Ils sont nombreux les peintres que la lumière de Venise a su captiver. André Hambourg
est de ceux-là. Né et mort avec le siècle (il naquit en 1909 et s'est
éteint en 1999), ancien élève des Beaux-Arts de Paris, il fut peintre
officiel de la Marine et correspondant de guerre. Il vécut à Honfleur,
connu pour la beauté de sa lumière si changeante qui attira tant de
peintres. Son expérience professionnelle l'amena à publier plusieurs
ouvrages consacrés à son vécu à la fin de la guerre. Il fut l'un des
premiers français à pénétrer dans le fameux nid d'aigle de Hitler à Berchtesgaden en 1947.
A la peinture et à l'écriture,
s'ajoutaient des talents d'illustrateur et de graveur. Je l'ai découvert
dans les années 80 en farfouillant dans la bibliothèque de mes parents.
Ils possédaient une édition de l'Altana ou la Vie Vénitienne d'Henri de Régnier (Éditions Rombaldi, 1959) magnifiquement illustrée par André Hambourg.
Quelques années plus tard, une exposition à Granville m'a permis de me rendre
compte de visu combien sa palette était riche de poésie et de
profondeur.
Certains le rangent avec une
certaine condescendance dans la catégorie des peintres mineurs qui n'ont
pas révolutionné la peinture et quand bien même. Ses tableaux sont
pleins de charme, joyeux, ensoleillés. Il émane de sa vision picturale
de Venise une grande sensibilité. Dans ses premiers séjours au tout
début des années 60, il a pu s'immerger dans une Venise pleine de vie
qui renaissait, se relevant, comme tout le reste de l'Europe, des
rigueurs de la guerre. Il y avait peu de touristes encore, et beaucoup
de vénitiens, jeunes et vifs. Toute cette atmosphère se retrouve dans
ses peintures.
Ses héritiers ont édité récemment un catalogue raisonné de son œuvre. Je ne l'ai pas encore feuilleté (voir le lien ICI).
Je me demande si cet homme au sens de l'observation tellement aiguisé
(l'expérience de ses années de correspondant de guerre et de peintre de
la Royale) l'avaient amené à dessiner des croquis de ce qu'il voyait
avant que d'en faire la traduction sur ses toiles. Les lecteurs de TraMeZziniMag
connaissent mon goût pour les carnets d'artiste, les croquis au fil du
crayon ou de la plume, toujours très vifs, très purs et authentiques.
C'est une question que je souhaiterai poser à ceux qui connaissent bien
son travail. Le site qui lui est consacré parle d'un carnet vénitien justement.
Venise l'avait tellement impressionné, qu'il fut comme figé par sa beauté : "J'ai voulu travailler
immédiatement, mais je n'y suis pas parvenu. C'était comme si je
m'étais trouvé devant une femme trop belle, trop désirée et qui se
serait refusée. J'étais paralysé. J'ai laissé tomber mes bras et mes
pinceaux..."
Mon ami Antoine, dans sa dernière lettre avait choisi d'illustrer un poème de Jean de la Ville de Mirmont (écrit en 1910 et extrait de "Retours", paru dans l'Horizon Chimérique), par une vue du Bacino di San Marco, intitulée "Printemps à Venise".
Une foule d'embarcations occupent le premier plan, avec au fond, nimbé
d'une brume estivale, la basilique de San Giorgio. Ceux qui connaissent
Venise retrouveront toute l’atmosphère d'un jour d'été. Ils seront aussi
d'accord avec moi quand je dis qu'il y a une parenté avec le travail
vénitien d'Albert Marquet.
" Mais que m'importe la tristesse des retours
Et l'éternelle ressemblance de mes jours !
Ce que je cherche et ce que j'attends n'est pas en eux
Ni dans tout ce que l'on voit et puis que l'on oublie.
Le bonheur désiré sera si lumineux
Que le reste paraîtra l'ombre de ma vie."
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