour passer ce week-end pascal. Ce qui doit faire une autre centaine de milliers de visiteurs. Aux deux ferry-boat qui relient habituellement le Tronchetto avec San Nicolo, l'ACTV a été obligé un troisième bateau pour répondre au nombre impressionnant de cyclotouristes avec leurs vélos à destination du Lido ! Du jamais vu. Quant aux îles de Murano et Burano, complètement envahies, il a fallu doubler les navettes.

La situation était critique en fin de matinée sur la Piazzale Roma. Déjà le jour de Pâques, le pont de la Liberté est resté bloqué pendant deux heures à cause de la file interminable des automobilistes qui cherchaient à se garer au Tronchetto ou dans les garages de la Piazzale Roma. La police a du faire venir des renforts de Mestre pour dévier le trafic vers le Tronchetto parce que les 2500 places des garages municipaux étaient occupées... 700 entrées se sont ajoutées au 950 du vendredi et aux 1000 enregistrées entre samedi et dimanche ! La piazzale Roma n'a commencé à se vider que tard dans la nuit d'hier et en se promenant du côté de San Sebastiano on entendait la rumeur du trafic comme dans n'importe quelle ville du monde au moment des bouchons !

Et pendant toute la journée, sortir à pied dans Venise a été une véritable expédition. Il était difficile - et à certains endroits pratiquement impossible - de marcher à certaines heures aux alentours du Rialto. Impossible de le traverser d'ailleurs. Pareil sur le pont de l'Accademia et celui de la gare, les environs de San Marco et en général tout au long des parcours suivis par les touristes. Le buraliste de San Barnaba est à 150 mètres de chez nous. Il a fallu à une de mes filles plus de 20 minutes pour y aller et revenir tant la foule était dense sur la Toletta. Inutile de vous dire combien nous étions bien dans notre petit jardin parfumé. La musique de Brescianello couvrait heureusement le bruit de la rue.
 
Ce qui m'étonne toujours dans cette vague de visiteurs c'est que la majorité se contente de se promener mais ils se promènent tous aux mêmes endroits. Les musées ont parait-il ressenti aussi cette invasion mais, comme à l'accoutumée, on ne se bousculait ni au Musée Correr, ni à l'Accademia, ni à la Ca'Rezzonico.
Allant de pair avec l'augmentation des visiteurs, le nombre des vendeurs ambulants a atteint aussi un pic vertigineux. Regroupés tous les un mètre avec leur drap où ils exposent les ceintures, sacs et lunettes de soleil de pacotille, maroquinerie de contrefaçon. En dépit des nombreuses plaintes des commerçants vénitiens - et des vénitiens eux-mêmes - on avait l'impression qu'ils se multipliaient à vue d’œil. Aucun policier ne risquait venir les déloger, toute la maréchaussée était occupée du côté de la Piazzale Roma à essayer de réguler le trafic des véhicules et des autocars ! Joli week-end de Pâques en vérité.

Moralité : si vous vous trouvez à Venise à un de ces moments d'hystérie touristique et que vous ne pouvez fuir vers Asolo ou Cortina et ne revenir que tard le soir voir quelques jours après, ne sortez pas entre 11 heures et 16 heures où bien étudiez des itinéraires-bis, ces raccourcis que les vénitiens pratiquent avec dextérité et qui permettent de contourner la foule, d'aller rapidement vers son but et de ne pas être au bord de l'implosion quand vous attendez entre deux murs que les pin pins arrêtés devant vous pour admirer un reflet sur l'eau d'un canal daignent se pousser pour vous laisser passer. Quittez les sentiers battus, installez vous sur un campiello retiré ou dans un des ces jardins retirés que le touriste ne connaît pas où qui ne l'intéresse pas : San Alvise, Ca Foscari, Ca Rezzonico, San Elena, San Pietro... Allez, patience, ils ne font que passer.

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