Dix-neuvième année - Nouvelle édition. Les Hors-Textes de Tramezzinimag :

31 décembre 2007

Les vœux du maire de Venise



Le sindaco di Venezia, Massimo Cacciari, a choisi cette année YouTube pour présenter à ses concitoyens les vœux de la Municipalité. Énonçant le bilan de l'année écoulée, le maire rappelle la complémentarité de Mestre et du Centre historique mais souligne la prépondérance de l'activité culturelle comme alternative à un tourisme idiot et polluant (20 millions de visiteurs par an). Venise est une ville unique tout le monde le sait et les conséquences de cette particularité sont la difficulté qu'il y a à agir tant dans le domaine de la restauration que de l'innovation, et le coût toujours croissant de tout ce qui est entrepris. Le maire a rappelé le problème du vieillissement de la population et la nécessité d'adapter les services publics à cette évolution comme à la diminution globale des résidents. Grande et prestigieuse cité, Cacciari annonce sa volonté avec l'aide de tous les vénitiens, d'aller encore plus loin et s'assumer dans l'avenir un rôle international au-delà de l'impact touristique mondial. Souhaitons avec le maire, que 2008 soit une bonne et une grande année pour Venise. Evviva Venezia !

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3 commentaires:

Venezia a dit…
Bonjour, c'est un vrai bonheur pour moi, que de finir l'année en découvrant un nouveau blog, qui traite d'une ville et d'un pays qui me fascine. A bientôt et merci pour la qualité de votre blog
Marie a dit…
Une petite grimace : http://www.europe1.fr/informations/ar ticles/779074/venise-un-baiser-geant-pour-le-nouvel-an.html Une belle année à venir pour vous et ceux que vous aimez Marie
Jaio a dit…
Juste une erreur de frappe pour dire Evviva au lieu de Evivva, et puis tout est beau et gentil comme toujours:-) Cordialement

Le bonheur est un ange au visage grave*


"C'était un beau jeune homme à l'air serein, ni grand ni petit, mais très élancé, vêtu avec beaucoup d'élégance". 

C'est ainsi que le peintre Ardengo Soffici décrit le jeune homme de dix-neuf ans qu'il rencontra à Venise et qui devait devenir l'un des plus grands artistes de son temps : Amedeo Modigliani. La rencontre eut lieu en 1903. Le jeune Modigliani connaissait à merveille les ruelles de Venise et il entraîna son nouvel ami dans de longues promenades où il lui décrivait chaque monument, contant l'histoire de chaque bâtiment croisé sur le chemin. Passionné par la peinture de Carpaccio, Modigliani se consacra à l'étude de l'histoire de l'art italien. D'abord à Florence, puis à Rome et enfin à Venise où il s'installa avec son ami Oscar Ghiglia avec qui il partagea le même atelier. On est encore loin du Modi, archétype du bohémien de Paris qu'il deviendra quelques années plus tard. "Incroyablement passionné de Carpaccio qu'il semblait vénérer particulièrement", Modigliani va énormément travailler et apprendre lors de son séjour vénitien. 

Les cours de l'École libre du Nu de Venise, à l'Accademia, la découverte de "formes pleines de beauté et d'harmonie" comme il l'écrira plus tard, les maîtres coloristes vénitiens mais aussi les cafés où se réunissait alors le monde artistique et littéraire dans lequel il tentait de s'introduire, tout concourt à marquer le jeune artiste et on sait aujourd'hui que les deux années passées sur la lagune influencèrent énormément l'art et la pensée de Modigliani. Il parvint à exposer une toile à la Biennale de 1903 (Un portrait de dame) alors que l'impressionnisme français dominait les esprits. C'est cette année-là que Venise rendit un hommage à Auguste Rodin. C'est à Venise aussi que le jeune Dedo découvrit les plaisirs de la bohème, le sexe et les secrets de la vie nocturne. Il commença de mêler dans sa vie sentimentale grandes dames et filles des rues, maîtresses et amants, prostituées, modèles et compagnes de lit, tout ce qui fera plus tard la matière de son art. Il fréquente alors les lieux de débauche qui sont nombreux à l'époque dans la Sérénissime. De santé fragile, ce séjour vénitien, s'il remplit de joie et de connaissance l'âme de l'artiste, contribua apparemment à détruire sa santé. Il laissa quelques travaux aujourd'hui conservés dans des collections particulières vénitiennes. Quand on sait qu'il vendait ses portraits 18 ou 20 francs de l'époque, l'équivalent de 15 euros d'aujourd'hui... 


 
Il habita au confins de Dorsoduro, sur la Fondamenta San Sebastiano, juste avant la Fondamenta San Basilio. La plaque ci-dessus, rappelle son séjour dans la maison (photographie de Christine). Vlaminck disait de lui :  "Je l'ai vu ayant faim, je l'ai vu ivre, je l'ai vu riche de quelque argent, jamais je n'ai vu Modigliani manquer de grandeur et de générosité. Jamais je n'ai surpris chez lui le moindre sentiment bas. Je l'ai vu irascible, irrité d'être obligé de constater que la puissance de l'argent, qu'il méprisait tant, dominait parfois sa volonté et sa fierté. Je revois Modigliani assis à une table de café de la Rotonde. Je revois son pur profil de Romain, son regard autoritaire ; je revois aussi ses mains fines, des mains racées aux doigts nerveux, ces mains intelligentes, tracer d'un seul trait un dessin sans hésitation. "

Une exposition, sous la direction de Christian Parisot, président de l'Institut Modigliani, fut consacrée au centième anniversaire de son séjour vénitien, à la Bibliothèque Marciana en 2005. Un excellent catalogue a été édité pour l'occasion (Editions Carlo Delfino).

Si vous vous intéressez au personnage, je vous recommande un ouvrage très rude mais qui présente le peintre d'une manière assez originale, comme un Jim Morrison des années folles : "La Vie fantasmagoriquement brève et étrange d'Amadeo Modigliani" par Velibor Colic, traduit du serbo-croate par Mireille Robin (Éditions Le Serpent à plumes).
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(* : citation de Modigliani qu'il signa "le ressuscité" quelques semaines avant sa mort.)

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5 commentaires:

Anonyme a dit…
Cher Amédée !
M.17
françois a dit…
Qui peut me traduire la plaque apposée à la maison de Modigliani?
Lorenzo a dit…
Cela donne à peu près ceci : "J'ai reçu de Venise les enseignements les plus précieux de la vie. Grâce à Venise, ils m'ont pénétré comme l'expérience acquise après le labeur." (Modigliani)
Amedeo Modigliani a travaillé ici en 1905
Les Amis des Musées et des Monuments de Venise - 24/05/2002.
François a dit…
Merci
J'avais vu cette plaque en octobre. BONNE ANNÉE 2008
Gérard a dit…
C'est toujours une ville impitoyable !
Une ville très dure.
Une louve.
Elle ne lui laissa aucune chance.
Seuls, les provinciaux distants lui résistent, quand ils ne s'en gaussent pa .
Les vieilles canailles !
Insubmersibles, dans ce chaudron, dans cette barrique.
Ils en font leurs vendanges. Chez les non-ivrognes, on appelle ça le "vin d'Paris". Pour initiés.
La remarque de Vlaminck est très joli , classe ! Elle me fait penser à celle de George Sand à l'encontre d'Eugène Delacroix ou bien à celle de Charles de Gaulle envers Philippe de Hauteclocque entrant dans Panam .
Les Maîtres sont partout !
Pas besoin de les chercher bien loin ; ils sont là, arrivent.
Traversent la Sein, à pied.
Vlaminck, c'est très beau ; ses villages et chemins de Beauce, surtout après son orage, valent de l'or.
C'est notre or à nous !
On s'le garde.
Comme le sourire noir des filles à Van Dongen. Sourire très noir.
Derain aussi, et Matisse du Cateau.
Les heures chaudes de Montparnasse ne sont plus, aujourd'hui, qu'un profond silence.
Celui de la louve morte.

En fouillant dans mes tiroirs...

 Mon fils Jean, à l'époque où il daignait se laisser prendre en photo 
devant sa maison préférée. Le cliché date de 2005.
 
En classant les nombreuses photos de mes enfants ce soir, je me rends compte que je n'ai aucune photographie récente d'eux, que ce soit à Venise ou ailleurs. Le temps a passé si vite en fait. Je me revois les faire poser quand ils avaient six ou sept ans. On les voit devant San Marco, avec les pigeons de la place, sur le vaporetto, à la terrasse du Cucciolo, chez Nico, au Florian, au Harry's Dolci, à Torcello ou à Burano...  

Peggy Lee chante "Waitin' for the train to come in" un standard de 1953. La journée touche à sa fin avec cet imperceptible malaise des dimanches soirs. Le chat dort sur mes genoux, Constance joue dans sa chambre, Jean déguste l'humour un épisode de "Friends". Les deux grandes sont déjà parties chez leur mère. Il fait nuit dehors. La pendule vient de sonner six heures. J'écoute la BBC sur internet, cette chère Radio 2 qui diffuse le dimanche des programmes de "light music" anglaise des années 30 à 50. Ce son si particulier, un brin nostalgique mais toujours heureux, qui me rappelle mon enfance et nos journées vénitiennes que cette musique rythme à chacun de nos séjours. Sympathique alternative à la musique baroque dont je suis fou... 

Dans quelques heures 2007 passera le relais à 2008. Une année nouvelle. Que nous réserve-t-elle ? Beaucoup de séjours à Venise j'espère. Des tas de rencontres et de découvertes. Plus que tout la santé et la joie pour tous ceux que nous aimons.

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2 commentaires:

Anonyme a dit…
Imperceptible malaise du dimanche soir !!!!!
M.17
Marie a dit…
Je viens tous les jours et je ne dis rien... Comme une sorte de pudeur vis à vis de ces impressions de la vie qui court, bien au-delà de Venise.
Mais ce soir, avec ma soixantaine si vite approchante et tous mes souvenirs qui commencent curieusement, à s'agglutiner comme s'il était temps qu'ils se rappellent à moi, je voulais vous dire que j'aime infiniment votre délicatesse.

Venise a planté sa graine magique dans mon cœur et même si je n'y retournerai qu'au printemps pour une nouvelle découverte, je vous suivrai fidèlement tout au long de cet hiver....
Lorenzo a dit…
Merci, mille mercis mes chères lectrices et bonne fin d'année à vous !

28 décembre 2007

Ce quotidien comme un rite

Noël est passé. Trop vite terminé. Après la fièvre, la nostalgie... Les cadeaux déballés, les rubans dorés qui jonchent le sol et dans la cuisine les restes du repas familial. Même le chat semble repu. Les nuages restés gris plusieurs jours laissent pointer un joli ciel bleu. Le soleil brille. Il fait froid pourtant (5° au thermomètre de la fenêtre de la cuisine située au sud). Peu de monde dans les rues. Les hordes de touristes ont disparu ou elle se réchauffent dans les cafés aux vitre embuées. Comme bientôt en France, on ne fume plus dans les lieux publics en Italie et les vénitiens comme tout le monde dans la péninsule se sont pliés de bonne grâce à cette nouvelle contrainte. Personne ne semble s'en plaindre. 
La maison est tranquille. Chacun vaque à ses occupations. Il y en a qui bouquinent en sirotant une bonne tasse de thé, les petits jouent avec les jeux trouvés au pied du sapin. Le chat dort près du radiateur. Tom Waits chante "dead and lovely"... Quel bonheur que l'ADSL et Radioblog, la playlist préparée avant de partir nous permet d'illustrer chaque moment de notre douce vie vénitienne. Le temps passe vite aussi dans la plus belle ville du monde même quand on est fermement décidé à ne pas perdre une minute. Pourtant quelle joie de paresser le matin dans la cuisine en attendant que les muffins finissent de cuire. La gelée de coings (amenée de France) voisine sur la table avec le pot géant de Nutella acheté en arrivant chez Billa. Cappuccino et thé irlandais pour les plus grands, chocolat à l'ancienne pour Constance, la magie du petit déjeuner frappe à nouveau chaque matin.

Avoir le temps. Prendre le temps. Puis, une fois la table nettoyée, les lits faits, tout le monde se retrouve emmitouflé, ganté, botté et prêt à sortir. Il y a longtemps que les promenades en famille se sont faites rares, sauf pour les sorties estivales en bateau. Chacun va maintenant à sa guise vers la Venise qu'il aime. On se retrouve ensuite, tous fourbus le plus souvent, dans un de nos lieux favoris : le Margaret Duchamps quand il fait beau, les Do Draghi, dans la salle du fond où il fait toujours chaud, (et où la musique est toujours bonne), mais aussi au Florian pour le chocolat à la crème et les pâtisseries aux amandes, le Rosa Salva aux pieds du Colleone, le bar près de l'Arsenal où les tramezzini sont les meilleurs, les plus gros et les moins chers... Tout dépend des balades et activités de chacun... La terrasse flottante de Nico ou le Harry's dolce font aussi nos délices. 

Des amis de passage (ils vont à Trieste pour le nouvel an) sont venus déjeuner dimanche. Ils ont laissé une bouteille de leur Sauternes et un disque de Nat King Cole. cette musique convient parfaitement à notre Venise d'hiver. Si seulement nous pouvions faire un feu de cheminée. Certains en font en dépit de l'interdiction séculaire. Chez Bobbo Ferruzzi par exemple. La grande salle de séjour de sa maison près des Zattere resplendit d'un magnifique feu dès qu'il commence de faire froid. L'odeur du bois, le spectacle des flammes dans l'âtre ajoutent à ce décor un je ne sais quoi d'intemporel. Il faut dire que Bobbo collectionne mille choses et sa passion pour les (belles) antiquités fait de sa maison un petit musée : vitraux du XVe, vierge polychrome du XIVe, tissus coptes, céramiques primitives, masques du XVIIe, argenterie et boites médiévales... Tout concourt à faire de chez lui une caverne d'Ali Baba. Sa peinture débordante de couleurs comme les tissus d'Hélène, sa ravissante femme et de Nora (sa fille), qui recouvrent fauteuils et canapés, ensoleillent la maison.
La nuit tombe vite en cette saison. Le froid aussi. Calle del XXII Marzo, la foule est là, compacte, comme sur les Mercerie et tout autour de San Marco. Les achats pour les Étrennes. La tradition ici veut qu'on offre souvent les cadeaux au nouvel an mais surtout à l'épiphanie avec les Rois Mages et la Befana, cette sorcière qui punit les enfants pas sages. En dépit du froid et de l'obscurité, les magasins sont pleins de monde. L'escalier roulant - le seul de Venise - des Grands Magasins Coin ressemble à ceux du métro aux heures de pointe... Quelques touristes emmitouflés mais surtout des vénitiens. Ils sont partout, reprenant comme en une reconquête, leur territoire trop souvent abandonné aux barbares. Le froid se fait plus vif. Il va geler cette nuit encore. En marchant dans les rues en direction de la Fenice où je vais rendre visite à mon ami Matteo Lo Greco qui a installé depuis quelques années son show-room à l'emplacement de la galerie de Giuliano Graziussi où je travaillais, je pense à la chanson de Lou Reed, toujours la même "Take a walk on the wild side"... 



Je vieillis. Me voilà ressassant les mêmes pensées. Ces souvenirs qui me reviennent des soirées d'avant, quand je travaillais sur ce merveilleux petit campo, face à la Fenice, regardant passer les lycéens qui venaient dans la salle de jeux voisine, juste en face de l'Antico Martini. Quand je baissais la grille le soir et que je retrouvais des amis sur les marches du théâtre pour un verre, avant de rentrer dans mon petit appartement de la Fondamenta Coletti où m'attendait Rosa, la mignonne petite chatte grise. Après avoir pris congé, je mettais mon casque sur les oreilles et je branchais mon baladeur... Les jeunes générations n'ont rien inventé. Pourtant ce walkman Sony, pointe de la high Tech des années 80 ressemble aujourd'hui à une machines à laver à côté des Ipod et autres lecteurs Mp3 ultra miniaturisés ! Mais je n'écoutais pas que Lou Reed. Il y avait Tom Waits, Billie Holiday, Bach et Vivaldi... Pourtant c'est cet air qui me revient à chaque fois quand je suis à cet endroit... C'est curieux combien certaines choses peuvent soudain nous transporter des lustres en arrière. Mais ne partons pas à la recherche du temps perdu !
Noël est passé. Les vacances continuent. Joie de ces journées tranquilles dans notre petite maison. Pas de programme précis, pas vraiment de journées organisées... "Hey, Ive got nothing to do today but smile" ("Hé, je n'ai rien d'autre à faire que sourire aujourd'hui") chantent Simon et Garfunkel dans une chanson célèbre. C'est un peu l'état d'esprit de notre petite bande en ce moment. Le risotto à la tomate et au jambon a été apprécié. Le cheesecake aussi. Il y a des fleurs sur la table du salon. La maison est rangée. Les fenêtres bien fermées pour éviter que le froid ne rentre. Allons nous promener maintenant...

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4 commentaires:

antoine14 a dit…
Agréable description de Venise en hiver. Vous me faites patienter chaque jour : je ne retourne à Venise qu'en mai prochain avec ma meilleure amie. En attendant vous lire nous ravit !
françois a dit…
Grace à vous on se sent chaque jour au profond de venise...où je rêverai d'y vivre...j'attends avec impatience mon 7° voyage dans cette pure merveille... Merci à vous !!!surtout continuez!!!
Florence a dit…
Buona passegiata veneziana!!!
Anonyme a dit…
Cela doit être bien joli Venise en hiver !

27 décembre 2007

Venise, la nuit, la lagune, le brouillard

Toutes les saisons ont leur charme. Le temps de Noël à Venise comme ailleurs est un moment magique. L'hiver se fait rude, le ciel est bas, la brume se répand souvent sur la lagune et les paysages prennent un aspect parfois effrayant. A la tombée de la nuit surtout. Il m'est arrivé de voguer du côté de San'Erasmo par un soir de décembre il y a bien longtemps. Nous étions cinq amis, partis sur deux barques rejoindre un groupe installé pour le weekend dans une de ces vieilles bicoques de bois construites autour d'une cheminée comme des yourtes. L'odeur de la lagune ne ressemblait à rien de ce que nous connaissions. Des blocs de brume ça et là donnaient au paysage un aspect lunaire. La lumière qui diminuait se faisait métallique. Il n'y a avait pas un bruit, pas un seul cri d'oiseau. Rien que le glissement de nos rames dans l'eau. 

Peu à peu l'angoisse montait. Personne ne disait rien. Nous savions bien sûr qu'il n'y avait aucun danger mais cette brume, ce silence, la nuit qui venait... Tout contribuait à faire palpiter nos cœurs. La lampe torche éclairait le chenal devant nous. Un corbeau qui serait passé trop près de nous, nous aurait fait hurler de terreur... Quand nous avons franchi les derniers palli et que les masses sombres des palais décatis de la Misericordia prirent forme, nous nous sommes sentis soulagés : La ville était toujours là, silencieuse, mais présente, palpitante. Nous allions enfin retrouver nos repères. 

Jamais le retour d'une promenade en barque à travers la lagune ne fut aussi précipité. Le temps de sortir de l'eau les deux barques, de ranger les avirons et de fermer le hangar, nous étions déjà bien au chaud dans la cuisine de la calle Navarro, assis devant une grande tasse de thé fumé. Dehors, le brouillard s'était répandu, dense et froid. Le chat ronronnait près de la cuisinière. Par la fenêtre, on ne voyait ça et là que des points lumineux que nous savions être les réverbères. Il n'y avait pas un bruit. Une fois encore Venise semblait flotter hors du temps et hors du monde...

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1 commentaire:

Anonyme a dit…
Doux billet dans la brume, le silence... hors du temps...
M.17

25 décembre 2007

Rien n'est simple à Venise... Même pour le Père Noël !


Photographies inédites de Christine. © Décembre 2007.
Tous droits réservés.

1 commentaire:

Anna N. a dit…
rigolo !

24 décembre 2007

Natale 2007


Un très 
 Joyeux Noël
à tous les lecteurs de TraMeZziniMag
et un grand remerciement à tous  
pour leur fidélité
leur indulgence et pour leur amitié !
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9 commentaires:


Marie a dit…
Heureux Noël à toi et à ceux que tu aimes Et longue vie à tramezzinimag! Amitiés
Florence a dit…
Buon Natale a tutti e a te Lorenzo. E viva Tramezzinimag!!!!!!!!!!!! Fiorenza
Anonyme a dit…
un très très joyeux Noël à vous et à toute votre famille! à bientôt, Marie G

Choubine a dit…
Je vous souhaite aussi un très joyeux Noël, Lorenzo.
Carla a dit…
Buon natale a lei e a tutta la sua famiglia !!!!
AG a dit…
JOYEUX NOËL à vous Lorenzo et à tous ceux qui vous sont chers. A bientôt de vous lire encore et encore. Agnès
Catherine & jean-Michel a dit…
merveilleux blog lorenzo merveilleux moments passés à vous lire merveilleuse venise dont vous êtes un merveilleux ambassadeur ! Joyeuses fêtes à vous !
Petite Fée a dit…
Je vous souhaite de très bonnes fêtes de fin d'année et longue vie à votre blog!
Myriam a dit…
Je vous souhaite une très joyeuse et agréable future année à vous et à tout ce que vous entreprendrez. Je vous lis depuis une année à peu près, pratiquement tous les jours. J'ai ma dose de Venise quotidienne avec vos articles. J'aime m'évader de la sorte. Vos histoires, vos photos, vos commentaires ..... tout me va !!!! Ne changez rien. Myriam

20 décembre 2007

Venise en hiver c'est cela aussi...

Une fin de matinée sur la place Saint Marc... En hiver, en dépit des milliers d'agences de voyage qui, de par le monde, vantent les attraits de la Sérénissime, peu de touristes se risquent à affronter la froidure du climat lagunaire. C'est un charme supplémentaire. A condition d'être chaudement vêtus (les chaussures surtout) et bien logés (rien de plus déprimant quand il fait mauvais de se retrouver dans une toute petite chambre donnant sur un mur lépreux), l'hiver à Venise est un moment délicieux. Elle est toute à ceux qui s'y aventurent pendant les quelques heures où le soleil éclaire la ville.
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Photo inédite de Christine. © 10 décembre 2007. Tous droits réservés.


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1 commentaire:

Gérard a dit…
La solitude du type qui déambule dans l'hiver de Venise est un luxe phénoménal que je n'hésite pas à m'offrir . Puisqu'il me réchauffe ! Et on y voit tout mieux . Surtout la Grandeur . La parabole de Montherlant , en dessous , est magnifique ; mais , chez ce grand auteur interstellaire qu'y a-t-il de mièvre ? Je me le demande . D'une certaine façon , il ressemble à la vieille cité du Golfe . On a besoin d's'appuyer d'ssus . Délivrance ? Ses hivers sont brûlants . Ses étés reviendront .
à B.L.
"... A la pointe de leur état, je suppose qu'il doit arriver aux mystiques de bonne foi de se demander s'ils ressentent vraiment quelque chose. A la pointe de l'état extrême de la contemplation du corps humain, la sensation est devenu si ténue, qu'un doute nous vient si notre extase n'est pas une fantasmagorie de l'esprit, un langage vulgaire un montage de cou et une pose ; bref, 1° : si l'objet est beau ; 2° : si, l'objet étant beau, nous en sommes touchés. Il vient toujours un moment où enfin nous détournons la tête. Toutes les musiques finissent par le silence."
Henri de Montherlant
Fragment lu en écoutant la gavotte de la Sonate da camera a tre n° 2 en mi mineur de l'Opera Prima d'Antonio Vivaldi interprété par Enrico Gatti et l'Ensemble Aurora (Glossa, 2007) et dédié à un ami dont la vie pleine de bouleversements inattendus et parfois douloureux n'est rien d'autre finalement que la substance même de son art, un don du ciel. Qu'il y puise sa vie durant toute sa force et son énergie.

19 décembre 2007

Au royaume des reflets


Venise est le royaume des reflets. Pas des faux-semblants, le trompe-l’œil s'il ests ouvent présent n'est qu'un écrin, un moyen, un faire-valoir. Partout la nature domine. elle est simplement travestie, maquillée, alourdie parfois aussi par tant d'ornements, bijoux de prix ou de pacotille, l'illusion triomphe.
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Photo inédite de Pierre. © Décembre 2007. Droits Réservés.

18 décembre 2007

Take a walk on the wild side


15 Décembre 1982
[...] Je n’ai pas encore assez d’argent pour rentre en France. Il fait très froid. Venise semble vide. Les facs ont fermé hier. Déjà pleins d’étudiants sont repartis dans leurs familles. Il fait nuit tôt. Des vapeurs de brume s’élèvent des canaux. A la lumière des réverbères, cela donne l’impression d’être dans les limbes. Et ce silence… Je marche dans les rues sans but précis. Il est presque minuit. Lou Reed chante dans mon walkman "Take a walk on the wild side". Le saxophone résonne dans ma tête. J’ai l’impression que le musicien est là au coin de la rue, près du kiosque. Tout brille, le sol, les parois des vieux palais délabrés. "Take a walk on the wild side"...
[...] Mes pas seuls dans la ville endormie. Tout à l’heure, au Do Draghi, vin chaud et crostini, la chaleur enfumée n’avait pas la même consistance. Stefano est rentré chez ses parents à Ancône, Betti est à Castelfranco… Ils me manquent. "Perfect day" maintenant dans mes oreilles. La pointe de la douane est un endroit magique à cette heure de la nuit. Un bateau parfois, la ville éclairée comme un décor de tragédie. San Giorgio, tout blanc, et au loin le Lido. En été, on croise des amoureux, des fumeurs solitaires, des groupes qui bavardent et rient. 
[...] Ce soir il n’y a personne. Même pas un de ces chats faméliques qui vivent dans les entrepôts abandonnés de la Punta della dogana. Un vaporetto qui accoste à la Salute rappelle que la vie existe toujours ici. Venise bouge encore. A peine. Les cheminées recrachent partout de la fumée. Il fait vraiment froid. Humide. Une heure sonne au campanile de San Zaccaria. D'autres cloches lui répondent. Je suis tout au bout de Venise, loin de tout. Ici le silence se fait encore plus lourd. Plus grave. Les maisons sont basses. La nuit plus noire encore. Je viens de croiser un chien étonné de rencontrer un humain. Il a hésité un instant puis a repris son chemin, se retournant une ou deux fois. Je vais bientôt rentre. Il fait froid. "Take a walk on the wild side". Dans une semaine c’est noël, je serai en France, en famille. Le sapin, le vieux chat endormi près du feu, notre mère, les enfants, la famille. 
[...]Et puis je reprendrai le train, Bordeaux-Vintimille, la nuit, puis la journée seul dans un compartiment. Il y a si peu de monde après la frontière sur cette ligne en hiver. Et la magie de nouveau : en pénétrant sur la lagune, le train sifflera. La fenêtre grande ouverte, j’humerai à pleins poumons cet air unique qu’on respire ici. Je marche dans la nuit. Mes pas me ramènent vers la fondamenta delle Capucine ou j’ai élu domicile. Rosa, ma petite chatte grise doit m’attendre derrière la porte.[...]

Juste pour rêver


Quand l'été s'en reviendra, quand la chaude lumière d'avril fera resplendir les façades des palais et que miroiteront à nouveau dans l'eau claire et bleue comme le ciel les campaniles, nous irons de nouveau par les calle, les rughe et les campi, avec cette petite musique dans la tête. Mais de qui est-ce déjà ? Ces cordes endiablées, ces flûtes doucereuses qui chantent comme chantent les oiseaux. Venise alors nous apparaîtra rayonnante et joyeuse.


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1 commentaire:

venise86 a dit…
J'ai découvert des droits de propriété là où je croyais le monde libre à condition d'être civilisé, et de nommer les sources... j'ai eu envie d'avoir une cigarette sous la main...

17 décembre 2007

Carnets (2)

J'ai toujours été fasciné par ces gens qui peuvent, avec une plume ou un crayon, donner vie en un instant aux paysages qu'ils rencontrent et aux êtres qui les entourent. Leurs ébauches, leurs croquis, ces dessins imparfaits qui remplissent leurs carnets sont toujours remplis de vérité, sans ces rajouts que l'artiste ne peut éviter dans l’œuvre aboutie qu'il offre aux regards sur les cimaises des galeries ou des musées. Ne trouvez-vous pas fascinants les dessins de Dürer, ceux de Michel-Ange, du Carpaccio, de Canaletto ou de Guardi ? Dans la maladresse d'un trait trop rapide, dans les ratures et les gribouillages, il y a toute l'humanité de la création artistique. Ce tâtonnement qui rend l'artiste plus qu'humain et montre la fébrilité qu'il y a à créer, comme si la main était possédée par cette fièvre de création. "Vite, vite dessiner..." C'est pour cela que l'exposition "Détour" du Moleskine Project m'a fasciné. Je recherche depuis tous les croquis réalisés sur le vif à Venise. En voici un exemple superbe : "Quaderni veneziani", le journal dessiné d'une jeune femme brésilienne, Mariadel, en visite dans les musées de la Sérénissime.









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1 commentaire:


La Mariana a dit…

J'ai beaucoup apprécié l’œuvre musicale servant de fond sonore au défilé de ces beaux dessins ! Peut-on savoir quelle est cette œuvre ? Merci d'avance. Et bravo et merci pour votre blog que je visite régulièrement, étant moi aussi passionnément amoureuse de Venise ! ...

16 décembre 2007

Venise sur un air de joie

Tellement d'ouvrages décrivent les monuments vénitiens et les chefs d’œuvres qu'ils contiennent, les milliers de cartes postales qui partent chaque année de Venise représentent la plupart du temps ces lieux emblématiques que sont la Piazza, le pont des soupirs, la façade de San Marco ou le Rialto... Au fur et à mesure de mon cheminement sur TraMezziniMag, une évidence s'est fait jour peu à peu : le charme de Venise, la mélancolie de ceux qui l'ont quitté, la joie de ceux qui y séjournent c'est cette manière unique de vivre comme n'importe où ailleurs et pourtant avec quelque chose de totalement différent. 
C'est le quotidien, la vie de tous les jours, les petits riens. Je me dis souvent quand je suis au milieu des vénitiens, que la musique que j'entends en les voyant vivre ce n'est pas tant du Vivaldi ou du Monteverdi, accompagnements musicaux que je réserve pour mes promenades solitaires davantage vouées à la contemplation des pierres qu'à l'observation des humains, c'est un de ces airs de "light music" anglo-saxonnes des années 30, ces musiques de fox-trot ou de swing toujours remplies de joie et de simplicité, comme les chansons de Sam Browne ou Charlie Barnet. Je pense aussi à Gary Williams, chanteur d'aujourd'hui que nousé coutons assez souvent quand nous sommes à Venise. L'expression d'une joie de vivre sans affectation ni mièvrerie. Écoutez et vous me comprendrez.
Mais trêve de bavardage, feuilletons ensemble cet album de tous les jours : Été comme hiver, la vie se répand chaque jour dans Venise. Même envahie par les hordes de touristes, la ville est une fourmilière et ses habitants vont et viennent comme partout ailleurs, avec l'extraordinaire différence qu'apporte l'eau omniprésente, la multitude de ponts, l'absence des voitures, et ce décor unique dont chaque vénitien, quelque soit son âge et sans en avoir l'air, est conscient.



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2 commentaires:
S.Schiavoni a dit…
BOnjour, merci pour ce blog très sympathique! Je découvre et redécouvre Venise que j'adore. C'est une ville magnifique. Mon nom de famille est Schiavoni, je pense que ça vous rappelle quelque chose! Bonne continuation, je repasserai par là, c'est sur!
Lorenzo a dit…
vous y êtes bienvenu !